II. DES MOYENS QUI RESTENT LIMITÉS POUR DES PREMIERS RÉSULTATS ENCOURAGEANTS

A. LES CALPAE APPORTENT DES FINANCEMENTS UTILES MAIS QUI RESTENT MARGINAUX AU SEIN DES BUDGETS DÉPARTEMENTAUX

Sur 2019-2021, les crédits annuels consacrés aux Calpae sont passés de 78 à 178 millions d'euros, traduisant leur montée en puissance . Prolongés pour un an en 2022, ils ont fait l'objet d'une ouverture de crédits en LFI 2022 à hauteur de 225 millions d'euros. Les Calpae ont fait l'objet d'une nouvelle prolongation en 2023, année de transition dédiée à l'élaboration d'une nouvelle génération de contrats (voir infra ). La diminution des crédits prévus, liée à l'extinction des dispositifs lancés dans le cadre de la Calpae, tient également à une mesure de périmètre, puisque le soutien aux départements au titre de la prévention des sorties sèches de l'aide sociale à l'enfance (ASE) font désormais l'objet d'un financement distinct (50 millions d'euros proposés en PLF 2023).

Évolution des crédits consacrés aux Calpae sur la période 2019-2023

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire des rapporteurs spéciaux

Si ces moyens ne sont pas négligeables et contribuent à permettre aux départements de réinvestir leurs politiques d'insertion en exerçant un effet-levier sur des initiatives nouvelles, force est toutefois de constater qu'ils restent marginaux au regard des dépenses sociales des départements (40,4 milliards d'euros en 2021 selon l'Observatoire national de l'action sociale).

B. S'IL EST TROP TÔT POUR ÉVALUER L'IMPACT DES CALPAE EN MATIÈRE DE LUTTE CONTRE LA PAUVRETÉ, DES INITIATIVES LOCALES INÉRESSANTES PEUVENT ÊTRE RELEVÉES

1. Une évaluation globale devra être conduite au terme des Calpae

Comme le relève l'Igas dans son rapport précité, « il n'est pas encore possible de mesurer les effets de la contractualisation sur la situation des personnes en situation de pauvreté (...) De surcroît, les effets sociaux de la crise sanitaire sont susceptibles de neutraliser certains des effets positifs de la contractualisation ».

Plus fondamentalement, les rapporteurs spéciaux considèrent qu'eu égard aux montants en jeu, évaluer les Calpae à l'aune des indicateurs nationaux de lutte contre la pauvreté (taux et intensité de la pauvreté, taux de chômage de longue durée...) est illusoire. Ce dispositif n'est qu'un volet de la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la
pauvreté 2018-2022, dont l'impact socio-économique devra être évalué dans son ensemble par France Stratégie.

L'Igas relève néanmoins quelques signaux positifs quant à l'impact des Calpae sur certains indicateurs d'activité départementale notamment entre 2019 et 2020, comme l'indique le tableau ci-dessous. À titre d'exemple, le taux d'orientation des bénéficiaires du RSA en moins de 30 jours a progressé de 7 points, pour atteindre 53 %.

Résultats sur les principaux indicateurs d'activité départementale
sur le socle commun d'objectifs en 2019 et 2020

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire des rapporteurs spéciaux

2. Focus sur la Calpae conclue avec le département de la Seine-Saint-Denis

Pour apprécier localement les effets de la Calpae, les rapporteurs spéciaux ont fait le choix d'effectuer un déplacement dans le département de Seine-Saint-Denis , département qui se caractérise par le taux de pauvreté le plus élevé de l'hexagone (27,9 % en 2019), près de deux fois supérieur à la moyenne nationale (14,6 %) 23 ( * ) . En exécution 2021, il s'agit du second département ayant bénéficié du montant le plus élevé de crédits de l'État au titre des Calpae (9,3 millions d'euros) après le département du Nord (13,3 millions d'euros).

Ils ont dans ce cadre mené une série de visites de terrain auprès de services départementaux et d'associations ayant bénéficié de crédits issus des Calpae.

À titre d'exemple, la Calpae a permis le financement d'une équipe administrative de protection maternelle et infantile (PMI) chargée, dans une logique « d'aller vers » et d'accès aux droits, d'accompagner les femmes enceintes en situation de difficultés, souvent de nationalité étrangère, dans leurs démarches. Pour cela, les agents tiennent des permanences d'accès aux droits en santé directement sur les lieux de consultations de ces femmes et assurent le lien avec la CPAM pour le suivi des dossiers. Elle agit en coordination avec une équipe mobile, constituée d'une sage-femme, d'une puéricultrice, d'une assistante de service social et d'une médiatrice en santé, mobilisée spécifiquement pour des interventions dans les bidonvilles, les campements, les centres d'hébergement ou encore les hôtels sociaux dont l'objectif est de permettre à la population concernée d'accéder à un parcours de soin de droit commun. Bénéficiant de 215 600 euros de la part de l'État en 2021, ce dispositif a permis d'accompagner dans leurs démarches plus de 800 femmes enceintes.

La Calpae a également permis de soutenir l'action de l'association C2DI 93, accomplissant un remarquable travail d'accompagnement vers l'emploi fondé sur la méthode innovante d'intervention sur l'offre et la demande (IOD), en assurant une médiation active entre les personnes en recherche d'emploi reçues et les employeurs, en s'appuyant à la fois sur son expertise d'accompagnement social et professionnel et sur un réseau d'entreprises diversifié. L'association a bénéficié en 2021 d'un financement de 250 000 euros.

L'association Solidarité formation mobilisation accueil et développement (SFMAD)a quant à elle bénéficié de plusieurs financements en faveur d'initiatives destinées à aider les bénéficiaires du RSA à lever leurs freins périphériques à l'emploi , via notamment l'orientation vers des cours de français et l'aide à l'accès à un mode de garde pour leurs enfants en bas âge.

À travers ces visites, les rapporteurs spéciaux ont pu constater par eux-mêmes le dévouement des acteurs mobilisés, comme l'esprit d'innovation et d'efficacité qui les anime. Tous ont souligné l'utilité des financements Calpae pour le lancement de leurs projets de développement de leur offre d'accompagnement.


* 23 Source : Insee.

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