PREMIÈRE PARTIE
ANALYSE GÉNÉRALE DE LA MISSION
« SANTÉ »
La mission « Santé » du budget général est censée concourir à la mise en oeuvre de la politique globale de santé. Celle-ci est déclinée autour de trois axes : la prévention, la sécurité sanitaire et l'organisation d'une offre de soins de qualité.
Il est toutefois nécessaire de rappeler que la plupart des dépenses publiques en matière de santé relèvent des lois de financement de la sécurité sociale. Par conséquent, le périmètre de la mission est très limité.
Deux programmes, coordonnés par le ministère des solidarités et de la santé, la constituent :
- le programme 204 . Il est piloté par la direction générale de la santé, et il est relatif à la prévention, à la sécurité sanitaire et à l'offre de soins. Il vise à réduire les inégalités sociales et territoriales de santé, et il doit également contribuer à garantir la protection de la population face à des évènements sanitaires importants tout en prévenant le développement de pathologies graves. Il regroupe, en outre, les subventions pour charges de service public accordées aux agences sanitaires. Ce programme ne représente plus, dans le projet de loi de finances pour 2022, que 16,4 % des crédits de la mission ;
- le programme 183 . Il est piloté par la direction de la sécurité sociale, et il est dédié à la protection maladie. Dans les faits, il tend essentiellement à financer l'aide médicale d'État (AME), qui est destinée aux personnes étrangères en situation irrégulière en France depuis plus de trois mois et dont les ressources sont insuffisantes pour une prise en charge au titre de la couverture maladie complémentaire universelle. Le programme 183 contribue également, depuis 2015, au financement du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA). Le programme 183 mobilise 83,6 % des crédits de la mission dans le projet de loi de finances pour 2022.
Les dépenses de la mission relèvent pour leur majorité du titre 6 « Dépenses d'intervention ». Les dépenses qui relèvent du titre 2, à 1 million dans le projet de loi de finances pour 2022, sont de faible ampleur.
Évolution des crédits de la mission « Santé » par programme
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires
I. UNE MISSION AU PÉRIMÈTRE QUI SE RÉDUIT
La mission « Santé » est aujourd'hui pratiquement réduite à l'aide médicale d'État (AME). L'une des raisons est que la mission, et plus particulièrement le programme 204, a connu entre 2015 et 2020 des modifications importantes de son périmètre, avec le transfert de l'État vers l'assurance-maladie du financement de plusieurs agences de santé :
- la loi de finances de 2015 a procédé à un transfert de 134 millions d'euros vers l'assurance maladie, visant principalement l'attribution du financement de la formation médicale initiale à la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (Cnamts) ;
- la loi de finances pour 2017 a réduit les crédits de la mission de 51 millions d'euros et supprimé l'action 13 « Prévention des risques infectieux et des risques liés aux soins », répartie entre d'autres actions ;
- la loi de finances pour 2018 a procédé à deux transferts de dépenses, réduisant les crédits portés par la mission de 23 millions d'euros, via la suppression du financement de l'École des hautes études en santé publique (EHESP) par l'État (9 millions d'euros) et l'arrêt du cofinancement de l'Agence de la biomédecine (ABM) par l'État (14 millions d'euros) ;
- la loi de finances pour 2020 a procédé au transfert des dépenses afférentes au fonctionnement de l'Agence nationale de la sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), soit 156,1 millions d'euros, et de l'Agence nationale de santé publique (ANSP), soit 112,5 millions d'euros.
Dans le sens inverse, la loi de finances pour 2021 a prévu des changements de périmètre à destination de la mission : 45 millions d'euros ont été transférés de l'assurance maladie vers l'État au titre du plan d'investissement de l'agence de santé de Wallis et Futuna, et la rebudgétisation du produit de la taxe sur la notification de produits du tabac a conduit au transfert de 2 millions d'euros. Enfin, 30 millions d'euros ont été déplacés de l'assurance-maladie vers l'État aux fins de mise en oeuvre de la mesure de réduction de la période de maintien de droit de l'assurance-maladie pour les assurés dont le titre de séjour a expiré.
Ces nouvelles entrées dans la mission ne constituaient toutefois pas le signe d'une inversion de tendance. Les crédits transférés ne sont pas d'un montant suffisamment élevé, ni les politiques qu'ils portent suffisamment structurantes, pour changer l'orientation de la mission.
Dans le PLF 2022, pour la première fois depuis 2019, le périmètre de la mission est pratiquement inchangé. Les quelques modifications effectuées sont mineures :
- il est opéré un transfert de 110 000 euros du programme 204 au programme 162 au titre de la contribution au plan chlordécone IV ;
- 550 000 euros sont transférés du programme 183 vers le programme 151, qui correspondent au financement de la prise en charge des évacuations sanitaires ou médicales (EVASAN) du Vanuatu.
Récapitulatif des mesures de transfert intervenues depuis 2013
(en millions d'euros)
Exercice |
Transfert |
Impact financier |
2014 |
Recentralisation de compétences sanitaires Budgétisation de taxes précédemment affectées à la Haute Autorité de Santé (HAS) |
+ 10,9 |
2015 |
Recentralisation de compétences sanitaires. Transfert vers l'assurance maladie des dépenses liées à la formation médicale, au financement du Centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière (CNG), de la HAS et de l'Agence technique de l'information sur l'hospitalisation (ATIH). Transfert des crédits d'intervention destinés à la prise en charge des frais de jury des diplômes sanitaires du programme 124 « Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative » vers le programme 204. |
- 133,7 |
2016 |
Transfert des personnels des Cellules de l'institut de veille sanitaire en région (CIRE) des Agences régionales de santé (ARS). |
+ 1,1 |
2017 |
Suppression du cofinancement de l'ANSP et du Fonds d'intervention régional (FIR). |
- 51 |
2018 |
Suppression du cofinancement de l'EHESP et de l'ABM. |
- 23 |
2019 |
Transferts des personnels des CIRE des ARS vers l'ANSP. Transferts de crédits en provenance de l'ANSM vers le programme 148 « Fonction publique » pour assurer le bénéfice de prestations interministérielles aux agents de l'ANSM. |
- 0,15 |
2020 |
Transfert intégral du financement de l'Agence nationale de la sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) à l'assurance maladie. Transfert intégral du financement de l'Agence nationale de santé publique. Transfert de crédits du programme 216« conduite et pilotage des politiques de l'intérieur » vers le programme 204 au titre des soins sans consentement. Transfert de l'assurance maladie à l'État du financement de l'accompagnement des groupes hospitaliers territoriaux (GHT) dans le cadre du programme « Phare » de performance des achats hospitaliers. Transfert du financement du plan Chloricone au programme 162 « interventions territoriales de l'État ». |
- 266,1 |
2021 |
Plan d'investissement de l'agence de santé de Wallis et Futuna. |
|
Réduction du maintien de droit de l'assurance-maladie pour les assurés dont le titre de séjour. Rebudgétisation de produit de la taxe sur les déclarations et notifications de produits du tabac. |
+ 77 |
|
2022 |
Transfert de la contribution au plan chlordécone IV au programme 204. Transfert du financement de la prise en charge des EVASAN du Vanuatu. |
- 0,6 |
Source : commission des finances du Sénat