N° 563
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2020-2021
Enregistré à la Présidence du Sénat le 6 mai 2021
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des affaires européennes (1) sur la proposition de résolution européenne en application de l'article 73 quinquies du Règlement, concernant les garanties professionnelles des élus locaux qui sont travailleurs frontaliers ,
Par Mmes Pascale GRUNY et Laurence HARRIBEY,
Sénateurs
ET TEXTE REJETÉ
PAR LA
COMMISSION
(Envoyé à commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. )
(1) Cette commission est composée de : M. Jean-François Rapin , président ; MM. Alain Cadec, Cyril Pellevat, André Reichardt, Didier Marie, Mme Gisèle Jourda, MM. Claude Kern, André Gattolin, Henri Cabanel, Pierre Laurent, Mme Colette Mélot, M. Jacques Fernique , vice-présidents ; M. François Calvet, Mme Marta de Cidrac, M. Jean-Yves Leconte, Mme Catherine Fournier , secrétaires ; MM. Pascal Allizard, Jean-Michel Arnaud, Jérémy Bacchi, Mme Florence Blatrix Contat, MM. Philippe Bonnecarrère, Pierre Cuypers, Gilbert-Luc Devinaz, Laurent Duplomb, Christophe-André Frassa, Mme Joëlle Garriaud-Maylam, M. Daniel Gremillet, Mmes Pascale Gruny, Véronique Guillotin, Laurence Harribey, MM. Ludovic Haye, Patrice Joly, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Pierre Louault, Victorin Lurel, Franck Menonville, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Louis-Jean de Nicolaÿ, Mme Elsa Schalck, M. Richard Yung .
Voir le numéro :
Sénat : |
512 (2020-2021) |
AVANT-PROPOS
Mesdames, Messieurs,
Conformément à l'article 73 quinquies du Règlement du Sénat, la commission des affaires européennes est saisie d'une proposition de résolution européenne (n° 512 ; 2020-2021), présentée par M. Jean Louis Masson, concernant les garanties professionnelles des élus locaux qui sont travailleurs transfrontaliers.
En juin 2010, la commission des affaires européennes avait déjà examiné une proposition de résolution identique , déposée également par M. Jean Louis Masson 1 ( * ) . Sur le rapport de son président Jean Bizet, la commission avait alors décidé de rejeter ce texte 2 ( * ) .
Cette proposition de résolution, objet du présent rapport, appelle à une action de l'Union européenne visant à l'harmonisation des garanties professionnelles accordées aux élus locaux au sein de l'Union, ou tout du moins à une amélioration de la situation des élus locaux transfrontaliers.
Si la problématique concernant ces élus locaux est réelle, la solution proposée ne semble pas la plus appropriée . Selon les rapporteures, elle réside moins dans une initiative législative de l'Union européenne que dans la conclusion d'accords bilatéraux entre États.
I. UNE PROBLÉMATIQUE RÉELLE CONCERNANT AU PLUS QUELQUES CENTAINES D'ÉLUS LOCAUX TRAVAILLEURS TRANSFRONTALIERS
Les garanties professionnelles accordées par le droit français aux élus locaux (de nationalité française ou ressortissants de l'Union) en France, travaillant en France ne bénéficient pas à ceux travaillant dans les pays frontaliers dont le droit national détermine les garanties de ce type applicables sur leur territoire.
A. LES GARANTIES ACCORDÉES AUX ÉLUS LOCAUX TRAVAILLANT EN FRANCE
En France, les élus locaux - de nationalité française ou ressortissants de l'Union - bénéficient de facilités leur permettant de concilier leur mandat avec l'exercice d'une activité professionnelle . Ces garanties ont été revues et renforcées, pour partie, par la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique.
Ces garanties professionnelles consistent notamment en :
• autorisations d'absence pour participer aux séances plénières de leur conseil, aux réunions des commissions dont ces élus sont membres, aux réunions des assemblées délibérantes et des bureaux des organismes où ils ont été désignés pour représenter leur collectivité, conformément aux articles L. 2123-1, L. 3123-1 et L. 4135-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) ;
• crédits d'heures forfaitaires et trimestriels , dont ils disposent, sur demande, pour participer à l'administration de leur collectivité (L. 2123-2, L. 3123-2 et L. 4135-2 du CGCT). Le volume de ces crédits d'heures a été revalorisé par l'article 87 de la loi précitée relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique ( cf. encadré infra ). Les heures mobilisées par le salarié au titre de ce crédit d'heures ne peuvent néanmoins pas faire l'objet d'une rémunération par l'employeur, le législateur l'ayant expressément exclu.
Crédits d'heures disponibles pour les élus locaux pour participer à l'administration de leur collectivité
Source : Direction générale des collectivités locales
Le temps d'absence annuel total d'un salarié au titre des deux dispositifs précités ne peut pas excéder la moitié de la durée légale de travail sur une année (article L. 2123-5 du CGCT). Ce plafond constitue certes une contrainte pour les élus locaux mais leur permet un temps total d'absence important et leur procure également une protection de leur contrat de travail.
L'article 89 de ladite loi « engagement et proximité » a par ailleurs introduit les nouveaux articles L. 2123-1-1, L. 3123-1-1 et L. 4135-1-1 du CGCT, en application desquels les élus locaux sont dorénavant réputés relever de la catégorie de personnes qui disposent de l'accès le plus favorable au télétravail dans l'exercice de leur emploi au sein de l'entreprise , dès lors que leur poste de travail s'y prête. Bien que les périodes de télétravail soient partie intégrante du temps de travail professionnel, cette disposition est susceptible de faciliter l'exercice du mandat, en particulier lorsqu'elle permet à des élus de réduire leur temps de trajet vers leur lieu de travail, pour consacrer davantage de temps à leur mandat.
Les élus locaux travaillant en France bénéficient également de garanties relatives à la protection sociale :
• Tous les élus sont dorénavant affiliés à la sécurité sociale, mais l'accès aux prestations en espèces est soumis à certaines conditions. Depuis le 1 er janvier 2013, tous les élus locaux sont effectivement affiliés au régime général de sécurité sociale. Néanmoins seuls certains d'entre eux voient leurs indemnités de fonction assujetties aux cotisations de la sécurité sociale. Il s'agit des élus dont le montant total des indemnités de fonction perçues sur une année est supérieur à la moitié du plafond annuel de la sécurité sociale (PASS), soit 1 714 euros par mois.
Toutefois, lorsqu'un élu, non fonctionnaire, a suspendu son activité professionnelle pour se consacrer à son mandat, ses indemnités sont systématiquement assujetties à cotisations.
Seuls les élus dont les indemnités sont soumises à cotisations peuvent bénéficier des prestations en espèces de la sécurité sociale (indemnité journalière et acquisition de droits à la retraite notamment). A minima , les élus ne cotisant pas bénéficient des prestations en nature (remboursement de soins).
• Tous les élus bénéficiant d'une indemnité de fonction, sans condition de montant, sont par ailleurs affiliés et assujettis au régime de retraite IRCANTEC. Ces élus sont affiliés à l'Ircantec dans les conditions de droit commun, y compris pour les taux de cotisation. Les collectivités ou intercommunalités concernées doivent déclarer à l'Ircantec l'ensemble de leurs élus indemnisés. Les cotisations sont calculées sur la base des indemnités de fonction brutes (le taux varie selon deux tranches) et permettent aux élus d'acquérir des points.
La retraite Ircantec est versée à terme échu. La valeur du point est révisée chaque année dans les mêmes conditions que les pensions de vieillesse du régime général de la Sécurité sociale (évolution prévisionnelle des prix à la consommation hors tabac).
• Les élus locaux percevant une indemnité de fonction disposent par ailleurs de la possibilité d'adhérer à un régime de retraite facultative par rente. L'adhésion librement décidée par l'élu entraîne obligatoirement le versement, par sa collectivité, d'une participation d'un montant équivalent à la cotisation effectuée par l'élu. Les assemblées délibérantes n'ont pas à se prononcer sur le bien-fondé ou le montant de cette dépense, qui fait partie des dépenses obligatoires des collectivités et des EPCI. Le taux plafond de cotisation est fixé à 8 % de l'indemnité brute perçue pour l'élu et 8 % pour la collectivité. Comme pour l'Ircantec, le niveau de la rente perçue dépend du capital de points acquis par les cotisations, ainsi que de l'âge de l'élu lors de la liquidation de la pension.
Dispositions relatives à la protection sociale
des élus locaux
au titre du risque vieillesse
Les fonctionnaires en détachement pour mandat électif restent soumis aux règles spéciales qui régissent leur situation au regard du risque vieillesse.
S'agissant plus particulièrement de l'assurance vieillesse, les élus cotisants acquièrent des droits sous réserve qu'ils ne soient pas déjà pensionnés à ce régime, dans les conditions du droit commun. S'ils ont déjà cotisé au régime général et n'ont pas liquidé leur retraite à ce régime, les droits acquis à raison du mandat se cumulent avec ceux déjà acquis. Pour les élus affiliés à un autre régime, les cotisations versées au titre de l'affiliation au régime général de la Sécurité sociale leur permettent d'acquérir des droits à pension au régime général, qui se cumulent (sans fusionner) avec les droits à pension acquis au titre de l'autre régime.
Les élus locaux cotisants qui ont cessé leur activité professionnelle pour se consacrer à leur mandat acquièrent des trimestres au régime général en fonction du niveau de leur indemnité de fonction. Ceux qui continuent d'exercer une activité professionnelle et cotisent au titre de leur mandat acquièrent quatre trimestres supplémentaires au régime général au titre de ce mandat, pouvant donc ouvrir de nouveaux droits ou compléter des droits existants. Les élus concernés pourront, sous réserve de remplir les conditions d'âge et de durée de cotisation, bénéficier d'une majoration de leur pension (ou surcote).
Source : Direction générale des collectivités locales
* 1 Proposition de résolution n° 526 (2009-2010) de M. Jean Louis MASSON, déposée au Sénat le 7 juin 2010.
* 2 Rapport n° 600 (2009-2010) de M. Jean BIZET, déposé le 30 juin 2010