SOMMAIRE
I. UN TEXTE LARGEMENT ENRICHI LORS DE SON EXAMEN EN PREMIÈRE LECTURE AU SÉNAT 5
A. LE CoeUR DE LA PROPOSITION DE LOI : CRÉER UNE NOUVELLE INFRACTION DE CRIME SEXUEL SUR MINEUR 5
B. UN TEXTE ENRICHI AU COURS DES DÉBATS 6
2. L'élargissement de la définition du viol et du crime sexuel sur mineur 7
3. L'allongement de certains délais de prescription 7
4. Une sanction plus sévère des atteintes sexuelles incestueuses 8
II. UN TEXTE REMANIÉ À L'ASSEMBLÉE NATIONALE DANS LE RESPECT DES OBJECTIFS POURSUIVIS PAR LE SÉNAT 8
A. LA FIXATION D'UN SEUIL D'ÂGE À QUINZE ANS ASSORTI D'UN ÉCART D'ÂGE DE CINQ ANS 8
B. LA PROTECTION DES MINEURS JUSQU'À DIX-HUIT ANS CONTRE L'INCESTE 9
C. DEUX MÉCANISMES TENDANT À REPOUSSER LA DATE DE PRESCRIPTION DES CRIMES ET DÉLITS SEXUELS SUR MINEUR 10
D. DES DISPOSITIONS COMPLÉMENTAIRES RELATIVES NOTAMMENT AUX INFRACTIONS COMMISES SUR INTERNET 10
III. LA POSITION DE LA COMMISSION : PARFAIRE LA RÉDACTION DU TEXTE SANS REMETTRE EN CAUSE SES GRANDS ÉQUILIBRES 11
• Article 1 er Création de nouvelles infractions de crime sexuel sur mineur 13
• Article 1 er bis BA Délit d'extorsion d'images pédopornographiques 20
• Article 1 er bis B Coordinations et délit d'atteinte sexuelle 21
• Article 1 er bis C Répression des atteintes sexuelles que la victime s'inflige à elle-même 25
• Article 1 er bis D Coordinations avec le crime de proxénétisme et le délit d'achat d'acte sexuel 26
• Article 1 er bis E Aggravation de la peine encourue en cas d'achat d'acte sexuel auprès d'un mineur 27
• Article 1 er bis Notions de contrainte et de surprise pour les mineurs de moins de quinze ans 28
• Article 2 Articulation avec le délit d'atteinte sexuelle 29
• Article 3 Coordinations pour les crimes de viol 30
• Article 4 bis Élargissement de la définition du viol aux actes bucco-génitaux 31
• Article 4 ter Règles de prescription du délit de non-dénonciation d'infraction sur mineur 32
• Article 4 quater Prescription des crimes et délits sexuels sur mineurs 33
• Article 5 Liste des infractions entraînant une inscription au fichier judiciaire des auteurs d'infractions sexuelles et violentes 37
• Article 5 bis Définition de l'exhibition sexuelle et aggravation de la peine quand la victime est un mineur de quinze ans 38
• Article 6 Inscription automatique dans le fichier judiciaire des auteurs d'infractions sexuelles et violentes lorsque la victime est mineure 39
• Article 7 Peine complémentaire d'interdiction d'exercer une activité au contact des mineurs 40
• Article 8 Procédure applicable à la nouvelle infraction de crime sexuel sur mineur 41
• Article 9 Application outre-mer 42
• Intitulé de la proposition de loi 43
RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45 DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS DU RÈGLEMENT DU SÉNAT (RÈGLE DE L'ENTONNOIR) 59
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES 61
L'ESSENTIEL
Réunie le mardi 23 mars 2021 sous la présidence de François-Noël Buffet (Les Républicains - Rhône), la commission des lois a examiné, en deuxième lecture, le rapport de Marie Mercier (Les Républicains - Saône-et-Loire) sur la proposition de loi n° 447 (2020-2021) visant à protéger les mineurs des crimes et délits sexuels et de l'inceste , adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale le 15 mars 2021.
Ce texte a été initialement déposé par Annick Billon, le 26 novembre 2020, sous l'intitulé de proposition de loi visant à protéger les jeunes mineurs des crimes sexuels.
La commission des lois a considéré que le texte adopté par l'Assemblée nationale était respectueux des objectifs poursuivis par le Sénat, tout en étant techniquement plus abouti. Elle a donc corrigé les scories qui subsistaient et renforcé la protection des mineurs de plus de quinze ans contre les infractions dont ils peuvent être victimes sur internet, sans remettre en cause les grands équilibres du texte qui constituent la base d'un accord politique entre les deux assemblées nécessaire à une adoption rapide par le Parlement.
Suivant l'avis de son rapporteur, la commission des lois a adopté la proposition de loi ainsi modifiée .
I. UN TEXTE LARGEMENT ENRICHI LORS DE SON EXAMEN EN PREMIÈRE LECTURE AU SÉNAT
Le Sénat avait approuvé, en première lecture, le dispositif proposé tout en le complétant par plusieurs mesures destinées à renforcer la prévention des infractions sexuelles sur mineurs.
A. LE CoeUR DE LA PROPOSITION DE LOI : CRÉER UNE NOUVELLE INFRACTION DE CRIME SEXUEL SUR MINEUR
Initialement, la proposition de loi avait pour objet de créer un nouveau crime sexuel sur mineur de treize ans , de façon à poser dans le code pénal un interdit sociétal clair et de manière à mieux protéger les jeunes adolescents contre les violences sexuelles qui peuvent être commises par des adultes.
La nouvelle infraction aurait permis de criminaliser tout acte de pénétration sexuelle commis par un majeur sur un mineur de treize ans , sans qu'il soit nécessaire d'établir un élément de contrainte, violence, menace ou surprise, requis pour caractériser le crime de viol.
Cette nouvelle infraction aurait coexisté avec l'actuel délit d'atteinte sexuelle , prévu à l'article 227-25 du code pénal, qui punit de sept ans d'emprisonnement et de 100 000 euros d'amende tout acte de nature sexuelle commis par un majeur sur un mineur de quinze ans.
La commission avait estimé que cette mesure était solide sur le plan constitutionnel : plutôt que d'introduire une présomption de contrainte qui aurait complété la définition du viol, elle tendait à créer une infraction autonome , sur le modèle du délit d'atteinte sexuelle, mais en matière criminelle. Le seuil d'âge de treize ans paraissait également de nature à répondre aux mises en garde exprimées en 2018 par le Conseil d'État.
Dans son avis du 15 mars 2018 sur le projet de loi visant à renforcer la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, celui-ci avait en effet noté qu'un seuil fixé à quinze ans soulevait une difficulté dans l'hypothèse, par exemple, d'une relation sexuelle qui serait librement consentie entre un mineur de dix-sept ans et demi et une adolescente de quatorze ans ; cette relation serait licite au regard du code pénal jusqu'à ce que le jeune homme atteigne l'âge de dix-huit ans, puis elle deviendrait criminelle, et donc susceptible de renvoyer le jeune homme aux assises, alors que rien n'aurait changé dans son comportement et qu'il n'aurait pas conscience de commettre une infraction.
Avec un seuil fixé à treize ans, l'écart d'âge avec un jeune majeur devient alors plus significatif, au minimum cinq ans, ce qui rend beaucoup plus improbable qu'un jeune majeur puisse entretenir une relation consentie avec un mineur à peine sorti de l'enfance.
Soucieuse que la création d'un seuil à treize ans n'affaiblisse la protection des mineurs de treize à quinze ans, la commission avait adopté un amendement du rapporteur tendant à compléter les dispositions interprétatives figurant dans le code pénal afin de préciser par ailleurs que la contrainte morale et la surprise, éléments constitutifs de l'infraction de viol, pouvaient résulter de l'âge de la victime ne disposant pas de la maturité sexuelle suffisante.