EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Le 20 novembre prochain, la Convention internationale des droits de l'enfant (CIDE), adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies, aura trente ans. Désormais ratifiée par 196 pays 2 ( * ) , cet instrument juridique reconnaît à l'enfant une protection et des droits subjectifs spécifiques.

Pour marquer cet anniversaire et la Journée nationale des droits de l'enfant créée à son initiative par la loi du 9 avril 1996 3 ( * ) , le groupe communiste républicain citoyen et écologiste a demandé l'inscription sur son ordre du jour réservé d'une proposition de loi tendant à la création de délégations parlementaires aux droits des enfants qu'il avait déposée l'année dernière. Son texte est inspiré d'une proposition de loi adoptée à l'Assemblée nationale en 2003, mais non examinée au Sénat 4 ( * ) .

Cette initiative doit être saluée puisqu'elle permet de mettre en lumière l'instrument de protection que constitue la Convention internationale des droits de l'enfant et d'interroger la manière dont la France en fait application. Toutefois, votre commission des lois relève qu'au-delà de son caractère symbolique, la création d'une délégation touche avant tout à l'organisation du travail parlementaire au sein de chaque assemblée.

Elle constate que, dans le cadre de ses structures internes actuelles, le Sénat se saisit déjà pleinement de ces sujets et est en mesure de veiller efficacement au respect des droits des enfants, comme l'illustrent par exemple deux sujets récents : l'interdiction des violences éducatives ordinaires 5 ( * ) et le droit d'allaiter pendant le temps de travail reconnu aux femmes fonctionnaires 6 ( * ) .

Dans ces conditions, la création d'une nouvelle délégation pour mettre en place « une veille et un contrôle plus assidus du respect des droits des enfants » ne lui semble pas opportune.

I. LA CRÉATION D'UNE DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE : UNE MESURE D'ORGANISATION DU TRAVAIL DES ASSEMBLÉES

La proposition de loi tend à la création de délégations parlementaires dans chaque assemblée pour les « informer de la politique suivie par le Gouvernement au regard de ses conséquences sur les droits des enfants » et assurer le suivi de l'application des lois. Leur fonctionnement serait calqué sur celui des délégations aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes créées par la loi du 12 juillet 1999.

A. UNE CRÉATION NON IMPOSÉE PAR LA CIDE

À titre liminaire, votre rapporteur souligne que la création de délégations parlementaires aux droits des enfants ne fait pas partie des engagements pris par les États signataires de la Convention internationale des droits de l'enfant (CIDE), qui comprend un mécanisme de supervision propre.

La Convention internationale des droits de l'enfant

Le 20 novembre 1989, l'Assemblée générale des Nations unies a adopté à l'unanimité la Convention relative aux droits de l'enfant (CIDE). Pour la première fois, un texte international reconnait explicitement les enfants comme des êtres à part entière et porteurs de droits sociaux, économiques, civils, culturels et politiques.

La Convention met en avant quatre principes fondamentaux : la non-discrimination, l'intérêt supérieur de l'enfant, le droit de vivre, survivre et se développer, ainsi que le respect des opinions de l'enfant. Les enfants se voient reconnaître des droits propres comme, par exemple, le droit à un nom et une nationalité, le droit de vivre avec ses parents ou de maintenir des contacts avec eux, le droit d'exprimer librement son opinion et de voir cette opinion prise en considération.

Les États parties s'engagent à défendre et à garantir les droits de tous les enfants sans distinction et à répondre de ces engagements devant les Nations unies.

La CIDE a prévu la création d'un comité de suivi ad hoc placé auprès du Haut-commissariat des Nations unies aux droits de l'Homme : le Comité des droits de l'enfant.

En application de l'article 44 de la convention, chaque État partie s'engage à lui soumettre périodiquement - dans les deux ans de la signature de la convention, puis tous les cinq ans - un rapport sur les mesures adoptées « pour donner effet aux droits reconnus dans la CIDE et sur les progrès réalisés dans la jouissance de ces droits ». La France, qui a signé la convention le 26 janvier 1990, a ainsi déjà remis cinq rapports de suivi au Comité des droits de l'enfant ; un sixième est attendu pour le 5 mars 2021.

Le Comité dispose de relais institutionnels dans chaque État. En France, il s'agit principalement du Défenseur des enfants et de la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH), ainsi que du Contrôleur général des lieux de privation de liberté.

La question de la création de délégations parlementaires aux droits des enfants doit donc s'apprécier uniquement au regard de l'organisation du travail parlementaire.


* 2 À l'exception des États-Unis, qui ont néanmoins fait part de leur intention de la ratifier.

* 3 Loi n° 96-296 du 9 avril 1996 tendant à faire du 20 novembre une Journée nationale des droits de l'enfant adoptée à l'initiative de notre ancienne collègue Marie-Claude Beaudeau, alors sénatrice du Val-d'Oise.

* 4 Proposition de loi de MM. Jacques Barrot et Dominique Paillé tendant à la création de délégations parlementaires aux droits des enfants, n° 586, déposée le 30 janvier 2003 sur le bureau de l'Assemblée nationale et adoptée le 13 février 2003.

* 5 Loi n° 2019-721 du 10 juillet 2019 relative à l'interdiction des violences éducatives ordinaires.

* 6 Article 46 introduit par amendement de membres de la délégation aux droits des femmes dans la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique.

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