D. LA POSSIBILITÉ D'ORGANISER DES OBSÈQUES CIVILES DANS DES SALLES COMMUNALES
Les communes disposent de la faculté de mettre une salle communale à disposition des administrés, dans le cadre d'une occupation temporaire du domaine public prévue par l'article L. 2125-1 du code général de la propriété des personnes publiques.
L'occupation temporaire du domaine public communal est soumise à un principe de non-gratuité, et donne lieu au paiement d'une redevance, sauf exceptions. À cet égard, l'autorisation d'occupation ou d'utilisation du domaine public peut être « délivrée gratuitement aux associations à but non lucratif qui concourent à la satisfaction d'un intérêt général ».
L'attribution de cette salle relève toutefois de la seule appréciation de la commune.
L'occupation ou l'utilisation temporaire du domaine public Nul ne peut occuper ou utiliser le domaine public sans disposer d'un titre l'y habilitant (article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques). Ce titre d'occupation ou d'utilisation du domaine public, consenti à titre précaire et révocable, peut l'être soit par la voie d'une décision unilatérale, soit par la voie d'une convention d'occupation du domaine public (article R. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques). Le Conseil constitutionnel a reconnu la conformité à la Constitution des principes d'inaliénabilité et d'imprescriptibilité du domaine public dans une récente décision QPC 18 ( * ) . Selon une jurisprudence constante du Conseil d'État 19 ( * ) , il appartient au conseil municipal de délibérer sur les conditions générales d'administration du domaine public communal, notamment sur le montant des redevances qui sont dues à la commune, mais le maire est seul compétent pour délivrer, retirer ou abroger des autorisations unilatérales d'occuper temporairement ce domaine 20 ( * ) . Les conventions d'occupation du domaine public sont signées par le maire après avoir été préalablement autorisées par le conseil municipal. Toutefois, en application de l'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales, le maire peut se voir déléguer cette compétence en tout ou partie, par délégation du conseil municipal, et pour la durée de son mandat. Les motifs 21 ( * ) pour lesquels l'administration peut mettre fin à l'occupation du domaine public, en application des principes selon lesquels elle est toujours précaire et révocable, sont très larges et valent tant pour l'hypothèse d'une fin anticipée que pour celle d'un refus de renouvellement. |
Ainsi, lorsque des funérailles à caractère civil sont organisées par une entité de cette nature 22 ( * ) , habilitée pour le service extérieur des pompes funèbres 23 ( * ) , la commune (maire ou conseil municipal selon les cas) peut autoriser l'occupation temporaire d'une salle communale à titre gratuit. Si cette disposition fournit un cadre juridique approprié pour l'organisation d'obsèques civiles, la situation se présente semble-t-il rarement en pratique.
Par ailleurs, l'article L. 2144-3 du code général des collectivités territoriales dispose que « des locaux communaux peuvent être utilisés par les associations, syndicats ou partis politiques qui en font la demande. Le maire détermine les conditions dans lesquelles ces locaux peuvent être utilisés, compte tenu des nécessités de l'administration des propriétés communales, du fonctionnement des services et du maintien de l'ordre public. Le conseil municipal fixe, en tant que de besoin, la contribution due à raison de cette utilisation. »
Les familles qui souhaiteraient disposer d'une salle communale pour l'organisation d'obsèques sans recourir à aucun intermédiaire doivent donc s'acquitter d'une redevance. L'occupation privative du domaine public est en pratique le plus souvent formalisée par une convention écrite entre la commune et l'occupant 24 ( * ) , qui prévoit les droits et obligations des parties prenantes, dont le paiement d'une redevance le cas échéant.
Aucune obligation ne s'imposant aux communes en l'état actuel du droit, l'attribution d'une salle communale à la demande des familles en vue de l'organisation d'obsèques civiles relève donc de la seule et libre appréciation de chaque commune. D'ailleurs, dans son vademecum sur l'application du principe de laïcité, l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalités (AMF) « invite les maires à mettre à disposition des familles qui le souhaitent une salle communale, lorsque c'est possible, aux fins de célébrer des funérailles non religieuses » 25 ( * ) .
De surcroît, rien n'interdit dans le droit en vigueur qu'une salle intercommunale puisse être mise à disposition pour l'organisation d'obsèques, soit parce que l'intercommunalité est compétente en matière funéraire, soit parce que la salle est mutualisée.
Enfin, l'implication d'un officier de l'état civil dans l'organisation des obsèques ou lors de la célébration reste possible en l'état du droit, à titre privé et avec l'accord de la personne ayant qualité pour pourvoir aux funérailles. Toutefois, elle demeure exceptionnelle : funérailles d'une personnalité locale, liens familiaux, etc. Cette situation se présenterait d'ailleurs davantage dans les communes rurales, d'après les témoignages recueillis par votre rapporteur lors de ses auditions.
* 18 Conseil constitutionnel, décision n° 2018-743 QPC du 26 octobre 2018, Société Brimo de Laroussilhe [Inaliénabilité et imprescriptibilité des biens du domaine public].
* 19 Conseil d'État, huitième et troisième sous-sections réunies, 26 mai 2004, société Paloma, n° 242087 ; statuant en référé, 18 novembre 2015, n° 390461.
* 20 Le Conseil d'État a fondé son analyse sur les dispositions de l'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales, selon lesquelles « Sous le contrôle du conseil municipal et sous le contrôle administratif du représentant de l'État dans le département, le maire est chargé, d'une manière générale, d'exécuter les décisions du conseil municipal et, en particulier : 1° De conserver et d'administrer les propriétés de la commune et de faire, en conséquence, tous actes conservatoires de ses droits (...) ».
* 21 Il peut s'agir traditionnellement de motifs de maintien de l'ordre public (Conseil d'État, 25 novembre 1931, Guigo-Barthélémy), mais aussi de motifs plus larges liés à la sauvegarde d'intérêts de caractère d'intérêt général, qui peuvent se rattacher à une mission de service public qu'il faut protéger ou réorganiser (Conseil d'État, 30 octobre 1942, compagnie générale des eaux), ou même de motifs liés à l'intérêt financier de la personne publique (Conseil d'État, 8 janvier 1960, Lafon).
* 22 Opérateur funéraire sous statut associatif à but non lucratif.
* 23 Article L. 2223-23 du code général des collectivités territoriales.
* 24 L'absence de titre d'occupation peut faire courir un risque juridique à la commune.
* 25 Laïcité, Le vade-mecum de l'AMF , Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité, publié en novembre 2015. Ce document est consultable à l'adresse suivante : https://medias.amf.asso.fr/docs/DOCUMENTS/AMF_14082_VADE_MECUM.pdf