II. DES ARBITRAGES CONTESTABLES ET UNE MAÎTRISE OPÉRATIONNELLE PERFECTIBLE DE CERTAINES FONCTIONS
A. UNE CERTAINE DYNAMIQUE DES CRÉDITS DU PROGRAMME 216 MOYENNANT DES ARBITRAGES DONT LA JUSTIFICATION EST SOUVENT DIFFICILE À PERCEVOIR
1. Une augmentation des crédits de personnel de l'administration centrale
Les crédits du programme 216 s'inscrivent en hausse sensible avec un supplément de crédits de 36,3 millions d'euros (+ 3,9 %).
Une partie de cette augmentation résulte de transferts de personnel à partir du programme 307 « Administration territoriale » de la mission. Il s'agit des personnels d'administration centrale occupant des fonctions de pilotage de l'administration territoriale, qui, auparavant pris en charge par le programme 307, sont rattachés à partir de 2019 au programme 216. 105 emplois sont concernés sur un total de 136 emplois transférés au programme.
Les motifs de ce transfert ne sont pas particulièrement clairs. Il pourrait s'agir de la préfiguration d'une fusion entre le programme 307 de la mission et le programme 333 rattaché aux services du Premier ministre. En l'état, il convient de rester vigilant pour qu'il ne s'agisse pas par-là de désarmer plus encore les moyens consacrés à l'administration territoriale.
Plus de la moitié des crédits du programme sont consacrés à des dépenses de personnel, dont les ressorts ont été précédemment exposés.
Votre rapporteur spécial souligne le poids élevé des effectifs d'administration centrale. Avec 4 308 ETPT, ils augmentent encore de 129 unités, soit davantage que les emplois transférés à partir du programme 307. Leur nombre excède de beaucoup celui des effectifs déployés dans le réseau des sous-préfectures, et bien plus encore, celui qu'occupent les seules sous-préfectures de province.
Le chiffrage de l'impact des transferts d'emplois sur les crédits du programme fait ressortir un supplément de charges de 10,9 millions d'euros, laissant un reliquat de 25,4 millions d'euros d'alourdissement des dotations.
Au total, la dynamique des dotations à emplois constants, atteint 2,7 %, ce qui reste significatif. Elle repose sur les évolutions des dépenses de personnel à périmètre constant, mais aussi sur l'augmentation sensible des dépenses d'investissement.
2. Des évolutions par action contrastées
Dans ce contexte, les évolutions par action apparaissent contrastées.
Évolution des crédits du programme
216
(2018-2019)
Ouverts en LFI pour 2018 |
Demandés pour 2019 |
Évolution 2019/2018 |
|
Action 01 - État-major et services centraux |
373,50 |
390,70 |
4,6 % |
Action 03 - Système d'information et de communication |
57,7 |
90,3 |
56,5 % |
Action 04 - Action sociale et formation |
40,2 |
40,2 |
0,0 % |
Action 05 - Affaires immobilières |
149,5 |
137,1 |
- 8,3 % |
Action 06 - Affaires juridiques et contentieuses |
80,0 |
80 |
0,0 % |
Action 08 - Immigration, asile et intégration |
41,0 |
41,1 |
0,2 % |
Action 09 - Sécurité et éducation routières |
126,2 |
126,3 |
0,1 % |
Action 10- Fonds interministériel de prévention de la délinquance |
71,7 |
70,4 |
- 1,8 % |
Total programme 216 |
939,8 |
976,1 |
3,9 % |
Source : commission des finances du sénat d'après le projet annuel de performances pour 2019
La baisse des crédits réservés au fonds interministériel de prévention de la délinquance se poursuit. L'an dernier, elle avait été expliquée par une réduction du format des centres de réinsertion et de prévention de la délinquance dans le contexte de la mise en place d'une nouvelle stratégie. Le plan présenté en février 2018 suppose 13,8 millions d'euros de crédits, 18,2 millions d'euros étant par ailleurs consacrés à la sécurisation de sites contre des actes terroristes. Le reste des interventions du fonds subira une contrainte renforcée, même si des recoupements peuvent exister. Votre rapporteur spécial relève la sous-représentation des zones de gendarmerie dans les équipements financés par le fonds. Cette situation peut s'expliquer par des besoins particuliers aux zones de police, mais il conviendra d'être attentif aux suites réservées aux engagements pris d'un rééquilibrage.
Le conseil national des activités privées de sécurité bénéficiera comme l'an dernier de 17,5 millions d'euros de crédits. L'extension de la sécurité privée et les besoins de formation correspondant aux perspectives d'élargissement des facultés offertes invitent à s'interroger sur le niveau de la dotation.
L'an dernier, le programme avait enregistré le rattachement de la commission du contentieux du stationnement payant (156 ETPT), situation assez singulière de financement d'une juridiction par le ministère de l'intérieur. Compte tenu du stock considérable d'affaires à traiter, les moyens pourraient être insuffisants, les collectivités territoriales devant connaître de leur côté une surcharge créée par les demandes préalables qu'elles seront appelées à instruire.
Les crédits du programme sont largement préemptés par des engagements précédents correspondant à des opérations immobilières très significatives. 702 millions d'engagements antérieurs restent à payer, ne laissant de marges que pour 404 millions d'euros de nouveaux engagements qui, en dehors de ceux purement conventionnels, laissent, en fait, moins de 200 millions d'euros disponibles pour des investissements nouveaux.
Ceux-ci seront fortement mobilisés vers les systèmes informatiques (101 millions d'euros en autorisations d'engagement ) , qui extériorisent une forte augmentation des dépenses prévues au titre des systèmes d'information et de communication (+ 32,6 millions d'euros soit + 56,5 %).
Elle répond, en particulier, au projet de réseau radio du futur annoncé par le président de la République.
Le coût de ce projet dépasse 160 millions d'euros. Compte tenu de certaines expériences (par exemple, le centre de données BO 15), il faut souhaiter qu'il ne suscite pas de dépassements.
Les autres motifs de dépenses compensent partiellement cette hausse, soit en demeurant à peu près stables, soit en baissant. Il en va ainsi, en particulier, des dépenses prévues au titre des affaires immobilières qui se replient de 8,3 % (- 12,4 millions d'euros).