PREMIÈRE PARTIE : LA FONDATION UE-ALC
I. LE RENFORCEMENT DU PARTENARIAT ENTRE L'UNION EUROPÉENNE ET LES PAYS D'AMÉRIQUE LATINE ET DES CARAÏBES
L'Union européenne et les Etats d'Amérique latine et des Caraïbes entretiennent des relations privilégiées depuis qu'un partenariat stratégique a été signé lors du premier sommet bi-régional des chefs d'Etat et de Gouvernement à Rio de Janeiro en juin 1999. Le principal interlocuteur de l'Union européenne entre 1999 et 2012 était le groupe de pays dénommé « groupe de Rio ». À partir de 2012, la Communauté des États latino-américains et des Caraïbes (CELAC) a été désignée par ses pays membres pour remplacer le groupe de Rio en tant qu'interlocuteur de l'Union européenne dans le processus des sommets et le partenariat stratégique de région à région.
Le partenariat stratégique bi-régional se structure aujourd'hui autour de trois piliers : le dialogue politique, les relations commerciales et l'aide au développement. Il est complété par un volet sur les questions globales au dialogue politique - droits de l'Homme, drogue, climat, énergie, migrations, sciences et technologies.
Le dialogue politique s'est traduit par la tenue de sommets réguliers dont l'objectif est de resserrer les liens entre l'UE et l'Amérique latine et les Caraïbes au plus haut niveau en rassemblant l'ensemble des chefs d'Etat et de gouvernement de la zone pendant deux jours. Ces sommets, qui ont également donné une impulsion politique à la relation, se sont déroulés à Madrid en 2002, à Guadalajara en 2004, à Vienne en 2006, à Lima en 2008 et à Madrid à nouveau en 2010. Deux sommets se sont déroulés sous le « format CELAC », le premier à Santiago du Chili en 2013 et le second à Bruxelles en 2015.
Le troisième sommet UE-CELAC qui devait se tenir à San Salvador en octobre 2017 a été reporté sine die suite à la déclaration du groupe dit « de Lima », le 8 août 2017, au regard de la dégradation de la situation au Venezuela . Les services du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE) 4 ( * ) ont fait savoir à votre rapporteur que cette déclaration appelait au report du sommet, sans qu'aucune concertation préalable n'ait eu lieu, ni au sein de la CELAC, ni avec l'Union européenne et que cette décision a finalement été endossée par les ministres de la CELAC, le 18 septembre 2017, en marge de l'Assemblée Générale de l'Organisation des Nations unies (ONU) à New York par le biais de l'annonce de la création d'un groupe de travail chargé de proposer une nouvelle date. Les services du MEAE ont également indiqué qu'une réunion ministérielle devrait se tenir les 16 et 17 juillet 2018 à Bruxelles p our permettre de maintenir une dynamique dans la relation dans un contexte où de nombreuses négociations sont en cours avec les pays de la zone Amérique latine et Caraïbes (modernisation de l'accord global avec le Mexique, négociation en cours avec le Mercosur, modernisation de l'accord d'association avec le Chili, futur cadre de Cotonou). La question de l'intérêt de la CELAC pour un dialogue politique global avec l'Union européenne se pose compte tenu des difficultés à trouver une date pour cette réunion, alors même que la Chine gagne beaucoup de terrain dans la région et qu'un sommet CELAC-Chine s'est tenu en janvier dernier au Chili.
L'approfondissement de ce dialogue bi-régional s'appuie sur deux outils politiques, un plan d'action et la Fondation UE-ALC.
Le plan d'action UE-CELAC concrétise la vision commune des deux régions. Défini au Sommet de Madrid en mai 2010, il a été actualisé au fil des sommets afin de refléter l'évolution et l'approfondissement de la relation entre les partenaires stratégiques. Ce plan compte aujourd`hui dix chapitres.
Le premier plan d'action bi-régional, adopté au Sommet de Madrid de 2010 , identifiait ainsi six domaines de coopération prioritaires :
- Chapitre 1 : sciences, recherche, innovation et technologie ;
- Chapitre 2 : développement durable, environnement, changement climatique, biodiversité, énergie ;
- Chapitre 3 : intégration régionale et interconnexion afin de promouvoir l'inclusion et la cohésion sociales;
- Chapitre 4 : migrations ;
- Chapitre 5 : éducation et emploi au service de l'inclusion et de la cohésion sociales ;
- Chapitre 6 : le problème mondial de la drogue.
Le Sommet de Santiago de 2013 a permis une première actualisation du plan d'action bi-régionale et l'incorporation de nouveaux chapitres :
- Chapitre 7 : égalité entre les sexes ;
- Chapitre 8 : les investissements et l'esprit d'entreprise au service du développement durable.
Le Sommet de Bruxelles de 2015 a permis l'actualisation de certains chapitres du plan d'action et l'incorporation de deux nouveaux chapitres :
- Chapitre 9 : enseignement supérieur, dont la rédaction a été lancée à l'initiative de la France et qui a pour objectif de donner un nouvel élan à la coopération UE-CELAC dans l'enseignement supérieur ;
- Chapitre 10 : sécurité citoyenne, dont le contenu vise à faire référence au projet de Plan d'action pour la Stratégie de l'Union européenne sur la sécurité des citoyens en Amérique centrale et dans les Caraïbes.
La Fondation UE-ALC se présente comme le second outil politique de l'approfondissement de ce dialogue bi-régional en ce qu'elle vise à encourager le débat sur des stratégies et des actions communes.
Selon les informations transmises par les services du MEAE, le présent accord s'inscrit également dans la Stratégie globale de l'UE qui prévoit le rehaussement du dialogue politique et de la coopération avec la région Amérique latine et Caraïbes, en particulier dans le domaine des migrations, de la sûreté maritime, du désarmement, de la non-prolifération et de la maîtrise des armements, de la lutte contre la criminalité organisée et du terrorisme.
Le Parlement européen a adopté le 13 septembre 2017 une résolution sur l'Union européenne et l'Amérique latine qui rappelle notamment les « principes, valeurs et intérêts communs » entre les deux régions et affirme le caractère prioritaire de la relation bi-régionale dans le contexte géopolitique actuel.
Cette résolution « met l'accent sur le rôle de la Fondation UE-ALC en tant qu'organisation internationale et plaide pour une ratification rapide de l'accord l'instituant par l'ensemble des soixante-deux membres, ce qui apporterait un appui sensible au partenariat bi-régional, ainsi que pour la mise en place de dispositifs permanents de coopération entre la Fondation et l'Assemblée Parlementaire Euro-Latino-Américaine (EuroLat) .»
En février 2018, le Service européen d'action extérieure (SEAE) et la Commission européenne ont entamé un processus de réflexions et de consultations qui s'achèvera en juin 2018 et devrait donner lieu à une communication conjointe sur les relations de l'UE avec l'Amérique latine et les Caraïbes. Le projet de communication devrait être finalisé en juillet en vue d'une publication en septembre/octobre 2018. En France, le SEAE compte s'appuyer notamment sur l'Observatoire Politique de l'Amérique latine et des Caraïbes (OPALC) 5 ( * ) .
* 4 Réponse du Gouvernement aux questions de la commission et audition du 15 février 2018.
* 5 L'OPALC est un observatoire politique spécialisé sur l'Amérique latine et les Caraïbes. Il réunit un groupe d'enseignants, chercheurs et étudiants de Sciences-Po et d'autres institutions partenaires.