EXAMEN DES ARTICLES
CHAPITRE IER - Arrêt de la recherche et de l'exploitation des hydrocarbures dans le cadre de la lutte contre les changements climatiques en application de l'accord de Paris
En première lecture à l'Assemblée nationale, les députés ont adopté plusieurs amendements de portée déclaratoire pour compléter l'intitulé du présent chapitre.
En commission , un amendement présenté par le groupe La France insoumise a d'abord précisé que l'« arrêt de la recherche et de l'exploration des hydrocarbures » s'inscrit « dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique ».
En séance , cette rédaction a ensuite été rectifiée :
- d'une part, par un amendement du groupe La République en Marche, pour reprendre les termes exacts employés par l'Accord de Paris sur le climat, qui porte sur « les changements climatiques » et non sur le seul « réchauffement » auquel les dérèglements climatiques ne se résument pas ;
- d'autre part, par un amendement de Mme Batho et plusieurs de ses collègues, pour se référer explicitement à l'« application de l'Accord de Paris ».
Article 1er A (Ordonnance n° 2011-91 du 20 janvier 2011 portant codification de la partie législative du code minier) - Ratification de l'ordonnance portant codification de la partie législative du code minier
Objet : cet article, introduit à l'Assemblée nationale, ratifie l'ordonnance du 20 janvier 2011 codifiant la partie législative du code minier.
I. Le texte adopté à l'Assemblée nationale
En séance , les députés ont adopté un amendement de Mme Batho et plusieurs de ses collègues ratifiant l'ordonnance du 20 janvier 2011 portant codification de la partie législative du code minier .
Selon les auteurs de l'amendement, dès lors que le présent projet de loi en modifie certaines dispositions, leur conférant ainsi une valeur législative, il s'agit par cette ratification de donner à l'ensemble de cette partie législative « une valeur juridique identique » - une ordonnance non ratifiée demeurant un acte de nature réglementaire contestable devant le juge administratif.
Un amendement identique avait pourtant été rejeté en commission après que le ministre avait fait valoir que cette ordonnance requerrait « un important travail de toilettage compte tenu des évolutions intervenues entre-temps, [que] la ratifier brutalement risquerait de remettre en cause les dispositions adoptées ultérieurement [et que] ce travail a vocation à être fait dans le cadre de la réforme du code minier », maintes fois repoussée mais désormais annoncée pour le courant de l'année 2018.
Le ministre et le rapporteur de la commission du développement durable, suivant la même argumentation, en avaient donc logiquement demandé et obtenu le retrait.
II. La position de votre commission
Votre rapporteur estime que la ratification de l'ordonnance du 20 janvier 2011 mérite d'être examinée dans le cadre de la réforme du code minier que le Gouvernement s'est engagé à présenter dans les prochains.
Il serait du reste assez inconséquent d'autoriser la ratification d'une ordonnance sans la modifier, tout en sachant que certaines de ses dispositions doivent l'être .
Votre rapporteur a donc proposé à votre commission, qui l'a accepté, un amendement de suppression COM-53 .
Votre commission a supprimé cet article. |
Article 1er (Art. L. 111-1, art. L. 111-4 à L. 111-9 [nouveaux] du code minier) - Arrêt progressif de la recherche et de l'exploitation des hydrocarbures
Objet : cet article organise la cessation progressive, d'ici à 2040, de la recherche et de l'exploitation de gisements d'hydrocarbures sur le territoire national.
I. Le droit en vigueur
1° Le contexte : une volonté d'exemplarité dans la lutte contre les changements climatiques
En organisant l'arrêt progressif de l'exploration et de l'exploitation d'hydrocarbures sur le territoire national, le présent projet de loi entend s'inscrire dans la mise en oeuvre de l'Accord de Paris , qui vise à contenir la hausse de la température mondiale en-deçà de 2° C par rapport aux niveaux préindustriels - voire à tendre vers un objectif de 1,5° C.
Or, selon les estimations du groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) et compte tenu de la quantité de CO 2 déjà émise depuis l'ère industrielle, cette limitation à 2° C du réchauffement de la planète supposerait de renoncer à l'exploitation d'au moins 80 % des réserves d'énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon) encore présentes dans le sous-sol.
Pour atteindre ces objectifs, le Gouvernement a adopté, le 6 juillet dernier, un plan Climat qui ambitionne d'« accélérer » et de « rendre irréversible » la mise en oeuvre de l'accord de Paris. « Pour en finir avec les énergies fossiles », le plan vise en particulier :
- la fin de la vente des voitures émettant des gaz à effet de serre d'ici 2040 (axe n° 4) ;
- l'arrêt de la production d'électricité issue des centrales à charbon (axe n° 8) ;
- « la sortie progressive de la production d'hydrocarbures sur le territoire français à l'horizon 2040 » (axe n° 9), objet principal du présent texte ;
- le renforcement de la fiscalité écologique (convergence des fiscalités de l'essence et du diesel, augmentation accélérée de la « taxe carbone » intégrée à la fiscalité énergétique et révision du mécanisme européen d'échanges de quotas d'émission) (axe n° 10) ;
- enfin, l'atteinte de la neutralité carbone à l'horizon 2050 (axe n° 11), soit un objectif plus ambitieux encore que celui du « facteur 4 » 2 ( * ) prévu dans la loi « Transition énergétique » 3 ( * ) et qui s'ajoute à celui d'une réduction de 30 % de la consommation énergétique primaire des énergies fossiles en 2030 par rapport à 2012, tel que fixé par la même loi.
S'agissant de la fin de l'exploration et de l'exploitation des hydrocarbures, l'exposé des motifs du projet de loi insiste en ces termes sur sa portée éminemment symbolique, le caractère pionnier de la démarche et l' effet d'entraînement sur d'autres pays qui en est attendu : « en étant le premier pays au monde à inscrire [ce principe] dans la loi, la France témoigne sa volonté d'être à l'avant-garde de la lutte contre le dérèglement climatique ».
2° Le poids du secteur dans l'économie : une filière industrielle d'excellence 4 ( * )
Avec sa soixantaine de gisements pétroliers et gaziers en exploitation , la production nationale d'hydrocarbures, limitée à 815 000 tonnes de pétrole par an et 380 millions de mètres cubes de gaz en 2016, « est déjà à un niveau très faible puisqu'elle représente aujourd'hui moins de 1 % de notre consommation » 5 ( * ) . Pour les 99 % restants, la France recourt aux importations pour une facture totale de 40 milliards d'euros en 2015, dans un contexte pourtant favorable de prix bas.
En septembre 2017, selon les données transmises par le Gouvernement à votre rapporteur, on dénombrait 33 permis exclusifs de recherches d'hydrocarbures et 62 concessions en cours de validité . En outre, comme souligné par le Conseil d'État pour encourager le Gouvernement « à apurer, dans les meilleurs délais, [ce] stock anormalement élevé », de nombreuses demandes d'octroi initial ou de prolongation de titres miniers, dont les plus anciennes remontent à 2009, sont encore en cours d'instruction : 14 demandes portent sur des concessions et 73 sur des permis de recherches.
L'exploration et la production d'hydrocarbures sur le territoire national génèrent aujourd'hui 1 500 emplois directs et environ 4 000 emplois indirects répartis principalement en Aquitaine (Parentis, Lacq), en Seine-et-Marne, dans la Marne ou en Moselle, pour un chiffre d'affaires de l'ordre, en 2015, de 270 millions d'euros . Comme rappelé dans l'étude d'impact, « chaque année, les acteurs de l'exploration-production en France réalisent plusieurs centaines de millions d'euros d'achats [et] contribuent [par leurs commandes] à l'activité d'un important réseau de fournisseurs ». On notera encore, parmi les recettes fiscales générées par l'exploitation des concessions, la perception de deux redevances, l'une au profit de l'État, l'autre des départements et communes , pour un montant de près de 20 millions d'euros en 2016, certes faible à l'échelle nationale mais non négligeable pour les départements et communes des bassins parisien et aquitain qui en sont les principaux bénéficiaires.
Les filières industrielles de la valorisation énergétique du sous-sol profond vont cependant bien au-delà de la seule activité d'exploration-production sur le territoire national . Ainsi, les trois filières - exploration-production en France et dans le monde, stockage géologique de CO 2 et géothermie profonde - « emploient plus de 66 000 salariés en France [ dont 64 000 pour l'exploration-production] pour un chiffre d'affaires d'environ 36 milliards d'euros » 6 ( * ) . Dans l'exploration-production (E&P), on dénombre « une centaine d'entreprises spécialisées qui réalisent l'essentiel de leur chiffre d'affaires à l'export (environ 75 %) ainsi qu'un très grand nombre d'entreprises (environ 700) non spécialisées qui réalisent, en moyenne, 20 % de leur chiffre d'affaires et 40 % de leurs exports dans le secteur E&P. La filière est composée de champions nationaux de taille internationale (et d'entités françaises de groupes étrangers) pétroliers, gaziers, parapétroliers ou paragaziers (TOTAL, ENGIE, Technip, CGG...) extrêmement compétitifs à l'export et d'un vaste écosystème d'entreprises de toutes tailles présentes sur toute la chaîne de valeur ».
Du reste, le Conseil d'État avait bien souligné, dans son avis sur le projet de loi, « l'importance industrielle du secteur des hydrocarbures , qui ne se limite pas au seul secteur de l'énergie mais irrigue une filière où des entreprises nationales figurent au premier rang mondial » et la nécessité de « [prendre] en compte les activités des secteurs para-pétrolier et para-gazier » pour disposer d'« une appréciation plus juste des impacts non seulement industriels mais aussi commerciaux et sociaux de la mesure ». Aussi, bien qu'elle « trouve sa justification dans la poursuite de l'objectif plus global de limitation du réchauffement climatique », il s'agit donc avant tout d'une « mesure industrielle ».
3° Le droit applicable : une activité régie par le code minier
Les activités d'exploration et d'exploitation d'hydrocarbures relèvent, selon l'article L. 111-1 du code minier 7 ( * ) , du régime légal des mines , au même titre, par exemple, que les mines de charbon.
Pour entreprendre des travaux de recherche, l'opérateur doit disposer 8 ( * ) d'une autorisation de l'administration qui prend en général la forme d'un permis exclusif de recherches ou, dans certains cas, d'une autorisation de prospections préalables (qui ne lui confère aucune exclusivité et ne vaut que pour la prospection en mer 9 ( * ) ).
Le permis exclusif de recherches est accordé par arrêté du ministre chargé des mines 10 ( * ) , après mise en concurrence, pour une durée initiale maximale de cinq ans, renouvelable deux fois pour la même durée au plus sans remise en concurrence. Chaque prolongation est de droit , soit pour trois ans, soit pour la durée de validité précédente si cette dernière est inférieure à trois ans, lorsque le titulaire a satisfait à ses obligations et souscrit à certains engagements financiers 11 ( * ) . Il confère à son titulaire un monopole des recherches dans le périmètre défini, la libre disposition des produits extraits et le droit exclusif à l'obtention d'une autorisation d'exploitation , appelé « droit de suite » 12 ( * ) .
Cette autorisation d'exploitation, elle-même appelée « concession » , est accordée par décret en Conseil d'État pour une durée maximale de cinquante ans . Elle peut faire l'objet de prolongations successives , chacune d'une durée inférieure ou égale à vingt-cinq ans 13 ( * ) .
Enfin, les travaux d'exploration ou d'exploitation, lorsqu'ils présentent des dangers et des inconvénients graves pour les intérêts mentionnés à l'article L. 161-1 14 ( * ) , nécessitent d'obtenir du préfet une autorisation de travaux - dans les autres cas, une simple déclaration suffit 15 ( * ) .
4° Le droit applicable aux hydrocarbures dits « non conventionnels »
En application de la loi dite « Jacob » du 13 juillet 2011 16 ( * ) , aucun permis de recherches ni aucune concession d'exploitation d'hydrocarbures dits « non conventionnels » , plus communément appelés « pétroles et gaz de schiste », n'est aujourd'hui en vigueur en France, ni ne pourrait être accordé si la demande en était faite . La loi de 2011 a en effet interdit , en raison des risques environnementaux avérés qu'elle comporte, le recours à la fracturation hydraulique de la roche, seul procédé industriel permettant d'exploiter ce type d'hydrocarbures , et a abrogé en conséquence tous les permis qui prévoiraient sa mise en oeuvre.
Dans le même temps, la loi ouvrait cependant la voie à la recherche de « techniques alternatives » ainsi qu'à des « expérimentations réalisées à seules fins de recherche scientifique sous contrôle public » en créant une Commission nationale d'orientation, de suivi et d'évaluation - qui n'a en pratique jamais été constituée ni réunie - et en prévoyant la remise annuelle au Parlement d'un rapport du Gouvernement qui porterait notamment sur l'évolution des techniques, la connaissance du sous-sol et les conditions de mise en oeuvre de telles expérimentations - rapport qui n'a lui non plus jamais été remis .
Dès lors, comme rappelé par le ministre à l'Assemblée nationale, en interdisant le recours à la fracturation hydraulique, « l'encadrement juridique actuel ne permet pas l'exploration et l'exploitation hors [des] gisements classiques » ; au surplus, comme le Conseil d'État l'a indiqué dans son avis sur le projet de loi 17 ( * ) , le ministre a confirmé que « si des techniques présentant des inconvénients ou des dangers pour l'environnement apparaissaient, l'État disposerait, dans le cadre de la police des mines, des outils nécessaires pour en proscrire immédiatement l'utilisation ».
Enfin, on rappellera que la distinction entre hydrocarbures « conventionnels » et « non conventionnels » ne repose pas sur une différence de nature du pétrole ou de gaz - les molécules sont rigoureusement identiques, d'où la difficulté à contrôler le respect d'une interdiction éventuelle d'importations de « gaz de schiste » - mais seulement sur une différence de technique d'extraction , et qu'elle peut varier dans le temps , comme souligné par l'IFPEN en 2013 : « physiquement et chimiquement, rien ne différencie un hydrocarbure non conventionnel d'un hydrocarbure conventionnel : il s'agit toujours de pétrole (hydrocarbure liquide) ou de gaz (gaz naturel, principalement composé de méthane). Le classement d'un hydrocarbure dans l'une ou l'autre catégorie tient aux conditions d'accumulation de cet hydrocarbure dans le sous-sol et aux types de technologies à mettre en oeuvre pour l'en extraire .
« L'industrie pétrolière nomme conventionnels les gisements contenus dans des roches poreuses et perméables et dont l'exploitation est relativement facile ; elle nomme non conventionnels tous les autres, la limite entre les deux notions évoluant cependant au cours du temps avec les progrès de la technologie : dans toutes les industries, ce qui était hier technologie de pointe peut être aujourd'hui méthode de routine. » 18 ( * )
II. Le texte du projet de loi
Par son 1°, l'article 1 er actualise la rédaction du 1° de l'article L. 111-1 , relatif aux combustibles fossiles relevant du régime légal des mines, dont le Conseil d'État a jugé que la lisibilité, s'agissant de « dispositions anciennes », était « très amoindrie » : aux termes « de la houille, du lignite, ou d'autres combustibles fossiles, la tourbe exceptée, des bitumes, des hydrocarbures liquides ou gazeux » sont ainsi substitués la formulation plus générique « des hydrocarbures et des combustibles fossiles, la tourbe exceptée, qu'ils soient sous forme solide, liquide ou gazeuse ». Ce toilettage n'appelle pas de remarques particulières.
Le 2° constitue le coeur du dispositif . Il créé, au sein du chapitre I er (« les gîtes contenant des substances de mine ») du titre I er (« Champ d'application ») du livre I er (« Le régime légal des mines ») du code minier une nouvelle section 3 intitulée « Arrêt de la recherche et de l'exploitation des hydrocarbures » et comportant six articles.
ï Un régime dérogatoire
L'article L. 111-4 dispose que la présente section s'applique spécifiquement à la recherche et à l'exploitation d'hydrocarbures par dérogation aux dispositions du livre I er , qui régit les autres substances de mine. L'article L. 111-9 précise cependant que les activités de recherche et d'exploitation qui seraient maintenues, en vertu des dérogations prévues à l'article L. 111-8 ( cf. infra ), continueront d'être régies, jusqu'à l'échéance de leurs titres, par les dispositions du code minier qui leur sont applicables.
ï Le principe
L'article L. 111-6 prévoit qu'« il est mis progressivement fin à la recherche et à l'exploitation des hydrocarbures , à l'exception du gaz de mine défini à l'article L. 111-5 [cf. infra] , afin de parvenir à une cessation définitive de ces activités , dans les conditions et selon les modalités fixées par la présente section ».
ï Le champ d'application géographique
L'article L. 111-7 précise que l'arrêt progressif posé à l'article L. 111-6 vaut pour l'ensemble du territoire terrestre et, en mer, pour le domaine public maritime, le plateau continental et la zone économique exclusive . Ce faisant, concernant les activités en mer, il complète le moratoire déjà établi par la France, en avril 2016, sur la recherche d'hydrocarbures en Méditerranée et étendu, en février dernier, à la façade atlantique de la métropole.
ï La mise en oeuvre
L'article L. 111-8 organise la mise en oeuvre du principe d'un arrêt progressif en prévoyant :
- l'arrêt de la délivrance de toute autorisation d'exploration (permis exclusif de recherches ou autorisation de prospections préalables), « y compris à des fins expérimentales », ou d'exploitation (concession), qui s'appliquera à toute demande nouvelle à compter de la promulgation de la loi ;
- l'impossibilité de prolonger une concession existante au-delà de 2040 ; alors que la version initiale du texte transmis au Conseil d'État ne permettait plus au titulaire d'une concession parvenue à l'expiration de sa période initiale de validité d'en obtenir la prolongation , le Conseil a jugé qu'une telle impossibilité « pourrait soulever une difficulté au regard de la garantie due aux situations légalement acquises comme aux effets légitimement attendus de la détention d'une concession » et que l'intérêt général visé par la loi ne serait « pas suffisant pour justifier l'arrêt immédiat de toutes les exploitations en cours » ; le Gouvernement a donc retenu la solution préconisée par le Conseil et consistant à permettre au titulaire d'une concession d'en obtenir la prolongation , sans toutefois qu'elle ne puisse excéder 2040 pour ne pas « [priver] d'une partie de ses effets la cessation décidée par le Gouvernement » ; s'agissant du choix de la date, l'étude d'impact la justifie par le fait qu'elle « permet d'atteindre l'arrêt presque complet de l'activité de production d'hydrocarbures en France à cet horizon [dès lors que] cette date correspond à l'échéance de la quasi-totalité des concessions actuellement en cours de validité » 19 ( * ) .
À l'inverse, demeurent autorisés :
- l'exercice du droit de suite prévu à l'article L. 132-6, qui permet au titulaire d'un permis exclusif de recherches en cours de validité qui en ferait la demande d'obtenir une concession ; sont potentiellement concernés les 31 permis exclusifs de recherches en cours de validité 20 ( * ) ;
- la prolongation d'un permis exclusif de recherches lorsqu'elle répond aux conditions posées aux articles L. 142-1 - prolongation de droit soumise au respect par le titulaire de ses obligations et d'un « engagement financier au moins égal à l'engagement financier souscrit pour la période de validité précédente, au prorata de la durée de validité et de la superficie sollicitées » - ou L. 142-2 21 ( * ) , dont le second alinéa permet, « en cas de circonstances exceptionnelles » indépendantes de la volonté du titulaire, de prolonger le permis de trois ans au plus sans la réduction de surface normalement prévue.
En d'autres termes, ces dérogations visent bien, comme le Conseil d'État y a fort justement veillé pour garantir les situations légalement acquises - ainsi que les effets légitimement attendus de telles situations -, à organiser un arrêt progressif, et non immédiat , des activités visées. Ainsi, parmi les titres en cours de validité à l'entrée en vigueur de la loi, la date butoir de 2040 s'applique uniquement, dans le texte initial, à la prolongation d'une concession existante mais n'empêche ni la poursuite de l'exploitation lorsque la durée initiale de la concession excède 2040 , et jusqu'au terme de cette durée, ni l'attribution d'une concession nouvelle en application du droit de suite dont la durée initiale pourrait, là aussi, dépasser la date de 2040.
Dans l'étude d'impact, on peut ainsi lire que « la production future peut être estimée dans le cadre fixé par le projet de loi, soit la préservation des droits acquis (conduisant à l'attribution de concessions déjà identifiées) et le renouvellement des concessions existantes à une échéance n'excédant pas 2040 . La courbe ci-dessous évalue ainsi la production d'hydrocarbure liquide en se basant sur les données de 2016 et en appliquant un taux de déclin. »
Projections d'hydrocarbures liquides en France à l'horizon 2046
Source : étude d'impact
« Cette courbe illustre la progressivité de la décroissance de la production nationale jusqu'en 2040, année après laquelle seules les concessions déjà attribuées ou issues du droit de suite et dont l'échéance dépasse 2040 perdureront .
« À l'instar de la production de pétrole, le cadre fixé par le projet de loi entraînera une décroissance progressive de la production de gaz naturel jusqu'en 2040 . Après 2040, la production d'hydrocarbures gazeux en France sera négligeable. »
ï L'exception
Outre les dérogations temporaires prévues à l'article L. 111-8, il est institué, à l'article L. 111-6, une exception permanente pour l'exploitation du gaz de mine , plus connu sous le nom de « grisou ».
L'article L. 111-5 définit le gaz de mine comme « le gaz dont la récupération s'effectue sans intervention autre que celles rendues nécessaires pour maintenir en dépression les vides miniers contenant ce gaz, afin de l'aspirer ». À l'arrêt de l'exploitation des mines de charbon, ce gaz principalement composé de méthane, dont le « coup » était bien connu des mineurs, continue en effet de remonter dans les vides laissés par les travaux miniers et risque de provoquer des explosions.
Le maintien en exploitation de ce gaz répond donc à un double impératif : d'une part, un impératif de sécurité , afin d'éviter la remontée du gaz en surface et le risque d'explosion et, d'autre part, un impératif environnemental consistant à éviter l'émission dans l'atmosphère d'un gaz, le méthane, dont l'effet de serre est vingt à vingt-cinq fois supérieur à celui du CO 2 . En outre, et bien que la qualité du gaz de mine se soit dégradée au fil du temps, l'activité emploie encore, selon l'étude d'impact, « une dizaine de personnes et a prévu l'embauche de trois personnes en 2017 suite à l'installation de moteurs pour convertir une partie du gaz en électricité ». Enfin, pour les finances publiques, l'arrêt de l'activité, qui obligerait à transférer à l'État la surveillance de la remontée de gaz, représenterait une charge évaluée par le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) à 4 millions d'euros sur 10 ans.
III. Les modifications apportées par l'Assemblée nationale
Plusieurs modifications substantielles ont été apportées en première lecture à l'Assemblée nationale.
En commission , outre quatre amendements purement rédactionnels, les députés ont adopté :
- trois amendements du rapporteur de la commission du développement durable pour interdire l'exploration et l'exploitation du charbon , au même titre que les hydrocarbures ; bien que le charbon soit effectivement l'un des combustibles fossiles les plus émetteurs de gaz à effet de serre, la portée d'un tel ajout est en pratique symbolique puisque la France ne produit plus de charbon depuis plusieurs années ;
- quatre amendements encadrant le régime dérogatoire permettant la poursuite de l'exploitation du gaz de mine : d'une part, trois amendements identiques du rapporteur et des groupes La France insoumise et La République en Marche prévoient que l'exception ne vaut que pour le gaz « situé dans les veines de charbon préalablement exploitées » , excluant ainsi toute nouvelle exploitation de gaz dit « de couche » ; d'autre part, un amendement du rapporteur précise que ne peut être considéré comme « gaz de mine » un gaz dont la récupération nécessiterait l'emploi de techniques dites « non conventionnelles » impliquant « la mise en oeuvre d'actions de stimulation, cavitation ou fracturation du gisement » ; par ces deux amendements, le régime dérogatoire est circonscrit au seul gaz lié à l'exploitation d'anciennes mines et dont la récupération , justifiée par les impératifs exposés ci-avant, ne s'opère que par différentiel de pression ;
- un amendement du groupe La France insoumise précisant que la fin progressive de la recherche et de l'exploitation des hydrocarbures s'applique « quelle que soit la technique employée » , précision sans portée pratique dès lors que la fracturation hydraulique, seule technique existant aujourd'hui pour rechercher ou exploiter des hydrocarbures dits « non conventionnels », est d'ores et déjà interdite ;
- enfin, un amendement du rapporteur disposant qu'outre les dispositions du code minier qui leur sont applicables, les titres miniers demeurent régis , jusqu'à leur échéance, par les dispositions du code de l'environnement relatives à la participation du public aux décisions ayant une incidence sur l'environnement.
En outre, en lien direct avec l'article 1 er , les députés ont adopté en commission un amendement du rapporteur, sous-amendé par le groupe La France insoumise et portant article additionnel après l'article 1 er , qui prévoit d'encadrer le droit de suite, et dont la rédaction a ensuite été modifiée en séance par un amendement du Gouvernement ( cf. le commentaire de l'article 1 er bis ci-après).
En séance , ont été adoptés, outre cinq amendements rédactionnels, de coordination ou de précision juridique du rapporteur :
- deux amendements du groupe Mouvement démocrate et apparentés créant une exception à la fin programmée de l'exploitation des hydrocarbures pour les hydrocarbures dits « connexes » 22 ( * ) à l'exploitation d'une autre substance minière lorsque ces deux activités sont indissociables . En pratique, cette exception permettra la poursuite de l'exploitation du soufre dans le bassin de Lacq , premier pôle mondial de thiochimie 23 ( * ) employant 750 personnes. Il s'agit donc de traiter le cas de matières situées dans des gisements complexes, dont les hydrocarbures ne sont qu'un coproduit sans lequel l'activité première ne pourrait néanmoins perdurer.
Pour se conformer à l'objectif visé par la loi, le premier amendement dispose que les hydrocarbures connexes devront « être laissés dans le sous-sol » à deux exceptions près : lorsque leur intégration dans un processus industriel est indispensable à la valorisation des substances sur lesquelles porte la concession ou répond à des impératifs de sécurité ; dans tous les cas, leur valorisation éventuelle ne pourra être que strictement locale , sans injection dans un réseau de transport ou liquéfaction, ce qui en interdit la commercialisation.
Le second amendement prévoit la possibilité, pour ces hydrocarbures connexes, de convertir une concession d'hydrocarbures en concession d'une autre matière non hydrocarbure à la double condition que son titulaire démontre, d'une part, démontre la connexité des deux ressources et, d'autre part, la rentabilité économique de la poursuite de l'activité.
- un amendement du rapporteur prévoyant la possibilité pour l'administration d'imposer , « si la protection de l'environnement, de la sécurité et de la santé publiques ou d'autres usages existants ou planifiés du sol ou du sous-sol », le respect d'un cahier des charges lors de la délivrance, l'extension ou la prolongation d'un titre d'exploration ou d'exploitation. Selon son auteur, « il s'agit [par ce biais] de renforcer l'encadrement des activités d'exploration et d'exploitation autorisées après l'entrée en vigueur de la loi et de limiter au maximum leur impact sur l'environnement local » ; l'on peut toutefois s'interroger sur l'utilité d'une telle procédure , dès lors que les intérêts visés sont déjà protégés par le code minier, en particulier par la police des mines, et sur la complexification administrative qui pourrait en résulter ;
- enfin, un amendement du rapporteur disposant qu'outre les dispositions du code minier qui leur sont applicables - et celles du code de l'environnement relatives à la participation du public ajoutées en commission -, les titres miniers restent régis par la loi du 13 juillet 2011 ; là aussi, l'intérêt d'un tel ajout peut être questionné, comme du reste l'avis de sagesse donné par le Gouvernement en séance y invite.
Le tableau ci-après présente les effets du projet de loi, tel qu'adopté à l'Assemblée nationale, sur les demandes de titres et sur les titres miniers en cours de validité.
IV. La position de votre commission
Votre rapporteur ne partage pas la logique défendue par le Gouvernement, qui préfère le symbole à la réalité .
En dépit des inconvénients majeurs qu'elle comporte en termes économiques, industriels et sociaux 24 ( * ) , une telle logique d'interdiction à l'échelle nationale aurait pu se justifier si, d'une part, un effet d'entraînement sur les autres pays pouvait raisonnablement en être attendu et, d'autre part, si elle permettait véritablement de lutter contre le réchauffement climatique.
Depuis la présentation du texte, le Gouvernement insiste sur la portée éminemment symbolique du texte et le caractère pionnier de la démarche : il s'agit de « témoigner de l'exemplarité de la France » et d'« être à l'avant-garde de la lutte contre le dérèglement climatique » 25 ( * ) . L'on peut cependant douter qu'à l'aune de l'exemple français, les grands pays producteurs d'hydrocarbures renonceront à leur rente pétrolière .
Par ailleurs, en remplaçant une production nationale , certes limitée, par des hydrocarbures importés par voie terrestre ou maritime et produits, le cas échéant, en usant de techniques moins respectueuses de l'environnement, on dégrade notre bilan carbone plutôt qu'on ne l'améliore . Sur la base du mix importé actuel, les industriels estiment que l'empreinte carbone du pétrole importé serait au moins trois fois supérieure à celle du pétrole produit localement 26 ( * ) .
Le Gouvernement objecte qu' à raison de la baisse espérée de la consommation , qui s'est en réalité stabilisée ces dernières années et pourrait repartir avec la reprise économique, une telle substitution n'aura pas lieu puisque le 1 % de la consommation couvert par la production nationale aura disparu. Or, sauf à supposer une consommation nulle, il restera toujours une part de la consommation que l'on aurait pu satisfaire par la production nationale .
Prenant acte des rapports de force politiques, votre commission a cependant choisi d' amender le projet de loi plutôt que de s'y opposer frontalement , afin que tout ou partie des apports du Sénat puissent être conservés dans le texte final.
Ce faisant, elle a cherché à trouver un équilibre entre la ligne du Gouvernement et des mesures visant à préserver , autant que possible, les droits acquis des industriels, à améliorer la connaissance de notre sous-sol et à valoriser des hydrocarbures uniquement lorsqu'ils contribuent à un usage vertueux de nos ressources ou n'émettent pas de gaz à effet de serre .
En conséquence, votre commission a adopté, outre les amendements rédactionnels ou de précision de votre rapporteur COM-57 et COM-60 :
- un amendement COM-54 de votre rapporteur créant une dérogation pérenne pour les hydrocarbures liquides ou gazeux destinés à un usage non énergétique , définis comme « les hydrocarbures entrant dans la fabrication ou dans la composition de produits ou substances à finalité non énergétique ». Cette dérogation est justifiée par le fait que l'utilisation finale du produit n'émet pas de gaz à effet de serre , puisqu'il n'y a pas de combustion, et que la valorisation de ces substances alimentera des filières existantes (pétrochimie, cosmétique, etc.) en circuit court, voire créera à terme de nouveaux débouchés ; d'ores et déjà, la pétrochimie consomme , en France métropolitaine, environ 11 % de l'ensemble des produits pétroliers en tant que matière première 27 ( * ) ;
- deux amendements identiques COM-55 et COM-90 , présentés respectivement par votre rapporteur et par le rapporteur de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, prévoyant une dérogation pérenne pour la recherche réalisée sous contrôle public à seules fins de connaissance géologique du sous-sol, de surveillance ou de prévention des risques miniers ; cette recherche ne pourra donner lieu, ni à l'attribution d'une concession en application du droit de suite, puisque son objet n'est pas d'exploiter les ressources, ni bien entendu à l'utilisation des techniques dites « non conventionnelles » interdites par la loi du 13 juillet 2011 et par la présente loi ; il apparaît en effet essentiel de ne pas renoncer à l'acquisition de connaissances qui pourraient contribuer au développement de filières d'avenir (hydrogéologie, géothermie, stockage géologique du CO 2 , de l'hydrogène, etc.) et accompagner la transition vers un nouveau modèle énergétique - par exemple pour répondre à la problématique du stockage de l'électricité renouvelable intermittente ;
- un amendement COM-56 de votre rapporteur procédant à trois ajustements rédactionnels pour élargir les possibilités de conversion à l'exploitation de gîtes géothermiques ;
- un amendement COM-58 de votre rapporteur qui permet, en lien avec le précédent, d' inclure la géothermie et, surtout, a pour effet de rendre pleinement opérationnelle la dérogation introduite à l'Assemblée pour les hydrocarbures connexes ; en l'état, ces dispositions, « taillées sur mesure » pour le gisement de Lacq, ne couvrent pas tous les cas où la valorisation d'hydrocarbures liquides ou gazeux connexes contribue à des usages vertueux de nos ressources , en rentabilisant, par exemple, des activités de production de géothermie ou de production de chaleur 28 ( * ) . Sans la valorisation des substances extraites , qui sont « indissociables de l'exploitation du gîte », ces activités devraient cesser faute de modèle économique et de tels projets ne pourraient être développés à l'avenir alors qu'ils participent d'un processus vertueux de valorisation énergétique locale en circuit court ;
- un amendement COM-59 de votre rapporteur remplaçant la notion de « substance non énergétique », qui n'est pas définie dans le code minier, par celle de « substance non mentionnée au premier alinéa de l'article L. 111-6 », soit une substance autre que le charbon et les hydrocarbures liquides ou gazeux :
- un amendement COM-46 de M. Poniatowski et plusieurs de ses collègues, que votre commission a adopté avec modification pour ne retenir que la proposition de ramener de cinq ans à deux ans avant l'échéance du titre le délai jusqu'auquel le titulaire peut demander la conversion de sa concession ;
- un amendement COM-61 de votre rapporteur supprimant le cahier des charges introduit à l'Assemblée nationale au motif que cette notion nouvelle n'a fait l'objet d' aucune concertation et que ses contours comme ses effets sur la délivrance des titres n'ont pas été explicités ; du reste, si la notion devait perdurer, elle ne pourrait trouver à s'appliquer qu'aux seuls hydrocarbures et devrait être examinée dans le cadre de la future réforme du code minier ;
- un amendement COM-62 de votre rapporteur supprimant l'alinéa rappelant les dispositions du code minier, du code de l'environnement et de la loi du 13 juillet 2011 qui demeurent applicables aux titres miniers portant sur des hydrocarbures ; rappeler dans la loi que le droit en vigueur continuera de s'appliquer , ce qu'il fait sauf dispositions expresses contraires, n'apporte rien, voire même pourrait s'avérer contre-productif si la liste ainsi fixée n'est pas exhaustive : un doute pourrait alors naître sur l'application de dispositions non citées bien qu'applicables ;
- un amendement COM-63 de votre rapporteur qui a trois objets :
• par souci de clarté,
l'encadrement du droit de suite
introduit à l'article
1
er
bis
par l'Assemblée
est
réintégré
à l'article
1
er
;
• il est précisé explicitement que
cet encadrement du droit de suite
ne s'applique qu'aux concessions
attribuées à compter de la promulgation de la loi
,
conformément à l'objet de l'amendement du Gouvernement à
l'origine de cette disposition qui ne visait que les
«
nouvelles concessions
» ;
• enfin,
la notion
d'«
équilibre économique
»
,
qui reviendrait à priver le titulaire de toute espérance
de profit
et qui ouvrirait un droit à indemnisation, est
remplacée par la notion de «
rémunération
normale des capitaux immobilisés
» ; cette notion de
«
rémunération normale
» est
parfaitement connue en droit et utilisée
, pour ne s'en
tenir qu'au code de l'énergie, dans le calcul des tarifs
réglementés de vente d'électricité
29
(
*
)
, des tarifs d'utilisation des
réseaux publics d'électricité et de gaz
30
(
*
)
, des tarifs d'achat du
biométhane
31
(
*
)
ou
encore pour dimensionner les appels d'offres à l'effacement
électrique
32
(
*
)
; elle est d'ailleurs
conforme à
l'amendement initial du Gouvernement
qui avait lui retenu la notion de
«
rentabilité normale
».
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié. |
Article 1er bis (Art. L. 111-10 [nouveau] du code minier) - Encadrement du droit de suite
Objet : cet article limite au 1 er janvier 2040 la durée des concessions attribuées à compter de la promulgation de la loi en application du droit de suite prévu à l'article L. 132-6 du code minier, à l'exception de celles pour lesquels le titulaire démontre que cette durée doit être prolongée pour atteindre l'équilibre économique de l'exploitation.
I. Le droit en vigueur
Le droit de suite accordé au titulaire d'un permis exclusif de recherche est défini en ces termes à l'article L. 132-6 du code minier : « sans préjudice des dispositions de l'article L. 142-4 33 ( * ) , pendant la durée de validité d'un permis exclusif de recherches, son titulaire peut seul obtenir une concession portant, à l'intérieur du périmètre de ce permis, sur des substances mentionnées par celui-ci. Le titulaire d'un permis exclusif de recherches a droit , s'il en fait la demande avant l'expiration de ce permis, à l'octroi de concessions sur les gisements exploitables découverts à l'intérieur du périmètre de ce permis pendant la validité de celui-ci ».
Ainsi, non seulement le titulaire d'un permis est-il le seul à pouvoir obtenir une concession dans le périmètre et pour les substances visées par le permis, mais cette obtention est-elle de droit , comme le Conseil d'État l'a confirmé dans son avis sur le projet en rangeant, parmi « les situations légalement acquises des titulaires d'un permis exclusif de [recherches] », les droits à la prolongation du permis prévus aux articles L. 142-1 et L. 142-2 et le droit de suite visé à l'article L. 132-6.
Le Gouvernement s'était du reste rangé à cette interprétation en ne limitant pas, dans le texte déposé à l'Assemblée nationale, la durée initiale des concessions obtenues dans le cadre du droit de suite d'un permis exclusif de recherches attribué antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi.
II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale
En commission , les députés ont souhaité encadrer le droit de suite en adoptant un amendement du rapporteur, sous-amendé par le groupe La France insoumise, qui prévoit de limiter au 1 er janvier 2040 l'échéance d'une concession nouvelle attribuée en application du droit de suite .
Lors de l'examen de cet amendement en commission, le ministre avait indiqué n'être « pas totalement rassuré en matière de conformité à la Constitution » et ne pas vouloir « avoir à payer des indemnités », tout en se disant convaincu de pouvoir trouver d'ici à la séance publique « une formulation qui permettra d'afficher l'échéance de 2040 en minimisant les risques ».
En séance , le Gouvernement a donc proposé une nouvelle rédaction qui reprend le principe adopté en commission mais prévoit une exception :
- le principe : la date butoir du 1 er janvier 2040 est maintenue pour les concessions attribuées en application du droit de suite ;
- l'exception : cette date peut être dépassée lorsque le titulaire du permis « démontre à l'autorité administrative qu'une telle limitation ne permet pas de couvrir ses coûts de recherche et d'exploitation avec une rentabilité normale par l'exploitation du gisement » ; elle est alors fixée par l'administration comme la durée minimale permettant de couvrir ces coûts avec une rentabilité normale, dans la limite de la durée maximale de cinquante ans fixée à l'article L. 132-11.
Comme indiqué par le ministre en séance, « en prévoyant que toute concession d'hydrocarbures, même une première concession, normalement délivrée pour une pour une période de vingt-cinq à cinquante ans, devrait prendre fin au plus tard en 2040 », la rédaction adoptée en commission, « comme l'avait souligné le Conseil d'État, (...) pose un problème juridique . Le risque est double . Tout d'abord, la rigidité de l'article 1 er bis peut permettre à des industriels d'attaquer le texte devant le Conseil constitutionnel en arguant qu'il serait susceptible de les priver d'un droit acquis . Par ailleurs, ces industriels pourraient demander d'immenses compensations ».
Afin de « renforcer la sécurité juridique de cette mesure et de protéger l'État contre le risque de devoir payer des compensations », le Gouvernement prévoit donc « une fin des concessions en 2040, sauf dans un seul cas très précis, si l'industriel peut prouver qu'une durée d'exploitation raccourcie ne permet pas de couvrir les frais engagés . Dès que la rentabilité sera atteinte, le titulaire du permis sera contraint de laisser les hydrocarbures restants, quels qu'ils soient, dans le gisement du sous-sol. Le reste du gisement ne pourra en aucun cas être exploité. En outre, ce sera à l'industriel de prouver qu'il a tout fait pour assurer la rentabilité de ses investissements avant 2040 ».
Deux sous-amendements adoptés , présentés par Mme Batho, d'une part, M. Orphelin, Mme Tiegna et M. Djebbari, d'autre part, ont cependant modifié l'équilibre de l'amendement du Gouvernement .
Le premier remplace la notion de « rentabilité normale » , jugée « sujette à trop d'interprétations », par celle d'« équilibre économique » . Ce faisant, le titulaire n'aurait en l'état plus aucune espérance de profit et, partant, plus d'autre intérêt à l'obtention d'une concession que la seule couverture de ses coûts de recherche, déjà engagés, et de ses coûts d'exploitation, à venir. Il serait par ailleurs toujours en droit d'exiger une indemnisation pour la perte des profits auxquels il aurait pu prétendre sans la limitation prévue au présent article.
En outre, la notion de « rémunération normale » des capitaux investis est parfaitement connue en droit et utilisée, pour ne s'en tenir qu'au code de l'énergie, dans le calcul des tarifs réglementés de vente d'électricité 34 ( * ) , des tarifs d'utilisation des réseaux publics d'électricité et de gaz 35 ( * ) , des tarifs d'achat du biométhane 36 ( * ) ou encore pour dimensionner les appels d'offres à l'effacement électrique 37 ( * ) .
Le second sous-amendement supprime également, dans la seconde phrase de l'amendement gouvernemental, la référence à la « rentabilité normale » et renvoie les modalités de prise en compte des coûts au décret en Conseil d'État attribuant une concession en vertu de l'article L. 132-2 du code minier.
Enfin, en l'état, la rédaction retenue ne vise plus les seules concessions attribuées en application du droit de suite à compter de la promulgation de la présente loi et trouverait donc à s'appliquer aussi à toutes les concessions accordées antérieurement .
III. La position de votre commission
Par cohérence avec l'amendement COM-63 qui a réintégré les dispositions de l'article 1 er bis au sein de l'article 1 er , votre commission a adopté un amendement COM-64 de votre rapporteur qui supprime cet article, de même que les deux amendements COM-2 de M. Adnot et COM-30 de M. Gay et plusieurs de ses collègues, qui ont le même effet mais des motivations différentes.
Votre commission a supprimé cet article. |
Article 2 - Application de l'article 1er aux demandes de titres nouvelles ou en cours d'instruction
Objet : cet article précise que l'article 1 er organisant la sortie progressive de la recherche et de l'exploitation des hydrocarbures s'applique à toute demande nouvelle ou en cours d'instruction d'octroi ou de prolongation de permis ou de concession sous réserve de décisions de justice devenues définitives.
I. Le texte du projet de loi
L'article 2 complète le dispositif de l'article 1 er en précisant son champ d'application dans le temps : ses dispositions sont ainsi applicables à « toute demande nouvelle d'octroi initial ou de prolongation » d'un titre d'exploration ou d'exploitation d'hydrocarbures « ainsi qu'aux demandes en cours d'instruction », et « sous réserve des décisions juridictionnelles passées en force de chose jugée » qui enjoindraient à l'administration de délivrer ou de prolonger un titre.
Sont considérés comme des décisions de justice « passées en force de chose jugée » ou « devenues définitives » les décisions qui ne sont pas ou plus susceptibles de recours ordinaires (notamment d'appel) mais uniquement de recours extraordinaires (tels qu'un pourvu en cassation).
En application de cet article, et hors ces décisions de justice devenues définitives, aucune des demandes en souffrance à la promulgation de la loi ne pourrait donc plus être accordée .
II. Les modifications apportées par l'Assemblée nationale
En commission , les députés ont adopté, outre un amendement rédactionnel du rapporteur :
- deux amendements du rapporteur précisant que les demandes visées sont celles déposées postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi ou en cours d'instruction à cette même date ;
- un amendement du groupe La République en Marche rappelant, comme à l'article 1 er , que ces dispositions s'appliquent « quelle que soit la technique utilisée ».
En séance , aucun amendement n'a été adopté.
III. La position de votre commission
En septembre 2017, 73 demandes de titres d'exploration 38 ( * ) et 14 demandes de titres d'exploitation 39 ( * ) étaient en cours d'instruction, dont les plus anciennes remontent à 2009 .
En vertu du présent article, la loi s'appliquerait donc, non seulement aux demandes déposées après son entrée en vigueur, mais aussi rétroactivement à ces demandes en cours d'instruction , sachant qu' aucune décision de justice devenue définitive n'a été prononcée.
En pratique , comme présenté à l'article 1 er dans le tableau sur les effets du texte, ne pourraient plus être accordées , parmi ces demandes :
- 42 demandes d'octroi initial d'un permis exclusif de recherches ;
- 3 demandes d'octroi initial de concession qui ne relèvent pas du droit de suite 40 ( * ) .
Or, comme le ministre l'a admis lui-même lors de son audition par votre commission en indiquant que l'État « ne disposait pas d'un droit qui permettait de refuser des permis », ces demandes auraient dû être accordées sous l'empire du droit antérieur , dès lors que les conditions fixées par le code minier étaient remplies.
L'application rétroactive de la loi aurait encore pour effet de n'autoriser :
- l'octroi initial des 5 concessions relevant du droit de suite que pour une durée n'excédant pas le 1 er janvier 2040 , sauf démonstration par le titulaire que l'équilibre économique de son activité exige d'aller au-delà ;
- les 6 demandes de prolongation d'une concession existante que pour une durée n'excédant pas le 1 er janvier 2040 .
De tels effets rétroactifs pourraient être jugés contraires aux principes constitutionnels de garantie des droits, tels qu'ils s'étendent aux effets légitimement attendus, ainsi qu'à ceux du droit de l'Union européenne en matière de sécurité juridique et de confiance légitime.
Du reste, à raison de ce que le Conseil d'État qualifie de « stock anormalement élevé de demandes (...) encore en souffrance à ce jour », la rétroactivité de ces dispositions reviendrait à pénaliser les demandeurs pour une situation née de l'inaction de l'État au cours des dernières années, l'administration ayant préféré garder le silence pour créer des décisions implicites de rejet, plutôt que de refuser expressément des demandes et d'avoir à les motiver - ce qu'en l'état du droit, elle aurait été bien en peine de faire.
Dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d'État invitait d'ailleurs le Gouvernement à « apurer, dans les meilleurs délais, [ce] stock » et l'incitait « si besoin, à atténuer au cas par cas les effets de l'intervention de la loi nouvelle, [en prévoyant] soit en des mesures transitoires plus substantielles , soit en des possibilités de dérogation pendant la durée qui serait jugée nécessaire ».
A contrario , exclure toute rétroactivité reviendrait à priver d'une trop grande partie de ses effets la cessation décidée par le Gouvernement .
En adoptant l'amendement COM-65 de votre rapporteur, votre commission a donc cherché à trouver un point d'équilibre entre , d'une part, l'exigence de sécurité juridique liée à la préservation des droits acquis et des effets légitimement attendus du droit antérieur et, d'autre part, l'objectif poursuivi par le Gouvernement d'un arrêt de ces activités à l'horizon 2040.
Pour ce faire, et comme le suggérait le Conseil d'État, elle a donc retenu les « mesures transitoires plus substantielles » suivantes :
- seules les demandes déposées au plus tard le 6 juillet 2017 , soit la date d'adoption du plan Climat, seraient concernées ; la date retenue, correspondant à l'annonce des intentions du Gouvernement, éviterait l'effet d'aubaine consistant à déposer des demandes avant la promulgation de la loi ;
- en revanche, l'encadrement du droit de suite , en vertu duquel la durée d'une concession ne pourrait permettre de dépasser le 1 er janvier 2040 sauf si la rentabilité de l'opération nécessite d'aller au-delà, serait applicable y compris aux demandes en cours d'instruction .
L'horizon de 2040 visé par le Gouvernement serait ainsi préservé, y compris pour les demandes en cours, tout en protégeant au mieux les droits acquis et les effets légitimement attendus de ces demandes .
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié. |
Article 2 bis (Art. L. 132-12-1 [nouveau] du code minier) - Remise par l'exploitant d'un dossier sur le potentiel de reconversion des installations ou du site
Objet : cet article, introduit à l'Assemblée nationale, prévoit la remise par l'exploitant, cinq ans avant la fin de sa concession, d'un dossier présentant le potentiel de reconversion de ses installations ou de leur site d'implantation pour d'autres usages du sous-sol ou activités.
I. Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Introduits en séance par deux amendements identiques présentés par le groupe Mouvement Démocrate et apparentés, d'une part, M. Pancher et Mme Auconie, d'autre part, cet article vise à anticiper la reconversion des installations et des sites qui seront affectés par l'interdiction de l'exploitation des hydrocarbures.
Il prévoit pour ce faire la remise par l'exploitant à l'autorité administrative, cinq ans avant la fin de sa concession et selon des modalités à préciser par un décret en Conseil d'État, d' un dossier « présentant le potentiel de reconversion de ses installations ou de leur site d'implantation pour d'autres usages du sous-sol , notamment la géothermie, ou pour d'autres activités économiques , en particulier l'implantation d'énergies renouvelables ».
Il est vrai que les ouvrages existants, de même que les technologies déployées et les savoir-faire mobilisés , pourraient opportunément être « recyclés » pour de nouvelles activités plus ou moins connexes telles que la géothermie mais aussi le stockage de chaleur, voire d'hydrogène , en diminuant d'autant les coûts d'entrée.
II. La position de votre commission
Votre rapporteur approuve le principe de ce rapport qui pourrait permettre d'anticiper, cinq ans avant l'échéance de la concession, la phase de reconversion des installations ou du site.
Elle s'interroge cependant sur la capacité de l'exploitant à y répondre dès lors qu'une évaluation complète du potentiel de reconversion impliquerait de faire appel à des corps de métiers et des moyens dont il ne dispose pas nécessairement et qui pourraient bien au-delà de son champ d'activités .
À cet égard, le décret d'application de ces dispositions pourrait être l'occasion de préciser dans quelles mesures l'expertise d'opérateurs publics - tels que le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), IFP Énergies nouvelles (IFPEN) ou l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) - pourrait être mobilisée .
Votre commission a adopté cet article sans modification. |
Article 2 ter A (nouveau) (Art. L. 142-6 du code minier) - Prise d'effet de la prolongation d'un permis exclusif de recherches
Objet : cet article, introduit par votre commission, dispose que lorsque, dans l'attente d'une prolongation de son titre, le titulaire d'un permis exclusif de recherches ne poursuit pas ses travaux, la durée de cette prolongation est calculée à compter de l'entrée en vigueur de la décision de prolongation.
La prolongation d'un permis exclusif de recherches prend aujourd'hui effet à la date d'expiration de la précédente période de validité .
Compte tenu des retards significatifs dans l'instruction et l'octroi des prolongations de permis constatés ces dernières années, cette règle a souvent eu pour conséquence l'intervention de la décision d'octroi de la prolongation plusieurs années après la date d'expiration de la précédente période de validité du permis, et peu de temps avant l'expiration de la prolongation octroyée .
Les titulaires des permis qui ne pouvaient pas, dans cette situation de rejet implicite de leur demande de prolongation, solliciter des autorisations pour de nouveaux travaux, ou qui ne souhaitaient plus continuer les travaux compte tenu de l'incertitude pesant sur le sort de leur demande, se trouvaient ainsi dans l'impossibilité de remplir leurs programmes de travaux et leurs engagements financiers pendant les quelques mois de validité restants. Les prolongations octroyées dans ces conditions ont ainsi été le plus souvent dénuées de tout intérêt.
Le nouvel article L. 111-8 du code minier autorisant la prolongation des permis exclusifs de recherches lorsqu'elle répond aux conditions posées aux articles L. 142-1 et L. 142-2, la situation des demandes de prolongation en détresse depuis plusieurs années devrait être clarifiée et les prolongations devraient être octroyées lorsqu'elles sont de droit ou se justifient par des circonstances exceptionnelles.
Il est dès lors légitime de prévoir que, lors de l'octroi de ces prolongations pour lesquelles des demandes ont été déposées il y a plusieurs années, leur durée sera calculée à compter de l'entrée en vigueur de la décision de prolongation .
Tel est le sens de cet article introduit par un amendement COM-66 de votre rapporteur, qui réserve toutefois le cas des permis pour lesquels , mettant en oeuvre la faculté prévue par l'actuel article L. 142-6 du code minier, le titulaire du permis a réalisé des travaux de recherches avant l'intervention de la décision lui octroyant la prolongation. Dans ce cas, la durée de la prolongation restera calculée à partir de la fin de la précédente période de validité du permis.
Votre commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé. |
Article 2 ter (Art. L. 163-11 et art. L. 163-11-1 [nouveau] du code minier) - Possibilité de conversion ou de cession des ouvrages pour d'autres usages du sous-sol
Objet : cet article, introduit à l'Assemblée nationale, permet la conversion ou la cession des installations de recherche ou d'exploitation en vue de leur utilisation pour d'autres usages du sous-sol.
I. Le droit en vigueur
Le chapitre III (« Arrêt de travaux ») du titre IV (« Travaux miniers ») du livre I er (« Le régime légal des mines ») du code minier fixe les règles applicables en matière d' arrêt de travaux miniers .
Son article L. 163-11 dispose en particulier que « l'explorateur ou l'exploitant est tenu de remettre aux collectivités intéressées ou aux établissements publics de coopération intercommunale compétents les installations hydrauliques que ces personnes publiques estiment nécessaires ou utiles à l'assainissement, à la distribution de l'eau ou à la maîtrise des eaux pluviales, de ruissellement et souterraines . Les droits et obligations afférents à ces installations sont transférés avec elles ». Il en de même, à la demande des mêmes personnes, pour les installations hydrauliques nécessaires à la sécurité , le transfert étant alors « assorti du versement par l'exploitant d'une somme correspondant au coût estimé des dix premières années de fonctionnement de ces installations ».
II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Introduit en séance par un amendement de M. Pancher et plusieurs de ses collègues sous-amendé par le rapporteur et par M. Orphelin et plusieurs de ses collègues, cet article complète l'article L. 163-11 pour faciliter la reconversion des installations , en lien avec l'article 2 bis ( cf . supra ).
Il prévoit qu'« en vue de leur utilisation pour d'autres usages du sous-sol , les installations d'exploration ou d'exploitation peuvent être converties ou cédées (...) à d'autres personnes publiques ou privées, sous réserve de l'exécution de la procédure d'arrêt de travaux pour toutes les installations non nécessaires aux nouveaux usages projetés ».
III. La position de votre commission
Votre commission a cherché à rendre ces dispositions plus opérationnelles . En l'état, la rédaction retenue n'apporterait en effet rien au droit en vigueur , qui n'interdit pas de procéder à des cessions d'ouvrages miniers, ni ne faciliterait la reconversion des sites dès lors qu'aucune conséquence pratique, par exemple en termes de simplification des procédures administratives n'est prévue.
Outre un amendement de précision COM-69 de votre rapporteur, votre commission a donc adopté :
- un amendement COM-67 de votre rapporteur prévoyant l'intervention d'un décret d'application , que le Gouvernement dit du reste avoir déjà prévu, pour préciser et, le cas échéant, simplifier les modalités d'une telle reconversion ;
- un amendement COM-68 prévoyant la possibilité de transférer à l'État, à l'entière discrétion de ce dernier, tout ou partie des droits et obligations liés à l'activité minière passée, pour faciliter et accompagner la réalisation des nouveaux projets.
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié. |
Article 3 (Loi n° 2011-835 du 13 juillet 2011) - Interdiction de la recherche et de l'exploitation des hydrocarbures dits « non conventionnels »
Objet : cet article interdit, outre la fracturation hydraulique déjà prohibée par la loi du 13 juillet 2011, « l'emploi de toute autre méthode ayant pour but de conférer à la roche une perméabilité ». Il abroge les dispositions de la loi de 2011 relatives aux possibilités de recherche à titre expérimental sur les hydrocarbures dits « non conventionnels » et à la Commission nationale d'orientation chargée d'émettre un avis sur ces expérimentations.
I. Le droit en vigueur 41 ( * )
En interdisant le seul procédé industriel qui permette aujourd'hui d'exploiter le pétrole et le gaz de schiste - c'est-à-dire la fracturation hydraulique de la roche - et en abrogeant les permis exclusifs de recherche qui y recourraient, l'article 1 er de la loi dite « Jacob » du 13 juillet 2011 42 ( * ) n'autorise d'ores et déjà plus, de fait, la recherche et l'exploitation des hydrocarbures dits « non conventionnels » sur le territoire national . Au surplus, comme souligné par le Conseil d'État et par le ministre lui-même, si d'autres techniques présentant un danger pour l'environnement devaient apparaître , les pouvoirs dont dispose l'État dans le cadre de la police des mines lui permettraient d'en proscrire immédiatement l'utilisation .
La loi de 2011 n'écartait cependant pas la recherche de « techniques alternatives » qui ne présenteraient pas les mêmes dangers environnementaux ni la réalisation d'« expérimentations (...) à seules fins de recherche scientifique sous contrôle public », qu'une commission nationale (art. 2) devait évaluer sur la base de rapports remis chaque année par le Gouvernement au Parlement (art. 4). En pratique, cette commission n'a jamais été constituée, ni aucun des rapports déposés.
L'encadrement juridique actuel des hydrocarbures non conventionnels consiste donc en une interdiction de fait de toute exploration ou production assortie d'une possibilité théorique d'expérimentation, non effective en pratique .
Enfin, on rappellera que la distinction entre hydrocarbures dits conventionnels et non conventionnels ne repose pas sur une différence de nature - les molécules des uns et des autres sont rigoureusement identiques - mais uniquement sur les « conditions d'accumulation de [ces hydrocarbures] dans le sous-sol et [, partant, sur les] types de technologies à mettre en oeuvre pour [les] en extraire » 43 ( * ) .
II. Le texte du projet de loi
En complément de l'interdiction de recherche et d'exploration fixée à l'article 1 er , qui vaut pour tous les hydrocarbures, conventionnels ou non conventionnels - même si, on l'a vu, pour ces derniers, l'interdiction existait déjà de fait -, le Gouvernement a souhaité interdire également toute possibilité d'expérimentation en matière d'hydrocarbures non conventionnels .
Le présent article entend sans doute mettre en oeuvre cette interdiction en abrogeant les articles 2 et 4 de la loi du 13 juillet 2011 relatifs respectivement à la Commission nationale d'orientation, de suivi et d'évaluation, et aux rapports annuels attendus du Gouvernement.
On observera cependant que l'interdiction générale posée à l'article 1 er , combinée au droit en vigueur, suffirait par elle-même à atteindre un tel objectif puisqu'on voit mal l'intérêt qu'il y aurait à expérimenter sans aucune perspective d'exploitation, vidant de fait les articles 2 et 4 de la loi de 2011 de leur objet. Aussi le présent article procède-t-il au mieux au toilettage de dispositions devenues sans objet .
III. Les modifications apportées par l'Assemblée nationale
En commission , les députés ont souhaité étendre, par un amendement du rapporteur sous-amendé par Mme Batho, l'interdiction de l'exploration et de l'exploitation des hydrocarbures non conventionnels en interdisant le recours, non plus seulement à la fracturation hydraulique, mais à « toute autre méthode non conventionnelle » , auquel il est désormais fait référence dans l'intitulé de la loi de 2011.
Ces autres méthodes dites « non conventionnelles » sont ensuite détaillées à l'article 1 er de ladite loi qui interdit, outre la fracturation hydraulique, la « stimulation de la roche ou (...) l'emploi de toute autre méthode ayant pour but de modifier notablement la perméabilité de la roche ou du réservoir de manière irréversible ».
Dans son rapport, la commission du développement durable précise que « comme le rappelle le rapport de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques du 27 novembre 2013 44 ( * ) , des méthodes de stimulation de la roche par des procédés physiques autres que la fracturation hydraulique comme la fracturation par arc électrique, la fracturation par effet thermique ou la fracturation pneumatique sont susceptibles d'être développées. Par ailleurs, la stimulation de la roche pourrait aussi être réalisée grâce à l'emploi de gaz liquéfiés ou gélifiés (hélium, CO 2 , azote, propane) et non d'eau. Certaines de ces techniques sont d'ailleurs déjà utilisées aux États-Unis ».
En séance , les députés ont adopté :
- un amendement du Gouvernement visant, selon son exposé des motifs, à « mieux décrire les techniques qui sont utilisées pour explorer et exploiter les hydrocarbures non conventionnels, qui sont piégés dans des roches non perméables et nécessitent la mise en oeuvre d'une technique pour créer la perméabilité de la roche » ; est ainsi désormais interdit, outre la fracturation hydraulique, « l'emploi de toute autre méthode ayant pour but de conférer à la roche une perméabilité » ;
- un amendement de Mme Batho et plusieurs de ses collègues, sous-amendé par le rapporteur, prévoyant la remise , au moment du dépôt d'une demande de titre minier, d'un rapport démontrant l'absence de recours aux techniques interdites à l'article 1 er de la loi de 2011 tel qu'amendé ci-avant ; à défaut de remise ou en l'absence d'une telle démonstration, le titre ne serait pas délivré ;
- deux amendements identiques de MM. Saulignac, Bouillon et Garot, d'une part, et Mme Batho et plusieurs de ses collègues, d'autre part, ajoutant à la liste fixée par l'article L. 173-5 du code minier des cas dans lesquels le titulaire d'un titre minier peut se le voir retirer par l'État, l'inobservation des dispositions de l'article 1 er de la loi de 2011 ; tout en s'y disant favorable, le ministre a fait valoir en séance que « cet ajout n'est pas indispensable, dans la mesure où le titre minier peut déjà, en théorie, être retiré au titre de l'article L. 173-5 du code minier si le titulaire ne respecte pas la loi de 2011 ou toute autre prescription à caractère environnemental » ;
- un amendement du rapporteur complétant l'article L. 512-1 du code minier pour punir le non-respect des dispositions de l'article 1 er de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende . On rappellera que la loi de 2011 prévoyait déjà que « le fait de procéder à un forage suivi de fracturation hydraulique de la roche sans l'avoir déclaré (...) est puni d'un an d'emprisonnement et de 75 000 € d'amende ».
IV. La position de votre commission
Votre rapporteur prend acte de ces dispositions . Elle observe toutefois que :
- l'exactitude scientifique de la définition retenue in fine pour distinguer les techniques dites « conventionnelles » des techniques « non conventionnelles » n'est pas certaine - toute roche étant, par exemple, perméable à des degrés divers ; mais à défaut de consensus sur le sujet, sans doute est-ce là la moins mauvaise des formulations ;
- l'articulation des nouvelles sanctions créées par le présent article avec les sanctions déjà prévues dans la loi de 2011 n'est pas évidente ;
- surtout, ces dispositions n'auront aucun effet pratique pour les raisons déjà exposées - la fracturation hydraulique est déjà interdite et le droit en vigueur permettrait déjà de proscrire l'emploi d'autres techniques présentant un danger pour l'environnement si elles advenaient ; de telles précisions pourraient dès lors s'avérer contre-productives , en laissant à penser à nos concitoyens, non seulement que ces techniques alternatives existent, mais aussi que les exploitants actuels seraient tentés de les utiliser, jetant à nouveau la suspicion sur le secteur de façon injustifiée .
Ne souhaitant cependant pas rouvrir le débat sur ce sujet sensible, votre rapporteur a seulement proposé à votre commission, qui l'a adopté, un amendement de clarification COM-70 qui codifie les dispositions de la loi de 2011 telle que modifiée par le présent article, sans rien retrancher ni modifier . En l'état, la loi de 2011 a en effet vu certaines de ses dispositions abrogées ou modifiées, et jusqu'à son intitulé même.
Votre commission a aussi adopté avec modification un amendement de précision COM-35 de M. Raynal qui précise que l'administration rend public le rapport démontrant l'absence de recours aux techniques interdites « avant le démarrage de l'exploration ou de l'exploitation ».
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié. |
Article 3 bis - Rapport sur l'accompagnement des entreprises et des personnels et sur la reconversion des territoires
Objet : cet article, introduit à l'Assemblée nationale, prévoit la remise au Parlement, dans l'année suivant la promulgation de la loi, d'un rapport du Gouvernement portant sur l'accompagnement des entreprises et des personnels impactés par la fin progressive et sur la reconversion des territoires.
I. Le texte adopté par l'Assemblée nationale
En commission , les députés ont adopté un amendement du groupe La République en Marche qui prévoit la remise au Parlement, dans l'année suivant la promulgation de la loi, d'un rapport du Gouvernement portant sur « l'accompagnement des territoires impactés par l'interdiction d'exploration et d'exploitation des hydrocarbures après 2040 ».
En séance , deux amendements identiques des groupes Mouvement Démocrate et apparentés et La République en Marche, sous-amendés par Mme Batho et plusieurs de ses collègues ainsi que par le rapporteur, en ont affiné le contenu : le rapport devra désormais porter, d'une part, sur l'accompagnement des entreprises et des personnels impactés et, d'autre part, sur la reconversion des territoires .
Sur le premier aspect, il est demandé que soient présentées « les mesures envisagées pour anticiper les mutations professionnelles et technologiques et pour favoriser le développement d'une économie de substitution oeuvrant à la transition énergétique ». Quant au second, le rapport devra « détailler les dispositifs mis en place tant sur le plan économique et fiscal que sur le plan environnemental, lesquels peuvent notamment appuyer le développement des énergies renouvelable s ».
II. La position de votre commission
Votre commission est toujours réticente à l'ajout de demandes de rapports dans la loi, dont on sait que la plupart ne sont jamais déposés. Le présent article a cependant le mérite de souligner l'un des « angles morts » du projet de loi, soit l'absence de dispositif opérationnel d'accompagnement des salariés, des entreprises et des territoires impactés.
Le Gouvernement s'est engagé, d'une part, « formellement et fermement à ce que ce rapport soit publié dans douze mois, jour pour jour » 45 ( * ) et, d'autre part, à ce que des contrats de transition écologique , dont le contenu « reste à inventer », soient mis en place avec, dès 2018 , « une quinzaine de territoires en expérimentation » 46 ( * ) .
Tout en regrettant que la reconversion soit , pour l'heure, uniquement traitée dans le texte par la promesse d'un rapport , votre rapporteur a proposé à la commission, qui l'a adopté, un amendement COM 71 qui rend obligatoire la concertation avec les parties prenantes sur les deux volets du rapport.
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié. |
Article 3 ter - Rapport sur l'origine et l'impact environnemental des pétroles bruts et des gaz naturels importés en France
Objet : cet article, introduit à l'Assemblée nationale, prévoit la remise au Parlement, avant le 31 décembre 2018, d'un rapport du Gouvernement qui présente l'origine des pétroles bruts et des gaz importés en France, évalue leur impact environnemental et analyse la faisabilité d'une différenciation de ces ressources en fonction de cet impact.
I. Le texte adopté par l'Assemblée nationale
En commission , les députés ont adopté un amendement du groupe La République en Marche demandant la remise au Parlement, avant le 31 décembre 2018, d'un rapport du Gouvernement :
- présentant « l'origine des pétroles bruts dont sont issus les carburants mis à la consommation en France » ;
- évaluant « l'impact environnemental lié à l'extraction et au raffinage de ces pétroles bruts et notamment des pétroles non conventionnels » ;
- et analysant « les méthodes qui permettraient de [les] différencier en fonction de [cet impact] et de leur origine ou du type de ressource ainsi que la faisabilité d'une différenciation des produits finis en fonction de l'origine des pétroles bruts dont ils sont issus », avec pour objectif que la France porte ensuite au niveau européen les propositions qui en résulteraient.
En séance , ce dispositif, rectifié par deux amendements rédactionnels du rapporteur, a été étendu :
- aux gaz naturels par un amendement du groupe La République en Marche ainsi que par un amendement de Mme Batho et plusieurs de ses collègues, sous-amendé par M. Orphelin et plusieurs de ses collègues, qui a ajouté un second paragraphe, superfétatoire car ayant le même objet ;
- à l'ensemble des pétroles bruts et gaz naturels importés , et plus seulement à ceux utilisés pour la fabrication des carburants, par un amendement du rapporteur.
II. La position de votre commission
Comme celui demandé à l'article précédent, ce rapport éclaire un autre « angle mort » du texte , soit le fait de n'agir que sur la production nationale en ignorant l'impact environnemental des hydrocarbures importés.
Or, non seulement cet impact est-il nécessairement plus important que celui de la production nationale , ne serait-ce qu'en raison de l'empreinte carbone du transport par voie terrestre ou maritime, mais encore peut-il être différencié en fonction des techniques d'extraction et des conditions d'exploitation ou de raffinage employées.
Sur la base du mix importé actuel, les industriels estiment que l'empreinte carbone du pétrole importé serait au moins trois fois supérieure à celle du pétrole produit localement 47 ( * ) . Selon certaines études, ce différentiel pourrait même atteindre, au moins en gaz, un facteur 10 48 ( * ) .
Et parmi ces importations, l'impact varie à l'évidence selon que les techniques utilisées sont plus ou moins respectueuses de l'environnement (méthodes d'extraction, efficacité énergétique et hydrique, etc.).
Votre commission a donc adopté un amendement COM-72 de votre rapporteur qui élargit l'objet de ce rapport pour disposer d'une vision globale de l'impact environnemental des hydrocarbures. Il intègre en particulier les pétroles et gaz produits localement , ce qui permettra de comparer leur impact à celui des hydrocarbures importés, de même que les pétroles raffinés . La différenciation est par ailleurs recentrée sur l'impact environnemental des hydrocarbures , qui pourra être analysé en fonction, notamment, de l'origine, du type de ressource et de leurs conditions d'extraction, de raffinage et de transport.
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié. |
Article 3 quater A - Rapport sur les concours de l'État en soutien aux activités de recherche et d'exploitation des hydrocarbures hors du territoire national
Objet : cet article, introduit à l'Assemblée nationale, prévoit la remise au Parlement, dans l'année suivant la promulgation de la loi, d'un rapport du Gouvernement portant sur les concours de l'État en soutien aux activités de recherche et d'exploitation des hydrocarbures hors du territoire national.
I. Le texte adopté par l'Assemblée nationale
En séance , les députés ont adopté un amendement du groupe La République en Marche, sous-amendé par le rapporteur, demandant la remise au Parlement, dans l'année suivant la promulgation de la loi, d'un rapport du Gouvernement « sur les concours de toute nature de l'État en soutien aux activités de recherche et d'exploitation des hydrocarbures hors du territoire national ».
Si son dispositif ne préjuge pas du sort de ces concours, son exposé des motifs précise cependant qu'il s'agit d'« introduire une ambition plus large de l'État en cessant progressivement, d'ici à 2040, d'apporter son concours aux activités industrielles de recherche, d'extraction et d'exploitation des hydrocarbures » hors du territoire national.
II. La position de votre commission
Au vu des incertitudes sur la nature des concours visés et de la très faible portée opérationnelle de ces dispositions, votre commission a adopté deux amendements COM-73 de votre rapporteur et COM-7 de M. Adnot pour supprimer cet article .
Votre commission a supprimé cet article. |
Article 3 quater - Mise en ligne des demandes de titres d'exploration et d'exploitation d'hydrocarbures et des titres en cours de validité
Objet : cet article, introduit à l'Assemblée nationale, prévoit la mise en ligne en « open data », dans le mois suivant la promulgation de la loi et dans un format ouvert, de l'ensemble des demandes de titres d'exploration et d'exploitation des hydrocarbures en cours d'instruction et des titres en cours de validité.
I. Le texte adopté par l'Assemblée nationale
En commission , les députés ont adopté un amendement du rapporteur, sous-amendé par Mme Batho, qui prévoit la mise en ligne , dans le mois suivant la promulgation de la loi, de l'ensemble des demandes de titres d'exploration et d'exploitation d'hydrocarbures en cours d'instruction et des titres déjà attribués en « open data » , c'est-à-dire dans un standard librement réutilisable et exploitable. Il est en outre prévu une actualisation tous les semestres.
En séance , outre trois amendements rédactionnels du rapporteur, un amendement de M. Saulignac et plusieurs de ses collègues a ajouté que ces informations devront être assorties d' une carte présentant le périmètre de ces titres sur le territoire national.
II. La position de votre commission
Votre rapporteur est favorable à la mise en ligne des demandes en cours d'instruction et des titres déjà attribués. Elle observe du reste que ces informations étaient déjà accessibles jusqu'au 31 décembre 2015 avant que le ministère ne les retire dans le cadre d'une remise à plat de son site internet, le Gouvernement ayant précisé à votre rapporteur que « leur mise à jour ne [pouvait] plus être assurée ».
Sur la proposition de votre rapporteur, votre commission a simplement adopté un amendement rédactionnel COM-74 ainsi qu'un amendement COM-75 rappelant que les informations couvertes par le droit d'inventeur ou de propriété intellectuelle du titulaire du titre ne peuvent être rendues publiques .
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié. |
Article 4 (Art. L. 131-1, L. 134-10, L. 421-3, L. 421-3-1 [nouveau], L. 421-4, L. 421-5, L. 421-5-1 [nouveau], L. 421-6 à L. 421-8, L. 421-10, L. 421-15, L. 421-16, L. 431-6-3 [nouveau], l. 443-8-1 [nouveau], L. 443-9, L. 452-1, L. 452-1-1 et L. 452-1-2 [nouveaux], L. 452-2-1, L. 452-3 et L. 452-5 du code de l'énergie) - Renforcement de la sécurité d'approvisionnement en gaz naturel
Objet : cet article habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour instaurer un cadre d'accès régulé aux infrastructures de stockage souterrain de gaz naturel, modifier les rôles et responsabilités des acteurs gaziers, élargir le champ du dispositif d'interruptibilité, encadrer le délestage et étendre le bénéfice de la réduction des tarifs d'utilisation des réseaux à d'autres sites fortement consommateurs.
I. Le droit en vigueur
1° Le stockage souterrain de gaz naturel
La France ne produisant plus de gaz sur le territoire national 49 ( * ) , la sécurité de son approvisionnement en gaz naturel dépend en quasi-totalité du gaz importé depuis les interconnexions aux frontières et les terminaux méthaniers, qui est ensuite acheminé aux clients par le biais des réseaux de transport et de distribution ou stocké, en période creuse, avant d'être réinjecté lors des pointes de consommation.
Au sein de cette chaîne d'approvisionnement, les infrastructures de stockage souterrain de gaz naturel constituent un maillon essentiel pour assurer une continuité d'alimentation tout au long de l'année 50 ( * ) . La consommation étant fortement corrélée aux températures - en particulier celle des clients particuliers et des centrales à cycle combiné gaz mobilisées pour couvrir les pointes électriques, souvent concomitantes des pointes gazières -, les stocks sont ainsi soutirés en hiver, lorsque les approvisionnements extérieurs ne suffisent pas à couvrir la demande, et remplis en été, lorsque la demande excède la capacité d'approvisionnement.
À raison du rôle majeur joué par les stockages dans la sécurité d'approvisionnement du système gazier 51 ( * ) , il a donc été fait obligation aux fournisseurs de gaz de stocker une partie de leurs besoins annuels pour garantir l'alimentation de leur portefeuille de clients modulés ou « protégés ». Cette obligation légale est aujourd'hui régie par les articles L. 421-1 à L. 421-16 du code de l'énergie et déclinée au niveau réglementaire aux articles R. 421-1 à R. 421-22 créés ou modifiés par un décret de mars 2014 52 ( * ) ainsi que par un arrêté de juillet dernier 53 ( * ) .
Le tableau ci-après illustre la nécessité de recourir aux stockages pour couvrir le risque de froid de probabilité 2 % (soit une occurrence tous les 50 ans, norme retenue en France 54 ( * ) ).
Capacité du système gazier et besoins lors d'une pointe de froid au risque 2 %
(en GWh/jour)
Source : étude d'impact.
Or, comme souligné par les trois corps d'inspection missionnés par le Gouvernement, fin 2016, pour proposer une réforme de la régulation du stockage, non seulement le secteur connaît-il, depuis 2010, « une grave instabilité » mais l'obligation de service public dont il fait l'objet apparaît-elle « juridiquement fragile » 55 ( * ) , au point que la plupart sinon tous les acteurs conviennent que le système actuel est « à bout de souffle ».
Cette grave instabilité s'explique d'abord par un changement de contexte économique que l'étude d'impact décrit en ces termes : « Jusqu'en 2009, du fait de la conjoncture sur les marchés gaziers, le différentiel du prix du gaz entre l'été et l'hiver a été suffisamment élevé pour inciter les opérateurs gaziers à utiliser la pleine capacité des stockages. Depuis 2010, la baisse du différentiel de prix été-hiver 56 ( * ) réduit cette incitation , ce qui se traduit par une baisse du remplissage des stockages, et donc par un accroissement des risques portant sur la saturation des réseaux et l'approvisionnement en gaz naturel ». Comme rappelé par les inspections, la situation des opérateurs de stockage est ainsi devenue « très critique à partir de la campagne 2012-2013 , conduisant à des «mises sous cocon» ou à des retards dans la mise en oeuvre de nouvelles capacités » avec, « sur plusieurs sites, des pertes de l'ordre de plusieurs dizaines de millions d'euros » et la perspective de pertes bien supérieures de « l'ordre du milliard d'euros en cas de fermetures définitives de sites ».
Souscriptions de capacités de stockage depuis 2008-2009 en France
(en TWh disponibles)
En clair : capacités souscrites
En foncé : capacités non souscrites
Source : DGEC, in rapport IGF/CGE/CGEDD.
Face à cette situation, une première réponse, voulue comme provisoire dans l'attente d'une réforme plus pérenne, a été apportée par le décret de 2014 qui a consisté à « renforcer les obligations de stockage des fournisseurs en les répartissant autoritairement, mais [qui] laissait aux opérateurs de stockage la liberté totale de fixer leurs prix, donc leurs marges ». Ces dispositions étant jugées excessivement contraignantes par les fournisseurs - obligation de stocker en France au moins 80 % des besoins 57 ( * ) et de détenir des capacités de stockages équivalentes, dans un contexte où les prix sont en outre « largement dictés » 58 ( * ) par les opérateurs de stockage en situation de duopole 59 ( * ) -, ces derniers ont déposé un recours en excès de pouvoir contre le décret devant le Conseil d'État, qui a transmis à son tour à la Cour de justice de l'Union européenne deux questions préjudicielles sur lesquelles l'avocat général de la Cour a présenté ses conclusions en juillet dernier 60 ( * ) .
Anticipant sur les critiques de la CJUE, qui portent en particulier sur l'absence de définition des instruments de modulation autres que le stockage en France auxquels les fournisseurs peuvent recourir pour respecter leurs obligations, le Gouvernement, par un arrêté pris le 31 juillet 61 ( * ) , a largement modifié le dispositif en réduisant de moitié l'obligation de détention de capacités de stockage en France et en détaillant les autres instruments de modulation auxquels il peut être fait appel : stocks souterrains de gaz situés dans un autre pays de l'Union européenne, terminaux méthaniers situés en France ou dans l'Union ou encore capacités de production non utilisées d'un gisement de gaz français ou européen.
En parallèle, la réforme d'ampleur de l'accès des tiers au stockage , attendue depuis 2013 au moins et pour laquelle le Gouvernement avait, déjà, été habilité à légiférer par ordonnance par la loi « Transition énergétique » 62 ( * ) , n'a pu aboutir dans le délai prévu par l'habilitation , « créant de fait un attentisme des acteurs » 63 ( * ) qui a renforcé, faute d'un niveau suffisant de souscriptions, les tensions sur l'approvisionnement hivernal. Le projet d'ordonnance prévoyait alors de recourir à une mise aux enchères pour attribuer les capacités de stockage à des prix compatibles avec ceux du marché, et de compenser la différence avec les coûts supportés par les opérateurs de stockage - évaluée entre 400 et 500 millions d'euros - par l'instauration d'un « terme tarifaire » spécifique intégré à la facture des utilisateurs finals . Cette solution avait été rejetée par le Conseil d'État, ce dernier considérant que la création d'un tel prélèvement, assimilable à un impôt, n'entrait pas dans le champ de l'habilitation 64 ( * ) .
Dans leur rapport remis en avril, les trois inspections saisies du sujet préconisent un système très proche de celui envisagé dans l'ordonnance, avec la mention explicite de la compensation à effectuer dans l'article d'habilitation : recours à des enchères pour commercialiser les capacités de stockage, régulation du revenu des opérateurs de stockage par la Commission de régulation de l'énergie (CRE) et financement de l'écart éventuel entre ce revenu autorisé et le produit des enchères par un terme tarifaire spécifique de transport mis à la charge des consommateurs, avec un traitement particulier réservé aux sites fortement consommateurs . En cas d'insuffisance des capacités souscrites par le biais des enchères, les gestionnaires du réseau de transport assureraient un « filet de sécurité » en souscrivant les capacités restantes nécessaires.
2° L'interruptibilité gazière
Pour renforcer notre sécurité d'approvisionnement énergétique, l'article 158 de la loi « Transition énergétique » a consolidé le mécanisme de l'interruptibilité électrique - qui consiste à rémunérer des sites fortement consommateurs (dits « énergo-intensifs ») qui acceptent de voir leur approvisionnement interrompu instantanément et sans préavis en cas de menace grave sur le fonctionnement du réseau - et créé , à l'article L. 431-6-2 du code de l'énergie, un dispositif analogue en matière de gaz dont les contours sont calqués sur ceux de l'interruptibilité électrique : interruption des consommateurs agréés à l'initiative du gestionnaire de réseau de transport en cas de menace grave, compensation des sujétions de service public ainsi créées dans la limite de 30 € par kilowatt, volume des capacités interruptibles et conditions d'application fixés par arrêté.
Lors de l'examen du texte au Sénat, votre commission avait cependant fait part de ses réserves sur une telle « duplication » du modèle électrique à raison des spécificités du système gazier et en particulier d'une moindre occurrence du risque de rupture d'approvisionnement dès lors que le gaz est plus aisément stockable que l'électricité. Du reste, les deux arrêtés requis par l'article L. 431-6-2 ne sont à ce jour toujours pas parus , rendant de fait le dispositif inapplicable.
3° Le délestage
En cas de difficulté d'approvisionnement, les gestionnaires peuvent aussi procéder au délestage de certains consommateurs mais comme rappelé dans l'étude d'impact, « à l'heure actuelle, le dispositif repose exclusivement sur des arrangements contractuels entre les gestionnaires de réseau et les consommateurs, voire sur la bonne volonté des uns et des autres [, sans qu'il] n'existe aucune disposition dans le code de l'énergie encadrant » la pratique.
4° Les tarifs d'utilisation réduits pour les sites gazo-intensifs
Afin de tenir compte des bénéfices pour le réseau de ces profils de consommation, l'article 159 de la loi « Transition énergétique » complété par l'article 65 de la loi « Montagne » 65 ( * ) a instauré une réduction, pouvant aller jusqu'à 90 %, des tarifs d'utilisation des réseaux de transport et de distribution au profit des sites « gazo-intensifs » qui présentent un profil de consommation prévisible et stable ou anticyclique, le coût de cette réduction étant financé par les autres utilisateurs du réseau.
II. Le texte du projet de loi
Le présent article a pour principal objet de mettre en oeuvre la réforme de l'accès des tiers au stockage . Il est complété de dispositions annexes participant du même objectif de renforcement de la sécurité d'approvisionnement en gaz.
Pour ce faire, il est proposé d'habiliter à nouveau le Gouvernement à légiférer par ordonnance, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la loi, en vue de :
- réformer le cadre d'accès aux infrastructures de stockage ainsi que les modalités d'exploitation et de commercialisation de leurs capacités ;
- assurer la couverture, par les tarifs d'utilisation des réseaux de transport, des coûts supportés par les exploitants des infrastructures de stockage nécessaires à la sécurité d'approvisionnement ;
- modifier les missions et les obligations des acteurs - opérateurs de stockages et de terminaux méthaniers, gestionnaires de réseaux de transport, fournisseurs - en matière de stockage, de continuité de fourniture et de fonctionnement du système gazier ;
- étendre les compétences de la CRE à la régulation des revenus des opérateurs de stockage ;
- élargir le mécanisme d'interruptibilité à des sites de consommation raccordés aux réseaux de distribution et rendre la compensation financière optionnelle ;
- définir les règles relatives au délestage ;
- modifier les tarifs d'utilisation des réseaux applicables aux sites « gazo-intensifs » .
1° La réforme de l'accès aux infrastructures de gaz souterrain
Tel qu'exposé dans l'étude d'impact, « le nouveau dispositif envisagé [, qui semble s'inspirer de la réforme du marché italien du stockage décidée en 2012,] reposerait sur les principes suivants :
- l'obligation pour les opérateurs de stockage de maintenir en fonctionnement les infrastructures de stockage identifiées dans la programmation pluriannuelle de l'énergie [PPE] comme nécessaires à la sécurité d'approvisionnement ;
- une commercialisation aux enchères des capacités de ces infrastructures de stockage ;
- une régulation par la Commission de régulation de l'énergie du revenu des opérateurs de stockage au titre des infrastructures de stockage considérées comme nécessaires à la sécurité d'approvisionnement et une garantie de couverture des coûts en contrepartie de l'obligation de maintien en fonctionnement de ces infrastructures ».
En d'autres termes, la réforme envisagée serait à la fois très proche de celle qui figurait dans le projet d'ordonnance d'août 2016 et de la solution préconisée par les corps d'inspection saisis du sujet, à ceci près :
- par rapport au projet de 2016, que le mécanisme de couverture des coûts , qui consiste à faire supporter, par une composante intégrée aux tarifs de transport, la différence entre le revenu autorisé des stockeurs et le produit des enchères, figure désormais explicitement dans l'habilitation , répondant ainsi aux objections du Conseil d'État ;
- et, à la différence de la solution proposée par les inspections, que le « filet de sécurité » consistant, en cas d'achats de capacités inférieurs à ce qu'exige la sécurité d'approvisionnement, à souscrire des capacités complémentaires, soit assuré par les opérateurs de stockage , et non par les transporteurs.
Si l'étude d'impact reste lacunaire sur le « coût global supporté par les consommateurs » au titre de ce dispositif, en indiquant simplement qu'il serait « stable, voire réduit, du fait de la régulation des revenus des opérateurs de stockage », le rapport des inspections confirme que « la régulation est en principe globalement neutre pour les consommateurs dans leur ensemble » - à l'exception des industriels gros consommateurs, d'où le sort particulier qui leur sera réservé, cf. infra - et qu'« elle pourrait même conduire à des économies par rapport à la situation actuelle compte, car les revenus des opérateurs de stockage non régulés paraissent très élevés. L'estimation effectuée par la mission conduit à penser que des économies de l'ordre de 100 M€ pourraient être trouvées par la mise en oeuvre de la réforme, dont les consommateurs profiteraient pleinement », en se fondant sur « un surcoût de stockage (compensation des revenus au-delà de la commercialisation des capacités par le mécanisme d'enchères) de 500 M€, qui paraît constituer un maximum ».
Ainsi, la régulation du revenu des stockeurs, en diminuant les coûts pour les fournisseurs que ces derniers répercutent sur les consommateurs, ferait-elle globalement plus que compenser le renchérissement à venir des tarifs de réseaux pour les consommateurs.
2° L'interruptibilité gazière
Partant du constat que les sites de consommation raccordés au réseau de transport, auxquels le mécanisme d'interruptibilité est aujourd'hui limité, « ne représentent qu'un quart de la demande », le projet de loi propose, sans plus de justifications techniques , de l'étendre aux sites raccordés aux réseaux de distribution « afin [selon l'étude d'impact] de pouvoir mobiliser la flexibilité [de ces] consommateurs qui représentent le reste de la demande ». Il prévoit en outre de rendre optionnel le principe d'une compensation financière directe pour permettre « la mise en oeuvre d'autres types de contreparties, comme par exemple une réduction de la contribution au financement de mesures relatives à la sécurité d'approvisionnement ».
L'étude d'impact ne dit par ailleurs rien du coût d'une telle extension, ni du coût total de l'interruptibilité gazière alors qu'en vertu du principe de couverture des coûts de réseaux par les tarifs, ce que ne paieront pas les uns, gros consommateurs interruptibles, sera nécessairement payé par les autres consommateurs , résidentiels ou petits professionnels.
3° Le délestage
En définissant les règles relatives au délestage dans le code de l'énergie, il s'agirait, selon l'étude d'impact qui n'en dit guère plus, d'« accroître les moyens disponibles pour préserver l'intégrité du système gazier et de maîtriser les impacts en cas d'insuffisance de gaz en un point du réseau ».
4° Les tarifs d'utilisation réduits pour les sites gazo-intensifs
Bien que les lois « Transition énergétique » et « Montagne » aient déjà prévu une forte réduction des tarifs d'utilisation acquittés par les industriels gros consommateurs de gaz présentant des profils de consommation prévisible et stable ou anticyclique, la réforme du stockage de gaz telle qu'elle est envisagée pourrait « impliquer des coûts nouveaux pour [des] sites fortement consommateurs » qui n'ont pas ces profils de consommation.
Aujourd'hui, ces clients, dits « non protégés » car théoriquement interruptibles ou délestables avec un préavis de deux heures en cas de déclenchement du plan d'urgence gaz et dont la consommation est le plus souvent très peu modulée, ne supportent pas le coût des obligations de stockages imposées aux fournisseurs, qui sont uniquement fondées sur leur portefeuille de clients « protégés ». Or, en prévoyant de couvrir les coûts des stockeurs par le biais du tarif de transport acquitté par tous les utilisateurs 66 ( * ) , le nouveau système aurait pour effet de faire peser une charge nouvelle sur ceux de ces industriels qui ne bénéficient pas déjà de tarifs réduits.
Aussi le projet prévoit-il d' étendre la réduction de tarifs à ces industriels pour neutraliser les effets de la réforme , sans toutefois que ne soient précisés , à ce stade, ni les modalités concrètes du dispositif 67 ( * ) , qui pourrait s'avérer complexe à mettre en oeuvre, ni son coût pour les autres utilisateurs , toute réduction de tarifs pour les uns étant nécessairement contrebalancée par une hausse de tarifs pour les autres, à commencer par les consommateurs résidentiels.
III. Les modifications apportées par l'Assemblée nationale
En commission , les députés ont adopté, sur proposition de la rapporteure de la commission des affaires économiques, à qui l'examen de cet article avait été délégué au fond, quatre amendements rédactionnels ou de clarification et deux amendements sur le fond :
- le premier prévoit que le Gouvernement devra fixer un délai de préavis pendant lequel les infrastructures qui ne seraient plus considérées par la PPE comme nécessaires à la sécurité d'approvisionnement resteront transitoirement soumises au nouveau cadre de régulation prévu au présent article. Un tel délai est en effet nécessaire pour donner aux opérateurs de stockage une visibilité suffisante sur le périmètre des actifs régulés ;
- le second précise que la définition des règles du délestage devra « [veiller] à maintenir l'alimentation du plus grand nombre de clients particuliers », comme c'est déjà le cas en pratique aujourd'hui : dans le cadre du plan d'urgence gaz, le délestage est assorti d'un ordre de priorité en vertu duquel les clients particuliers ne sont affectés qu'en dernière extrémité.
En séance , aucun amendement n'a été adopté.
IV. La position de votre commission
Comme les difficultés actuelles le démontrent, le marché ne permet plus, à lui seul, de révéler la véritable valeur du stockage du gaz pour la collectivité . Au-delà de sa valeur d'arbitrage entre présent et futur, le stockage a aussi une valeur « système » , qui tient notamment aux coûts des investissements évités sur le réseau de transport pour passer la pointe hivernale, et une valeur assurantielle , dès lors qu'il est le seul outil de régulation qui ne dépende pas de considérations géopolitiques et qui assure la proximité géographique entre les besoins et les ressources.
Or, comme rappelé par les inspections, le système actuel est très insatisfaisant , notamment parce que « les stockages se trouvent (...) dans une situation intermédiaire entre marché et régulation, étant assortis à la fois d'obligations et d'accès des tiers, mais sans régulation des prix », asymétrie « qui n'est pas soutenable dans la durée ».
L'introduction d'un nouveau cadre de régulation apparaît donc urgente et indispensable pour assurer la sécurité d'approvisionnement à compter de l'hiver 2018-2019. Votre rapporteur observe toutefois que le passage de l'hiver prochain , auquel la réforme ne pourra pas s'appliquer, pourrait s'avérer périlleux : si en volume, le niveau des souscriptions actuelles paraît suffisant (85 TWh souscrits pour 80 TWh requis), ce n'est pas le cas du débit journalier disponible (1 515 GWh/jour contre 1 750 GWh/jour requis) ; en outre, le risque de congestion dans le sud-est de la France sera supérieur à celui connu l'an dernier.
Votre rapporteur approuve les grands principes de la nouvelle régulation : renforcement de l'obligation de continuité de fourniture des fournisseurs, commercialisation des capacités de stockage aux enchères, revenu autorisé des stockeurs fixé par le régulateur et couverture tarifaire de l'écart entre ce revenu et le produit des enchères.
Du point de vue du consommateur , la réforme aura pour effet de répartir différemment le coût du stockage sur la facture : auparavant intégré uniquement dans le prix de la fourniture - pour représenter environ 4 % de la facture au tarif réglementé d'un client moyen en distribution publique -, ce coût sera désormais pour partie facturé dans le coût de la fourniture, et pour l'autre dans le tarif de transport. A minima , la réforme sera donc neutre pour le consommateur final, voire même pourrait générer , du fait de la régulation du revenu des opérateurs de stockage, des économies importantes, « de l'ordre de 100 M€ » selon les inspections, dont les consommateurs profiteraient pleinement.
Plutôt que d'habiliter le Gouvernement à réformer par ordonnance le cadre de régulation du stockage souterrain de gaz naturel, votre commission a adopté un amendement COM-76 de votre rapporteur qui intègre directement la réforme dans la loi .
Plusieurs raisons justifient de procéder ainsi :
- sur la forme d'abord , le Gouvernement avait déjà été habilité à réformer le stockage du gaz par la loi « Transition énergétique » mais n'avait pu aboutir dans les délais prescrits par l'habilitation ; le Parlement est donc fondé à reprendre la main sur cette question ;
- sur le fond ensuite , tous les acteurs du système - fournisseurs, gestionnaires de réseaux, opérateurs de stockage, régulateur et État - conviennent de la nécessité et de l'urgence à réformer le système actuel ; il est en particulier impératif que l'ensemble du dispositif juridique, tant législatif que réglementaire et régulatoire, soit mis en place au plus tard en début d'année prochaine pour couvrir l'hiver 2018-2019 ; or le fait d'intégrer ces dispositions dans la loi permettra de gagner de précieuses semaines pour en fixer les grands principes ;
- bien qu'il reste sans doute plusieurs points à affiner , ce qui pourra au besoin être fait d'ici à la séance publique, voire à la réunion de la commission mixte paritaire, ces grands principes font consensus ; il est par ailleurs rappelé que la concertation sur ces sujets a débuté depuis au moins 2014 .
En particulier, le dispositif adopté par votre commission :
- permet un partage des responsabilités entre les fournisseurs et les opérateurs de stockage pour la constitution des éventuels stocks additionnels nécessaires en cas d'insuffisance des capacités souscrites aux enchères (« filet de sécurité ») ; combiné au renforcement de leur obligation de continuité de fourniture, ce partage vise, en particulier, à éviter une éventuelle déresponsabilisation des fournisseurs ;
- prévoit la création d'un mécanisme additionnel d'interruptibilité qui permettra d'exonérer les consommateurs finals agréés de la hausse du tarif d'utilisation du réseau de transport liée à cette réforme. Les effets de la réforme seront ainsi neutralisés pour les sites fortement consommateurs qui ne payaient pas, jusqu'à présent, pour le stockage du gaz.
Enfin, une habilitation à légiférer par ordonnance est maintenue pour trois sujets nouveaux destinés à améliorer la sécurité d'approvisionnement gazier : la modification des missions des acteurs du système gazier sur la base du retour d'expérience des difficultés rencontrées l'hiver dernier dans le sud-est, l'extension de l'actuel mécanisme d'interruptibilité à des clients raccordés aux réseaux de distribution et la définition des règles de délestage des consommateurs.
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié. |
Article 5 (Art. L. 134-1 et L. 134-2, art. L. 341-4-3 et L. 452-3-1 [nouveaux] du code de l'énergie) - Rémunération de la gestion de clientèle effectuée par les fournisseurs d'énergie pour le compte des gestionnaires de réseaux
Objet : cet article dispose que les fournisseurs d'électricité et de gaz naturel sont rémunérés par les gestionnaires de réseaux, selon des modalités fixées par la Commission de régulation de l'énergie, pour les prestations de gestion des clients en contrat unique qu'ils effectuent pour leur compte.
I. Le droit en vigueur
En application des dispositions du code de la consommation (art. L. 224-1 et L. 224-8) et du code de l'énergie (art. L. 332-1 à L. 332-3 pour l'électricité et L. 442-1 à L. 442-3 pour le gaz) et en vue de simplifier les démarches des consommateurs particuliers et des petits clients professionnels, les fournisseurs d'électricité et de gaz naturel sont tenus de proposer un contrat unique incluant la fourniture d'énergie et l'accès au réseau à tous les consommateurs domestiques , ainsi qu'aux consommateurs non domestiques souscrivant une puissance électrique inférieure ou égale à 36 kVA ou consommant moins de 30 MWh de gaz par an.
En pratique, et bien qu'elle ne soit pas obligatoire pour les autres catégories de consommateurs, l'offre en contrat unique est majoritairement retenue par les fournisseurs d'électricité pour leurs clients raccordés en basse et en moyenne tension , et constitue la règle , en matière de fourniture de gaz, pour les clients raccordés aux réseaux de distribution .
Dans le cadre d'un tel contrat, les fournisseurs gèrent donc pour le compte du gestionnaire de réseau de distribution (GRD) certains aspects de la relation contractuelle entre ce gestionnaire et le client final . Comme détaillé par la Commission de régulation de l'énergie (CRE) dans la consultation publique qu'elle a organisée sur le sujet en mai dernier, « la prestation de gestion des clients en contrat unique effectuée par les fournisseurs comprend notamment les éléments suivants :
• choix des paramètres tarifaires : le fournisseur choisit ou relaie les demandes de l'utilisateur concernant les paramètres du tarif de réseau choisi (option tarifaire, puissance souscrite, etc.), impliquant, le cas échéant, des interventions du GRD sur les compteurs ;
• facturation : le fournisseur facture à l'utilisateur le tarif d'accès au réseau, pour le compte du gestionnaire de réseau ;
• gestion et recouvrement des impayés : le fournisseur assure le recouvrement des factures qu'il émet concernant, notamment, les tarifs d'utilisation des réseaux. » 68 ( * )
Dans cette même consultation, la CRE rappelle qu'« à l'origine, les contrats conclus entre les GRD et les fournisseurs ne prévoyaient pas de rémunération du fournisseur par le GRD , le fournisseur étant, le cas échéant, rémunéré par le consommateur via la part fourniture de la facture pour l'ensemble des prestations rendues pour son compte et pour celui du GRD ».
Cependant, à la suite de recours intentés par certains fournisseurs, il résulte de deux décisions récentes du Conseil d'État 69 ( * ) et de la cour d'appel de Paris 70 ( * ) que les fournisseurs doivent désormais être rémunérés par les GRD pour les prestations d'intermédiation réalisées pour leur compte , la cour d'appel de Paris renvoyant au comité de règlement des différends (CoRDiS) de la CRE le soin de déterminer le montant de cette rémunération.
II. Le texte du projet de loi
Le présent article a donc pour objet d' attribuer à la CRE la compétence de fixer le montant de la rémunération des fournisseurs par les gestionnaires de réseaux pour ces prestations de gestion de clientèle, plus connue sous le nom de « commissionnement ».
À cette fin, les 1° et 2° complètent les articles L. 134-1 et L. 134-2 du code de l'énergie qui énumèrent les matières dans lesquelles la CRE est habilitée à prendre des décisions en matière, respectivement, d'électricité et de gaz naturel. En des termes voisins, les 3° et 4° de ces deux articles prévoient aujourd'hui que le régulateur est compétent pour fixer les conditions d'accès aux réseaux publics de transport et de distribution et arrête en particulier la méthodologie de calcul des tarifs d'utilisation de ces réseaux et les évolutions de ces tarifs.
Bien que cette formulation aurait sans doute suffi à établir la compétence de la CRE pour encadrer la prestation d'intermédiation objet du présent article, comme du reste le régulateur semblait le penser lui-même dans sa consultation publique 71 ( * ) , le Gouvernement a choisi de préciser explicitement , en des termes identiques pour l'électricité et le gaz, que cette compétence s'étend à « la rémunération des fournisseurs pour la gestion de clientèle qu'ils réalisent pour le compte des gestionnaires de réseaux de distribution ».
Au surplus, et sans que la valeur ajoutée des articles de code ainsi créés apparaisse clairement , les 3° et 4° rappellent ces mêmes dispositions - soit le principe d'une rémunération des fournisseurs pour la prestation d'intermédiation qu'ils exécutent et la compétence de la CRE pour en établir le montant - dans deux nouveaux articles L. 341-4-3 et L. 452-3-1 insérés au sein des sections relatives respectivement à l'accès aux réseaux d'électricité et de gaz.
En vertu du principe de couverture tarifaire des coûts d'un gestionnaire de réseau efficace, cette rémunération sera financée par les tarifs d'utilisation des réseaux acquittés par les consommateurs finals .
Par quatre délibérations adoptées le 7 septembre dernier 72 ( * ) , la CRE a d'ores et déjà fixé les niveaux de rémunération des fournisseurs applicables au 1 er janvier 2018 en se fondant sur « les coûts d'un fournisseur normalement efficace , sans dépasser les coûts évités par les [gestionnaires de réseaux] qui délèguent la réalisation d'une partie de la gestion des clients aux fournisseurs ». Les montants retenus sont les suivants :
- pour l'électricité , 156 euros par an et par client en moyenne tension (HTA), 78 euros en basse tension pour les puissances souscrites supérieures à 36 kVA et 6,8 euros en basse tension pour les puissances inférieures ou égales à 36 kVA ;
- pour le gaz , 91 euros par an et par client pour les options tarifaires T3, T4 et TP, et 8,1 euros pour les options tarifaires T1, T2 et les clients ne disposant pas d'un compteur individuel.
Dans les deux cas, une réduction transitoire et dégressive jusqu'à sa disparition au 31 juillet 2022 est prévue pour les clients aux tarifs réglementés de vente , afin de tenir compte de la « passivité » relative de ces clients qui engendre un plus faible taux de contact.
S'agissant du coût de ces dispositions pour les consommateurs, l'étude d'impact indique que « dans la mesure où cette charge de gestion de clientèle ne sera plus, à l'avenir, supportée par les fournisseurs mais par les gestionnaires de réseau, la mesure devrait être neutre pour le consommateur, la hausse de la part distribution étant compensée par une baisse équivalente de la part fourniture ». Or, si la hausse de la part réseau de la facture est certaine, sa neutralisation par une baisse de la part fourniture fait le pari que les marchés sont suffisamment concurrentiels pour garantir que les fournisseurs répercuteront effectivement, et intégralement, ce gain sur leurs clients, sous peine de perdre des parts de marché. L'examen des conditions actuelles de marché, où les acteurs sont nombreux et offensifs, laisse à penser que tel devrait être le cas .
III. Les modifications apportées par l'Assemblée nationale
En commission , les députés ont adopté, sur proposition de la rapporteure de la commission des affaires économiques, à qui l'examen de cet article avait été délégué au fond, quatre amendements rédactionnels ainsi qu' un amendement de validation législative des conventions déjà conclues entre fournisseurs et gestionnaires de réseaux, et ce afin de « protéger les consommateurs des hausses de factures injustifiées qu'ils pourraient subir dans le contexte juridique actuel ».
En effet, dès lors que la loi, tirant les conséquences des deux décisions de justice susmentionnées, acte pour l'avenir le principe d'une rémunération des fournisseurs pour les prestations de gestion de clientèle effectuées pour le compte des gestionnaires de réseaux, certains fournisseurs pourraient être en droit de demander à bénéficier rétroactivement d'une telle rémunération pour leurs prestations passées.
Comme rappelé dans l'exposé des motifs de l'amendement, « seuls certains fournisseurs nouveaux entrants » sur le marché, qui avaient négocié avec le gestionnaire de réseaux un contrat encadrant les modalités opérationnelles et financière de la gestion de clients en contrat unique 73 ( * ) , « ont été rémunérés » ; les autres fournisseurs, alternatifs ou historiques, pourraient dès lors être légitimes à réclamer une telle rémunération , étant précisé, s'agissant des fournisseurs historiques, que lesdits coûts « étaient déjà intégrés dans les coûts commerciaux facturés à leurs clients », « ce qui conduirait à une double rémunération et donc à un effet d'aubaine important ».
Au surplus, cet « enrichissement sans cause », tel que qualifié dans l'exposé des motifs de l'amendement, aurait pour effet d'entraîner des hausses rétroactives significatives des tarifs d'utilisation de réseaux acquittés par les consommateurs.
Pour ces motifs d'intérêt général, l'amendement procède donc, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, à la validation des conventions relatives à l'accès aux réseaux en tant qu'elles seraient contestées par le moyen tiré de l'imposition, aux fournisseurs, de la prestation d'intermédiation réalisée pour le compte des gestionnaires de réseaux, ou du maintien à leur charge de tout ou partie du coût de cette prestation .
En séance , aucun amendement n'a été adopté.
IV. La position de votre commission
Votre rapporteur approuve l'encadrement de la pratique dite du « commissionnement » prévue au présent article. Le dispositif adopté à l'Assemblée permettra de sécuriser une pratique qui a fait l'objet de nombreux recours contentieux, à la fois pour l'avenir et pour le passé puisqu'il est assorti d'une validation législative des contrats passés justifiée par un motif d'intérêt général de protection des consommateurs contre d'éventuelles hausses de factures injustifiées.
Votre commission a adopté cet article sans modification. |
Article 5 bis A (Art. L. 111-82, L. 111-92-1 [nouveau] et L. 134-3 du code de l'énergie) - Approbation par la Commission de régulation de l'énergie des modèles de contrats d'accès aux réseaux conclus entre les fournisseurs d'énergie et les gestionnaires de réseaux
Objet : cet article, introduit à l'Assemblée nationale, dispose que la Commission de régulation de l'énergie approuve les modèles de contrats d'accès aux réseaux de distribution conclus entre les fournisseurs d'électricité et de gaz et les gestionnaires de réseaux.
I. Le droit en vigueur
Dans le cadre du droit d'accès des tiers aux réseaux et aux installations régi par la section 7 du chapitre I er du titre I er du livre I er du code de l'énergie, les gestionnaires de réseaux et les opérateurs de ces ouvrages sont tenus de conclure avec les fournisseurs d'énergie des contrats - ou des protocoles lorsque le gestionnaire ou l'opérateur et le fournisseur ne sont pas des personnes morales distinctes - pour régler leurs relations . Ces contrats ou protocoles sont mentionnés aux articles L. 111-91 et L. 111-92, s'agissant des réseaux électriques, et L. 111-97 pour les réseaux gaziers et installations de gaz naturel liquéfié.
Dans les deux cas, ces contrats ou protocoles sont transmis à la Commission de régulation de l'énergie (CRE), systématiquement pour l'électricité et à sa demande pour le gaz.
II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale
En séance , les députés ont, sur proposition de la rapporteure de la commission des affaires économiques, introduit cet article additionnel qui entend, selon son exposé des motifs, « sécuriser le cadre juridique d'adoption des contrats d'accès aux réseaux et (...) réduire les sources de contentieux entre acteurs du marché ».
Après avoir rappelé que ces contrats « font aujourd'hui l'objet d'une simple concertation, laquelle ne donne lieu à aucune décision contraignante de la Commission de régulation de l'énergie », la rapporteure précise que « cette situation a favorisé la multiplication des désaccords , notamment entre opérateurs de réseaux et fournisseurs d'électricité et de gaz naturel » et qu'« il en résulte une instabilité juridique au détriment du consommateur final », voire « un risque de traitement discriminatoire entre les utilisateurs des réseaux de distribution, selon que ces derniers saisissent ou non l'organe de règlement des différends de la CRE ».
Aussi le présent article confie-t-il désormais à la CRE un pouvoir d'approbation des modèles de contrats ou de protocoles d'accès aux réseaux de distribution et complète en ce sens l'article L. 134-3 (4°), qui liste les matières soumises à l'approbation du régulateur.
En matière d'accès aux réseaux électriques, son 2° crée un nouvel article L. 111-92-1 qui précise que ces modèles, « établis par chaque gestionnaire de réseau public de distribution, déterminent les stipulations contractuelles permettant un accès transparent et non discriminatoire aux réseaux pour les fournisseurs ». L'effet du silence gardé pendant trois mois par la CRE est en outre différencié selon la taille du gestionnaire de réseau : il vaudrait décision de rejet lorsque celui-ci dessert au moins 100 000 clients, et décision d'acceptation en deçà.
En matière d'accès aux réseaux gaziers, son 3° reproduit exactement le même dispositif, tandis que son 1° procède à une coordination à l'article L. 111-82 relatif aux sanctions pénales, et à leur exemptions, en cas de divulgation d'informations sensibles en matière de gaz.
Lors de l'examen de l'amendement en séance, le ministre avait émis un avis de sagesse, considérant que « cette disposition ne [semblait] pas indispensable ».
III. La position de votre commission
Votre rapporteur est favorable à l'approbation par le régulateur des modèles de contrats et protocoles d'accès aux réseaux prévu au présent article, qui complète utilement l'encadrement du « commissionnement » fixé à l'article 5.
Outre un amendement rédactionnel COM-78 de votre rapporteur, votre commission a adopté un amendement COM-77 qui prévoit, par souci de simplification , que les contrats et protocoles eux-mêmes d'accès aux réseaux électriques ne soient transmis à la CRE qu'à sa demande , comme c'est déjà le cas pour le gaz.
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié. |
Article 5 bis (Art. L. 341-2, L. 342-3 et L. 342-7, Art. L. 342-7-1 et L. 345-1 à L. 345-7 [nouveaux] du code de l'énergie) - Régulation du raccordement en mer d'énergies renouvelables et définition des réseaux intérieurs des bâtiments
Objet : cet article, introduit à l'Assemblée nationale, traite de deux sujets distincts : la réforme du cadre de régulation du raccordement des énergies marines renouvelables, d'une part, et la définition d'un statut spécifique pour les « réseaux intérieurs des bâtiments », d'autre part.
I. Le droit en vigueur
1° Les raccordements en mer d'énergies renouvelables
À la suite des deux premiers appels d'offres lancés en 2011 et 2013, six parcs éoliens en mer de 450 à 500 MW chacun ont été attribués à trois consortiums 74 ( * ) au large des communes de Fécamp (Haute-Normandie), Courseulles-sur-Mer (Basse-Normandie), Saint-Brieuc (Bretagne), Saint-Nazaire (Pays de Loire), Dieppe-Le Tréport (Haute-Normandie), et Yeu-Noirmoutier (Pays de Loire), pour un coût total de soutien évalué par la Commission de régulation de l'énergie (CRE) à 40,7 milliards d'euros et un prix de plus de 200 euros/MWh ; leur mise en service n'est cependant pas attendue, au mieux, avant 2020 ou 2021 . Un nouvel appel d'offres, organisé sous la forme du dialogue concurrentiel, est par ailleurs en cours pour l'attribution d'un parc d'une puissance comprise entre 250 et 750 MW au large de Dunkerque.
Plusieurs causes sont avancées pour expliquer tant le retard observé pour la réalisation des parcs d'éoliennes offshore que son coût très élevé pour la collectivité en comparaison d'autres parcs opérés en mer du Nord : lourdeur des procédures administratives, multiplication des recours en justice, fonds marins moins favorables ou encore inadaptation du cadre français de régulation du raccordement des énergies renouvelables en mer, en vertu duquel les raccordements sont aujourd'hui financés par les producteurs mais réalisés par le gestionnaire du réseau de transport , RTE. Sur ce dernier point, la CRE considérait, en novembre 2016 75 ( * ) , qu'« un partage plus clair des risques entre les producteurs et le responsable du raccordement , dans les cas de retard important du raccordement ou d'avaries de longue durée, devrait être défini pour les futurs appels d'offres et serait de nature à en réduire sensiblement le coût ».
Plusieurs dispositions législatives ont été adoptées depuis 2015 pour limiter les retards de raccordement et sécuriser les producteurs. Ainsi, la loi « Transition énergétique » 76 ( * ) a fixé, à l'article L. 342-3 du code de l'énergie 77 ( * ) , un délai maximal de dix-huit mois pour le raccordement des installations nécessitant des travaux d'extension ou de renforcement du réseau, assorti, en cas de non-respect, du versement d'indemnités . Ces dispositions ont été précisées par décret 78 ( * ) .
Ce dispositif a ensuite été complété par la loi « Autoconsommation » du 24 février 2017 79 ( * ) qui a créé un régime indemnitaire spécifique des producteurs en cas de retard de raccordement des énergies renouvelables en mer , avec un plafonnement des indemnités dues pouvant atteindre 150 millions d'euros par an pendant trois ans 80 ( * ) , et a surtout prévu une couverture totale ou partielle de ces indemnités par les tarifs d'utilisation des réseaux publics d'électricité (TURPE) acquittés par tous les consommateurs. Cette couverture, prévue au 4° de l'article L. 341-2, est totale « lorsque la cause du retard n'est pas imputable au gestionnaire du réseau concerné mais résulte de la réalisation d'un risque que celui-ci assume aux termes de la convention de raccordement », et partielle « lorsque la cause du retard est imputable au gestionnaire de réseau », ce dernier étant alors « redevable (...) d'une part de ces indemnités , dans la limite d'un pourcentage et d'un plafond sur l'ensemble des installations par année civile » devant être fixé par un arrêté non paru à ce jour.
Lors de l'examen du texte, votre commission était certes convenue de la nécessité d'un régime dérogatoire du droit commun pour tenir compte des risques très spécifiques liés à l'éolien offshore 81 ( * ) mais avait fait observer qu'« un tel dispositif, s'il venait à être « activé », pourrait engager jusqu'à plusieurs centaines de millions d'euros qui s'ajouteraient à une facture totale de plusieurs dizaines de milliards d'euros d'aides publiques sur la durée de vie des parcs ».
Au surplus, ce régime s'appliquant aux projets déjà attribués, dans le cadre desquels les lauréats sont censés avoir déjà intégré ces risques dans leur offre 82 ( * ) , le risque existe, comme souligné par la CRE, « d' une double couverture de leurs risques , d'une part au titre du prix qu'ils ont proposé, financé par la CSPE, et d'autre part au titre du nouveau régime indemnitaire » 83 ( * ) . Pour lever ce risque, la CRE recommandait, pour le passé, que « toute évolution du partage de responsabilités entre les lauréats et RTE [soit] limitée à la seule couverture des risques qui n'avaient pas pu être identifiés par les lauréats au moment de la constitution de leur offre » 84 ( * ) .
2° Les réseaux intérieurs des bâtiments
Le droit actuel ne connaît que deux types de réseaux de distribution d'électricité :
- les réseaux publics de distribution d'électricité , propriété des communes qui ont le plus souvent délégué leur compétence d'autorité concédante à des syndicats intercommunaux ou départementaux, et dont la gestion est confiée, sauf constitution d'une régie , à Enedis (pour 95 % du territoire) ou à des entreprises locales de distribution (qui couvrent les 5 % restants) par le biais de contrats de concession . Ces réseaux publics sont définis aux premier et troisième alinéas du IV de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales 85 ( * ) ;
- les réseaux fermés de distribution , créés par une ordonnance de décembre 2016 86 ( * ) prise sur le fondement d'une habilitation conférée par la loi « Transition énergétique » 87 ( * ) et définis à l'article L. 344-1 du code de l'énergie comme « un réseau de distribution qui achemine de l'électricité à l'intérieur d'un site géographiquement limité et qui alimente un ou plusieurs consommateurs non résidentiels exerçant des activités de nature industrielle, commerciale ou de partages de services » ; un tel réseau ne peut être constitué que s'il répond à des impératifs techniques ou de sécurité ou fournit de l'électricité essentiellement au propriétaire ou au gestionnaire de réseau ou aux entreprises qui leur sont liées 88 ( * ) .
Les réseaux publics de distribution peuvent en outre accueillir des opérations d'autoconsommation individuelle ou collective , cette dernière étant définie comme une opération dans laquelle « la fourniture d'électricité est effectuée entre un ou plusieurs producteurs et un ou plusieurs consommateurs finals liés entre eux au sein d'une personne morale et dont les points de soutirage et d'injection sont situés en aval d'un même poste public de transformation d'électricité de moyenne en basse tension » 89 ( * ) .
Enfin, on signalera le cas particulier des « colonnes montantes » qui, dans les immeubles d'habitation, acheminent l'électricité du pied de l'immeuble à chaque étage et dont l'appartenance aux réseaux publics reste incertaine, au moins pour celles d'avant 1992.
II. Le texte adopté par l'Assemblée nationale
1° Les raccordements en mer d'énergies renouvelables
En commission , les députés ont adopté un amendement du Gouvernement qui, comme indiqué dans son exposé des motifs, « vise à changer le modèle de régulation des raccordements en mer d'énergies renouvelables pour accélérer la réalisation des projets », en le rapprochant du modèle retenu dans les pays nordiques (Danemark et Allemagne notamment). Désormais, « le raccordement ne serait plus, financièrement, à la charge du producteur (dont le prix est couvert aujourd'hui par les charges de [service public] au travers du tarif d'achat) mais serait réalisé par le gestionnaire du réseau public de transport, RTE, sur ses fonds propres et couvert par le [tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité, le] TURPE ».
Plusieurs bénéfices sont attendus du nouveau système. En décorrélant la réalisation du raccordement de celle du parc, il devrait être possible d' anticiper la réalisation du raccordement et donc de limiter le risque de retard de sa mise à disposition, ce qui facilitera le financement des projets . En ayant la maîtrise complète du raccordement, RTE devrait aussi pouvoir en réduire le coût grâce à la standardisation et à la mutualisation des plateformes.
À cette fin, le 1° du I du présent article étend , à l'article L. 341-2, le champ des coûts couverts par le TURPE en matière de raccordement des énergies marines renouvelables.
Seraient désormais mis à la charge des utilisateurs de réseaux , comme précédemment, pour les parcs déjà attribués ou à venir, les indemnités versées au producteur en cas de dépassement du délai fixé par la convention de raccordement ou, à défaut, des dix-huit mois prévus à l'article L. 342-3, mais en complétant les cas dans lesquels RTE serait redevable d'une partie de ces indemnités : non plus seulement lorsque la cause du « retard » lui est imputable mais aussi lorsqu'il est tenu responsable de « la limitation de la production du fait d'une avarie sur des ouvrages de la partie marine du réseau d'évacuation », excluant ainsi « l'extrémité » du raccordement sur la partie terrestre, pour laquelle les risques sont paradoxalement connus et mieux maîtrisés. En outre, l'arrêté ministériel plafonnant cette participation de RTE serait désormais pris sans avis de la CRE ( a) et dernier alinéa du 4° de l'article L. 341-2).
Alors que n'étaient jusqu'à présent indemnisés que les retards de raccordement à la mise en service du parc, la couverture serait par ailleurs étendue, pour l'avenir 90 ( * ) , aux indemnités versées à raison d'incidents sur la partie marine du raccordement qui interviendraient en cours d'exploitation , et donc sur toute la durée de vie du parc, sous les conditions prévues au sein d'un nouvel article L. 342-7-1 créé par le c) du 2° du I : lorsque le producteur ne choisit pas l'emplacement de la zone, ce qui est le cas dans le 3 e appel d'offres et devrait être la règle à l'avenir, et lorsque les avaries entraînent « une limitation partielle ou totale de la production ». Des cas de dispense d'indemnisation devraient être fixées par décret et RTE devrait participer à l'indemnisation dans les mêmes conditions qu'en cas de retard initial de raccordement (( b) et dernier alinéa du 4° de l'article L. 341-2 et art. L. 342-7-1).
Le a) du 2° du I modifie l'article L. 342-3 pour :
- préciser que le décret permettant de déroger au délai de raccordement des installations nécessitant des travaux fixe, outre les cas, « les conditions » dans lesquelles une telle dérogation est prévue ;
- surtout, prévoir, par exception aux délais de raccordement de droit commun , que dans le cadre des appels d'offres portant sur des énergies marines renouvelables, lorsque le producteur ne choisit pas l'emplacement de la zone, c'est-à-dire pour l'avenir, que le raccordement doit être achevé avant la date fixée dans le cahier des charges de l'appel d'offres . En cas de retard, RTE devrait verser une indemnité au producteur, soit un nouveau régime d'indemnisation dont les conditions - en termes, par exemple, d'imputabilité du retard - ne sont pas connues puisque renvoyées à un décret qui devra en fixer « le champ d'application, les modalités de calcul ainsi que le plafond ».
Enfin, le b) du 2° du I dispose, par exception au principe prévu à l'article L. 342-7 selon lequel le coût d'un raccordement au réseau de transport est à la charge du demandeur, que pour les énergies marines renouvelables, lorsque le producteur ne choisit pas l'emplacement de la zone, c'est RTE qui assumerait désormais « le coût du raccordement correspondant aux conditions techniques prévues par le cahier des charges ou définies par le ministre chargé de l'énergie, y compris les coûts échoués en cas d'abandon de la procédure de mise en concurrence ou de défaillance du lauréat ».
En séance , ont été adoptés sur proposition de la rapporteure, outre deux amendements rédactionnels - dont l'un a pour effet, en ne supprimant plus le quatorzième alinéa de l'article L. 341-2, de créer une incohérence dans le dispositif - et un amendement de correction d'une référence :
- un amendement renvoyant la fixation du barème des indemnités à un décret simple et plus à un décret en Conseil d'État ;
- un amendement clarifiant le fait que lorsque l'État arrête, dans l'appel d'offres, le périmètre de la zone d'implantation du parc, le producteur choisit l'emplacement précis de son parc à l'intérieur de cette zone ;
- enfin, un amendement prévoyant que dans le nouveau système où RTE assumerait le coût du raccordement, le producteur resterait cependant redevable des coûts dont il est responsable , qu'il s'agisse de coûts liés à des modifications des conditions techniques du raccordement à son initiative, ou des coûts échoués qui résulteraient de sa défaillance.
2° Les réseaux intérieurs des bâtiments
En commission , les députés ont adopté un autre amendement de la rapporteure de la commission des affaires économiques dont les dispositions, bien que sans aucun rapport avec le sujet précédent, ont très étonnamment été regroupées au sein d'un même article 5 bis .
Cet amendement entend introduire dans le code de l'énergie une définition des « réseaux intérieurs des bâtiments ». Selon son exposé des motifs, « depuis quelques années, un nouveau schéma de distribution de l'électricité s'est développé dans les immeubles de bureaux . Un unique compteur est installé pour tout l'immeuble. Un réseau intérieur, n'appartenant pas au réseau public de distribution d'électricité, achemine l'électricité à tous les bureaux. Ce schéma existe quand le bâtiment appartient à un unique propriétaire et que les surfaces occupées par chaque locataire changent au cours du temps. Les locataires n'ont pas leur propre compteur mais payent l'électricité via les charges locatives ».
« Or, Enedis , s'appuyant sur l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 12 janvier 2017, n'accepte plus ce schéma de raccordement et, par ce biais, les raccordements indirects de consommateurs », la rapporteure juge nécessaire de créer la notion de réseaux intérieurs « afin de légaliser les situations existantes et de permettre le développement de ce schéma de distribution de l'électricité dans les immeubles de bureaux ».
Pour ce faire, l'amendement crée un nouveau chapitre V au sein du titre IV (« L'accès et le raccordement au réseau ») du livre III (« Les dispositions relatives à l'électricité ») du code de l'énergie comportant sept articles L. 345-1 à l. 345-7. Les réseaux intérieurs y sont définis comme des « installations intérieures d'électricité à haute ou basse tension des bâtiments (...) à usage tertiaire ou accueillant un service public, appartenant à un propriétaire unique » qui ne constituent ni un réseau public, ni un réseau fermé de distribution . En sont explicitement exclues les installations alimentant « un ou plusieurs logements », « plusieurs bâtiments reliés entre eux par des ouvrages qui empruntent ou surplombent le domaine public », « plusieurs bâtiments qui desservent plusieurs utilisateurs qui relèvent de personnes morales ou physiques différentes ».
Il est ensuite précisé que le raccordement à un tel réseau intérieur ne fait obstacle ni au libre choix de son fournisseur, ni à la participation aux mécanismes d'effacements de consommation, ni au droit pour un producteur de bénéficier des tarifs d'achat, du complément de rémunération ou des garanties d'origine pour sa production d'électricité renouvelable ou de vendre cette dernière à un tiers. Pour l'exercice de ces droits, le gestionnaire du réseau public doit installer, moyennant rémunération fixée dans les tarifs de ses prestations annexes, un dispositif de comptage de la consommation ou de la production.
Il est enfin prévu, d'une part, que les réseaux intérieurs doivent satisfaire aux normes techniques et de sécurité applicables aux installations électriques intérieures et, d'autre part, que le propriétaire d'un réseau intérieur « peut abandonner ses droits sur ledit réseau en vue de son intégration au réseau public de distribution auquel il est raccordé, après remise en état à ses frais ».
En séance , six amendements purement rédactionnels de la rapporteure ont été adoptés.
III. La position de votre commission
Sur la forme d'abord, votre rapporteur observe qu' ont été regroupées dans cet article deux dispositions introduites par deux amendements distincts portant article additionnel et qui n'ont aucun lien l'une avec l'autre bien qu'elles s'insèrent dans un même titre du code de l'énergie, ce qui nuit à la clarté et à l'intelligibilité du texte.
Surtout, votre rapporteur estime que le lien, même indirect , avec le texte déposé, des dispositions relatives au raccordement des énergies renouvelables en mer est loin d'être avéré , et donc que la question de la conformité de ces dispositions avec l'article 45 de la Constitution est posée . En effet, rien dans l'intitulé, l'exposé des motifs ou le contenu du texte n'évoquait la problématique du raccordement des éoliennes en mer, ni plus largement celle des énergies renouvelables qui n'y sont pas mentionnées une seule fois, même au détour d'une phrase. À cet égard, le seul fait que le texte déposé contenait un chapitre dédié aux relations entre les gestionnaires de réseaux et les fournisseurs - ce que ne sont pas les producteurs d'énergies renouvelables - ne suffit sans doute pas à établir l'existence d'un tel lien. Malgré ces doutes, et au vu de l'intérêt sur le fond des mesures proposées , votre rapporteur a décidé de ne pas soulever l'irrecevabilité de ces dispositions mais observera avec attention ce que le Conseil constitutionnel en dira s'il est appelé à en connaître.
Sur le fond donc, s'agissant du raccordement des énergies marines renouvelables , votre rapporteur juge favorablement la réforme proposée . Par son caractère « hybride » entre le modèle de type allemand, où le raccordement est financé et réalisé par le gestionnaire de réseau, et le modèle de type anglais, où le producteur en assume le coût comme la réalisation, le cadre français de raccordement explique en effet, par sa complexité, une partie des retards accumulés dans la réalisation des projets.
Dans le nouveau régime, qui s'appliquera uniquement à compter de l'appel d'offres en cours pour l'implantation d'éoliennes au large de Dunkerque, le gestionnaire du réseau de transport, RTE réalisera désormais le raccordement sur ses fonds propres et sera couvert par le tarif d'utilisation des réseaux, ce qui permettra de réduire tant les délais , en anticipant sur les premières opérations de raccordement, que les coûts , par la standardisation et la mutualisation des plateformes, mais aussi par une réduction des risques portés par le producteur qui améliorera la « bancabilité » des projets, en réduisant d'autant les frais financiers. Le système sera assorti de nouvelles règles d'indemnisation du producteur non seulement en cas de retard de raccordement à la mise en service du parc, mais aussi en cas d'avarie sur le réseau qui limiterait sa production en cours d'exploitation. Le gestionnaire de réseau comme le producteur resteront cependant redevables des coûts pour lesquels leur responsabilité est engagée , les indemnités étant par ailleurs plafonnées.
Votre commission a souhaité procéder à quelques ajustements du dispositif en adoptant, outre les amendements de précision ou de corrections d'erreurs matérielles COM-79 , COM-82 et COM-84 de votre rapporteur :
- deux amendements identiques COM-80 et COM-93 de votre rapporteur et du rapporteur pour avis, pour étendre l'indemnisation du producteur , d'une part, aux cas de dysfonctionnements , et non des seules avaries, qui viendraient limiter sa production et, d'autre part, aux avaries ou dysfonctionnements sur l'ensemble du réseau d'évacuation , et non sur sa seule partie marine.
Ces modifications sont justifiées par le fait que les conséquences économiques d'une indisponibilité du réseau à raison d'une avarie ou d'un dysfonctionnement qui interviendrait sur sa partie maritime ou terrestre, sont identiques pour le producteur . Au surplus, les risques sur la partie terrestre sont bien mieux maîtrisables, et maîtrisés , par RTE. Ces dérogations ne sauraient par ailleurs servir d'argument aux producteurs d'énergies renouvelables terrestres qui demanderaient à bénéficier d'un régime équivalent puisque leur justification tient uniquement au fait d'évacuer la production d' installations implantées en mer ; il n'y a donc pas de « risque de contagion » . On rappellera également que les énergies renouvelables en mer bénéficient déjà , depuis la loi « Autoconsommation », d'un régime dérogatoire du droit commun qui n'en devient donc, en quelque sorte, que plus dérogatoire. Enfin, le nouveau régime vient définitivement consacrer le monopole de raccordement en mer du gestionnaire du réseau de transport .
- deux amendements identiques COM-80 et COM-93 de votre rapporteur et du rapporteur pour avis prévoyant l'avis de la CRE sur les décrets relatifs aux indemnités versées et au reste à charge du gestionnaire de réseau, afin de respecter la compétence tarifaire du régulateur .
Enfin, concernant les réseaux intérieurs des bâtiments , votre commission a adopté un amendement COM-83 supprimant, pour plus de clarté, ces dispositions du présent article, pour les réintroduire au sein d'un nouvel article 5 ter A ( cf. infra ), et un amendement de suppression COM-32 de M. Hervé.
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié. |
Article 5 ter A (nouveau) (Art. L. 345-1 à L. 345 7 [nouveaux] du code de l'énergie) - Réseaux intérieurs des bâtiments
Objet : cet article, introduit par votre commission, réintègre la notion de réseaux intérieurs des bâtiments supprimée à l'article 5 bis 91 ( * ) , et l'encadre pour sécuriser le monopole de la distribution publique d'électricité et la péréquation tarifaire.
Votre commission a adopté un amendement COM-85 de votre rapporteur pour mieux encadrer la notion de réseaux intérieurs , et ainsi sécuriser le monopole de la distribution publique d'électricité garante de la péréquation tarifaire et technique sur l'ensemble du territoire .
Le dispositif retenu circonscrit les réseaux intérieurs :
- aux immeubles de bureaux , en conformité avec l'exposé des motifs de l'amendement ayant introduit ces dispositions à l'article 5 bis , qui visait à « lever le «régime de non-droit» en vigueur » pour ceux de ces immeubles qui disposent d'un schéma de raccordement en un point unique, schéma fragilisé par un arrêt de la Cour d'appel de Paris du 12 janvier 2017 ; il n'y a dès lors pas lieu d'ouvrir la notion de réseaux intérieurs aux bâtiments à usage tertiaire , notion bien plus large qui couvre les bureaux mais aussi les commerces, l'hôtellerie ou les bâtiments administratifs, pas plus qu'il n'y a lieu de l'étendre aux bâtiments accueillant un service public ;
- aux bâtiments contigus ou parties de bâtiments contiguës d'un même bâtiment ; à défaut d'une telle précision, les réseaux intérieurs s'étendraient de fait au-delà des seules installations intérieures d'un même bâtiment, ce qui viendrait remettre en cause le monopole de la distribution publique d'électricité et ouvrirait la voie, en milieu urbain, à la constitution d'îlots énergétiques autonomes gérés par des promoteurs privés.
Votre commission a aussi adopté avec modification un amendement COM-50 de M. Poniatowski pour prévoir qu' en cas de division de la propriété ou de vente partielle de l'immeuble , le réseau intérieur , en ce qu'il ne peut appartenir qu'à un propriétaire unique, est réintégré au réseau public après remise en état aux frais du propriétaire.
Votre commission a inséré cet article additionnel ainsi rédigé. |
Article 5 ter (Art. L. 224-3 du code de la consommation) - Information du consommateur sur le type de gaz fourni
Objet : cet article, introduit à l'Assemblée nationale, dispose que les fournisseurs doivent préciser, dans leurs offres, les proportions de gaz naturel et de biométhane dans le gaz proposé.
I. Le texte adopté par l'Assemblée nationale
« Afin d' encourager le développement de la méthanisation de l'usage du biogaz », le présent article, introduit en commission des affaires économiques, prévoit que les fournisseurs devront désormais préciser, dans leurs offres, « les proportions de gaz naturel et de biométhane dans le gaz proposé » . Il complète pour ce faire l'article L. 224-3 du code de la consommation qui vise l'ensemble des informations que doivent comporter les offres de fourniture d'électricité et de gaz naturel.
II. La position de votre commission
Votre rapporteur approuve le principe de cet article mais observe que l'information visée ici n'est pertinente que dans le cadre des offres dites « vertes » de gaz qui comportent une part de biométhane , comme le prévoit le présent amendement.
Compte tenu du faible développement actuel de la filière, cette proportion n'atteint au mieux que quelques pourcents dans les offres vertes et un pourcentage nul dans les offres « non vertes ». L'information sur les premières pourra donc s'avérer utile au consommateur, en lui permettant d'arbitrer, le cas échéant, entre des offres vertes proposées par différents fournisseurs en fonction de leurs taux respectifs d'incorporation de biométhane ; elle est en revanche sans intérêt pour les offres non vertes , où cette proportion sera nécessairement égale à zéro puisque les fournisseurs valoriseront toujours le biométhane dans des offres vertes.
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié. |
Article 6 (Art. L. 661-4, art. L. 661-10 à L. 661-20 [nouveaux] du code de l'énergie) - Contrôle de la qualité environnementale des biocarburants
Objet : cet article transposant la directive (UE) 2015/1513 du 9 septembre 2015 définit le régime des sanctions applicables en cas de non-respect des critères de durabilité des biocarburants et modifie les niveaux minimum de réduction des gaz à effet de serre de ces biocarburants en fonction de la date de mise en service de leur unité de production.
I. Le droit en vigueur
Pour encourager le développement des biocarburants, l'article 266 quindecies du code des douanes impose aux distributeurs de carburants un prélèvement supplémentaire de taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) dont ils peuvent être exonérés lorsqu'ils respectent les objectifs d'incorporation des biocarburants dans les carburants mis à la vente, et à la condition que ces biocarburants respectent eux-mêmes des « critères de durabilité » .
Ces critères de qualité environnementale sont définis aux articles L. 661-4 à L. 661-6 du code de l'énergie et s'imposent, en vertu de l'article L. 661-3, à « toutes les étapes de la chaîne de production et de distribution ». Comme décrit dans l'étude d'impact, il s'agit à la fois de « critères dits «terres» (par exemple, les biocarburants ne doivent pas être produits à partir de matières premières provenant de terres cultivées après déforestation) ou des critères de réduction des émissions de gaz à effet de serre par rapport à l'utilisation de carburants fossiles ».
Ainsi, l'article L. 661-4 dispose que les biocarburants doivent présenter « un potentiel de réduction des émissions de gaz à effet de serre » par rapport aux carburants fossiles d'au moins « 50 % au 1 er janvier 2017 » et « 60 % au 1 er janvier 2018 , pour les biocarburants produits dans des installations dans lesquelles la production aura démarré à partir du 1 er janvier 2017 ».
Au niveau européen, la directive du 9 septembre 2015 92 ( * ) prévoit, d'une part, de porter ce seuil à 60 % pour les biocarburants produits dans des unités de production mises en service depuis le 5 octobre 2015 et, d'autre part, que les États membres prennent des dispositions lorsque des cas de fraude sont détectés ; l'étude d'impact précise à cet égard que « plusieurs États membres ont constaté des fraudes notamment au niveau des produits permettant de réaliser des biocarburants éligibles au double comptage comme les huiles alimentaires usagées ».
II. Le texte du projet de loi
Le présent article vise donc à transposer pleinement la directive de 2015 en ajustant les critères de durabilité des biocarburants pour se conformer à la date de mise en service de l'unité de production retenue par le droit européen et en renforçant les outils de contrôle du respect de ces critères pour pouvoir sanctionner pénalement, le cas échéant, tous les acteurs de la chaîne des biocarburants . En effet, alors que le respect des critères incombe « aux cultivateurs/récoltants d'une part et aux industriels qui fabriquent les biocarburants d'autre part », « les outils législatifs actuellement à disposition ne permettent pas de sanctionner ces opérateurs pour des fraudes qu'ils commettraient, mais uniquement les personnes qui mettent les carburants à la consommation » 93 ( * ) .
Sur le premier point, l'article L. 661-4 est modifié pour maintenir le seuil des 50 % pour les biocarburants produits dans des unités mises en service avant le 5 octobre 2015 et le porter à 60 % pour ceux produits dans des unités mises en service après cette date . En pratique , ce durcissement n'aura aucun impact sur la production française existante , puisqu'aucune installation n'a été mise en service depuis le 5 octobre 2015, mais relève le seuil d'exigence pour l'avenir, en particulier lorsqu'il sera question de produire des biocarburants dits avancés ou de deuxième génération.
Sur le second point, deux nouveaux chapitres II « Contrôles et sanctions administratives » et III « Sanctions pénales » sont créées au sein du code de l'énergie comportant les articles L. 661-10 à L. 661-20 (devenus L. 662-1 à L. 662-10 et L. 663-1 dans le texte adopté par l'Assemblée) qui prévoient en particulier d' habiliter, en plus des agents de la direction générale de l'énergie et du climat déjà compétents, des inspecteurs de l'environnement, des gardes champêtres, des agents des douanes, des agents des services de l'État chargés des forêts, des agents de l'Office national des forêts et des agents des réserves naturelles pour rechercher et constater les manquements aux obligations. Sont par ailleurs fixées les règles d'instruction et de procédure, dont le respect du principe du contradictoires, ainsi que les sanctions administratives et pénales encourues.
III. Les modifications apportées par l'Assemblée nationale
En commission , les députés ont adopté, sur la proposition du rapporteur, de nombreux amendements rédactionnels ou de précision ainsi que plusieurs amendements étendant le champ de la nouvelle surveillance administrative aux bioliquides . Les bioliquides désignent les combustibles liquides produits à partir de la biomasse et destinés à des usages énergétiques autres que pour le transport, y compris la production d'électricité, le chauffage et le refroidissement, quand les biocarburants désignent les combustibles liquides ou gazeux produits à partir de la biomasse et qui sont utilisés pour le transport .
En séance , un amendement de cohérence rédactionnelle du rapporteur a été adopté.
IV. La position de votre commission
Le présent article n'appelle pas d'observations particulières puisqu'il ne crée pas, en pratique, d'obligations nouvelles pour la filière agro-industrielle française et qu'il renforce la lutte contre les fraudes , ce que les producteurs approuvent également.
À l'occasion de l'examen de ces dispositions en commission, deux amendements de M. Cuypers et plusieurs de ses collègues ont cependant soulevé un problème réel, celui de la concurrence déloyale de certains biocarburants importés , sur lequel votre rapporteur s'est engagée à travailler, avec le Gouvernement, d'ici à la séance publique.
Votre commission a adopté cet article sans modification. |
Article 6 bis (Art. L. 651-2 et L. 651-3 [nouveaux] du code de l'énergie) - Distribution suffisante de carburants compatibles avec tous les véhicules et engins roulants
Objet : cet article, introduit à l'Assemblée nationale, vise à sécuriser l'approvisionnement en carburants des véhicules et engins roulants incompatibles avec certains mélanges incorporant des biocarburants.
I. Le texte adopté par l'Assemblée nationale
En raison du développement de nouveaux mélanges incorporant une part croissante de biocarburants - essence E10 (ou SP-95 E10) ou gazole B10 qui contiennent jusqu'à 10 % de biocarburants 94 ( * ) - certains véhicules ou engins roulants encore en service qui sont incompatibles avec ces nouveaux carburants pourraient avoir des difficultés à s'approvisionner dans les années à venir.
Ainsi, selon la Commission européenne, « une petite proportion du parc automobile, représentant néanmoins un nombre non négligeable de véhicules non compatibles avec les mélanges à plus forte teneur en biocarburants devrait persister en 2020 et au-delà ; entre 1,3 et 6,8 % du parc des utilitaires légers de l'Union européenne - soit entre 1,6 et 9 millions de véhicules environ - seront vraisemblablement incompatibles avec le mélange E10 en 2020. Les mélanges d'EMAG (par exemple B10 et B30) pourraient également causer des problèmes techniques, notamment de dilution d'huile, en particulier à basse température ambiante ».
D'ores et déjà, la législation européenne impose une obligation d'information des consommateurs sur la compatibilité entre les carburants et les véhicules 95 ( * ) mais aucune obligation de double distribution : au-delà d'un certain seuil de teneur en biocarburants, le droit européen demande seulement aux États-membres d'assurer, pour la distribution d'essence et « en consultation avec les parties prenantes, une couverture géographique appropriée » 96 ( * ) .
Aucune règle de droit européen n'exige donc aujourd'hui qu'une double distribution d'essence ou de diesel soit mise en place dans chaque station-service .
Or, le présent article, créé à l'initiative du rapporteur de la commission du développement durable, introduit deux nouveaux articles au sein du titre du code de l'énergie consacré à la distribution du pétrole, des biocarburants et des bioliquides :
- l'article L. 651-2, qui conditionne la distribution de carburants dont la compatibilité avec les véhicules en circulation est limitée au maintien, « dans la même station-service » , de la fourniture de carburants compatibles avec tous les véhicules et engins roulants, la liste des carburants concernés devant être fixée par arrêté ;
- l'article L. 651-3, qui permet d'exiger des distributeurs le maintien de la fourniture de certains carburants lorsque des véhicules et engins roulants seraient non pas incompatibles mais difficilement modifiables pour fonctionner avec d'autres carburants, la liste des carburants et leurs modalités de distribution étant là aussi à préciser par arrêté.
II. La position de votre commission
Sur la proposition de votre rapporteur, votre commission a adopté un amendement COM-87 pour éviter une surtransposition du droit communautaire qui risquerait, en outre, de fragiliser encore le secteur de la distribution de carburants , alors que 28 000 stations-service ont fermé entre 1985 et 2016 et que les 11 000 stations restantes n'assurent déjà plus un maillage optimal du territoire.
Cet amendement prévoit donc que la distribution assure une couverture géographique appropriée , qu'il appartiendra à l'État de définir après consultation des parties prenantes, comme le droit européen l'y invite, et avec une clause de revoyure annuelle qui permettra de tenir compte de l'évolution des parts de marchés respectives des carburants.
Votre commission a adopté cet article ainsi modifié. |
Article 6 ter (nouveau) (Art. L. 2224-37 du code général des collectivités territoriales) - Intervention des collectivités et de leurs groupements en matière de stations de recharge de véhicules en gaz ou en hydrogène
Objet : cet article, introduit par votre commission, permet aux collectivités territoriales et à certains de leurs groupements de participer au déploiement de stations de recharge de véhicules en gaz, en biogaz ou en hydrogène.
L'article L. 2224-37 du code général des collectivités territoriales dispose aujourd'hui que les collectivités territoriales et certains de leurs groupements peuvent, en cas d'insuffisance de l'offre, participer au déploiement de bornes de recharge de véhicules électriques .
Votre commission a adopté avec modification un amendement COM-45 de M. Poniatowski et plusieurs de ses collègues qui étend cette possibilité d'intervention , dans les mêmes conditions, à l'installation et à l'entretien de stations de recharge de véhicules fonctionnant au gaz naturel véhicule (GNV), au bio-GNV ou à l'hydrogène .
Sur la forme, votre rapporteur a jugé que le lien, même indirect, avec le texte est présent dès lors qu'il est question de favoriser l'émergence de solutions de mobilité alternatives aux véhicules fonctionnant avec des carburants fossiles. Une telle mesure peut donc être lue comme le pendant, côté consommation, de l'arrêt de la production nationale d'hydrocarbures.
Sur le fond, l'élargissement d'une formule qui a montré son efficacité pour mailler le territoire paraît justifiée . Elle s'inscrit par ailleurs dans les objectifs de mobilité durable fixés par la loi « Transition énergétique » et déclinés dans la programmation pluriannuelle de l'énergie
Votre commission a inséré cet article additionnel ainsi rédigé. |
Article 7 (Art. L. 222-9 du code de l'environnement) - Réduction des émissions de certains polluants atmosphériques
Objet : cet article met en conformité les objectifs nationaux et le plan national de réduction des émissions de certains polluants atmosphériques, en particulier la périodicité de sa révision, avec la directive (UE) 2016/2284 du 14 décembre 2016.
I. Le droit en vigueur
L'article L. 222-9 du code de l'environnement dispose qu'un « plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques [PRÉPA] est arrêté par le ministre chargé de l'environnement afin d'atteindre [les] objectifs » nationaux de réduction de ces émissions 97 ( * ) et que « ce plan est réévalué tous les cinq ans et, si nécessaire, révisé ». Le plan pour la période 2017-2021 a été publié en mai 2017.
Au plan européen, la directive du 14 décembre 2016 98 ( * ) prévoit « la révision du plan au moins tous les quatre ans (au lieu d'une révision quinquennale selon l'article L. 222-9 en vigueur), et précise que le plan doit être révisé lorsque l'inventaire des émissions de polluants atmosphériques met en évidence la non-atteinte des objectifs de réduction des émissions » 99 ( * ) .
II. Le texte du projet de loi
Le présent article vise donc à assurer la parfaite conformité de notre droit interne avec le droit européen. Pour ce faire, il ramène à quatre ans la périodicité de révision du PRÉPA et précise, pour lever toute ambiguïté, que sont visées les émissions anthropiques et que les objectifs de réduction sont fixés pour les périodes allant de 2020 à 2024, de 2025 à 2029 et à partir de 2030.
III. Les modifications apportées par l'Assemblée nationale
En commission , les députés ont adopté, sur proposition du rapporteur, trois amendements rédactionnels ainsi qu'un amendement corrigeant la liste des schémas et plans régionaux (schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires [SRADDET], schémas régionaux d'aménagement, schémas régionaux du climat, de l'air et de l'énergie [SRCAE] et plans de protection de l'atmosphère [PPA]) dans lesquels les objectifs nationaux et les actions du plan national doivent être pris en compte.
IV. La position de votre commission
Cet article, qui met en conformité notre législation avec le droit européen, n'appelle pas de commentaires.
Votre commission a adopté cet article sans modification. |
Article 7 bis A - Rapport sur la réelle prise en compte des objectifs de développement durable dans les plans de protection de l'atmosphère lors de l'attribution des marchés publics
Objet : cet article, introduit à l'Assemblée nationale, demande la remise au Parlement, dans l'année suivant la promulgation de la loi, d'un rapport du Gouvernement portant sur la réelle prise en compte des objectifs de développement durable dans les plans de protection de l'atmosphère lors de l'attribution des marchés publics.
I. Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Introduit en séance par un amendement de M. Saddier et Mme Duby-Muller, cet article prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement, dans l'année suivant la promulgation de la loi, sur la façon dont les plans de protection de l'atmosphère (PPA) pourraient permettre de mieux prendre en compte les objectifs de développement durable lors de l'attribution des marchés publics .
Il s'agissait en réalité d'une position de repli après le rejet d'un amendement des mêmes auteurs et de M. Rolland, au terme duquel, dans les territoires où un plan de protection de l'atmosphère a été élaboré, la préférence pouvait être donnée , lors de l'attribution des marchés publics, à égalité de prix ou à équivalence d'offres, aux offres qui utilisent les modes de transport et de déplacement des gros engins et des salariés les moins polluants pour l'atmosphère. Le rapporteur et le ministre avaient rappelé que rien n'interdisait une telle préférence dans la législation existante et que, s'il s'avérait qu'un rappel des possibilités permises par le code des marchés publics était nécessaire, « la circulaire interministérielle [semblait] un outil plus adapté que la présente loi ».
II. La position de votre commission
Votre commission a adopté deux amendements identiques COM-88 et COM-95 de votre rapporteur et du rapporteur pour avis pour préserver l'objet du rapport mais en améliorer la rédaction et l'étendre à l'ensemble des marchés publics , et pas seulement à ceux qui seraient attribués dans une zone couverte par un PPA.
Votre commission a adopté cet article sans modification. |
Article 7 bis - Plan d'action favorisant le recours aux énergies les moins émettrices de particules et facilitant le raccordement aux infrastructures gazières publique ou réseaux de chaleur existants
Objet : cet article, introduit à l'Assemblée nationale, prévoit que dans le cadre d'un plan de protection de l'atmosphère pour lequel les valeurs limites relatives aux particules fines sont dépassées, le préfet établit, en concertation avec les collectivités territoriales concernées, un plan d'action favorisant le recours aux énergies les moins émettrices de particules et facilitant le raccordement aux infrastructures gazières publique ou réseaux de chaleur existants.
I. Le texte adopté par l'Assemblée nationale
En commission , les députés ont adopté un amendement de M. Saddier, Mme Duby-Muller et M. Rolland, pour prévoir, dès lors qu'un plan de protection de l'atmosphère (PPA) a été établi, la définition par le représentant de l'État dans le département, en concertation avec les collectivités territoriales concernées, d'un « plan d'action favorisant le recours aux énergies les moins émettrices de particules et facilitant le raccordement aux infrastructures gazières publiques existantes ».
En séance , une précision et un complément ont été apportés :
- par un amendement de M. Saddier et Mme Duby-Muller sous-amendé par le rapporteur, il a été précisé, « afin de ne pas faire peser de risque juridique » sur les plans de protection de l'atmosphère récemment adoptés ou en passe de l'être, que ce plan d'action ne s'appliquera que pour les plans dont l'élaboration et la révision sont engagées après l'entrée en vigueur de la loi , et seulement pour les plans dans le périmètre desquels « les valeurs limites relatives aux particules fines sont dépassées » ;
- par un amendement du Gouvernement, il a été ajouté que le plan d'action viserait à faciliter le raccordement aux réseaux de gaz mais aussi aux « réseaux de chaleur existants ».
II. La position de votre commission
Votre commission a adopté deux amendements identiques COM-89 et COM-96 de votre rapporteur et du rapporteur pour avis qui tendent à :
- préciser que les mesures arrêtées par le préfet ne constituent pas un nouveau plan, distinct du PPA , mais sont intégrées dans le PPA ;
- prévoir que l'élaboration de telles mesures est une faculté laissée aux préfets de département et non une obligation , afin de ne pas ajouter de contraintes supplémentaires lors de l'élaboration ou de la révision des PPA et de tenir compte des spécificités de chaque territoire ;
- enfin, disposer que les énergies mais aussi les technologies les moins émettrices doivent être favorisées afin de ne pas exclure, par principe, le chauffage au bois mais d'inciter au renouvellement du parc vers les appareils les plus performants en termes de rendement énergétique et d'émissions de particules fines.
Votre commission a adopté cet article sans modification. |
Article 7 ter (nouveau) - (Art. L. 2224-34 du code général des collectivités territoriales) - Personnes publiques pouvant mettre en oeuvre des actions de maîtrise de la demande d'énergie sur leur territoire
Objet : cet article, introduit par votre commission, permet aux établissements publics de coopération intercommunale ayant adopté un plan climat-aire-énergie territorial à titre facultatif et aux syndicats d'énergie de mettre en oeuvre des actions de maîtrise de la demande d'énergie sur le territoire.
L'article L. 2224-34 du code général des collectivités territoriales prévoit aujourd'hui que seuls les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et la métropole de Lyon, lorsqu'ils ont adopté le plan climat-air-énergie territorial (PCAET), peuvent mettre en oeuvre des actions de maîtrise de la demande d'énergie sur leur territoire .
Votre commission a adopté un amendement COM-52 de M. Laurent et plusieurs de ses collègues pour ajouter à ces personnes publiques les EPCI qui ont adopté un PCAET à titre facultatif et les syndicats d'énergie 100 ( * ) .
Votre rapporteur a considéré que le lien avec le texte, même indirect, est tenu , ce qui pose la question de la recevabilité de cet amendement au titre de l'article 45 de la Constitution, mais a jugé cette disposition intéressante et cohérente avec l'esprit du droit en vigueur.
Votre commission a inséré cet article additionnel ainsi rédigé. |
Article 8 (Art. L. 661-1 et L. 691-1 du code minier) - Application à l'outre-mer de l'arrêt progressif de la recherche et de l'exploitation des hydrocarbures
Objet : cet article prévoit que la cessation progressive de la recherche et de l'exploitation des hydrocarbures s'applique aux îles Wallis et Futuna ainsi qu'aux Terres australes et antarctiques françaises.
I. Le droit en vigueur
1° L'applicabilité du projet de loi en l'état
Comme rappelé dans l'étude d'impact, l'interdiction progressive des activités de recherche et d'exploitation des hydrocarbures d'ici à 2040 s'applique aux collectivités d'outre-mer selon les droits reconnus et les compétences dévolues par les régimes qui leur sont applicables .
En l'état du droit, les dispositions de l'article 1 er du présent projet de loi trouvent ainsi à s'appliquer :
- de plein droit aux départements et régions d'outre-mer régis par l'article 73 de la Constitution (Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte et La Réunion) ; bien que la délivrance des titres miniers en mer y relève, en vertu de l'article L. 611-31 du code minier 101 ( * ) , de la compétence de la région selon des modalités à préciser par un décret en Conseil d'État, l'étude d'impact précise que ce décret, à paraître prochainement, « ne remettra pas en cause l'application du présent projet de loi » ;
- de façon diverse dans les collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 de la Constitution, selon les compétences qui leur ont été transférées :
• à Saint-Pierre-et-Miquelon, sur terre et en mer à défaut de concession à la collectivité par l'État, selon la faculté prévue par l'article L.O. 6414-3 du code général des collectivités territoriales, de « l'exercice des compétences en matière d'exploration et d'exploitation des ressources naturelles, biologiques et non biologiques, du fond de la mer, de son sous-sol et des eaux surjacentes » ;
• uniquement sur terre à Saint-Barthélemy et Saint-Martin , ces collectivités étant compétentes pour réglementer le droit d'exploration et d'exploitation des ressources naturelles, dont celles minières en mer, en vertu respectivement des articles L.O. 6214-6 et L.O. 6314-6 du même code ;
- ni sur terre ni en mer en Polynésie Française , où le droit minier est régi par les « lois du pays » adoptées par l'assemblée de la collectivité 102 ( * ) , et en Nouvelle-Calédonie , où la réglementation relative aux hydrocarbures, au nickel, au chrome, au cobalt et aux éléments des terres rares est là aussi fixée par les « lois du pays » adoptées par le congrès 103 ( * ) et où les provinces réglementent et exercent les droits d'exploration, d'exploitation, de gestion et de conservation des ressources naturelles non biologiques du sol et du sous-sol, des eaux intérieures et de la mer territoriale 104 ( * ) .
S'agissant des territoires d'outre-mer que sont les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF) et que demeure Wallis-et-Futuna jusqu'à l'intervention de la loi organique qui lui confèrera le statut de collectivité d'outre-mer, le droit minier national s'applique :
- sous réserve de dispositions spécifiques prévues aux articles L. 661-1 et L. 661-2 du code minier aux TAAF ;
- « dans le respect des compétences dévolues à cette collectivité » et à l'exception de certaines de ses dispositions à Wallis-et-Futuna , en vertu de l'article L. 691-1 du même code.
Aussi, pour être pleinement applicable dans ces deux derniers territoires, l'article 1 er du présent projet de loi nécessite-t-il l'ajout d'une disposition spécifique dans le code minier . Tel est l'objet du présent article.
2° L'impact économique spécifique du projet de loi pour ces territoires
L'étude d'impact précise que « compte tenu des caractéristiques géologiques de leur sous-sol et du potentiel en hydrocarbures en mer, les territoires d'outre-mer impactés par le projet de loi sont la Guyane, Saint-Pierre-et-Miquelon et les Îles Éparses dans le canal du Mozambique », ces dernières relevant des TAAF.
En pratique, la présence d'hydrocarbures n'est aujourd'hui attestée qu'au large de la Guyane à la suite d'un premier forage intervenu en 2011 dans le cadre du permis dit de « Guyane Maritime » sans, comme le rappelle l'étude d'impact, que le caractère commercial de cette découverte ne soit confirmé, ni le potentiel du gisement en mer guyanais parfaitement connu 105 ( * ) .
Accordé en 2001 puis prolongé à deux reprises en 2007 et 2011, le permis « Guyane Maritime » avait pris fin le 1 er juin 2016. Par un arrêté du 14 septembre dernier 106 ( * ) , le Gouvernement a autorisé sa prolongation jusqu'au 1 er juin 2019 afin de « conclure cette phase d'inventaire » du potentiel en hydrocarbures de la Guyane. Désormais seul titulaire du permis, le groupe Total a indiqué vouloir « terminer le programme d'exploration sur ce permis par le forage d'un dernier puits d'exploration qui devrait se dérouler fin 2018-début 2019 afin de pouvoir conclure définitivement à la pertinence ou non de la phase de développement des réserves » 107 ( * ) .
Dans les deux autres zones impactées, Saint-Pierre-et-Miquelon et le canal du Mozambique au large des Îles Éparses, les ressources y sont très mal connues et la recherche embryonnaire - un seul permis d'exploration est en cours de validité au large de Juan de Nova. En n'autorisant plus la délivrance d'aucun permis d'exploration, le présent projet de loi ne permettra donc pas d'entamer ou de poursuivre l'inventaire des ressources dans ces deux territoires .
II. Le texte du projet de loi
Le I du présent article complète les deux articles du code minier (L. 661-1 et L. 691-1) relatifs respectivement aux modalités d'application du code minier dans les TAAF et à Wallis-et-Futuna pour préciser que les dispositions organisant l'interdiction de l'exploration et de l'exploitation des hydrocarbures, introduites dans le code par l'article 1 er du présent projet de loi, y sont applicables . Son II prévoit que l'article 2 du présent texte, relatif aux demandes d'octroi ou de prolongation de permis ou de concession visées par l'interdiction, s'y applique de la même façon .
III. Les modifications apportées par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.
IV. La position de votre commission
Ces dispositions n'appellent pas de remarques particulières
Votre commission a adopté cet article sans modification. |
* 2 Qui consiste à diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2050.
* 3 Art. 1 er de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte.
* 4 L'impact économique spécifique du projet de loi pour l'outre-mer est présenté à l'article 8.
* 5 Étude d'impact.
* 6 Pôle interministériel de prospective et d'anticipation des mutations économiques (Pipame), Enjeux et perspectives des filières industrielles de la valorisation énergétique du sous-sol profond, 2016.
* 7 Qui dispose : « Relèvent du régime légal des mines les gîtes renfermés dans le sein de la terre ou existant à la surface connus pour contenir les substances minérales ou fossiles suivantes :
« 1° De la houille, du lignite, ou d'autres combustibles fossiles, la tourbe exceptée, des bitumes, des hydrocarbures liquides ou gazeux, du graphite, du diamant ; (...) ».
* 8 Sauf dans l'hypothèse où il serait propriétaire de la surface ou agirait avec son consentement, auquel cas seul un régime de déclaration à l'administration est imposé (art. L. 121-1).
* 9 Sur le plateau continental ou dans la zone économique exclusive (art. L. 123-3).
* 10 Décret n° 2006-648 du 2 juin 2006 relatif aux titres miniers et aux titres de stockage souterrain, art. 23.
* 11 Art. L. 122-3 et L. 142-1.
* 12 Art. L. 121-3, L. 122-1 et L. 132-6.
* 13 Art. L. 132-2, L. 132-11, L. 142-7 et L. 142-8.
* 14 Préservation de la sécurité et de la salubrité publiques, de la solidité des édifices publics et privés, conservation des voies de communication, de la mine et des autres mines, caractéristiques essentielles du milieu environnant, terrestre ou maritime, et plus généralement protection des espaces naturels et des paysages, de la faune et de la flore, des équilibres biologiques et des ressources naturelles, conservation des intérêts de l'archéologie ainsi que des intérêts agricoles des sites et des lieux affectés par les travaux et les installations afférents à l'exploitation.
* 15 Art. L. 162-1, L. 162-3 et L. 162-10.
* 16 Loi n° 2011-835 du 13 juillet 2011 visant à interdire l'exploration et l'exploitation des mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique et à abroger les permis exclusifs de recherches comportant des projets ayant recours à cette technique.
* 17 « Si d'autres techniques présentaient des inconvénients ou des dangers tels qu'il faille en envisager l'interdiction, l'État disposerait, dans le cadre de la police des mines, des outils nécessaires pour en proscrire immédiatement l'utilisation dans les travaux miniers, qui sont subordonnés à une autorisation préalable et soumis à des contrôles. »
* 18 IFP Énergies nouvelles (IFPEN), Hydrocarbures de roche-mère, État des lieux, janvier 2013.
* 19 Sur les 63 concessions en cours de validité, seules cinq concessions d'hydrocarbures - et deux concessions d'exploitation de gaz de mine, qui resteront autorisées par exception - disposent d'une durée initiale allant au-delà de 2040 : Lacq, Lacq-Nord et Lucats-Cabeil (2041), les Arbousiers (2045) et Courbey (2054). Source : rapport n° 174 (AN - XV e législature).
* 20 Voire le cas échéant ceux qui pourraient être délivrés avant la promulgation de la loi.
* 21 « La superficie du permis exclusif de recherches d'hydrocarbures liquides ou gazeux, dit «permis H», est réduite de moitié lors du premier renouvellement et du quart de la surface restante lors du deuxième renouvellement. Ces réductions ne peuvent avoir pour effet de fixer pour un permis une superficie inférieure à une limite fixée par voie réglementaire. Les surfaces restantes sont choisies par le titulaire. Elles doivent être comprises à l'intérieur d'un ou de plusieurs périmètres de forme simple.
« En cas de circonstances exceptionnelles invoquées par le titulaire ou par l'autorité administrative, la durée de l'une seulement des périodes de validité d'un «permis H» peut être prolongée de trois ans au plus, sans réduction de surface ».
* 22 Au sens de l'article L. 121-5 du code minier, « sont considérées comme substances connexes au sens du présent code celles contenues dans une masse minérale ou fossile dont l'abattage est indispensable pour permettre l'extraction des substances mentionnées dans le titre ou l'autorisation ».
* 23 La thiochimie est l'activité de transformation chimique des produits contenant du soufre.
* 24 1 500 emplois directs et 4 000 emplois indirects supprimés à terme, perte des recettes fiscales correspondantes pour l'État et les collectivités concernées, dégradation de la balance commerciale, entre autres.
* 25 Exposé des motifs du projet de loi.
* 26 Source : Union française des industries pétrolières (UFIP).
* 27 Source : L'activité de la pétrochimie en France métropolitaine, données 2016, Commissariat général au développement durable, juillet 2017.
* 28 D'ores et déjà, l'exploitation de gisements de pétrole permet de chauffer gratuitement, à Parentis, une dizaine d'hectares de serres de tomates ou, dans le bassin d'Arcachon, les 450 logements que comportera à terme un écoquartier, grâce aux calories récupérées de l'eau issue du processus de production du pétrole
* 29 Art. L. 337-6 et R. 337-19.
* 30 Art. L. 341-2 et L. 452-1.
* 31 Art. R. 446-2.
* 32 Art. L. 271-4.
* 33 En l'absence de décision sur la demande de concession formulée par son titulaire à l'expiration du permis, l'article L. 142-2 proroge la validité du permis jusqu'à l'intervention d'une décision sur cette demande.
* 34 Art. L. 337-6 et R. 337-19.
* 35 Art. L. 341-2 et L. 452-1.
* 36 Art. R. 446-2.
* 37 Art. L. 271-4.
* 38 42 demandes d'octroi initial et 31 demandes de prolongation.
* 39 8 demandes d'octroi initial, dont 5 relevant du droit de suite, et 6 demandes de prolongation.
* 40 Il s'agit de deux demandes d'octroi de concession où le demandeur ne dispose pas d'un permis exclusif de recherches en cours de validité sur la zone concernée, et qui doivent donc faire l'objet d'une mise en concurrence (art. L. 132-4 du code minier), et d'une demande d'extension géographique d'une concession existante, pour laquelle il n'y a pas non plus de permis exclusif de recherches dans la zone concernée.
* 41 Pour une présentation plus détaillée du droit en vigueur, cf. le commentaire de l'article 1 er , I, 4°.
* 42 Loi n° 2011-835 du 13 juillet 2011 visant à interdire l'exploration et l'exploitation des mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique et à abroger les permis exclusifs de recherches comportant des projets ayant recours à cette technique.
* 43 IFPEN, étude précitée.
* 44 Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, rapport n° 174 (2013-2014) de MM. Jean-Claude Lenoir, sénateur et Christian Bataille, député.
* 45 M. Lecornu, secrétaire d'État auprès du ministre, lors des débats à l'Assemblée.
* 46 Comme indiqué par le ministre lors de son audition par votre commission.
* 47 Source : Union française des industries pétrolières (UFIP).
* 48 Étude 2015 - ISO 14044 Institut Fur Energie Heildelberg, Bio-Deloitte, CNRS, Birgit Grahl, citée par La Française de l'énergie : en Lorraine, ce gaz local a une empreinte carbone 10 fois plus faible que celle du mix gazier français (compte non tenu de l'arrivée, depuis, de gaz de schiste américain sous forme de GNL dans le mix énergétique français).
* 49 Depuis l'arrêt de la production de Lacq en 2013 et si l'on excepte la production marginale de gaz de houille dans les anciennes régions charbonnières et celle, encore très émergente, de biométhane.
* 50 Les interconnexions et les terminaux méthaniers n'étant « pas dimensionnés pour importer suffisamment de gaz lors d'une pointe de froid », comme rappelé dans l'étude d'impact.
* 51 Outre le rôle lié à la modulation de la consommation entre l'hiver et l'été, les stockages peuvent aussi pallier la défaillance ponctuelle d'un approvisionnement ou d'une infrastructure ou résoudre des problèmes d'équilibrage ou de congestion temporaire du réseau.
* 52 Décret n° 2014-328 du 12 mars 2014 modifiant le décret n° 2006-1034 du 21 août 2006 relatif à l'accès aux stockages souterrains de gaz naturel.
* 53 Arrêté du 31 juillet 2017 relatif aux modalités de prise en compte des autres instruments de modulation pour l'application de l'obligation de déclaration et de détention de stocks et de capacités de stockage des fournisseurs de gaz naturel
* 54 Il est à noter que cette norme est plus élevée que celle appliquée ailleurs en Europe, où l'obligation de stockage ne couvre en général que le risque de probabilité 5 % (soit une occurrence tous les 20 ans).
* 55 Inspection générale des finances (IGF), Conseil générale de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des technologies (CGE) et Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD), Rapport sur le stockage souterrain de gaz, avril 2017.
* 56 Cette baisse du « spread » été-hiver est elle-même liée à plusieurs phénomènes cumulatifs, conjoncturels ou structurels : surcapacités gazières au niveau mondial, baisse de la consommation en Europe, développement des autres moyens de modulation (interconnexions, terminaux méthaniers), intégration des marchés gaziers en Europe et développement des places de marché offrant des alternatives d'approvisionnement aux fournisseurs, etc.
* 57 Les autres instruments de modulation, non définis, étant forfaitairement pris en compte à hauteur des 20 % restants.
* 58 Rapport IGF/CGE/CGEDD précité.
* 59 Deux opérateurs - Storengy (et sa filiale Géométhane) et TIGF - se partagent les quinze infrastructures de stockage des territoires métropolitain considérées par la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) comme nécessaires à la sécurité d'approvisionnement.
* 60 CJUE, affaire C-226/16, conclusions de l'avocat général présentées le 26 juillet 2017.
* 61 Arrêté du 31 juillet 2017 relatif aux modalités de prise en compte des autres instruments de modulation pour l'application de l'obligation de déclaration et de détention de stocks et de capacités de stockage des fournisseurs de gaz naturel.
* 62 Art. 167 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 précitée.
* 63 Rapport IGF/CGE/CGEDD précité.
* 64 L'article d'habilitation n'évoquait en effet que la possibilité d'une régulation des tarifs des capacités de stockage, et non celle d'un mécanisme de compensation via le tarif de transport.
* 65 Loi n° 2016-1888 du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne.
* 66 Qu'ils soient raccordés aux réseaux de transport ou de distribution, le tarif de transport étant une des composantes du tarif de distribution sur lequel il se répercute.
* 67 Hormis la mention, dans l'étude d'impact, de « mesures d'efficacité énergétique » qui seraient exigés des bénéficiaires en contrepartie de la ristourne obtenue.
* 68 CRE, consultation publique du 4 mai 2017 n° 2017-005 sur la rémunération des prestations de gestion de clientèle effectuées par les fournisseurs pour le compte des gestionnaires de réseaux de distribution de gaz naturel et d'électricité auprès des clients en contrat unique.
* 69 Conseil d'État, Section du contentieux, 13 juillet 2016, n° 388150.
* 70 CA de Paris, 2 juin 2016, 2014/26021.
* 71 « Cet encadrement entre dans les compétences de la CRE définies par les articles L. 134-1 et L. 134-2 du code de l'énergie, qui disposent que la CRE précise les conditions d'accès aux réseaux publics d'électricité et de gaz naturel, dans le respect des dispositions législatives et réglementaires », CRE, consultation précitée.
* 72 CRE, délibérations n° 2017-196 à 2017-199.
* 73 Un tel contrat, liant Direct Énergie et ERDF (à l'époque, aujourd'hui Enedis), était précisément l'objet du litige ayant conduit à la décision du Conseil d'État précitée.
* 74 EMF (EDF Énergies nouvelles et Enbridge), AM (Iberdrola et RES) et LEM (Engie et EDP R).
* 75 CRE, délibération du 17 novembre 2016 portant décision sur les tarifs d'utilisation des réseaux publics d'électricité dans le domaine de tension HTB.
* 76 Art. 105 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 précitée.
* 77 Qui prévoyait déjà un délai maximal de deux mois en l'absence de travaux d'extension et de renforcement du réseau pour les installations d'une puissance installée inférieure ou égale à 3 kVA.
* 78 Décrets n° 2016-399 du 1 er avril 2016 relatif au délai de raccordement des installations de production d'électricité à partir de sources d'énergie renouvelable, et n° 2016-1316 du 5 octobre 2016 fixant le barème des indemnités dues en cas de dépassement du délai de raccordement d'une installation de production d'électricité à partir de sources d'énergie renouvelable d'une puissance installée supérieure à trois kilovoltampères.
* 79 Art. 14 de la loi n° 2017-227 du 24 février 2017 ratifiant les ordonnances n° 2016-1019 du 27 juillet 2016 relative à l'autoconsommation d'électricité et n° 2016-1059 du 3 août 2016 relative à la production d'électricité à partir d'énergies renouvelables et visant à adapter certaines dispositions relatives aux réseaux d'électricité et de gaz et aux énergies renouvelables.
* 80 CRE, délibération du 9 mars 2017 sur le projet de décret d'application de ces dispositions, devenu le décret n° 2017-628 du 26 avril 2017 fixant le barème d'indemnisation en cas de dépassement du délai de raccordement au réseau de transport d'une installation de production d'électricité à partir de sources d'énergie renouvelable en mer.
* 81 « Il n'existe par exemple que quelques câbliers en Europe capables de raccorder des parcs d'éoliennes offshore, ce qui démultiplie les conséquences financières potentielles en cas de défaillance, et les risques d'exploitation sont aussi bien plus élevés qu'à terre », rapport n° 285 (2016-2017).
* 82 Même si, comme indiqué par RTE à la CRE dans la délibération précitée, en raison de « l'évolution de l'état des connaissances entre les moments où les lauréats ont remis leurs offres et aujourd'hui », « les risques de retard et d'indisponibilité sont plus significatifs qu'initialement anticipés ».
* 83 CRE, délibération précitée.
* 84 CRE, délibération précitée.
* 85 « Un réseau public de distribution d'électricité a pour fonction de desservir les consommateurs finals et les producteurs d'électricité raccordés en moyenne et basse tension. (...)
« Sous réserve des dispositions des articles 12 et 24 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée et des articles 10 et 37 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 précitée, un réseau public de distribution est constitué par les ouvrages de tension inférieure à 50 kV situés sur le territoire de l'autorité organisatrice de la distribution d'électricité ainsi que par les ouvrages de tension supérieure existant, sur le territoire métropolitain continental, à la date de publication de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 précitée et non exploités par Électricité de France en tant que gestionnaire du réseau public de transport à cette même date. Un décret en Conseil d'État définit, en particulier pour les postes de transformation, les conditions de l'appartenance des ouvrages ou parties d'ouvrages aux réseaux publics de distribution, notamment en ce qui concerne leurs caractéristiques, leurs fonctions ou la date de leur mise en service.
* 86 Ordonnance n° 2016-1725 du 15 décembre 2016 relative aux réseaux fermés de distribution
* 87 Art. 167 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 précitée.
* 88 Cf. art. L. 344-1 : « il doit remplir l'une des deux conditions suivantes :
- l'intégration dans ce réseau des opérations ou du processus de production des utilisateurs est justifiée par des raisons spécifiques ayant trait à leur technique ou à leur sécurité ;
- ce réseau distribue de l'électricité essentiellement au propriétaire ou au gestionnaire de réseau ou à des entreprises qui leur sont liées au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce.
Les utilisateurs d'un réseau fermé de distribution d'électricité sont les personnes physiques ou morales dont les installations soutirent ou injectent de l'électricité directement sur ce réseau. »
* 89 Art. L. 315-2.
* 90 Y compris pour le 3 e appel d'offres en cours.
* 91 Le droit en vigueur et le texte adopté à l'Assemblée nationale sur les réseaux intérieurs sont présentés à l'article 5 bis ci-avant.
* 92 Directive (UE) 2015/1513 du Parlement européen et du Conseil du 9 septembre 2015 modifiant la directive 98/70/CE concernant la qualité de l'essence et des carburants diesel et modifiant la directive 2009/28/CE relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables.
* 93 Étude d'impact.
* 94 Éthanol pour l'E10 et esters méthyliques d'acides gras (EMAG) pour le B10.
* 95 Directive 2014/94/UE du Parlement européen et du Conseil sur le déploiement d'une infrastructure pour carburants alternatifs.
* 96 Directive 2009/30/CE 2009/30/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 modifiant la directive 98/70/CE en ce qui concerne les spécifications relatives à l'essence, au carburant diesel et aux gazoles ainsi que l'introduction d'un mécanisme permettant de surveiller et de réduire les émissions de gaz à effet de serre, modifiant la directive 1999/32/CE du Conseil en ce qui concerne les spécifications relatives aux carburants utilisés par les bateaux de navigation intérieure et abrogeant la directive 93/12/CEE.
* 97 Dont sont exclues les émissions de méthane entérique naturellement produites par l'élevage de ruminants.
* 98 Directive (UE) 2016/2284 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2016 concernant la réduction des émissions nationales de certains polluants atmosphériques, modifiant la directive 2003/35/CE et abrogeant la directive 2001/81/CE.
* 99 Étude d'impact.
* 100 Dont le dernier alinéa de l'article L. 2224-37-1 précise qu'ils peuvent accompagner les EPCI à fiscalité propre qui en sont membres pour « l'élaboration du [PCAET] ainsi que la réalisation d'actions dans le domaine de l'efficacité énergétique ».
* 101 À l'exception des titres qui porteraient sur des minerais ou produits utiles à l'énergie atomique.
* 102 L'État ne demeurant compétent en matière minière que pour les seules « matières premières stratégiques telles qu'elles sont définies pour l'ensemble du territoire de la République, à l'exception des hydrocarbures liquides et gazeux » (4° de l'art. 14 de la loi n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française).
* 103 Art. 22, 40 et 99 de la loi n° 99-209 du 19 mars 2009 relative à la Nouvelle-Calédonie.
* 104 Art. 46 de la loi précitée.
* 105 L'étude d'impact indique : « si l'on prend pour base le gisement de Jubilee au Ghana (parfois donné comme « modèle » géologique pour l'offshore guyanais), le potentiel pourrait produire 80 000 à 100 000 barils/jour pendant une dizaine d'années, ce chiffre n'étant qu'une comparaison et non une appréciation de la dimension possible d'une exploitation au large de la Guyane ». En outre, après les résultats positifs enregistrés lors du premier forage, les forages suivants se sont jusqu'à présent révélés infructueux.
* 106 Arrêté du 14 septembre 2017 prolongeant le permis exclusif de recherches de mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux, dit « permis de Guyane Maritime » (Guyane), et autorisant sa mutation à la société Total E&P Guyane française SAS.
* 107 Selon un porte-parole du groupe, cité par AEF le 21 septembre 2017.