B. LE MÉCANISME DE LA PROPOSITION DE LOI : FILIALISATION DE L'ACQUISITION DE TERRES PAR DES SOCIÉTÉS ET EXTENSION DU DROIT DE PRÉEMPTION DES SAFER.
Les dispositions de la loi Sapin II, reprises dans la présente proposition de loi, visent donc à dresser des obstacles aux montages sociétaires permettent d'échapper au contrôle des SAFER sur les cessions de terres agricoles, à travers un mécanisme en deux temps :
- l'article 1 er oblige les personnes morales à acquérir des terres agricoles à travers une société dédiée au portage foncier. Cette disposition permet d'atteindre une transparence complète sur les achats de terres à travers des achats de parts sociales. Cette obligation ne concerne en réalité que peu d'acteurs, dans la mesure où les GAEC, EARL, GFA ou GFR en sont exemptés ;
- l'article 3 étend le droit de préemption des SAFER aux cessions partielles de parts sociales : ainsi, les SAFER disposent d'un droit d'interférer dans les cessions de parts de société.
Complétées par les trois autres articles du volet foncier, ces dispositions remettent les SAFER au coeur du dispositif de contrôle des concentrations de la propriété foncière.
Les SAFER sont en effet un acteur essentiel du marché foncier rural et le droit de préemption dont elles disposent est un outil puissant d'intervention sur ce marché, même s'il est peu utilisé : sur les 10 300 biens acquis par elles en 2015 et représentant 83 800 hectares, le droit de préemption a été utilisé dans 1 260 cas.
Votre rapporteur n'a pas souhaité remettre en cause les dispositions votées en loi Sapin II sur le foncier agricole. Certes, l'exercice du droit de préemption des SAFER fait l'objet de critiques fortes, notamment parce que la simple menace de l'utilisation de ce droit permet d'être en position de force dans des négociations à l'amiable.
Le rapport public 2014 de la Cour des comptes avait d'ailleurs dressé un bilan critique de l'action des SAFER, qui bénéficient d'un avantage considérable dans leur activité d'intermédiation immobilière : une exonération de droit d'enregistrement, qui s'applique y compris sur les opérations effectuées en dehors de toute préemption.
Pour autant, la SAFER reste le seul instrument à disposition de la puissance publique pour réguler les échanges de foncier agricole et l'extension de son intervention à l'acquisition de parts sociales lors de cessions partielles lui permettra de mieux assurer ses missions.
Par ailleurs, l'obligation de passer par une société de portage foncier pour l'acquisition de terres agricoles accroîtra la transparence sur le marché des terres, même si elle complexifie la tâche des opérateurs économiques. À cet égard, votre rapporteur a souhaité par un amendement accroître les cas d'exonération de cette nouvelle obligation de filialisation aux sociétés souhaitant racheter des terres dont elles sont déjà locataires.
À l'exception de cet ajout, le texte voté par l'Assemblée nationale sur le foncier agricole n'a pas été modifié par votre commission.