EXAMEN EN COMMISSION

MERCREDI 21 DÉCEMBRE 2016

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Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - Nous examinons le rapport de Jacques Grosperrin sur la proposition de résolution européenne n° 104 (2016-2017) présentée par Mme Brigitte Gonthier-Maurin et plusieurs de ses collègues, en application de l'article 73 quinquies du Règlement, sur la reconnaissance de l'enseignement supérieur comme un investissement nécessaire à l'avenir.

M. Jacques Grosperrin, rapporteur . - Cette proposition de résolution, qui a été rejetée il y a quelques semaines la commission des affaires européennes, pose des questions fondamentales à notre société : Quels sont les besoins de financement à l'horizon 2025 de l'enseignement supérieur européen, face à la massification des effectifs et dans un contexte de concurrence internationale accrue ? Quelle répartition entre financement public et financement privé ? Telles sont les questions, lourdes d'enjeux d'avenir pour notre continent, que nous pose le texte que nous examinons aujourd'hui.

Reprenant très directement l'une des propositions du comité pour la StraNES en matière de financement de l'enseignement supérieur, la présente proposition a pour objet, en premier lieu, de reconnaitre l'enseignement supérieur comme « un investissement nécessaire à l'avenir », en deuxième lieu, d'amener les dépenses d'enseignement supérieur à 2 % du PIB européen à l'horizon 2025 et, en dernier lieu, d'exclure les dépenses d'enseignement supérieur et de recherche du calcul des déficits publics.

S'agissant du premier point, je pense que nous serons tous d'accord pour reconnaître l'enseignement supérieur comme un investissement nécessaire à l'avenir. C'est bien évidemment un objectif de l'Union européenne comme en témoignent la Déclaration de la Sorbonne de 1998, le Processus de Bologne lancé en 1999, la Stratégie de Lisbonne définie en 2000 et la Stratégie « Europe 2020 » de 2010, confirmée très récemment à la conférence d'Erevan en 2015. C'est aussi un objectif de ses États membres, en premier lieu la France comme l'ont prouvé les travaux de la StraNES. La reconnaissance par l'Union et par les États membres de l'enseignement supérieur comme un « investissement nécessaire à leur avenir » n'est donc pas, à mes yeux, un sujet nécessitant l'adoption d'une résolution européenne.

S'agissant du deuxième point qui propose d'amener les dépenses d'enseignement supérieur à 2 % du PIB européen à l'horizon 2025, nous savons tous que les besoins de financement de l'enseignement supérieur sont très élevés si nous voulons faire face à la fois à la massification des effectifs et aux besoins d'amélioration et de modernisation continue des prestations offertes par les établissements, dans un contexte de vive concurrence internationale.

Mais l'objectif des 2 % du PIB est encore loin : la France est en dessous de 1,5 %, l'Union européenne dans son ensemble n'atteint pas les 1,3 %, loin derrière les États-Unis et le Canada qui dépassent les 2,5 %. L'objectif de 2 % du PIB européen consacré à l'enseignement supérieur est donc un objectif certainement souhaitable mais très ambitieux. Comment l'atteindre ?

La proposition de résolution nous propose que « les dépenses d'enseignement supérieur soient essentiellement couvertes par un financement public ». Pour ma part, je considère que l'État ne peut supporter à lui seul la charge de l'investissement dans l'enseignement supérieur : les établissements doivent aussi pouvoir développer leurs ressources propres. Vous l'aurez compris, si je partage l'ambition des auteurs de la proposition de résolution s'agissant des besoins de financement du secteur de l'enseignement supérieur, je considère que la répartition entre financement public et privé qu'ils préconisent est malheureusement irréaliste.

Le troisième point vise à exclure les dépenses d'enseignement supérieur et de recherche du calcul des déficits publics. Depuis son entrée en vigueur en 1997, le Pacte de stabilité et de croissance fixe respectivement à 3 % et 60 % du PIB les valeurs de référence pour le déficit budgétaire annuel et l'endettement public. Même si le principe d'égalité de traitement entre tous les États membres est un élément central de l'application des règles du Pacte, celui-ci prévoit néanmoins une certaine souplesse dans ses modalités d'application : il laisse notamment à la Commission et au Conseil une marge de manoeuvre pour évaluer la viabilité des finances publiques à la lumière des circonstances spécifiques à chaque pays.

L'existence de cette « marge d'appréciation » a conduit la Commission à publier une communication interprétative en janvier 2015 qui a précisé les conditions dans lesquelles trois dimensions politiques spécifiques (des réformes structurelles, des conditions conjoncturelles et des investissements publics) pouvaient être prises en compte dans l'application des seuils de référence. Depuis lors, la Commission a fait application de ces nouvelles dispositions à plusieurs reprises s'agissant notamment des dépenses liées à l'accueil des réfugiés, des dépenses de sécurité de la France et des dépenses liées aux tremblements de terre en Italie.

Mais le principe de la dérogation à l'application des règles du Pacte est loin de faire l'unanimité parmi les États membres comme parmi les experts internationaux. Le Conseil l'a largement encadré fin 2015 et la commission des affaires européennes du Sénat a très récemment adopté une proposition de résolution européenne déplorant la multiplication, depuis 2015, des clauses de flexibilité qui renforcent selon elle l'opacité autour de ce dispositif. Il ne me paraît donc pas souhaitable de demander la création d'une nouvelle dérogation à l'application des règles du Pacte de stabilité et de croissance.

Vous l'aurez compris, en dépit d'un certain nombre de convergences avec ses auteurs, je vous recommande de confirmer la position de la commission des affaires européennes et de ne pas adopter la proposition de résolution européenne qui nous est soumise aujourd'hui.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin . - La conclusion de notre rapporteur ne me surprend pas, mais je regrette que l'auteur d'une proposition ne puisse lui-même rapporter, cela m'aurait permis de vous présenter nos motivations dans le détail.

Nous le savons tous, compte tenu des avancées technologiques, nos sociétés sont confrontées à une exigence d'élévation des connaissances et des qualifications afin que chacun, à l'avenir, soit en capacité de comprendre le monde dans lequel il se trouve et puisse rebondir. Cet effort de « démocratisation » de l'accès à l'enseignement supérieur - non pas uniquement de « massification » - ne devra pas reposer sur un principe de sélection : tous et toutes doivent pouvoir aller le plus loin possible dans leurs études. C'est la raison pour laquelle nous sommes convaincus que les dépenses d'enseignement supérieur constituent un véritable investissement pour la nation et pour les entreprises qui choisissent de s'implanter sur notre territoire.

J'entends bien l'argument de M. le rapporteur sur le Pacte de stabilité et de croissance. Certaines dépenses - accueil des migrants fuyant la guerre et la misère, réparation des catastrophes naturelles ou prévention des actes terroristes, comme celui survenu avant-hier en Allemagne -ont déjà été exclues des règles de calcul. Mais si nous sommes confrontés à une multiplication des demandes de dérogation à ce Pacte, c'est tout simplement parce qu'il ne permet pas de répondre aux défis et aux enjeux de notre époque. Mais au sein de ce Pacte de stabilité et de croissance, que je condamne fortement, nous restons maîtres de la répartition budgétaire de notre nation. J'observe que nous sommes capables de dépenser des sommes extrêmement importantes pour des dispositifs tels que le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) ou le crédit d'impôt recherche CIR et que, faute de réactivité suffisante, ceux qui en bénéficient ne font pas la démonstration de leur efficacité. Ma proposition de résolution pourrait donc trouver une issue favorable dans le cadre du Pacte de stabilité et de croissance si nous nous intéressions à la façon dont les dépenses du budget de la France sont ventilées.

Mme Dominique Gillot . - Je voudrais rappeler la réflexion lancée sous l'impulsion du Fonds monétaire international (FMI), du G20 et, aujourd'hui, de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), sur la nécessaire relance budgétaire par les investissements afin d'assurer une croissance plus soutenue en Europe. Ce débat, porté par la Commission devant l'Eurogroupe le 5 décembre dernier, implique une réflexion sur l'adaptation du Pacte de stabilité et de croissance aux politiques de relance par l'investissement, que les socio-démocrates allemands et français ont engagées depuis l'automne dernier.

Un rapport alternatif, rédigé chaque année par des économistes et auquel l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE= participe activement, recommande, pour répondre au rapport de la Commission sur les plans budgétaires des États membres, d'analyser la situation économique financière, fiscale et budgétaire des États membres et de faire des propositions alternatives à celles de la Commission. Depuis l'entrée en vigueur du Pacte de stabilité et de croissance, la situation économique, sociale, humaine, technologique et scientifique de l'Union européenne a évolué, de nouveaux besoins sont apparus et l'Europe doit faire en sorte que le cadre européen puisse s'adapter afin de répondre aux aspirations des populations.

Ce rapport alternatif pour 2017 rappelle que le renforcement de l'investissement public peut jouer un rôle décisif dans la croissance de l'emploi et l'amélioration du bien-être des citoyens. Il défend une nouvelle génération de réformes structurelles qui stimulent le capital humain, soutiennent l'investissement et luttent plus efficacement contre les inégalités. Cet objectif serait cohérent avec celui défendu par la StraNES, adoptée par le Président de la République et fixée comme ligne de conduite à l'ensemble du Gouvernement. Les politiques de relance menées de manière coordonnée par les États membres pourraient ainsi contribuer à l'efficacité de notre stratégie nationale.

J'ai participé aux travaux de la StraNES et à ceux de la Stratégie nationale de la recherche. Les propositions contenues dans leurs rapports respectifs visent à développer une société apprenante pour tracer des perspectives d'ici 2025 en atteignant 2 % du PIB consacré à l'enseignement supérieur. Les efforts vont en effet devoir être soutenus dans tous les États membres afin d'accompagner les besoins croissants de l'enseignement supérieur, mais ils ne seront pas d'un niveau équivalent. Au sein de l'Union européenne, celui de la France est l'un des plus importants, avec près de 1,5 % du PIB consacré à l'enseignement supérieur, mais néanmoins loin derrière les États-Unis ou le Japon. Il s'agit dans notre pays d'un investissement porté essentiellement par le secteur public. Selon les arguments développés dans le cadre de la StraNES, l'investissement public est générateur de progrès et d'adhésion de la plus grande partie de la population à l'enseignement supérieur et à la recherche, alors que la quête de financements privés élève des barrières et verrouille l'accès de l'enseignement supérieur à tout un pan de notre population que nous ne pouvons pas abandonner, faute de se priver de leur dynamisme et de leur capacité d'investissement humain dans le développement de notre pays. Les socio-démocrates plaident donc pour un renforcement de l'investissement public dans le cadre d'une politique de relance en faveur de l'éducation, de la formation, de l'apprentissage et de la mobilité des jeunes en Europe.

Le deuxième objectif de la proposition de résolution européenne, s'il est difficilement réalisable en l'état du droit communautaire, est cohérent avec le débat mené tant au niveau du Parlement européen que de la Commission, sous l'impulsion du commissaire européen Pierre Moscovici. Un indicateur spécifique pourrait ainsi être créé dans le cadre du semestre européen afin de mesurer les investissements publics dans l'enseignement supérieur de chaque État membre et de mieux les prendre en compte dans les recommandations de trajectoire budgétaire.

Pour toutes ces raisons, les membres du groupe socialiste et républicain voteront cette proposition de résolution.

M. Claude Kern . - Je remercie le rapporteur pour son excellente analyse, que mon groupe et moi-même partageons. L'objectif des 2 % du PIB paraît difficile à atteindre avec le seul financement public.

Les membres du groupe de l'UDI-UC suivront donc les conclusions du rapporteur et ne voteront pas cette proposition de résolution.

Mme Marie-Christine Blandin . - Le groupe écologiste ira dans le sens des arguments développés par l'auteur de la proposition de résolution. La connaissance est indispensable à la transition énergétique. À l'heure où un général de l'armée française sort de sa réserve pour réclamer un budget de la défense de 2 % du PIB - pour la sécurité contre le terrorisme, mais également pour des achats d'armes et la dissuasion nucléaire - cette proposition de résolution est la bienvenue pour faire contrepoint.

Certes, il y a la rigueur du Pacte de stabilité et de croissance, mais il y a aussi la stratégie de Lisbonne où le mot « connaissance » résonnait avec le mot « croissance ».

Il est nécessaire que les fonds publics ne soient pas les seuls à abonder l'université. L'augmentation massive des droits d'inscription irait à l'encontre de la démocratisation, l'augmentation des droits d'inscription pour les étrangers serait un obstacle à l'ouverture de la France et à l'oxygénation des postures de recherche et d'enseignement. Avec le crédit impôt-recherche, nous voyons l'argent public couler à flot alors que l'investissement privé demeure insuffisant, voire absent. Le financement privé privilégie malheureusement une recherche rentable, des produits brevetables et tourne le dos à des disciplines qui le sont moins comme l'archéologie, la botanique, l'expertise sanitaire.

Et n'oublions pas la situation des étudiants américains surendettés et des universités vérolées par le créationnisme et ses mécènes, dont Tom Cruise, qui corrompent la notion de savoir au profit de la notion de croyance.

En conséquence, le groupe écologiste votera cette proposition de résolution.

Mme Françoise Laborde . - Dans le cadre des travaux de notre commission, nous avons rencontré récemment le philosophe Bernard Stiegler au Sénat, qui nous a expliqué la différence entre travail et emploi et les priorités à fixer. Marie-Christine Blandin a évoqué la notion de relance économique ainsi que l'exemple des universités américaines, qui forment des élèves brillants, mais la plupart endettés et l'esprit parfois déformé par des idées toxiques telles que la scientologie. Nous devons coupler connaissance et croissance et rester attentifs.

Les membres du groupe RDSE voteront donc cette proposition de résolution.

Mme Colette Mélot, co-rapporteur pour la commission des affaires européennes . - Estimant que le développement de l'enseignement supérieur est, à juste titre, un élément déterminant pour l'avenir de l'Union européenne et de ses États membres, le texte que nous examinons milite pour que les dépenses publiques y afférant ne soient pas prises en compte dans l'estimation par la Commission européenne du déficit public. Les signataires de la proposition considèrent qu'une telle disposition devrait permettre à l'Union européenne de parvenir à l'objectif de 2 % de dépenses publiques en faveur de l'enseignement supérieur.

Les dépenses publiques en faveur de l'enseignement supérieur peuvent relever de deux logiques : il s'agit en tout état de cause d'investissements et elles peuvent aussi participer de la mise en oeuvre de réformes structurelles. Aux termes de sa communication du 13 janvier 2015, la Commission considère qu'un État peut déroger, dans une certaine mesure, à ses objectifs budgétaires dès lors que les dépenses constatées concourent à des investissements ou à des réformes structurelles. La réforme italienne dite de la buona scola en faveur de l'enseignement a été intégrée par la Commission européenne dans son appréciation de la situation budgétaire de ce pays en 2015. L'Italie a ainsi été autorisée à s'écarter à ses objectifs budgétaires initiaux.

Aller plus loin aujourd'hui paraît peu réaliste et pourrait rajouter à la confusion actuelle entourant l'application du Pacte de stabilité et de croissance. Depuis la communication du 13 janvier 2015, la Commission européenne a en effet décidé de prendre en compte de nouveaux facteurs pouvant permettre aux États de s'affranchir partiellement des objectifs du Pacte de stabilité et de croissance. Je pense à l'accueil des réfugiés. Les dépenses destinées à faire face à la crise des migrants ne devraient donc pas ainsi être intégrées à l'évaluation des soldes budgétaires pour les années 2015 et 2016 dans le cadre de la procédure du semestre européen. Le président de la Commission européenne a estimé, de son côté, le 18 novembre 2015, que « les dépenses de sécurité de la France devraient être exclues des calculs entrant dans le champ des règles de l'Union européenne sur les déficits ». Plus récemment, la Commission européenne a pris en compte les dépenses liées aux tremblements de terre qui ont fragilisé l'Italie en octobre et en août derniers.

La multiplication de ces dérogations ne suscite pas l'adhésion unanime du Conseil. L'Allemagne s'était déjà montrée réservée sur l'absence de concertation préalable entre la Commission européenne et les États au moment de la parution de la communication en janvier 2015, la France ou l'Italie étant très favorables à ce nouveau dispositif. Des interrogations subsistent également quant à la façon d'évaluer les réformes structurelles ou sur les limites à apporter à l'application répétée des clauses de flexibilité. Dans ces conditions, le Conseil Ecofin a émis une position commune sur cette question le 8 décembre 2015. Les États ont ainsi décidé d'imposer des limites claires aux clauses de flexibilité. L'application de la clause d'investissement est plus encadrée : les gouvernements doivent désormais soumettre des informations détaillées sur les projets d'investissements au service de réformes structurelles. Ils doivent fournir, dans le même temps, une évaluation indépendante de ces investissements, en mettant notamment en avant l'impact estimé à long terme sur la situation budgétaire.

Dans ce contexte, il semble donc assez délicat de proposer une nouvelle dérogation. Il convient en outre de relever que plusieurs observateurs jugent que les clauses sont déjà, en l'état, trop nombreuses, inefficaces et opaques. Nos collègues Fabienne Keller et François Marc l'avaient déjà noté dans leur rapport sur la phase I de l'approfondissement de la gouvernance de l'Union économique et monétaire adopté début novembre par la commission des affaires européennes. La proposition de résolution européenne jointe au rapport, que nous avions alors adoptée à l'unanimité, relève « la multiplication, depuis 2015, des clauses de flexibilité au Pacte de stabilité et de croissance » et juge qu'« elle contribue, indirectement, à renforcer l'opacité autour de ce dispositif sans pour autant que ces clauses apparaissent toujours efficaces ». Le texte appelait à une « clarification politique dans ce domaine ». Approuver aujourd'hui la mise en place d'une nouvelle dérogation apparaît donc contradictoire avec le texte que nous avons voté.

Comme Mme Gonthier-Maurin, nous pensons que ce texte doit donner lieu à un débat au cours duquel il sera toujours temps de revenir sur certaines questions et procéder à un examen plus approfondi sur les dépenses de l'enseignement supérieur.

Compte tenu de nos réserves sur ces points du texte, le groupe Les Républicains vous recommande de ne pas adopter la proposition de résolution européenne sur la reconnaissance de l'enseignement supérieur comme un investissement nécessaire à l'avenir.

Les membres du Groupe Les Républicains suivront l'avis du rapporteur et ne voteront pas cette proposition de résolution.

M. Daniel Percheron . - C'est un débat très policé. Nous sommes enfermés dans la camisole de force de l'Europe, l'Allemagne nous ayant prêté son Deutsch-Mark et ayant, avec la France, demandé les 3 %. L'Europe ambitionne d'être le continent le plus intelligent du monde : c'est la stratégie de Lisbonne, développée et revendiquée.

Un seul chiffre nous ramène à l'humilité du modèle français. En revenant en 1958, le Général de Gaulle avait instauré le franc fort, à parité avec le mark. Lorsque, 20 ans plus tard, François Mitterrand est arrivé au pouvoir, un mark valait 2,85 francs. La France avait dévalué sa monnaie de 185 % pour maintenir sa compétitivité. Cela donne une idée de l'enjeu et des contradictions de l'Europe.

Ne pas compter les dépenses de sécurité de la France quand l'Europe nous laisse intervenir seuls au Mali, c'est la moindre des politesses à l'égard de notre pays. Si l'Europe n'adopte pas une politique de l'intelligence et des universités, si elle ne tourne pas le dos au modèle anglo-saxon dépeint par Mme Blandin, nous n'y arriverons pas. Nous sommes dans la camisole de l'euro, il ne nous reste que la voix, celle que je viens de faire entendre.

M. Jacques Grosperrin, rapporteur . - Je tiens à remercier Mme Gonthier-Maurin et tous les intervenants qui se sont exprimés. L'objet de cette proposition de résolution européenne était d'ouvrir le débat sur l'enseignement supérieur dans l'Union européenne. Nous ne connaissons pas les métiers de demain mais l'éducation constitue une priorité commune. Vous conviendrez, madame Gonthier-Maurin, que nos points de convergence sur l'enseignement supérieur et les investissements d'avenir sont une réalité. Je vous recommande néanmoins de confirmer la position de la commission des affaires européennes et de rejeter cette proposition de loi.

Mme Dominique Gillot . - Je tiens à rappeler que nous sommes une commission autonome non soumise à l'avis de la commission des affaires européennes. Ce n'est pas parce que la commission des affaires européennes a adopté une position, et que les socialistes membres de cette commission en ont suivi la philosophie, qu'il ne faut pas ouvrir le débat pour que la Commission et le Conseil européen prennent en considération les Parlements.

M. Guy-Dominique Kennel . - L'université de Strasbourg, qui compte cinq prix Nobel, ne serait pas mondialement connue au niveau de la recherche si elle avait été exclusivement financée par les fonds publics. Pour soutenir la recherche fondamentale, une fondation créée par un chef d'entreprise a versé à l'université un montant de 300 millions d'euros de fonds privés. Cette illustration confirme que les fonds publics seuls ne suffisent pas à assurer l'excellence et le rayonnement de nos universités.

La commission rejette la proposition de résolution européenne.

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