III. LE PROGRAMME 137 « EGALITÉ ENTRE LES FEMMES ET LES HOMMES » : LE RENFORCEMENT DES MOYENS DÉDIÉS À LA LUTTE CONTRE LA PROSTITUTION ET CONTRE LES VIOLENCES FAITES AUX FEMMES
Le programme 137 porte les crédits destinés à promouvoir l'égalité entre les femmes et les hommes et à lutter contre les violences faites aux femmes. Ce programme connaît un léger changement de maquette dans le présent projet de loi de finances : l'action 14 est fusionnée avec l'action 11, qui est renommée « Actions et expérimentations pour la culture de l'égalité et en faveur de l'égalité professionnelle, politique et sociale » et voit en conséquence ses crédits plus que doubler.
Les crédits de ce programme permettent principalement de financer des associations favorisant l'égalité entre les femmes et les hommes, luttant contre les violences sexistes ou contre la prostitution, au niveau national comme au niveau local.
Le programme 137 est traditionnellement le « parent pauvre » de la mission « Solidarité » : ses crédits connaissent une baisse régulière depuis quelques années. Ainsi, entre 2010 et 2014, les crédits de ce programme ont baissé de 21 %.
Cette baisse supportée principalement par l'action 13, qui porte les dépenses de fonctionnement courant des délégations régionales aux droits des femmes et à l'égalité entre les femmes et les hommes 33 ( * ) . En 2016, les crédits de cette action, de même que ceux dédiés aux actions et aux expérimentations en faveur de l'égalité professionnelle, politique et sociale continuent de baisser. En effet, la nouvelle action 11 est dotée de 5,02 millions d'euros en 2016, soit 22 % de moins que les actions 11 et 14 dont elle est issue en 2015 (6,5 millions d'euros).
La baisse ces crédits de la mission est toutefois plus que compensée par mise en place du fonds pour la prévention de la prostitution et l'accompagnement social et professionnel des personnes prostituées , dont la mise en place est prévue par proposition de loi visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées actuellement en discussion au Parlement. La création de ce fonds conduit à majorer les crédits de l'action 15 « Prévention et lutte contre la prostitution et la traite des êtres humains », grâce à un transfert de crédits d'un montant de 2,8 millions d'euros de trois programmes budgétaires : 1 million d'euros en provenance du programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins », 1 million d'euros en provenance du programme 101 « Accès au droit et à la justice » et 0,8 million d'euros en provenance du programme 176 « Police nationale ».
Au total, les crédits du programme 137 connaissent donc une augmentation de 6,6 %, pour s'établir à 27 millions d'euros.
Évolution des crédits de paiement du programme 137 entre 2015 et 2016
(en millions d'euros)
Ouverts en LFI pour 2015 |
Demandés pour 2016 |
Évolution 2015-2016 |
|
Action 11 - Actions et expérimentations pour la culture de l'égalité et en faveur de l'égalité professionnelle, politique et sociale (libellé modifié) |
2,12 |
5,02 |
137,5% |
Action 12 - Promotion des droits, prévention et lutte contre les violences sexistes |
15,18 |
15,75 |
3,8% |
Action 13 - Soutien du programme égalité entre les femmes et les hommes |
1,39 |
1,20 |
-13,9% |
Action 14 - Actions de soutien, d'expérimentation en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes (supprimée en 2016) |
4,38 |
- |
|
Action 15 - Prévention et lutte contre la prostitution et la traite des êtres humains |
2,24 |
4,98 |
122,7% |
Total programme 137 |
25,3 |
26,96 |
6,6% |
Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2016
1. La promotion de l'égalité femmes-hommes et la lutte contre les violences sexistes
La politique de l'égalité entre les femmes et les hommes et de lutte contre les violences sexistes portée par ce programme se traduit principalement par des subventions accordées à des associations . Le ministère des affaires sociales a indiqué, dans ses réponses au questionnaire de votre rapporteur spécial, que « la priorité a été donnée au financement d'associations assurant des missions pouvant être assimilées à des missions de service public ou d'intérêt collectif ». En conséquence, des objectifs sont assignés à ces associations, qui s'inscrivent dans le cadre des priorités ministérielles. Ces subventions permettent de financer à la foi les têtes de réseau, certain dispositifs nationaux, mais aussi des projets ciblés.
Le tableau ci-dessous retrace les dix associations recevant les subventions les plus importantes, ainsi que les objectifs fixés dans le cadre des conventions pluriannuelles d'objectifs (CPO). Ces subventions sont gelées depuis 2013 .
Répartition des dix plus importantes subventions aux associations par le programme 137
(en euros)
Association |
Subvention 2014 |
Subvention 2015 |
Subvention prévue pour 2016 |
Objet du financement |
Centre national d'information sur les droits des femmes et des familles (CNIDFF) |
1 320 00 |
1 320 00 |
- |
Accès aux droits et lutte contre les violences faites aux femmes |
Collectif féministe contre le viol (CFCV) |
312 500 |
312 500 |
312 500 |
Soutien aux femmes victimes de viols et d'agressions sexuelles (notamment permanence téléphonique) |
Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT) |
235 000 |
235 000 |
235 000 |
Soutien aux femmes victimes de discriminations ou violences sexistes au travail |
Mouvement français pour le planning familial (MFPF) |
213 000 |
213 000 |
- |
Mise en place d'un réseau national de lutte contre les violences faites aux femmes |
Accompagnement lieu d'accueil (ALC) |
170 000 |
170 000 |
- |
Favoriser l'accueil et la protection de victimes de la traite des êtres humains |
Mouvement du nid |
80 000 |
80 000 |
- |
Prévention et lutte contre la prostitution |
Comité contre l'esclavage moderne (CCEM) |
60 000 |
60 000 |
- |
Aide aux personnes victimes d'esclavage domestique |
Groupe femmes pour l'abolition des mutilations sexuelles (GAMS) |
42 000 |
42 000 |
42 000 |
Prévention des mutilations sexuelles et des mariages forcés |
France Active |
37 000 |
42 000 |
- |
Promotion de l'entreprenariat des femmes et de l'accès au crédit bancaire |
Amicale du nid |
35 000 |
35 000 |
- |
Prévention des risques prostitutionnels auprès des jeunes et des élèves |
Note : Dans la mesure où les conventions pluriannuelles d'objectif de sept associations arrivent à échéance fin 2015, les montants prévisionnels de leurs subventions en 2016 n'étaient pas encore connus au moment de la rédaction de ce rapport.
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire
Comme indiqué précédemment, les crédits dédiés aux actions visant à favoriser l'égalité femmes-hommes sont en baisse en 2016. Afin de favoriser l'égalité professionnelle, le Gouvernement accorde moins de moyens aux projets et actions de sensibilisation, mais il renforce par ailleurs les obligations des entreprises . Ainsi, depuis la loi du 4 août 2014 34 ( * ) , les entreprises de plus de cinquante salariés qui ne respectent pas leurs obligations en matière d'égalité professionnelle sont privées d'accès à la commande publique, pour les contrats conclus depuis le 1 er décembre 2014. Le projet annuel de performances de la présente mission rappelle qu'en 2012, 130 000 entreprises étaient concernées par les marchés publics, pour un montant de 75 milliards d'euros.
Les moyens alloués à la lutte contre les violences faites aux femmes sont, au contraire, en progression . Ceci traduit la mise en place des engagements pris dans le cadre du 4 e plan interministériel de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes 2014-20166, qui prévoit notamment une extension du dispositif téléphonique d'accompagnement des femmes victimes de violences (39.19 « Violences femmes info ») désormais accessible sept jours sur sept ainsi que le renforcement du nombre d'accueil de jour.
2. La création du fonds pour la prévention de la prostitution et l'accompagnement social et professionnel des personnes prostituées
La proposition de loi visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel actuellement en cours de discussion au Parlement prévoit la création d'un fonds pour la prévention de la prostitution et l'accompagnement social et professionnel des personnes prostituées . Ce fonds a pour objet de soutenir les initiatives relatives à l'insertion des personnes prostituées, de prévenir l'entrée dans la prostitution et de sensibiliser les populations aux effets de la prostitution sur la santé. Le fonds financera notamment le versement d'aides financières spécifiques aux personnes engagées dans un parcours de sortie de la prostitution.
Ce fonds bénéficierait de trois types de financements :
- des crédits versés par l'État , portés par le présent programme 137, pour un montant de 2,8 millions d'euros ;
- des recettes provenant de la confiscation des biens et produits des personnes et réseaux coupables de traite des êtres humains et de proxénétisme, réalisée par l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC) ;
- d'un montant, déterminé annuellement par arrêté interministériel, prélevé sur le produit des amendes acquittées par les personnes ayant eu recours à la prostitution 35 ( * ) .
Les crédits budgétaires dédiés au financement de ce fonds sont issus de transferts de trois programmes budgétaires (cf. supra ). Le montant total des dépenses annuelles prises en charge par le fonds est estimé, pour les trois premières années, à 20 millions d'euros .
Par ailleurs, le programme 137 permet de financer, au niveau national, des associations têtes de réseau en matière de lutte contre la prostitution et la traite des êtres humains, pour un montant de 0,41 million d'euros, ainsi que des actions au niveau déconcentré d'accompagnement social des personnes prostituées et de prévention auprès des jeunes.
* 33 Les dépenses liées aux loyers de ces délégations régionales sont quant à elles financées par le programme 333 « Moyens mutualisés des administrations déconcentrées ».
* 34 Loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes.
* 35 L'article 16 de la proposition de loi en cours d'examen modifie l'article 225-12-1 du code pénal pour sanctionner d'une contravention de la cinquième classe le recours à l'achat d'actes sexuels.