B. MIEUX ENCADRER LE RECOURS AUX TECHNIQUES DE RENSEIGNEMENT

Si votre commission a jugé légitime le recours aux différentes techniques de renseignement prévues par le projet de loi, elle a cependant estimé que l'intrusion dans la vie privée que représentait chacune d'entre elles appelait un encadrement d'autant plus strict que l'intrusion est forte. C'est dans cet esprit qu'elle a adopté les amendements proposés par son rapporteur pour fixer les limites au recours aux différentes techniques de renseignement ( articles 2 et 3 ) : réduction des délais d'autorisation, limitation des renseignements collectés, définition plus rigoureuse, exclusion de la procédure d'urgence, etc .

1. Les interceptions de sécurité

Suivant son rapporteur, votre commission a précisé la notion d'« entourage » pouvant faire l'objet d'une écoute. Si, l'Assemblée nationale avait admis largement les possibilité d'interceptions de sécurité pour l'entourage d'une personne visée au titre d'une des finalités précitées, votre commission s'en est tenu à une définition recentrée .

De même, la possibilité nouvelle de procéder à des interceptions de correspondances avec des appareils dits « IMSI catcher » , qui sont en réalité des antennes relais mobiles factices , seraient plus fortement encadrées puisque votre commission a réduit la durée maximale d'autorisation à 48 heures .

2. La géolocalisation sur sollicitation des réseaux

Cette technique, introduite par la loi du 18 décembre 2013 dite de programmation militaire, permet de géolocaliser en temps réel un téléphone ou un terminal mobile sur sollicitation des réseaux . Votre commission a fixé un cadre précis et resserré à son utilisation puisqu'elle a successivement limité les données collectées par ce moyen aux seules données de localisation et ramené de quatre à deux mois la durée d'autorisation.

3. Les « IMSI catchers »

Votre commission a été particulièrement attentive à cette technique de renseignement ayant suscité des réserves fortes. Elle a ainsi restreint les données pouvant être collectées par cet appareil aux numéros IMSI et IMEI c'est-à-dire les numéros des boitiers de téléphone et les numéros de cartes SIM ainsi qu'aux données relatives à la localisation des équipements terminaux utilisés, données peu intrusives qui ne permettent pas une identification directe.

4. Le recueil des données en temps réel de personnes préalablement identifiées comme présentant une menace

Compte-tenu des critiques qu'elle a suscitée, votre commission a souhaité clarifier les règles d'utilisation de cette technique. Suivant son rapporteur, elle a précisé que chaque personne faisant l'objet de cette mesure ferait l'objet d'un examen individuel. En outre, cette technique ne serait mise en oeuvre que pour une durée, renouvelable, de deux mois . Votre commission a enfin exclu le recours à la procédure d'urgence dans ce cas.

5. Les algorithmes

En raison des vives craintes suscitées par cette technique, votre commission a apporté les clarifications nécessaires pour mettre en lumière la portée exacte du recours à cette technique. Elle a ainsi retenu une nouvelle définition, plus restrictive , indiquant plus précisément que ce sont des traitements automatisés détectant des connexions , c'est-à-dire le contenant et non le contenu de la communication. En outre, un avis préalable et technique à la mise en oeuvre de ce dispositif serait requis de la CNCTR. La première autorisation accordée ne pourrait excéder deux mois . La demande de renouvellement devrait comporter un relevé du nombre d'identifiants signalés par le traitement automatisé et une analyse de la pertinence de ces signalements.

6. Sonorisation et captation d'images, captation de données informatiques et introduction dans un lieu privé

Sur ces nouvelles techniques, votre commission a approuvé le souci de clarification de son rapporteur, acceptant de mieux distinguer la sonorisation et captation d'images de la captation des données informatiques .

Pour la sonorisation et captation d'images, l'autorisation ne serait valable qu'au maximum pour deux mois et des mesures d'encadrement particulières seraient prévues (en particulier la mise en oeuvre par des agents individuellement désignés et la systématisation d'un compte rendu à la CNCTR).

Votre commission a, enfin, examiné avec un soin particulier l' introduction domiciliaire qui constitue une des atteints les plus fortes aux composantes de la vie privée. Le texte issu de l'Assemblée nationale ne distinguait pas les lieux privés (véhicules notamment) des lieux à usage d'habitation. Or, dans ce dernier cas, le Conseil constitutionnel exerce un contrôle de proportionnalité entre les atteintes à l'inviolabilité du domicile et la prévention des atteintes à l'ordre public 23 ( * ) .

Votre commission a donc choisi de renforcer le dispositif proposé en prévoyant un régime spécifique pour les lieux d'habitation . Elle a étendu ce régime à l'accès aux données d'un traitement automatisé, par exemple situées sur un disque dur . Votre commission, dans son unanimité, a convenu de l'intrusion forte que pouvait constituer, à une époque de forte dématérialisation des documents, l'accès à de telles données. Aussi, a-t-elle exigé, avant l'autorisation donnée à une introduction domiciliaire, que la CNCTR rende un avis collégial et exprès.


* 23 Pour un exemple récent : Conseil constitutionnel, 29 décembre 2013, n° 2013-357 QPC

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