B. UN DURCISSEMENT SIGNIFICATIF DU BONUS ET DU MALUS EN 2014
Afin de préserver l'équilibre budgétaire du dispositif, le Gouvernement a décidé de durcir à la fois le bonus (diminution de la dépense) et le malus (augmentation de la recette) .
1. Un bonus moins généreux et plus concentré
La modification du bonus est intervenue par un décret du 30 octobre 2013 qui vient préciser les nouvelles modalités de l'aide à l'acquisition de véhicules propres ( cf . tableau ci-dessous) 49 ( * ) . Le bonus maximal est désormais de 6 300 euros contre 7 000 euros précédemment.
Au-delà de 60 grammes de CO 2 par kilomètre, l'aide est réduite de 550 à 150 euros. Il s'agit de la tranche du bonus qui concerne les voitures disposant d'un moteur thermique de petite cylindrée, c'est-à-dire la partie la plus importante - et de loin - des véhicules « bonusés ». La réduction de l'avantage du bonus est donc notable sur ce segment et devrait permettre de réaliser des économies.
Il faut également noter que le décret a introduit un seuil maximal au bonus. Pour les véhicules dont les émissions sont comprises entre 0 et 20 grammes de CO 2 par kilomètre, ce seuil est fixé à 27 % du coût du véhicule 50 ( * ) . Il est abaissé à 20 % pour les émissions comprises entre 20 et 60 grammes de CO 2 par kilomètre et à 8,25 % pour les véhicules hybrides émettant moins de 110 grammes de CO 2 par kilomètre.
Évolution du barème du bonus depuis sa création
Taux d'émission de CO 2 (en grammes par kilomètre) |
Montant de l'aide (en euros) |
||||||
Date de facturation |
|||||||
2008 |
2009 |
2010 |
2011 |
Du 1 er janvier au 31 juillet 2012 |
Du 1 er août au 2012 au 31 octobre 2013 |
À compter du 1 er novembre 2013 |
|
Taux = 20 |
5 000 |
5 000 |
5 000 |
5 000 |
5 000 |
7 000 |
6 300 |
20 < taux = 50 |
5 000 |
4 000 |
|||||
50 < taux = 60 |
3 500 |
4 500 |
4 000 |
||||
60 < taux = 90 |
1 000 |
1 000 |
1 000 |
800 |
400 |
550 |
150 |
90 < taux = 95 |
400 |
100 |
200 |
0 |
|||
95 < taux = 100 |
500 |
||||||
100 < taux = 105 |
700 |
700 |
|||||
105 < taux = 110 |
0 |
0 |
|||||
110 < taux = 115 |
0 |
||||||
115 < taux = 120 |
100 |
||||||
120 < taux = 125 |
200 |
200 |
|||||
125 < taux = 130 |
0 |
Source : décret n° 2013-971 du 30 octobre 2013
Les fraudes au bonus automobile La presse a relaté des fraudes présumées au dispositif national d'aide à l'acquisition des véhicules propres, notamment des véhicules électriques. L'exemple d'un concessionnaire norvégien a été cité, celui-ci faisant immatriculer des voitures électriques en France afin de bénéficier de l'aide de 7 000 euros avant de les revendre en Norvège en tant que véhicules d'occasion. Au 1 er octobre 2013, 322 véhicules électriques ayant bénéficié de l'aide de l'État ont été revendus à l'étranger moins de six mois après leur première immatriculation en France depuis janvier 2011, dont 309 uniquement sur les 12 derniers mois (correspondant au relèvement de l'aide à l'achat des véhicules électriques de 5 000 à 7 000 euros). 89 % des modèles concernés sont des Nissan Leaf. Ces pratiques sont essentiellement le fait de personnes isolées (cinq personnes morales sont responsables de 80 % des fraudes). Une des conditions d'attribution de l'aide à l'achat de véhicules propres définies dans le décret (depuis sa première parution fin 2007 et avant sa révision applicable au 1 er novembre 2013) est que le véhicule donnant droit à l'octroi d'une aide ne doit pas être « destiné à être revendu en tant que véhicule neuf ». Cette formulation est claire mais potentiellement fragile en raison de l'emploi des termes « destiné à » et de la caractérisation du véhicule « neuf ». La notion de véhicule neuf varie selon le champ disciplinaire et les intérêts juridiques concernés. Le droit fiscal par exemple considère qu'il s'agit d'un véhicule de moins de six mois ayant moins de 6 000 kilomètres, mais la jurisprudence ne retient pas cette définition lorsqu'elle cherche à défendre les intérêts du consommateur ou à garantir le jeu de la libre concurrence. Dans ce dernier cas, le juge peut alors considérer qu'un véhicule neuf est, selon les intérêts en jeu, un véhicule qui n'a pas été immatriculé ou un véhicule immatriculé n'ayant pas fait l'objet d'une conduite sur route. Sur ces bases, si l'utilisation faite par les professionnels étrangers de la revente automobile précités du dispositif d'aide à l'acquisition de véhicules propres est clairement une dérive, la caractérisation juridique de cette dérive en tant que fraude n'est pas garantie. Les modifications juridiques nécessaires permettant de caractériser sans ambiguïté la fraude, dans le cas où de nouvelles dérives seraient constatées, ont été introduites dans la version du décret applicable au 1 er novembre 2013. Ces modifications portent sur les conditions d'attribution de l'aide en stipulant que si un véhicule ayant donné droit à l'octroi d'une aide est revendu dans les six mois suivant sa première immatriculation ou avant d'avoir parcouru 6 000 km, le bénéficiaire de l'aide doit rembourser cette dernière . De plus, un dispositif de surveillance et de gestion des cas frauduleux est en train d'être formalisé en partenariat avec l'Agence de services et de paiement à qui est délégué le traitement des dossiers de bonus . Suite à l'application de la nouvelle formulation du décret, ce dispositif permettra d'identifier les acteurs devant rembourser une aide indûment versée et de poursuivre les éventuels contrevenants. Source : réponse au questionnaire budgétaire de votre rapporteur spécial |
2. Le malus : un durcissement constant
a) Un barème qui a déjà fait l'objet de plusieurs ajustements
L'article 1011 bis du code général des impôts, dernièrement modifié par l'article 17 de la LFI pour 2013, fixe le régime du malus.
Celui-ci est en partie « familialisé » puisqu'il est prévu une diminution de 20 grammes de CO 2 par kilomètre par enfant à charge à partir du troisième enfant. De même, les véhicules adaptés aux personnes handicapées ou acquis par des personnes titulaires de la carte d'invalidité sont exonérés du paiement du malus.
Tarif du malus résultant de l'article 17 de la loi de finances pour 2013
Taux d'émission de CO 2 (en grammes par kilomètre) |
Tarif de la taxe en euros par année d'acquisition |
||||||
2008 |
2010 |
2011 |
Premier barème 2012 (LFI 2010) |
Deuxième barème 2012 |
Troisième barème 2012 (LFI 2012) |
2013 |
|
et 2009 |
(LFR 2010) |
||||||
Taux = 135 |
0 |
0 |
0 |
0 |
0 |
0 |
0 |
De 135 à 140 |
100 |
||||||
De 141 à 145 |
200 |
200 |
300 |
||||
De 146 à 150 |
400 |
||||||
De 151 à 155 |
200 |
200 |
500 |
500 |
1 000 |
||
De 156 à 160 |
200 |
750 |
750 |
750 |
750 |
1 500 |
|
De 161 à 165 |
200 |
750 |
|||||
De 166 à 175 |
750 |
||||||
De 176 à 180 |
2 000 |
||||||
De 181 à 185 |
1 100 |
1 300 |
2 600 |
||||
De 186 à 190 |
3 000 |
||||||
De 191 à 195 |
1 600 |
1 600 |
1 600 |
2 300 |
5 000 |
||
De 196 à 200 |
1 600 |
||||||
De 201 à 230 |
1 600 |
6 000 |
|||||
De 231 à 235 |
2 600 |
3 600 |
|||||
De 236 à 240 |
|||||||
De 241 à 245 |
2 600 |
2 600 |
|||||
De 246 à 250 |
2 600 |
||||||
Supérieur à 250 |
2 600 |
Source : article 1011 bis du code général des impôts
b) Un nouveau barème du malus fixé par l'article 37 du PLF
En complément d'une action sur le bonus, l'article 37 du présent projet de loi de finances procède à un nouveau durcissement du barème du malus en vue d'assurer le retour à l'équilibre budgétaire du dispositif en 2014. Il établit le barème suivant :
Taux d'émission de dioxyde de carbone (en grammes de CO 2 par kilomètre) |
Tarif de la taxe (en euros) |
Année d'immatriculation |
|
2014 |
|
Taux = 130 |
0 |
130 < taux = 135 |
150 |
135 < taux = 140 |
250 |
140 < taux = 145 |
500 |
145 < taux = 150 |
900 |
150 < taux = 155 |
1 600 |
155 < taux = 175 |
2 200 |
175 < taux = 180 |
3 000 |
180 < taux = 185 |
3 600 |
185 < taux = 190 |
4 000 |
190 < taux = 200 |
6 500 |
200 < taux |
8 000 |
Source : article 37 du projet de loi de finances pour 2014
Le barème est très sensiblement relevé par rapport à 2013. Le seuil d'entrée dans le malus est abaissé de 135 à 130 grammes de CO 2 par kilomètre. En outre, le tarif applicable à chaque tranche augmente. Au-delà de 200 grammes de CO 2 par kilomètre, le malus maximal est désormais de 8 000 euros alors qu'il n'était que de 6 000 euros auparavant.
Il convient aussi de souligner que le barème proposé est plus exponentiel que les précédents , comme le montre le graphique ci-dessous. En 2013, le malus restait modéré jusqu'à 150 grammes de CO 2 par kilomètre (400 euros) ; désormais, pour la même tranche d'émission, il a plus que doublé (900 euros).
Durcissement du barème du malus depuis 2012
Source : commission des finances du Sénat
* 49 Décret n° 2013-971 du 30 octobre 2013 modifiant le décret n° 2007-1873 du 26 décembre 2007 instituant une aide à l'acquisition des véhicules propres.
* 50 Le bonus ne sera donc versé au taux plein que pour des véhicules de 23 334 euros ou plus.