2. La « feuille de route » issue de la grande conférence sociale
Dans le cadre de la grande conférence sociale des 9 et 10 juillet 2012, souhaitée par le Président de la République et associant les organisations de salariés et d'employeurs et les collectivités territoriales, une « feuille de route sociale » a été élaborée. Elle fixe les chantiers prioritaires du Gouvernement et des partenaires sociaux d'ici juillet 2014.
Sept tables rondes ont été organisées, dont trois ont abordé, directement ou indirectement, la question de la sécurisation de l'emploi :
- la table ronde n° 1 « Développer l'emploi, et en priorité l'emploi des jeunes » ;
- la table ronde n° 2 « Développer les compétences et la formation tout au long de la vie » ;
- la table ronde n° 4 « Atteindre l'égalité professionnelle et améliorer la qualité de vie au travail ».
Parmi les chantiers et réformes prioritaires dégagés par la table ronde n° 1, figure explicitement la négociation au niveau national interprofessionnel des conditions d'une meilleure sécurisation de l'emploi, comportant trois volets :
- l'anticipation des évolutions de l'activité ;
- l'accompagnement des mutations économiques ;
- la lutte contre la précarité excessive du marché du travail.
Il était prévu d'aborder également le sujet de l'activité partielle, tandis que la réflexion préalable sur le compte individuel de formation était inscrite dans le cadre du chantier relatif à la sécurisation des parcours professionnels.
Les conclusions de la table-ronde n° 2 ont souligné la nécessité de renforcer le volet « compétences » pour accompagner les mutations économiques, de mieux former les demandeurs d'emploi et de lancer dès septembre 2012 un travail de réflexion sur le compte individuel de formation.
A l'issue de la table ronde n° 4, il a été indiqué que la préoccupation de l'égalité entre les femmes et les hommes devait devenir une priorité pour tous les acteurs et dans tous les domaines d'action concernés. En outre, il a été précisé que la question du temps partiel pouvait être traitée, si les partenaires sociaux le souhaitaient, dans la négociation sur la qualité de vie au travail et l'égalité professionnelle en lien avec la négociation sur la sécurisation de l'emploi.
3. Le document d'orientation sur la négociation « sécurisation de l'emploi »
Le ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a remis aux partenaires sociaux, le 7 septembre dernier, un document d'orientation nationale interprofessionnelle pour une meilleure sécurisation de l'emploi.
L'objectif fixé aux partenaires sociaux était de parvenir à un accord avant la fin de l'année 2012.
Le parti pris du Gouvernement a été de faire résolument confiance au dialogue social, troisième voie entre la déréglementation et la sur-réglementation. L'expression de « flexisécurité » 6 ( * ) est absente du document, le Gouvernement préférant parler d'équilibre « gagnant-gagnant ».
Cette négociation devait évidemment s'articuler avec les autres négociations mentionnées à l'issue de la grande conférence sociale, et portant notamment sur les institutions représentatives du personnel, l'égalité professionnelle et la qualité de vie au travail, la convention d'assurance chômage.
En outre, le ministère a souhaité qu'une attention particulière soit accordée à l'égalité entre les femmes et les hommes pendant la négociation.
Quatre axes de négociation ont été définis par le Gouvernement, les partenaires sociaux étant toutefois libres d'élargir ces domaines.
a) Lutter contre la précarité sur le marché du travail
Le ministère a souhaité que le CDI « redevienne la forme normale d'embauche », à travers notamment une modulation des taux de cotisation à l'assurance chômage pour les autres types de contrats de travail.
En outre, les partenaires sociaux sont invités à traiter la problématique du temps partiel subi et à proposer un meilleur accès à la formation pour les salariés et les demandeurs d'emploi.
b) Améliorer l'anticipation des évolutions de l'activité, de l'emploi et des compétences
Cet axe passe par un meilleur partage, en amont, des décisions de l'employeur et de l'information auprès des institutions représentatives du personnel, et par un rôle accru des salariés et de leurs représentants dans les instances de gouvernance de l'entreprise.
Il implique également un renforcement des dispositifs de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, de l'employabilité des salariés et de la portabilité des droits à la formation, et le développement des démarches d'anticipation dans les branches et les territoires.
c) Renforcer les dispositifs de maintien de l'emploi face aux aléas conjoncturels, afin d'éviter les licenciements et les pertes de compétences dans les entreprises concernées
Ce troisième axe comprend deux mesures phares :
- d'une part, l'amélioration et l'unification des dispositifs d'activité partielle.
- d'autre part, la mise en place d'un cadre juridique pour les accords collectifs d'entreprises qui souhaitent maintenir l'emploi et l'activité dans un contexte de difficultés conjoncturelles aiguës.
d) Revoir les procédures de licenciement économique, pour concilier un meilleur accompagnement des salariés et une plus grande sécurité juridique de tous les acteurs
Le ministère de travail est parti du constat que les procédures de licenciements collectifs font l'objet de « contournements » qui portent préjudice aux salariés et aux entreprises. Plus globalement, les rôles respectifs des institutions représentatives du personnel, des partenaires sociaux, de l'Etat, du juge, ne peuvent plus être considérés comme pleinement satisfaisants aujourd'hui.
C'est pourquoi le document d'orientation souhaitait donner plus d'importance aux accords collectifs, renforcer le rôle de l'administration (tout en excluant explicitement un retour à l'autorisation administrative de licenciement), clarifier et sécuriser les délais associés à ces procédures, et plus globalement renforcer les interventions des tiers (juges et experts).
Il était également demandé aux partenaires sociaux d'apporter une réponse en cas de projet de fermeture d'un site et de refus de la direction de considérer favorablement l'offre valable d'un repreneur garantissant la pérennité de tout ou partie ou partie des emplois.
Enfin, le document d'orientation appelait au renforcement de la sécurisation des parcours professionnels et des dispositifs de reclassement.
* 6 Par « flexisécurité », il faut entendre une stratégie intégrée visant à renforcer à la fois la flexibilité et la sécurité sur le marché du travail.