d) Les déterminants de la diminution de la masse salariale

Hors pensions, la masse salariale de l'Etat s'élève à 81,505 milliards d'euros dans le projet de loi de finances pour 2012, en baisse de 113,4 millions d'euros (soit -0,14 %) par rapport au budget exécuté 2011, à périmètre constant et hors débasage et rebasage.

Comme l'indique le graphique ci-après, les économies budgétaires induites par les suppressions d'emplois ( -969,4 millions d'euros , en noir, réparties entre 513,8 millions d'euros au titre du schéma d'emplois 2011 et 455,6 millions d'euros au titre du schéma d'emplois 2012) dépassent, pour la première fois depuis 1945, le coût des autres mesures (en grisé).

Le surcoût en 2012 résulte au premier chef des mesures catégorielles, soit +526,1 millions d'euros , dont environ 466 millions d'euros au titre du « retour catégoriel » aux agents de la moitié des économies induites par les suppressions d'emplois, et 60 millions d'euros de surcoût lié à la poursuite de plans catégoriels antérieurs ( cf . tableau).

L'impact des principales mesures catégorielles

Source : ministère du budget

Les autres facteurs de hausse de la masse salariale sont :

1) un glissement vieillesse-technicité 108 ( * ) « solde » légèrement positif (+92,4 millions d'euros) ;

2) les effets de la revalorisation des bas salaires (+54,4 millions d'euros) ;

3) 65,8 millions d'euros de surcoût lié au mécanisme de garantie individuelle du pouvoir d'achat ( GIPA 109 ( * ) ).

La rubrique hétérogène des « autres mesures » représente enfin un surcoût budgétaire significatif de 117,2 millions d'euros en 2012 , associé à des mécanismes divers. Le solde de ces mesures est négatif pour le ministère de la culture et de la communication (4,4 millions d'euros), et surtout pour le ministère de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, à hauteur de 89 millions d'euros pour ce dernier, en raison notamment de retenues pour grève imputées en 2012 ( cf . encadré ci-dessous) .

Les « autres mesures » : un impact non négligeable
sur la masse salariale de l'Etat

Pour ce qui concerne la mission « Administration générale et territoriale de l'Etat » (83 millions d'euros), il s'agit principalement de crédits qui devraient être consommés en 2012 dans le cadre de l'organisation de l'élection présidentielle et des élections législatives.

S'agissant de la mission « Ecologie, développement et aménagement durables » (26 millions d'euros), ces mesures comprennent notamment les montants liés au transfert des activités du Service Technique Interdépartemental d'Inspection des Installations Classées (STIIIC), reprises par la Direction Régionale et Interdépartementale de l'Environnement et de l'Energie (DRIEE) du même ministère (2,7 millions d'euros). Une enveloppe de 9,5 millions d'euros, qui fera l'objet d'une mesure de fongibilité asymétrique, est également prévue afin de procéder au remboursement des rémunérations des personnels mis à disposition de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) par des organismes extérieurs. Par ailleurs, 10 millions d'euros seront consacrés à l'accompagnement de la mise en oeuvre des mesures décidées dans le cadre de la Révision Générale des Politiques Publiques (RGPP).

Pour ce qui concerne la mission « Enseignement scolaire » (-89 millions d'euros), il s'agit pour l'essentiel de divers ajustements relatifs aux dépenses 2012 (retenues pour grèves, rétablissements de crédits, etc.).

Les facteurs d'évolution de la masse salariale de l'Etat

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après la direction du budget

Le projet de loi de finances pour 2012 ne prévoit pas de revalorisation du point d'indice de la fonction publique , alors qu'en 2011 les effets en année pleine de la revalorisation du point d'indice intervenue en 2010 représentaient une dépense budgétaire de 190 millions d'euros. Sans cette mesure d'économie, la masse salariale de l'Etat en 2012 ne diminuerait pas pour la première fois en valeur depuis 1945.

L'impact d'une revalorisation de 1 % du point d'indice de la fonction publique est estimé à plus de 1,88 milliard d'euros en année pleine, dont 880 millions d'euros pour la fonction publique d'Etat, 530 millions d'euros pour la fonction publique territoriale et 470 millions d'euros pour la fonction publique hospitalière.

Pour la seule fonction publique d'Etat, la non-revalorisation du point d'indice de la fonction publique à hauteur de 1 % représente donc une économie de 880 millions d'euros, d'un montant équivalent aux diminutions brutes de dépenses provenant du schéma d'emplois (969 millions d'euros dans le présent projet de loi de finances), voire supérieur si l'on prend en compte les économies nettes (504 millions d'euros) liées aux suppressions d'emplois , le montant net intégrant le retour aux agents sous forme de mesures catégorielles.

Le Gouvernement justifie la non-revalorisation du point d'indice de la fonction publique par le contexte économique, social et financier. S'agissant des prochaines années, dans les réponses au questionnaire de votre commission des finances, le Gouvernement a précisé que « pour ce qui concerne les années 2013 et 2014, le rendez-vous salarial annuel permettra de déterminer l'évolution du point d'indice, compte tenu de la situation économique ».

Le Gouvernement estime à 1,3 % la progression globale du pouvoir d'achat des fonctionnaires en 2012 , sous l'effet des évolutions automatiques de carrière des fonctionnaires, des promotions individuelles et des mesures catégorielles.

Il a été vu plus haut que le mécanisme de garantie individuelle du pouvoir d'achat (GIPA) permet d'assurer, pour les fonctionnaires concernés, une évolution de leur traitement indiciaire égale à l'inflation. La forte augmentation, entre 2011 et 2012, de 47 à 65,6 millions d'euros des mesures inscrites au GIPA en projet de loi de finances fait apparaître un nombre croissant de fonctionnaires dont l'évolution du traitement indiciaire est inférieure à l'inflation .

Selon les données les plus récentes figurant dans le dernier rapport annuel du Gouvernement sur l'état de la fonction publique (2009-2010), le mécanisme de la GIPA a bénéficié, en 2009, à 107 520 agents (au titre de la période 2004-2008, soit cinq années de rémunération) . Parmi les bénéficiaires, 73 % étaient âgés de plus de 50 ans (et 51 % étaient même âgés de plus de 55 ans) : il s'agit donc notamment d'agents arrivés en fin de carrière. 96 % des bénéficiaires étaient des fonctionnaires titulaires, appartenant aux trois catégories (A, B et C) de la fonction publique : cadres A (38 % des bénéficiaires), cadres B (21 % des bénéficiaires) et cadres C (33 %), étant donné que la catégorie d'appartenance de 5 % des fonctionnaires titulaires qui bénéficient de la mesure était inconnue. Toutefois, le montant moyen versé à chaque cadre A bénéficiaire (soit 1 415 euros pour une GIPA correspondant à cinq années) est supérieur à la moyenne pour un cadre B (835 euros) et plus encore pour un cadre C (88 euros seulement, toujours au titre de la période 2004-2008).

La non-revalorisation du point d'indice entraîne une autre difficulté, soulignée par les syndicats : le tassement des grilles de rémunérations dans la fonction publique . Cette question devrait être traitée dans le cadre d'une politique de la fonction publique plus ambitieuse que celle aujourd'hui conduite, qui se résume trop souvent à des suppressions de poste suivant une logique comptable : la motivation des agents publics exige d'élargir à nouveau les perspectives de carrière et de rémunération .


* 108 Votre rapporteure générale rappelle que le solde du glissement vieillesse technicité (GVT) combine :

- le GVT positif, correspondant à l'augmentation de la rémunération individuelle d'un agent en raison de son avancement sur la grille indiciaire (composante vieillesse) et de son changement de grade ou de corps, par concours ou promotion au choix (composante technicité),

- le GVT négatif, traduisant le fait que les nouveaux entrants, en début de carrière, ont un salaire généralement inférieur aux sortants, qui se trouvaient en fin de carrière.

* 109 La garantie individuelle de pouvoir d'achat, mise en place en 2007, compense la perte d'achat pour les fonctionnaires arrivés, notamment, en fin de carrière. Son mécanisme repose sur une comparaison entre l'évolution du traitement indiciaire brut (TIB) détenu sur une période de référence de quatre ans et celle de l'indice des prix à la consommation (hors tabac).

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