b) Un effort structurel à peu près également réparti entre dépenses et recettes, alors que le Gouvernement prévoyait des réductions nettes de recettes
Comme le montre le tableau ci-avant, si l'effort structurel devrait être de 2,1 points de PIB de 2007 à 2012, ce qui est proche de celui prévu en 2007 (1,6 point de PIB), la décomposition de cet effort serait très différente de celle initialement prévue.
En effet, alors que l'effort aurait dû reposer exclusivement sur les dépenses, d'autant plus que les mesures discrétionnaires sur les recettes étaient censées les réduire de 0,7 point de PIB, au total il devrait reposer de manière à peu près équilibrée entre dépenses et recettes.
Cela vient tout d'abord du fait que le Gouvernement n'est pas parvenu à maîtriser la croissance des dépenses en volume comme il l'avait prévu . Ainsi, l'effort structurel cumulé correspondant à la maîtrise des dépenses, qui aurait dû être de 2,3 points de PIB en 2012, cet effort ne serait plus que de 1,1 point de PIB. En effet, les dépenses auraient dû augmenter de 1,1 % par an en volume. Elles ont augmenté en réalité de 1,4 % 49 ( * ) .
Bien que non explicitées, les mesures nouvelles sur les recettes étaient quant à elles censées augmenter le déficit d'un montant qui pouvait être estimé à environ 0,7 point de PIB. En effet, le « programme présidentiel » impliquait des allégements de prélèvements obligatoires de l'ordre de 15 milliards d'euros. Par ailleurs, le programme de stabilité 2009-2012 de décembre 2012 prévoyait de faire passer les recettes de 50,7 points de PIB en 2007 à 50 points de PIB en 2012, ce qui, en supposant que les recettes tendaient spontanément à augmenter à la même vitesse que le PIB, correspondait à une réduction discrétionnaire des recettes égale au différentiel.
Or, la somme des mesures nouvelles prévues sur la période, telle qu'on peut la reconstituer à partir des documents budgétaires, correspond à une augmentation de 0,7 point de PIB (14 milliards d'euros).
c) Des mesures discrétionnaires imposées par la crise
Sans la crise, l'action discrétionnaire du Gouvernement n'aurait pas significativement réduit le déficit.
Le graphique ci-après présente une autre décomposition des facteurs d'évolution du déficit public de 2007 à 2012, moins mécanique, mais qui traduit mieux la réalité.
Les facteurs d'évolution du solde public de 2008 à 2012 : une décomposition indicative par facteurs politiques
(en points de PIB)
* Croissance inférieure à son potentiel, fluctuation de l'élasticité des recettes au PIB.
NB : par convention, on retient les hypothèses de croissance et de solde du Gouvernement pour 2011 et 2012.
Sources : Insee, DGTPE, documents budgétaires, calculs de la commission des finances
En 2007, le déficit public a été de 2,7 points de PIB.
Le Gouvernement a pris de 2008 à 2010 un ensemble de mesures de réductions de recettes (loi TEPA, TVA restauration, réforme de la taxe professionnelle) qui ont globalement accru le déficit de 17,6 milliards d'euros, soit 0,9 point de PIB. Il s'agissait là de mesures purement discrétionnaires, auxquelles rien ne l'obligeait.
Alors qu'il s'était engagé à maîtriser les dépenses d'une manière qui aurait correspondu à un effort structurel cumulé de 2,3 points de PIB en 2012, cet effort n'a été, on l'a vu, que de 1,1 point de PIB. Compte tenu de son engagement initial de maîtriser les dépenses, et de la nécessité de financer les baisses de recettes tout en réduisant le déficit, on peut supposer - de manière favorable au Gouvernement - que cet effort de 1,1 point de PIB aurait également eu lieu en l'absence de crise.
Au total, l'action « vraiment discrétionnaire » du Gouvernement correspond donc à une amélioration du solde de l'ordre de seulement 0,2 point de PIB .
Ensuite est venue la crise.
Celle-ci a mécaniquement aggravé le déficit de 3,8 points de PIB 50 ( * ) .
En sens inverse, la politique d'allégements de recettes de début de mandat a dû être plus que compensée par des augmentations nettes 51 ( * ) de recettes (fiscales et non fiscales), en quasi-totalité concentrées sur les années 2011 et 2012, pour un montant total de 1,9 point de PIB (environ 40 milliards d'euros). A moins de supposer que le Gouvernement a délibérément mené une politique absurde, consistant, dans un premier temps, à réaliser de forts allégements de recettes - ne répondant d'ailleurs à aucune stratégie économique -, puis, dans un second temps, à accroître celles-ci pour un montant supérieur, on est bien obligé de considérer que ces augmentations de recettes n'auraient pas été réalisées sans la crise, et qu'elles sont donc une conséquence de celle-ci.
Si l'on prend en compte ces deux phénomènes, l'impact de la crise (y compris la contrainte qu'elle fait peser sur le Gouvernement) correspond à une aggravation du déficit de « seulement » 2 points de PIB.
Ainsi, sans la crise le Gouvernement n'aurait en réalité rien fait pour réduire significativement le déficit par rapport à son niveau de 2007 .
* 49 Voire 1,6 % si l'on utilise comme déflateur non l'indice des prix à la consommation hors tabac (utilisé pour définir l'objectif d'évolution des dépenses en volume), mais l'indice des prix du PIB, qui est celui qui importe si l'on s'intéresse à l'évolution du déficit.
* 50 Du fait de l'effet conjugué d'une moindre croissance (qui augmente le ratio dépenses/PIB) et d'un moindre dynamisme spontané des recettes.
* 51 Compte tenu de son caractère transitoire, le plan de relance de 2009 n'a pas d'impact significatif sur les recettes en 2012, son impact en 2009 (-12,7 milliards d'euros) ayant été compensé les années suivantes (en quasi-totalité dès 2010). Son impact sur le PIB de 2012 est également vraisemblablement non significatif.