Articles 14 bis et 15 Remise d'un rapport au Parlement sur la création d'un Observatoire national des violences faites aux femmes
L'article 15 de la proposition de loi initiale tendait à créer un Observatoire national des violences faites aux femmes, qui aurait été chargé de collecter, d'analyser et de diffuser les travaux et données relatifs à l'ensemble des violences faites aux femmes et aux politiques menées afin de lutter contre ces dernières, sur le modèle de l'Observatoire des violences faites aux femmes en Seine-Saint-Denis, créé en 2002 à l'initiative du conseil général de ce département.
Selon les conclusions de la mission d'information de l'Assemblée nationale, « sa mission serait, d'une part, de réaliser ou de commander des enquêtes d'envergure nationale sur les violences faites aux femmes et, d'autre part, d'inciter à la production de statistiques sexuées par les administrations concernées. Pour ce faire, un partenariat étroit pourrait être noué par l'Observatoire national de la délinquance et avec l'INSEE. Les travaux de cet Observatoire pourraient déboucher, à l'instar de ceux de l'Observatoire de la parité, sur le dépôt d'un rapport à l'autorité auprès de laquelle il est rattaché, qui serait également déposé auprès du Parlement » 39 ( * ) .
Toutefois, les dispositions de l'article 15 de la proposition de loi ont été déclarées irrecevables au regard de l'article 40 de la Constitution avant l'adoption du texte par la commission spéciale de l'Assemblée nationale et ne figurent de ce fait plus dans le texte adopté par les députés.
Lors de la discussion du texte en séance publique par les députés, Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'Etat, garde des Sceaux, ministre de la Justice et des libertés, a souhaité que l'évaluation des violences commises au sein du couple soit confiée à l'Observatoire national de la délinquance et de la réponse pénale (ONDRP) 40 ( * ) .
Relevant qu'un Observatoire européen dédié à la connaissance et à la compréhension des violences faites aux femmes devrait être prochainement créé, à l'initiative de la présidence espagnole de l'Union européenne, les députés ont insisté pour qu'un organisme spécifique soit chargé d'évaluer ce type de violences et ont souhaité que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur la création d'un Observatoire national des violences faites aux femmes. Ce rapport fait l'objet de l'article 14 bis de la présente proposition de loi, introduit en séance publique par l'Assemblée nationale sur proposition de Mme Catherine Coutelle.
Votre commission relève pour sa part que, quel que soit l'organisme auquel cette tâche serait confiée, une meilleure connaissance des violences faites aux femmes est indispensable afin de pouvoir adapter les politiques publiques menées afin de lutter contre ce phénomène. Or, en dépit de leur caractère prégnant, les violences faites aux femmes demeurent un phénomène particulièrement mal connu , tant sur le plan statistique qu'en ce qui concerne les mécanismes qui les sous-tendent.
Votre commission observe toutefois que le champ des études ainsi réalisées devrait avoir également pour but de mieux mesurer et de mieux comprendre les violences faites aux hommes au sein du couple . Il convient de rappeler que, d'après l'Observatoire national de la délinquance, environ 130 000 hommes auraient été victimes de violences conjugales en 2005-2006. Toutefois, moins de 5 % de ces faits auraient été portés à la connaissance de la Justice 41 ( * ) .
Enfin, votre commission souhaite que de telles études permettent de mesurer et de mieux évaluer les incidences des violences conjugales sur les enfants . Un certain nombre de personnes entendues par votre rapporteur ont en effet indiqué que, d'une part, les violences commises à l'encontre du conjoint s'accompagnaient parfois de violences sexuelles incestueuses à l'encontre des enfants du couple et que, d'autre part, les enfants témoins de violences exercées contre l'un de leurs parents pouvaient à leur tour, devenus adultes, devenir auteurs de violences contre leur partenaire.
Un effort particulier pour mieux cerner ces phénomènes paraît donc essentiel.
En outre, comme l'ont rappelé à votre rapporteur Mme Ernestine Ronai, responsable de l'Observatoire départemental des violences envers les femmes du conseil général de la Seine-Saint-Denis et M. Patrick Poirret, procureur de la République de Strasbourg, un effort particulier doit être accompli pour mieux partager les bonnes pratiques et initiatives concluantes menées dans les territoires en matière de lutte contre les violences conjugales.
En toute hypothèse, votre commission juge, compte tenu des délais d'examen de la présente proposition de loi, qu'il est peu réaliste de demander au Gouvernement de remettre ce rapport pour le 30 juin 2010. En conséquence, votre commission a adopté un amendement de son rapporteur tendant à modifier l'article 14 bis afin de prévoir que celui-ci devra être remis, au plus tard, le 31 décembre 2010.
Votre commission a adopté l'article 14 bis ainsi modifié .
* 39 Assemblée nationale, rapport d'information précité, page 82.
* 40 Assemblée nationale, débats de la deuxième séance du 25 février 2010.
* 41 Bulletin statistique de l'Observatoire national de la délinquance, juillet 2008.