TITRE II - AUTRES DISPOSITIONS RELATIVES AU CRÉDIT

Initialement constitué de trois articles, ce titre comporte désormais, dans sa rédaction soumise au Sénat, quatre articles répartis en trois chapitres :

- le chapitre I er , consacré aux contrats de crédit immobilier (article 16) et à l'assurance emprunteur qui leur est le plus souvent liée (article 17) ;

- le chapitre II, relatif aux regroupements de crédit (article 18) ;

- le chapitre III, créé par votre commission spéciale pour accueillir un article 18 bis consacré au microcrédit.

CHAPITRE IER - CONTRATS DE CRÉDIT IMMOBILIER
ET ASSURANCE EMPRUNTEUR

Ce chapitre, d'une part, tire les conséquences de la directive en redéfinissant le champ du crédit immobilier , touché en creux par une conception du domaine du crédit à la consommation plus extensive que celle retenue jusqu'alors par le droit français (article 16), et, d'autre part, met fin à la possibilité pour les banques, dans le cadre des crédits immobiliers, d'imposer à leurs clients d'adhérer à des contrats d'assurance souscrits pour leur compte afin de garantir leurs emprunts (article 17).

Article 16 (article L. 312-2 du code de la consommation) - Redéfinition du champ du crédit immobilier

Commentaire : cet article modifie la définition du champ du crédit immobilier pour tenir compte de l'extension de celui du crédit à la consommation à des prêts allant jusqu'à 75 000 euros, sous deux réserves : la construction d'immeubles d'habitation et l'acquisition d'immeubles en jouissance à temps partagé.

I. Le droit en vigueur

Le chapitre II du titre I er du livre III du code de la consommation définit le régime applicable aux crédits immobiliers, qui se caractérise notamment par un encadrement de la publicité, l'exigence de mentions obligatoires figurant dans l'offre de contrat de crédit immobilier présentée au client potentiel, un délai de validité de cette offre d'au minimum trente jours et un délai de réflexion minimal de dix jours pour l'emprunteur.

Le champ du crédit immobilier est strictement délimité par les articles L. 312-2 et L. 312-3 en fonction de deux critères. Le premier est matériel : l'opération à financer doit consister en l'acquisition en pleine propriété ou en jouissance d'un immeuble ou de parts ou actions de société donnant vocation à la propriété ou la jouissance. Les emprunts en vue de l'acquisition d'immeubles en jouissance à temps partagé ( time-share ) relèvent donc de cette législation. L'opération peut également consister en l'achat de terrains dans le but d'y construire un immeuble ou encore en la réalisation de travaux de construction, réparations, aménagements et entretiens de cette même catégorie d'immeubles, lorsque leur montant dépasse le plafond des crédits à la consommation, fixé à 21 500 € par l'article L. 311-3.

Le second critère est celui du but de l'opération, qui doit avoir pour finalité un usage d'habitation et non un usage professionnel . Les règles du crédit immobilier s'appliquent toutefois si l'opération à financer vise un immeuble à usage à la fois d'habitation et professionnel, comme c'est souvent le cas pour les professions libérales. En revanche, le financement de l'achat de parts de sociétés civiles immobilières est exclu du domaine du crédit immobilier.

II. Le texte du Gouvernement

La directive 2008/48/CE a étendu le champ du crédit à la consommation tout en maintenant la possibilité pour les Etats membres de l'Union européenne de conserver un régime spécifique pour le crédit immobilier défini au b) du 2 de l'article 2 de la directive comme destiné à « permettre l'acquisition ou le maintien de droits de propriété d'un terrain ou d'un immeuble existant ou à construire ». Cette exception n'est pas utilisée par tous les Etats, l'Allemagne en particulier ayant décidé d'appliquer le droit du crédit à la consommation aux crédits immobiliers.

Avec le présent article 16, le Gouvernement propose de maintenir un droit du contrat de prêt immobilier spécifique tout en adaptant son domaine aux exigences communautaires par :

- la fixation à 75 000 € du seuil au-delà duquel le contrat de prêt sort du régime du crédit à la consommation pour entrer dans celui du prêt immobilier. Désormais, seules les opérations de réparation, d'amélioration ou d'entretien d'immeubles les plus lourdes seront susceptibles d'être financées par des prêts immobiliers ;

- la soumission des opérations de construction d'immeubles à usage d'habitation au régime des prêts immobiliers dès le premier euro , alors qu'actuellement, ce régime ne s'applique que si l'opération de construction est supérieure à 21 500 € (cas en tout état de cause le plus fréquent) ;

- la soumission au régime du crédit à la consommation des contrats de crédits destinés à financer l'acquisition d'immeubles en jouissance ou à l'achat de parts ou actions de sociétés donnant vocation à leur attribution en jouissance lorsque le crédit demandé est inférieur au seuil de 75 000 € . Actuellement, le droit de la consommation prévoit que les crédits souscrits pour l'acquisition de ces biens immobiliers en temps partagé (appartements, chalets de montagne, maisons vendues à plusieurs acquéreurs à temps partagé...) sont des crédits immobiliers quel que soit le montant emprunté .

III. Le texte de la commission spéciale

Votre rapporteur souhaite une transposition en droit français de la directive sur le crédit à la consommation la plus fidèle possible , dans le but de parvenir à un marché unifié du crédit au niveau européen, soumis aux règles les plus proches possibles.

La directive permet de ne pas soumettre aux règles du c rédit à la consommation les crédits destinés à l'acquisition de droits de propriété sur des immeubles . La distinction de deux régimes est traditionnelle en droit français. Deux régimes économiques très différents, qui se traduisent par des durées d'engagement, des conditions de taux, des natures de besoins à financer très différents justifient pleinement deux régimes juridiques différents.

La soumission au droit des crédits à la consommation des crédits destinés à financer l'achat de droits de jouissance d'immeubles à temps partagé, lorsque l'opération se situe en dessous du seuil de 75 000 € ne paraît à cet égard pas satisfaisante. En effet, la propriété, définie aux articles 544 et suivants du code civil, est composée de trois éléments constitutifs, trois droits du propriétaire communément désignés sous le triptyque « usus fructus abusus » : un droit d'usage , un droit de jouissance et un droit de disposer de la chose possédée . Traiter différemment le droit de jouissance lorsqu'il est séparé des autres composantes du droit de propriété n'a pas de sens.

Outre les arguments de droit développés ci-dessus, il est peu lisible pour les acquéreurs de biens immobiliers à temps partagé d'avoir deux régimes de crédit applicables, que l'on se situe au dessus ou en dessous de 75 000 €. En conséquence, votre commission spéciale, sur la proposition de votre rapporteur , et nonobstant les réserves du Gouvernement, a réintégré dans le champ du crédit immobilier tous les crédits destinés aux achats de biens immobiliers à temps partagé, quel que soit le montant de l'emprunt .

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

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