Article 5 (article 47-1 de la loi du 30 septembre 1986) -Composition du conseil d'administration de France Télévisions

I - Le droit existant

L'article 47-1 de la loi du 30 septembre 1986 définit la composition du conseil d'administration de la société France Télévisions ainsi que celui des sociétés nationales de programme visées au I de l'article 44.

Aux termes de cet article, le conseil d'administration est ainsi composé de:

« 1° Deux parlementaires désignés respectivement par l'Assemblée nationale et par le Sénat ;

2° Cinq représentants de l'État ;

3° Cinq personnalités qualifiées nommées par le Conseil supérieur de l'audiovisuel, dont une au moins est issue du mouvement associatif, une autre au moins est issue du monde de la création ou de la production audiovisuelle ou cinématographique et une au moins est issue de l'outre-mer français ;

4° Deux représentants du personnel élus conformément aux dispositions du titre II de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public. »

Le Conseil supérieur de l'audiovisuel nommant à la majorité de ses membres le président de la société France Télévisions parmi les membres du conseil d'administration de cette dernière qu'il nomme, cet organe réunit 15 membres.

La composition actuelle du conseil d'administration de France Télévisions est la suivante 62 ( * ) :

Président

M. Patrick de Carolis ( nommé par le CSA )

Membres

Collège parlementaire :

M. Christian Kert (Assemblée nationale)

M. Michel Thiollière (Sénat)

Représentants de l'État :

M. Raphaël Hadas-Lebel

M. Rémy Rioux

Mme Véronique Cayla

Mme Laurence Franceschini

M. ou Mme X., nommé par le ministre en charge de l'outre mer

Personnalités qualifiées nommées par le CSA :

M. Jean-Christophe Rufin

M. Jean-Claude Carrière

M. Dominique Wolton

Mme Henriette Dorion-Sébéloué

Représentants du personnel :

M. Laurent Bignolas

M. Serge Guillemin

Les compétences du conseil d'administration de France Télévisions

Aux termes de l'article 13 des statuts de la société France Télévisions, « le conseil d'administration définit les orientations stratégiques de l'action de la société. Il veille à la bonne marche des services et à l'observation des dispositions légales et réglementaires applicables à la société. »

« Le conseil d'administration :

- approuve le projet de COM de la société et ses avenants, et délibère sur le rapport relatif à leur exécution annuelle ;

- approuve l'état prévisionnel des recettes et des dépenses de la société France Télévisions, des sociétés France 2, France 3, France 5 et RFO, ainsi que des filiales visées au dernier alinéa du I de l'article 44 de la loi 30 septembre 1986, pour chaque exercice. Il approuve également, après consultation des conseils d'administration des sociétés concernées, les modifications apportées, le cas échéant, en cours d'exercice, à la répartition du montant des ressources publiques allouées par la loi de finances à la société France Télévisions ;

- approuve les conventions de gestion passées entre la société et ses filiales ;

- délibère (...) sur les prises, extensions et cessions de participations financières ;

- approuve, sous réserve des délégations qu'il peut consentir au président, les cautions, avals et garanties(...) ;

- autorise les conventions visées à l'article L. 225-38 du code de commerce (...) ;

- détermine les limitations de durée applicables aux messages destinés à promouvoir les programmes pour chacune des sociétés France 2 et France. »

« Sur proposition du président, le conseil d'administration désigne le directeur général de chacune des sociétés France 2, France 3, France 5 et RFO. »

S'agissant du conseil d'administration des sociétés nationales de programme visées au I de l'article 44 autres que RFO , il comprend, outre son président qui, en vertu de la loi, est celui de France Télévisions :

« 1° Deux parlementaires désignés respectivement par l'Assemblée nationale et par le Sénat ;

2° Deux représentants de l'État nommés par décret ;

3° Une personnalité qualifiée nommée par le Conseil supérieur de l'audiovisuel choisie parmi les personnalités qualifiées nommées par le Conseil supérieur de l'audiovisuel au conseil d'administration de la société France Télévision ;

4° Deux représentants élus du personnel. »

Quant au conseil d'administration de RFO , il comprend, outre son président, qui est lui aussi, en vertu de la loi, le président de France Télévisions :

« 1° Deux parlementaires désignés respectivement par l'Assemblée nationale et par le Sénat ;

2° Quatre représentants de l'État nommés par décret ;

3° Trois personnalités qualifiées nommées par le Conseil supérieur de l'audiovisuel, dont une au moins disposant d'une expérience reconnue dans le domaine radiophonique ;

4° Deux représentants élus du personnel conformément aux dispositions applicables à l'élection des représentants du personnel aux conseils d'administration des entreprises visées au 4 de l'article 1er de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 précitée. »

Enfin, la société France 4 n'ayant pas été créée par la loi, mais sur habilitation de celle-ci, la composition de son conseil d'administration n'est pas prévue par une disposition législative. Elle a été définie par les statuts de la société, qui prévoient à leur article 14 que le conseil d'administration de la société est ainsi composé : 63 ( * )

- quatre administrateurs désignés sur proposition de France Télévisions ;

- un administrateur désigné sur proposition d'Arte France ;

- deux administrateurs désignés sur proposition de France Télévisions en fonction de leurs compétences reconnues dans le domaine d'activité de la société, choisis en dehors des collaborateurs des actionnaires de la société ;

- trois administrateurs désignés par l'État.

Par ailleurs, l'article 47-1 de la loi du 30 septembre 1986 confie également au conseil d'administration de France Télévisions une compétence spéciale. Celui-ci désigne en effet le directeur général des sociétés France 2, France 3, France 5 et RFO.

En vertu des dispositions dudit article, le président du conseil d'administration de la société France Télévisions est en effet président du conseil d'administration des sociétés nationales de programme, mais n'est pas nécessairement président-directeur général de ces mêmes sociétés 64 ( * ) . De fait, tel est pourtant le cas.

II - Le texte du projet de loi

L'article 5 du présent projet de loi modifie la composition du conseil d'administration de France Télévisions en prévoyant que le président de la société n'appartient plus au collège des administrateurs nommés par le CSA .

Dès lors, le conseil d'administration de France Télévisions comprendra 15 membres , qui seront les 14 membres nommés en vertu de l'article 47-1 dans la rédaction restée inchangée de ses alinéas 2 à 5, et le président, nommé par décret.

Source : Rapport n°1267 de M. Christian Kert au nom de la commission spéciale de l'Assemblée nationale sur le projet relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision

Enfin, le projet de loi tire les conséquences de la fusion prévue par le I de l'article 1 er en supprimant les dispositions de l'article 47-1 n'ayant pas trait à la composition du conseil d'administration de France Télévisions.

Les sociétés nationales de programme filiales de la société disparaissant, il n'y a en effet plus lieu de prévoir que le président de France Télévisions est également président du conseil d'administration de ces dernières. Il en va de même pour les dispositions définissant la composition du conseil d'administration de ces sociétés.

Enfin, l'article 8 du présent projet de loi modifiant les conditions de nomination des présidents des sociétés nationales de programme et proposant une nouvelle rédaction en ce sens de l'article 47-4 de la loi du 30 septembre 1986, l'article 5 du présent texte supprime par coordination les dispositions de l'article 47-7 de la loi précitée prévoyant la nomination du président de France Télévisions par le CSA.

III - L'examen par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté un amendement présenté par le rapporteur au nom de la commission spéciale .

Cet amendement modifie la rédaction de l'article 47-1 de la loi du 30 septembre 1986 afin d'apporter deux précisions d'importance :

- les parlementaires siégeant au conseil d'administration de la société France Télévisions sont désignés respectivement par les commissions chargées des affaires culturelles de chacune des deux assemblées ;

- les personnalités désignées par le Conseil supérieur de l'audiovisuel doivent être des « personnalités indépendantes... nommées à raison de leur compétence ».

Il ressort du rapport précité de M. Christian Kert que la commission spéciale a entendu, par cette dernière modification, exclure que les personnalités qualifiées nommées au Conseil supérieur de l'audiovisuel puissent être des clients ou des fournisseurs de la société France Télévisions .

L'Assemblée nationale a souhaité ainsi s'inscrire dans le droit fil des travaux la Commission pour la nouvelle télévision publique, qui avait souligné le risque de conflit d'intérêt que faisait naître la composition du conseil d'administration de France Télévisions.

IV - La position de votre commission

Votre commission approuve la rédaction de l'article 5 issue des travaux de l'Assemblée nationale.

Elle a, en effet, permis de trouver un équilibre entre la nécessaire stabilité de la composition du conseil d'administration de France Télévisions et la non moins nécessaire indépendance des administrateurs qui y siègent.

Votre commission a néanmoins estimé indispensable de préciser les compétences du conseil d'administration en lui attribuant la responsabilité de nommer, sur proposition de son président et à la majorité qualifiée, le responsable de l'information au sein de la société France Télévisions.

Ce faisant, elle a entendu prendre acte de la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République, qui, en son article 11, modifié à l'initiative du Sénat , complète l'article 34 de la Constitution et confie à la loi le soin de fixer les règles en matière de liberté, de pluralisme et d'indépendance des médias .

Or, dans sa décision n° 2000-433 DC du 27 juillet 2000, le Conseil constitutionnel a estimé que, s'agissant du principe constitutionnel d'indépendance des médias, « l'objectif à réaliser est que les auditeurs et les téléspectateurs qui sont au nombre des destinataires essentiels de la liberté proclamée par l'article 11 [de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen] soient à même d'exercer leur libre choix sans que ni les intérêts privés ni les pouvoirs publics puissent y substituer leurs propres décisions ni qu'on puisse en faire les objets d'un marché ».

Le législateur a donc désormais toute compétence pour garantir que ni les intérêts privés ni les pouvoirs publics ne pourront substituer leurs propres décisions à celles des auditeurs et téléspectateurs qui sont, en tant que citoyens, les premiers destinataires des libertés proclamées et protégées par la Constitution.

Au premier rang des garanties essentielles de la liberté de la communication et de l'indépendance des médias figure l'indépendance de l'information. Cette indépendance s'entend en un double sens : elle vaut en effet, elle aussi, par rapport aux intérêts privés aussi bien que par rapport aux intérêts publics.

La circonstance qu'un service de télévision soit une entreprise publique n'a donc pas d'influence déterminante sur l'étendue des garanties qui doivent être attachées à l'exercice de la liberté de l'information .

Si tel était le cas, votre commission estime que cela devrait conduire à rehausser ces garanties, afin de renforcer dans l'esprit des citoyens la certitude que la télévision publique, loin d'être, à un titre ou à un autre, un organe relayant les conceptions défendues par le Gouvernement, est un média libre, critique et indépendant.

C'est pourquoi votre commission a souhaité compléter les garanties d'indépendance d'ores et déjà offertes par la loi aux journalistes en prévoyant que le responsable de l'information au sein de la société France Télévisions sera nommé par le conseil d'administration à la majorité des trois cinquièmes.

Pour l'heure, la nomination des membres dirigeants de la société est une compétence propre du président du conseil d'administration, ce dernier étant en effet également directeur général de la société. Aux termes de l'article 14 des statuts de France Télévisions, le président « organise la direction de la société et en nomme les membres. »

Votre commission observe cependant que la loi du 30 septembre 1986 prévoit d'ores et déjà, en son article 47-1, que la nomination de certains dirigeants relève du conseil d'administration de France Télévisions et non de son président : le huitième alinéa de cet article dispose en effet que les directeurs généraux des sociétés nationales de programme visées au I de l'article 44 sont nommées par le conseil d'administration de la société-mère sur proposition de son président. Rien n'interdit donc de prévoir une telle disposition s'agissant d'une fonction particulière au sein de l'entreprise, dès lors que celle-ci revêt une importance suffisante. Tel est bien le cas en l'espèce.

S'agissant de la procédure de nomination d'un dirigeant à la majorité qualifiée, votre commission n'ignore pas qu'il s'agit là d'une procédure inédite pour les sociétés nationales de programme. Elle estime néanmoins qu'il s'agit là de la meilleure manière de garantir que les administrateurs représentant, à un titre ou à un autre, les pouvoirs publics ne pourront à eux seuls nommer ou révoquer le responsable de l'information au sein de la société.

En effet, la révocation du responsable de l'information serait acquise à la majorité simple lorsque 8 administrateurs voteraient en ce sens. Or ce seuil serait atteint par l'addition des voix des administrateurs nommés par le Président de la République, par les représentants de l'État ainsi que par les parlementaires siégeant au sein du Conseil.

Si votre commission considère que ces membres ne sont pas voués par nature à soutenir les mêmes décisions, elle estime que s'agissant d'une décision aussi sensible que la nomination et la révocation du responsable de l'information au sein de la principale entreprise audiovisuelle publique du pays, aucun doute ne doit pouvoir peser sur elle.

Une nomination et une révocation acquise à la majorité des trois cinquièmes, c'est-à-dire, si tous les administrateurs de la société sont présents, par dix voix au moins, apparaît donc de nature à lever tous les doutes qui pourraient naître au sujet de l'indépendance du responsable de l'information au sein de France Télévisions et, partant, au sujet de l'indépendance de l'information diffusée sur les ondes publiques.

En effet, sans porter atteinte au pouvoir général de direction de la société reconnu au président-directeur général de France Télévisions, cette procédure garantirait une indépendance suffisante au responsable de l'information et, par contrecoup, à l'ensemble des journalistes de l'entreprise.

Votre commission a donc adopté un amendement en ce sens .

Elle vous demande d'adopter l'article 5 du projet de loi ainsi modifié.

* 62 Vos rapporteurs s'étonnent de constater que la composition du conseil d'administration ne figure sur aucune page aisément accessible du site Internet de France Télévisions.

* 63 Vos rapporteurs regrettent à cette occasion que la tutelle de France 4 n'ait pas jugé utile de prévoir la présence de parlementaires dans son conseil d'administration, alors même qu'y figurent des administrateurs désignés par l'État. De la même manière, l'absence de personnalités qualifiées désignées par le CSA est une situation singulière.

* 64 S'agissant de France 4, le président du conseil d'administration est élu par le conseil parmi les administrateurs désignés sur proposition de France Télévisions.

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