Article 29 (article 27 de la loi du 30 septembre 1986) - Valorisation des dépenses d'audio-description dans la contribution des éditeurs de services de télévision diffusés en mode hertzien à la production. Adaptation des obligations aux SMAd. Contribution des éditeurs de services de télévision au financement de la production d'oeuvres cinématographiques et audiovisuelles

Cet article tend à modifier l'article 27 de la loi du 30 septembre 1986 qui précise le régime des services de communication audiovisuelle diffusés par voie hertzienne.

I. Le droit existant

• Le principe de la contribution des éditeurs de services de télévision au financement de la production d'oeuvres cinématographiques et audiovisuelles est fixé par la loi n° 2000-719 du 1er août 2000, qui a modifié la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication :

- son article 27 renvoie à des décrets en Conseil d'État le soin de fixer les principes généraux définissant un certain nombre des obligations des différentes catégories de services de communication audiovisuelles diffusés par voie hertzienne. Parmi ces obligations, figure la contribution au développement de la production cinématographique et audiovisuelle, notamment indépendante ;

- son article 33 prévoit qu'un décret en Conseil d'État, également pris après avis du CSA, fixe les règles et obligations applicables aux catégories de services distribués par les réseaux n'utilisant pas les fréquences assignées par le CSA ;

- et son article 71 prévoit que l'ensemble de ces décrets précisent les conditions dans lesquelles une oeuvre cinématographique ou audiovisuelle peut être prise en compte au titre de la contribution d'un éditeur de service à la production indépendante et il fixe les règles de cette indépendance.

En application de ces dispositions, des décrets en Conseil d'État, appelés communément les « décrets Tasca » , du nom de la ministre en charge du secteur à l'époque, ont été adoptés :

- le décret n° 2001-609 du 9 juillet 2001 modifié est applicable aux services de télévision diffusés par voie hertzienne analogique (décret dit « chaînes analogiques »). Ce dernier est venu annuler et se substituer au décret n° 90-67 du 17 janvier 1990. Il s'applique aujourd'hui à TF1, France 2, France 3, France 5 et M6 ;

- le décret n° 2001-1332 du 28 décembre 2001 est applicable aux services de télévision par voie hertzienne terrestre en mode analogique dont le financement fait appel à une rémunération de la part des usagers (décret dit « chaînes payantes ») ;

- le décret n° 2001- 1333 du 28 décembre 2001 fixe les principes généraux concernant la diffusion des services autres que radiophoniques par voie hertzienne terrestre en mode numérique (décret dit « TNT ») ;

- enfin, le décret n°2002-140 du 4 février 2002 modifié détermine le régime applicable aux différentes catégories de services de radiodiffusion sonore et de télévision distribués par câble et par satellite (décret dit « câble et satellite »).

Ces décrets comportent tous un corps de règles communes ayant vocation à s'appliquer à tous les services mais avec la possibilité de moduler ces obligations dans les conventions que les chaînes signent avec le CSA en fonction de leur particularité.

L'article 29 du présent projet de loi tend à modifier les dispositions applicables aux services de communication audiovisuelle diffusés par voie hertzienne visés à l'article 27 de la loi de 1986.

II - Le texte du projet de loi

Le présent article tend à modifier l'article 27 de la loi du 30 septembre 1986 afin de valoriser l'audio-description dans la contribution à la production des éditeurs de services de télévision diffusés par voie hertzienne et de prévoir des obligations adaptées pour les SMAd.

Afin d'inciter les éditeurs à adapter les programmes pour les personnes aveugles ou malvoyantes , le deuxième alinéa modifie le 3° de l'article 27 de la loi du 30 septembre 1986, qui fixe le principe de la contribution des éditeurs de services de communication audiovisuelle diffusés en mode hertzien à la production audiovisuelle et cinématographique, en ouvrant la possibilité d'intégrer les dépenses relatives à cette adaptation dans les calcul des obligations de production .

Cette mesure incitative à l'audiodescription (voir l'exposé général pour la description des méthodes d'audiodescription), avec celle prévue à l'article 34 du présent projet de loi, devrait favoriser le respect des dispositions plus contraignantes du projet de loi relatives à l'audiodescription, (articles 30 et 35 du projet de loi).

Selon le rapport du Gouvernement sur l'adaptation des programmes de télévision aux personnes aveugles et malentendants de janvier 2008, les politiques menées à l'étranger retenait l'un des trois scénarios suivants pour développer l'audiodescription :

- le développement d'une chaîne entièrement accessible aux déficients sensoriels, comme cela est envisagé au Canada. L'initiative est certes très utile pour suivre certains programmes spécialisés comme les bulletins d'information mais elle ne remplit pas entièrement la fonction sociale du média télévisé. Elle ne permet en effet pas l'accès aux programmes principalement regardés par le reste de la population. Même si ce type de projet a parfois été évoqué en France, c'est d'après le rapport « une communautarisation de l'accès à la télévision, plus adaptée à des pays anglo-saxons qu'à nos traditions » ;

- l'imposition du développement de l'audiodescription aux seules chaînes du service public. Cette hypothèse est plus séduisante aux yeux du ministère de la culture, qui souligne que l'accessibilité des populations concernées aux programmes télévisés peut être regardée comme une mission de service public. Mais là encore, souligne-t-il, elle aboutit à limiter le choix des programmes des personnes concernées puisqu'elle ne leur permet pas d'accéder à l'ensemble des autres programmes diffusés par les opérateurs privés ;

- la généralisation du développement de l'audiodescription par les chaînes les plus regardées, publiques et privées. C'est le choix retenu en matière d'accessibilité des personnes sourdes et malentendantes par la loi du 11 février 2005.

Il semble clair que le présent projet de loi a adopté la troisième solution, ce dont vos rapporteurs se félicitent, soulignant que le soutien aux personnes handicapées doit être l'affaire de tous . En outre, la généralisation de la télévision numérique permettra de dégager la ressource suffisante pour disposer de versions sonores supplémentaires. Il est donc vraisemblable à terme que les chaînes seront capables de proposer simultanément des versions classiques et audiodécrites sans conséquence majeure sur la qualité sonore de l'une ou l'autre des versions.

Les obligations en matière d'audiodescription seront définies, s'agissant des sociétés nationales de programme, par leur contrat d'objectifs et de moyens (voir le commentaire sur l'article 18 du présent projet de loi), et pour les chaînes hertziennes privées, par les conventions passées avec le CSA (article 30 du présent projet de loi).

Le troisième alinéa du présent article complète le dixième alinéa de l'article 27 de la loi du 30 septembre 1986 qui prévoit que les décrets en Conseil d'État d'application de l'article 27 pourront définir des règles spécifiques pour les SMAd diffusés par voie hertzienne, et même les exonérer de certaines obligations. Cette disposition a une portée très large dans la mesure où les décrets prévus à l'article 27 régissent de très nombreux aspects de l'activité des services de télévision (publicité, parrainage, quotas de diffusion, contributions à la création, acquisitions de droits de diffusion...).

Elle est conforme à l'esprit de l'avis du CSA sur le projet de loi qui préconisait que l'encadrement des SMAd soit souple et que les obligations afférentes ne soient pas strictement les mêmes que celles relatives aux services de télévision.

III - L'examen par l'Assemblée nationale

• L'Assemblée nationale a adopté trois amendements présentés par le Gouvernement afin de traduire les accords interprofessionnels se substituant aux décrets dits « Tasca » 94 ( * ) .

En effet, ainsi qu'il a été indiqué dans la première partie du présent rapport, des accords interprofessionnels ont été conclus récemment par les principaux groupes audiovisuels et des syndicats de producteurs et représentants d'auteurs afin de fixer la contribution des chaînes à la production audiovisuelle et cinématographique. Ces accords traduisent l'aboutissement d'une longue concertation entre ces professionnels engagée il y a plus d'un an par la ministre de la culture et de la communication et confiée à MM. Kessler et Richard.

Ces accords assouplissent un certain nombre d'obligations aujourd'hui fixées par la loi de 1986 modifiée et ses décrets d'application, afin notamment de permettre de mieux prendre en considération l'apport économique des diffuseurs à la production des oeuvres qu'ils financent, d'améliorer la circulation des oeuvres et leur distribution sur tous les supports d'exploitation, en tenant compte de la constitution de groupes intégrés et plurimédias.

Rappelons que le principe de la contribution des éditeurs de services de télévision au financement de la production d'oeuvres cinématographiques et audiovisuelles est fixé par la loi n° 2000-719 du 1er août 2000, qui a modifié la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication. Ainsi qu'il a été indiqué précédemment, l'article 27 de cette dernière renvoie à des décrets en Conseil d'État le soin de fixer les principes généraux définissant un certain nombre des obligations des différentes catégories de services de communication audiovisuelles diffusés par voie hertzienne.

Le 3° de cet article précise que, parmi ces obligations, figure la contribution au développement de la production cinématographique et audiovisuelle, notamment indépendante.

La première modification proposée tend à permettre que la contribution des chaînes diffusées par voie hertzienne terrestre puisse porter en totalité sur la production indépendante, alors que la rédaction actuelle ne le prévoit pas.

Le deuxième ajout permet de recentrer les obligations de production sur les oeuvres dites patrimoniales , en permettant aux éditeurs de faire porter leurs contributions en totalité sur ce type de production. En effet, la rédaction actuelle prévoit que ces contributions doivent comporter « une part significative dans la production d'oeuvres de fiction, d'animation, de documentaires de création, de vidéo-musiques et de captation ou de recréation de spectacles vivants », c'est-à-dire dans la production d'oeuvres patrimoniales.

Le troisième amendement du Gouvernement adopté par l'Assemblée nationale à cet article tend à permettre aux accords interprofessionnels d'inclure dans les dépenses prises en compte au titre de la contribution des éditeurs à la production d'oeuvres audiovisuelles, la formation des auteurs et la promotion des oeuvres produites . Il s'agit ainsi notamment d'encourager l'écriture et de valoriser les auteurs.

L'Assemblée nationale a enfin adopté un amendement de MM. Benoist Apparu (UMP - Marne) et Franck Riester (UMP - Seine-et-Marne) visant à étendre la disposition du projet de loi permettant la prise en compte d'une partie des coûts relatifs à l'accessibilité des programmes aux personnes aveugles ou malvoyantes dans la contribution à la production audiovisuelle aux coûts occasionnés par l'accessibilité des programmes aux personnes sourdes et malentendantes.

IV - La position de votre commission


• Soulignant que l'accessibilité des programmes aux personnes sourdes et malentendantes découle d'un choix législatif fort et déjà ancien (loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées) que les chaînes ont déjà largement mises en oeuvre, vos rapporteurs estiment qu'il n'est pas légitime que les chaînes déduisent les sommes afférentes de leur contribution à la création. En outre, aucune disposition similaire n'a été prévue pour les services de communication diffusant sur des réseaux non hertziens.

Sur leur proposition, votre commission a donc adopté un amendement tendant à supprimer les dispositions issues de l'amendement de MM. Benoist Apparu (UMP - Marne) et Franck Riester (UMP - Seine-et-Marne).

• Par ailleurs, s'agissant des dispositions tendant à traduire les accords interprofessionnels, votre commission souscrit à ce nouveau cadre, issu d'une longue concertation. Elle regrette seulement son manque de lisibilité, lié à sa présentation « éclatée » tout au long du projet de loi...

Recentré sur les oeuvres audiovisuelles patrimoniales, garantissant l'indépendance des producteurs, valorisant davantage les auteurs, adapté à la réalité économique des diffuseurs, ce cadre crée des conditions devant permettre de garantir l'avenir de la création audiovisuelle française dans un univers numérique.

Votre commission s'est cependant interrogée sur la notion de « documentaire de création » qui permet à cette catégorie d'oeuvre de figurer au titre des oeuvres patrimoniales.

La mission Kessler-Richard concluait à la difficulté de définir cette notion complexe car, au terme de la longue concertation, aucune définition satisfaisante n'avait pu être élaborée. Ce sont donc le Conseil supérieur de l'audiovisuel et le CNC qui l'évaluent en fonction des projets.

Sans entrer dans une telle définition, votre commission a souhaité néanmoins préciser que la notion de « documentaire de création » comprend bien des documentaires qui sont insérés au sein d'une émission autre qu'un journal télévisé ou une émission de divertissement.

Tel est l'objet de l' amendement qu'elle vous propose au dernier alinéa du 3° de l'article 27 de la loi de 1986, tel que modifié par la loi n° 2007-309 du 5 mars 2007 relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur.


• Votre commission vous propose, par ailleurs, un amendement au même alinéa afin d'améliorer le nouveau dispositif en y incluant , comme le prévoient les accords interprofessionnels, non seulement les services de télévision, mais également les nouveaux services de médias audiovisuels à la demande (SMAd) .

Il s'agit là de confirmer que des magazines d'information et de connaissance peuvent comporter des reportages qui sont de véritables oeuvres patrimoniales, avec une valeur culturelle et/ou artistique.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

* 94 Voir les développements sur ce sujet dans la première partie du présent rapport (III F) ainsi que les annexes.

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