2. Les avantages du régime par points
Les régimes de base gagneraient sans doute à s'inspirer de la technique de la gestion des retraites par points, utilisée par les régimes complémentaires Agirc et Arrco depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, et adoptée par l'Allemagne en 1992.
Les régimes de retraite par points reposent sur des mécanismes relativement simples, favorisant la réalisation automatique des ajustements financiers. Au cours des dernières décennies, la maîtrise des dépenses de vieillesse a pu y prendre différentes formes (modération de la revalorisation annuelle du point, réduction des bonifications pour familles nombreuses, par exemple). A l'usage, le mode de fonctionnement de ces régimes semble plus efficace que celui des régimes de base, qui repose sur un ensemble de normes vaste et complexe, souvent contradictoires entre elles.
La technique de gestion par points apparaît d'autant plus souple qu'elle peut être utilisée aussi bien par les régimes de répartition pure (Argirc, Arcco, Ircantec) que par les régimes de répartition provisionnée, comme le nouveau régime additionnel des fonctionnaires, voire par les régimes financés en capitalisation (Préfon).
En outre, les systèmes par points sont par nature contributifs, dans la mesure où le montant de la retraite servie est proportionnel au nombre total de points. Rien n'empêche, d'ailleurs, de moduler le caractère contributif du régime par des mécanismes de solidarité : des points gratuits peuvent être attribués sans contrepartie de cotisations salariales, afin de compenser certaines périodes non travaillées (chômage, maladie), des majorations de pension en fonction du nombre d'enfants élevés peuvent être mises en place, etc.
Une version élaborée de la technique des points est utilisée en Suède depuis 1998, date à laquelle les pouvoirs publics ont choisi de modifier radicalement le système de l'assurance vieillesse.
3. Les leçons à tirer du modèle suédois des comptes notionnels
Partant d'un régime de retraite à prestations définies , ressemblant beaucoup au régime général français, les Suédois ont fait le choix de passer à un mécanisme original de cotisations définies , préservant le principe de répartition, tout en y introduisant une faible part de capitalisation. L'objectif des pouvoirs publics suédois était d'anticiper le choc démographique lié eu vieillissement de la population. Ils ont donc choisi comme variable d'ajustement l'âge du départ à la retraite et, dans une moindre mesure, le taux de progression des pensions. En contrepartie, le niveau de cotisation pesant sur les actifs a été définitivement stabilisé à 18,5 % des salaires.
Tous les assurés sociaux suédois bénéficient d'un compte individuel virtuel, d'où le qualificatif de « notionnel », sur lequel sont enregistrés les flux de cotisations. Ceux-ci ne donnent toutefois pas lieu à la constitution d'un capital financier au sens propre du terme, car le régime continue de fonctionner suivant les règles de la répartition : les cotisations encaissées sont utilisées chaque mois pour financer les pensions des retraités.
En 2001, la technique des comptes notionnels a été complétée par un mécanisme d'ajustement structurel : si les ressources du régime s'avèrent insuffisantes pour honorer le montant des retraites à servir aux assurés sociaux, un processus d'ajustement fondé sur le ratio actif-passif s'enclenche automatiquement en agissant sur le taux de revalorisation du capital notionnel accumulé par l'ensemble des assurés sociaux, ainsi que sur l'indice d'évolution des pensions déjà liquidées.
Le bilan positif de la réforme suédoise a conduit la Mecss 25 ( * ) à recommander la transposition de ses principaux éléments en France : le système des comptes notionnels d'une part, le mécanisme d'ajustement automatique des comptes, d'autre part. Selon la Mecss, ce système « présente quatre avantages principaux :
- il garantit un équilibre financier pérenne, sur la base de taux de cotisations élevés, mais stables à l'avenir ;
- il préserve l'équité entre les générations ;
- il assure une meilleure transparence de l'effort contributif, ainsi que des niveaux de prestations perçues par les assurés sociaux suédois ;
- il garantit une pension minimum aux personnes âgées les plus modestes.
Il a été conçu pour préserver un haut niveau de retraite au cours des prochaines décennies. En contrepartie, les assurés sociaux sont incités à prolonger leur activité professionnelle pour conserver un même taux de remplacement que les générations bénéficiant de l'ancien système. »
En définitive, le système des comptes notionnels présente l'avantage de garantir la stabilité financière du régime de retraite au cours des prochaines décennies et d'éviter que le poids des ajustements financiers nécessaires soit principalement mis à la charge des générations futures.
* 25 Rapport d'information de la Mecss n° 377 (2006-2007) - « Réformer la protection sociale : les leçons du modèle suédois » - Alain Vasselle et Bernard Cazeau.