B. UN DROIT DE LA DURÉE DU TRAVAIL ASSOUPLI ET SIMPLIFIÉ

Cette réforme vient compléter un ensemble de mesures adoptées depuis 2003 et préserve la durée légale du travail à trente-cinq heures hebdomadaires, qui demeure le seuil de déclenchement des heures supplémentaires défiscalisées.

1. La réforme s'inscrit dans le prolongement des textes précédents

Depuis cinq ans, plusieurs texte ont assoupli les règles relatives à la durée du travail mais sans modifier radicalement la législation issue des lois Aubry sur les trente-cinq heures.

* La loi n° 2003-47 du 17 janvier 2003 relative aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi a autorisé les partenaires sociaux à fixer, par accord collectif, le taux de majoration des heures supplémentaires, sous réserve qu'il soit supérieur à 10 %. C'est seulement en l'absence d'accord que les taux de majoration inscrits dans le code du travail (25 % pour les huit premières heures, 50 % au-delà) trouvent à s'appliquer.

De plus, alors que la deuxième loi Aubry avait imposé que les quatre premières heures supplémentaires soient rétribuées par l'attribution d'un repos compensateur, ce texte a prévu qu'elles soient rémunérées à un taux majoré, à moins qu'un accord collectif ne maintienne le principe d'un repos compensateur.

* Les décrets n° 2003-258 du 20 mars 2003 et n° 2004-1381 du 21 décembre 2004 ont ensuite porté, respectivement, de 130 à 180 puis de 180 à 220 heures, le contingent réglementaire d'heures supplémentaires, donnant ainsi plus de souplesse de gestion aux entreprises. Ce contingent réglementaire s'applique en l'absence de contingent conventionnel.

* La suppression d'un jour de repos pour financer la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) a eu pour effet d'augmenter de sept heures la durée annuelle du travail.

* La loi n° 2005-296 du 31 mars 2005 portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise a adapté le compte épargne-temps afin que des temps de repos non pris puissent être plus facilement convertis en argent.

* En instaurant une défiscalisation et une exonération de cotisations sociales sur les heures supplémentaires, la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (Tepa) a encouragé les employeurs et les salariés à accomplir des heures supplémentaires, rompant ainsi avec la logique de réduction de la durée du travail.

2. Des règles simplifiées qui donnent la priorité à la négociation d'entreprise

Le projet de loi permet cependant de franchir une étape supplémentaire et de tourner définitivement la page des lois Aubry. Il s'inspire des recommandations d'un récent rapport du Conseil d'analyse économique (CAE) qui suggérait de « simplifier drastiquement la réglementation de la durée du travail, des heures supplémentaires et activer la négociation collective » 14 ( * ) .

a) Des règles simplifiées

Le projet de loi simplifie considérablement le droit de la durée du travail puisque le nombre d'articles qu'y consacre le code va être ramené de soixante-treize à trente-quatre. Le droit de la durée du travail est devenu si complexe et instable depuis dix ans qu'une simplification et une stabilisation des règles étaient devenues indispensables, notamment dans l'intérêt des PME.

La simplification est particulièrement spectaculaire en matière d'aménagement du temps de travail puisque les divers dispositifs minutieusement réglementés qui figurent aujourd'hui dans le code du travail (travail par cycles, modulation, attributions de jours de RTT sur quatre semaines ou sur l'année) seront remplacés par un dispositif unique d'aménagement du temps de travail par voie d'accord collectif.

A l'initiative du député Pierre Morange, l'Assemblée nationale a par ailleurs adopté plusieurs amendements qui simplifient le régime du compte épargne-temps, tout en ouvrant la voie à une meilleure portabilité des droits.

b) La priorité donnée à l'accord d'entreprise

Le projet de loi entend donner une plus grande liberté aux partenaires sociaux pour négocier sur la durée du travail, qu'il s'agisse de fixer le niveau du contingent d'heures supplémentaires ou les conditions de son dépassement, d'aménager le temps de travail ou d'autoriser la conclusion de conventions de forfait.

Il donne la priorité à l'accord d'entreprise et confère à l'accord de branche ou aux dispositions législatives et réglementaires un caractère supplétif.

Votre commission soutient ce choix qui permettra de définir les règles applicables au plus près des réalités du terrain. Elle estime peu fondées les craintes exprimées par certaines organisations syndicales sur un éventuel « dumping social », résultant de la concurrence que se livreraient les entreprises pour revoir le droit de la durée du travail à la baisse. Elle rappelle en effet qu'un accord, pour être valide, devra être approuvé par des organisations ayant recueilli au moins 30 % des voix aux élections professionnelles et que les organisations syndicales majoritaires pourront y faire opposition.

c) Le maintien de la durée légale à trente-cinq heures

Le projet de loi maintient la durée légale du travail à trente-cinq heures par semaine. Toute autre option aurait été incohérente avec le choix effectué l'an dernier, par le vote de la loi Tepa, de mieux rémunérer les heures supplémentaires. Comme la durée légale du travail marque le seuil de déclenchement des heures supplémentaires, il est indispensable que cette référence figure toujours dans le code.

Le texte procède d'ailleurs aux adaptations nécessaires du dispositif issu de la loi Tepa afin de tenir compte des modifications introduites par la loi au régime des heures supplémentaires. Le ministre du travail a précisé que l'éventuelle perte de recettes pour la sécurité sociale résultant d'un recours accru aux heures supplémentaires serait compensée dans la prochaine loi de financement. Attentive à la compensation des exonérations de charges, votre commission veillera à ce que les recettes adéquates soient affectées à la sécurité sociale.

* 14 Rapport « Temps de travail, revenu et emploi » de Patrick Artus, Pierre Cahuc et André Zylberberg, CAE, La Documentation française, 2007.

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