EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le 29 avril 2008, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Denis Badré, rapporteur, sur le projet de loi n° 293 (2007-2008) autorisant l'approbation de la décision du Conseil relative au système des ressources propres des Communautés européennes.
M. Denis Badré, rapporteur , a indiqué que le projet de loi soumis à examen constituait le volet « recettes » des perspectives financières 2007-2013 de l'Union européenne. Il a rappelé que le système actuel des ressources propres se composait de ressources propres traditionnelles (droits de douane, prélèvements agricoles et cotisation « sucre »), d'un montant d'environ 19 milliards d'euros, de la ressource TVA, pour un montant équivalent, et de la ressource RNB assise sur le revenu national brut des États membres, qui représentait 68 % du total, soit 81 milliards d'euros en 2008. Il a précisé que le calcul des contributions nationales au budget communautaire s'opérait en appliquant une « correction » à la contribution britannique, consistant à rembourser au Royaume-Uni les deux tiers de la différence entre leur participation au budget et les retours qu'ils en perçoivent. Par ailleurs, quatre États fortement contributeurs nets (Allemagne, Suède, Pays-Bas et Autriche) n'acquittent que 25 % de leur contribution théorique à la « correction » britannique.
M. Denis Badré, rapporteur , a précisé que la France était le deuxième pays contributeur au budget communautaire, avec 18,4 milliards d'euros en 2008, et qu'elle était le premier financeur du « rabais » britannique dont elle acquittait, à elle seule, 26 % du total (1,5 milliard d'euros en 2008).
S'agissant des modifications introduites par la décision du Conseil du 7 juin 2007, le rapporteur a insisté sur les aspects suivants :
1. les modalités de calcul de la « correction » britannique sont revues en profondeur, de manière à en exclure les dépenses réalisées dans les pays ayant adhéré à l'Union européenne à partir de 2004. Cette modification, qui ne pourra toutefois pas conduire à une augmentation de la contribution britannique supérieure à 10,5 milliards d'euros sur la période 2007-2013, met fin au paradoxe selon lequel le Royaume-Uni participe très peu financièrement à un élargissement dont il est pourtant le fervent partisan ;
2. le taux d'appel de TVA est uniformisé à 0,30 % pour l'ensemble des États membres ;
3. des compensations en recettes sont octroyées aux autres pays fortement contributeurs nets sous forme de taux d'appel TVA allégée et de réductions forfaitaires des contributions RNB.
M. Gérard Longuet a jugé opportune la remise en cause du « chèque » britannique que ne justifiait plus la prospérité du Royaume-Uni au sein de l'Union.
M. Denis Badré, rapporteur , a souscrit à cette analyse et ajouté que ce dispositif était emblématique des égoïsmes nationaux et coûteux pour la France. Il a ensuite indiqué que l'entrée en vigueur de la nouvelle décision « ressources propres » devrait accroître la contribution brute de la France de 11 milliards d'euros entre 2007 et 2013, et en accentuer le statut de contributeur net, puisque le solde net devrait passer de - 0,21 % à - 0,37 % du RNB en moyenne sur la même période.
Le rapporteur a enfin mentionné que la décision du Conseil reprenait les termes de la « clause de réexamen » de l'ensemble des recettes et des dépenses de l'Union adoptée par les chefs d'État et de gouvernement en décembre 2005. Rappelant que cette clause avait jusqu'alors donné lieu au lancement d'une consultation par la Commission européenne et à l'adoption d'une résolution par le Parlement européen, il a estimé que l'examen du présent projet de loi devait être l'occasion de s'interroger sur les enjeux de la réforme du financement de l'Union européenne.
Alors que les défauts de ce financement, notamment en termes de lisibilité et d'efficacité économique, sont connus depuis longtemps et que l'actualité communautaire récente fait craindre le report de débats qui pourraient « interférer » avec la ratification du Traité de Lisbonne, M. Denis Badré, rapporteur , a considéré que l'examen du projet de loi serait l'occasion d'interroger le gouvernement sur les intentions de la future présidence française de l'Union européenne en la matière.
Il a conclu en proposant à la commission de recommander l'adoption du projet de loi au Sénat.
M. Yves Fréville a ironisé sur le fait que la complexité croissante des finances européennes, due à la multiplication des mécanismes de compensation au bénéfice de certains États membres, n'était pas sans évoquer celle des finances locales. Revenant sur ce que devaient être les bases du système des ressources propres, il a rappelé que l'instauration d'un « quasi impôt européen », tel qu'un prélèvement additionnel aux impôts nationaux sur les bénéfices des sociétés, avait déjà été proposée dans les années 70.
A M. Jean Arthuis, président, qui s'interrogeait sur la différence entre le revenu national brut (RNB) et le produit intérieur brut (PIB), M. Gérard Longuet a précisé que le revenu national brut intégrait le revenu sur les investissements nets réalisés à l'étranger.
M. Denis Badré, rapporteur, a souscrit à l'idée de doter le budget communautaire de ressources véritablement propres, les cotisations acquittées au niveau national alimentant la logique du « taux de retour ». Il a également démontré que les raisonnements fondés sur le calcul des soldes nets étaient fortement sujets à caution, dans la mesure où ils n'intégraient pas l'ensemble des gains non quantifiables et non localisables tirés de l'appartenance à l'Union européenne.
M. Jean Arthuis, président , a considéré que l'impôt européen demeurerait une « chimère » tant que les États membres ne se seraient pas dotés d'une culture fiscale commune et que l'Union européenne serait considérée par d'aucuns comme un simple « SIVOM ».
Mme Nicole Bricq a expliqué que l'insuffisance des avancées consacrées par la nouvelle décision « ressources propres » et la complexité croissante du système de financement communautaire qui en résultait la conduiraient à s'abstenir sur le projet de loi.
M. Denis Badré, rapporteur, a fait observer qu'un rejet du texte placerait la France dans une position de faiblesse alors qu'elle s'apprête à prendre la présidence de l'Union européenne et à la veille d'échéances aussi importantes que le renouvellement de la Commission et les élections au Parlement européen.
Sur la recommandation du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi sans modification.