EXAMEN DES ARTICLES

Article premier (art. L. 321-1 du code de la route) - Commercialisation des véhicules non soumis à réception par des professionnels - Interdiction de leur vente aux mineurs

Le présent article complète l'article L. 321-1 du code de la route par un second paragraphe. Il tend :

- d'une part, à prévoir que les cyclomoteurs, motocyclette et quadricycle à moteur non soumis à réception et dont la vitesse excède par construction vingt-cinq km/h ne pourraient être vendus, cédés ou loués que par des professionnels adhérant à une charte de qualité définie par décret ;

- d'autre part, à interdire la vente, la cession ou la location-vente de ces véhicules aux mineurs.

1. La commercialisation de ces engins par des professionnels

Le monopole de la commercialisation des mini-motos et quads attribué aux professionnels adhérant à une charte de qualité aurait pour effet d'assainir le marché en réservant la vente ou la location de ces engins à des professionnels sérieux. Les engagements de la charte de qualité porteraient principalement sur l'information et le conseil de l'acheteur. Ils vont de pair avec une plus grande attention des vendeurs quant à la qualité et la sécurité des engins proposés à la vente ou à la location.

Le non-respect de ces serait puni d'une contravention de la cinquième classe.

Toutefois, cette nouvelle réglementation ne résoudrait pas toutes les difficultés au stade de la commercialisation de ces engins.

On remarquera tout d'abord que l'obligation d'information des acheteurs est déjà prévue par le code de la consommation et par la directive « Machines ». Les contrôles opérés par la DGCCRF ont d'ailleurs montré que dans l'ensemble les distributeurs de ces engins fournissaient désormais une information satisfaisante.

Mais surtout, il est encore délicat d'évaluer la portée de ces dispositions nouvelles sur la vente par Internet de ces engins. L'obligation d'adhérer à une charte de qualité sera inopérante sur des sites situés à l'étranger.

2. L'interdiction de vendre ou céder ces engins aux mineurs

L'interdiction de vente, de cession ou de location-vente aux mineurs doit responsabiliser les parents en les informant lors de l'achat des conditions d'utilisation et des risques.

Le cas de la cession vise notamment à éviter que des mini-motos ou quads soient offerts à des mineurs comme lots de tombola ou dans des foires. Toutefois, on peut se demander si, plus généralement, ces professionnels ne devraient pas être exclus de la liste des professionnels autorisés à céder de tels engins.

Le non respect de ces dispositions serait puni d'une contravention de la cinquième classe.

En revanche, la location à des mineurs ne serait pas interdite par la proposition de loi.

3. Les propositions de la commission

Sur le fond

Votre commission approuve les principales dispositions de cet article.

Concernant la commercialisation par des professionnels , elle propose néanmoins quelques aménagements et précisions.

En premier lieu, la catégorie des tricycles à moteur non soumis à réception devrait être ajoutée afin de couvrir l'ensemble des engins de loisir susceptibles d'être commercialisés.

En deuxième lieu, la référence à l'adhésion à une charte de qualité serait supprimée. Votre rapporteur estime que cette précision relève du décret qui définira le contenu de la charte de qualité. La simple mention que ces engins doivent être vendus par des professionnels « dans des conditions définies par décret » permet de prévoir l'adhésion à une charte de qualité et de poser le cas échéant d'autres conditions, en particulier le respect de cette charte.

En troisième lieu, il est dommage que la proposition de loi ne prévoît pas la récidive de ces contraventions. Votre commission propose de réprimer la récidive et de permettre dans ce cas de figure la confiscation de plein droit du véhicule ayant servi à commettre l'infraction, comme le prévoit déjà l'article 2 de la proposition de loi pour les contraventions qu'il définit.

En dernier lieu, les termes de la proposition de loi peuvent laisser entendre que ces véhicules ne pourraient être vendus que par des professionnels, les particuliers ne pouvant les revendre eux-mêmes. Il semble excessif d'interdire le marché de l'occasion. En conséquence, afin de ne pas risquer des interprétations abusives, votre commission vous propose une rédaction moins ambiguë.

Concernant la commercialisation aux mineurs, votre commission estime important de ne pas léser les propriétaires de circuits, notamment de karting, en maintenant la possibilité pour les mineurs de plus de quatorze ans de louer un de ces véhicules.

Votre commission souhaite en revanche que la récidive de la vente à des mineurs soit sanctionnée et que la confiscation du véhicule soit alors de plein droit, sauf décision spécialement motivée de la juridiction.

Concernant les mineurs de moins de quatorze ans, votre rapporteur ne souhaite pas interdire toute forme de pratique sportive ou de compétition. La fédération française de motocyclisme organise des initiations dès l'âge de six ans. Encadrées, ces activités ne sont pas dangereuses. En conséquence, votre commission vous propose d'autoriser la mise à disposition à ces mineurs dans le cadre d'une association sportive agréée.

Sur la forme

Votre commission estime que les modalités d'insertion de ces dispositions dans le code de la route ne sont pas satisfaisantes.

En effet, l'article L. 321-1 du code de la route en vigueur punit d'un délit la commercialisation des véhicules soumis à réception mais non réceptionné ou qui ne sont plus conformes à celle-ci.

Or, le présent article y insère des dispositions relatives à la commercialisation des véhicules non soumis à réception car n'ayant pas vocation à circuler sur la voie publique.

En outre, l'article L. 321-1 précité en vigueur prévoit des délits. Le présent article crée en revanche de simples contraventions. Le mélange de contraventions et de délits dans un même article pose en l'espèce des problèmes de coordination importants. En effet, les articles L. 321-2 et suivants du code de la route réprime la tentative du délit prévu à l'article L. 321-1 et ouvre la possibilité de prononcer les peines complémentaires prévues pour les délits. Or, ces différentes dispositions ne peuvent pas être appliquées aux contraventions.

En conséquence, votre commission vous soumet un amendement de réécriture complète de l'article 2 de la proposition de loi qui incluerait notamment l'ensemble du dispositif prévu à l'article premier et modifié sur le fond tel que proposé ci-dessus.

Conjointement, votre commission vous soumet un amendement de réécriture de l'article premier . Celui-ci aurait désormais pour objet de clarifier la rédaction de l'article L. 321-1 en vigueur.

En effet, certaines juridictions 20 ( * ) tendent à faire application de cet article pour réprimer la vente de mini-motos ou de quads non soumis à réception et plus généralement pour interdire la commercialisation des machines sportives non réceptionnés.

L'article L. 321-1 peut en effet prêter à confusion lorsqu'il dispose que le fait de vendre un véhicule « qui n'a pas fait l'objet d'une réception ou qui n'est plus conforme à celle-ci » est puni de six mois d'emprisonnement et de 7.500 euros d'amende. Par définition, les mini-motos et les quads qui ne sont pas conçus pour un usage sur route n'ont pas fait l'objet d'une réception puisqu'ils n'y sont pas soumis.

A l'article premier, votre commission vous propose donc un amendement modifiant l'article L. 321-1 du code de la route et levant cette ambiguïté.

Votre commission vous propose d'adopter l'article premier ainsi modifié.

Article 2 (art. L. 321-1-1 du code de la route) - Utilisation des véhicules non soumis à réception

Le présent article tend à compléter l'article L. 321-1-1 du code de la route. Cet article est issu de la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance qui réprime d'une contravention de la cinquième classe le fait de circuler avec un deux-roues, un tricycle ou un quadricycle à moteur non réceptionnés « sur les voies ouvertes à la circulation publique ou les lieux ouverts à la circulation publique ou au public ».

Cette disposition interdit la circulation sur toutes les voies publiques ou privées ouvertes à la circulation ainsi que dans les lieux ouverts au public. Ceci couvre par exemple les espaces publics ou privés entre les immeubles ou les parkings. Cette rédaction très large comprend également les espaces naturels ouverts au public.

Le présent article tend à compléter ce dispositif.

En premier lieu, il restreint encore un peu plus l'utilisation des quads et mini-motos non soumis à réception en prévoyant qu'ils ne pourraient circuler que sur des terrains adaptés à leur pratique dans des conditions fixées par décret . Le fait d'utiliser ou de favoriser l'utilisation de ces engins en dehors de ces terrains serait puni d'une contravention de la cinquième classe.

Par rapport au droit positif, il ne serait donc plus possible d'utiliser ces engins sur des terrains privés non adaptés .

Toutefois, la notion de terrains adaptés ne doit pas être interprétée au sens de l'article R.331-21 du code du sport qui définit ce qu'est un terrain, un circuit ou un parcours dédiés à l'organisation de manifestations sportives. Un terrain adapté pourra consister en un terrain privé respectant certaines normes de sécurité et préservant la tranquillité publique, sans qu'il soit nécessaire que des manifestations sportives puissent y être organisées. Il reviendra au décret d'apprécier ce qui est raisonnable.

En deuxième lieu, la proposition de loi aménage un régime particulier pour l'utilisation de ces engins par les mineurs de moins de quatorze ans . Serait toujours puni d'une contravention de la cinquième classe :

- le fait pour un mineur de quatorze ans d'utiliser un de ces engins en dehors d'une « pratique sportive sur des terrains spécialement destinés à cet usage ou dans le cadre d'une association sportive agréée ». Cette formule un peu obscure semble toutefois partiellement redondante avec les autres dispositions du présent article puisqu'elle n'impose rien de plus aux mineurs de quatorze ans que ce qui est déjà prévu pour les autres mineurs et majeurs. Elle permet au contraire une utilisation en dehors d'un terrain adapté à la condition que cela se fasse dans le cadre d'une association sportive agréée ;

- le fait de mettre un de ces engins à la disposition d'un mineur de quatorze ans, sauf dans le cadre d'une pratique sportive. La location ou le prêt à un mineur de 14 ans serait donc interdit sous réserve de cette exception. Rappelons que l'article premier de la proposition de loi autorise la location par les autres mineurs.

En troisième lieu , la récidive 21 ( * ) de l'ensemble des contraventions prévues par le présent article serait réprimée dans les conditions prévues aux articles 132-11 et 132-15 du code pénal. La proposition de loi prévoit également qu'en cas de récidive, la confiscation du véhicule serait de plein droit, sauf décision spécialement motivée de la juridiction 22 ( * ) .

Tout en partageant l'essentiel des dispositions du présent article, votre commission vous soumet un amendement de réécriture de l'article L. 321-1-1 du code de la route . Il tend :

- à y transférer les dispositions de l'article premier de la proposition de loi de façon à ce que l'article L. 321-1-1 du code de la route rassemble toutes les mesures relatives à la commercialisation et à l'usage des véhicules non soumis à réception. Les dispositions de l'article premier sont intégrées au présent article sous réserve de quelques modifications 23 ( * ) ;

- à substituer à la notion de « véhicule non réceptionné » celle de « véhicule non soumis à réception » afin de clarifier la lecture conjointe des articles L. 321-1 -relatif aux véhicules n'ayant pas fait l'objet d'une réception mais qui ont vocation à l'être en raison de leur conception pour un usage sur route- et L. 321-1-1 -relatif aux véhicules de loisir ou de compétition non conçus pour un usage sur route et donc non soumis à réception ;

- à maintenir la possibilité d'utiliser des véhicules non soumis à réception sur des terrains privés à des fins strictement professionnelles. Il faut songer notamment aux agriculteurs qui utilisent de petits quads pour se déplacer dans leur champ;

- à clarifier les dispositions spécifiques aux mineurs de moins de quatorze ans. Ces véhicules ne pourraient pas être vendus, cédé, loués ou mis à la disposition de ces mineurs. Toutefois, afin de permettre une pratique sportive encadrée, la mise à disposition resterait possible dans le cadre d'une association sportive agréée. En outre, ces mineurs ne pourraient utiliser ces véhicules sur des terrains adaptés que dans le cadre d'une association sportive agréée. En revanche, afin de ne pas affecter l'activité des circuits de karting notamment, la location aux mineurs de plus de quatorze ans resterait autorisée.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 2 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 2 (art. L. 321-1-2 [nouveau] du code de la route) - Création d'une obligation d'identification des véhicules non soumis à réception

Votre commission vous propose un amendement tendant à insérer un nouvel article L. 321-1-2 dans le code de la route. Il prévoit que tout propriétaire d'un véhicule non soumis à réception et dont la vitesse peut excéder 25 km/h devra le déclarer auprès de l'autorité administrative qui lui délivrera un numéro d'identification. Le véhicule devra être muni d'une plaque portant le numéro d'identification et fixée en évidence.

Cette proposition d'identification obligatoire des véhicules non soumis à réception part du constat qu'aujourd'hui les forces de l'ordre ont des difficultés à appréhender les utilisateurs de ces engins sur la voie publique. La police et la gendarmerie sont réticentes à les poursuivre en raison du risque d'accident. En outre, les véhicules des forces de l'ordre ne sont pas conçus pour s'engager sur des pelouses ou des terre-pleins.

Avant que leur immatriculation ne soit rendue obligatoire par le décret n° 2003-1186 du 11 décembre 2003, les cyclomoteurs posaient les mêmes difficultés aux forces de l'ordre. Leurs conducteurs bénéficiaient d'une immunité de fait.

Par analogie avec la procédure d'immatriculation, votre commission vous propose donc de rendre obligatoire l'attribution d'un numéro d'identification 24 ( * ) à chaque engin, lequel numéro devrait être visible. De la sorte, les forces de l'ordre pourraient identifier à distance les véhicules contrevenants et retrouver par la suite le propriétaire. Le véhicule serait immobilisé puis confisqué.

Cette solution présenterait également l'avantage de mieux tracer les engins acquis sur Internet, les propriétaires devant les déclarer 25 ( * ) . Elle permettrait enfin de connaître l'état du marché de l'occasion.

Il reviendrait à un décret en Conseil d'Etat d'en préciser les conditions d'application comme c'est déjà le cas pour la procédure d'immatriculation des véhicules réceptionnés. Afin de tenir compte de l'utilisation sportive de ces véhicules, le décret préciserait les conditions dans lesquelles la plaque pourrait être retirée au cours d'une manifestation sportive.

Votre commission vous propose d'adopter un article additionnel ainsi rédigé .

Article additionnel après l'article 2 (art. L. 321-5 et L. 321-6 [nouveaux] du code de la route) - Peines complémentaires applicables aux contraventions
prévues par l'article L. 321-1-1 du code de la route

Votre commission vous propose un amendement définissant les peines complémentaires applicables en cas de condamnation pour l'une des contraventions de la cinquième classe définies par l'article 2 de la proposition de loi.

En effet, la proposition de loi ne prévoit aucune peine complémentaire. Or, l'article 131-16 du code pénal dispose que des peines complémentaires peuvent être prononcées à la condition que le règlement qui réprime la contravention le prévoit.

Un règlement pourrait y pourvoir après l'adoption de la loi. Toutefois, il est plus simple de le prévoir immédiatement dans le présent texte.

Parmi la liste des peines complémentaires prévues par l'article L. 131-16 du code pénal, votre commission considère que la peine de confiscation du véhicule pourrait être utilement prononcée en plus de l'amende.

Pour les personnes morales, la peine complémentaire de confiscation du véhicule serait également prévue.

Votre commission vous propose d'adopter un article additionnel ainsi rédigé .

* 20 Ainsi le tribunal correctionnel de Melun a condamné le 29 novembre 2007 un vendeur de mini-motos.

* 21 L'article 132-11 du code pénal dispose que la récidive est constituée pour les contraventions de la cinquième classe lorsqu'une personne physique ou morale déjà condamnée pour une contravention de la cinquième classe commet, dans le délai d'un an à compter de l'expiration ou de la prescription de la précédente peine, la même contravention.

* 22 Cette rédaction est inspirée de la loi n° 2007-1198 du 10 août 2007 renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs. Celle-ci a institué des peines minimales pour les crimes et délits commis en état de récidive légale. Toutefois, la juridiction conserve la faculté de prononcer une peine inférieure « par une décision spécialement motivée » (articles 132-18-1 et 132-19-1 du code pénal).

On remarquera enfin que le code de la route prévoit déjà pour certaines infractions la confiscation de plein droit de l'objet qui a servi à commettre l'infraction. Ainsi, l'article L. 413-4 du code de la route qui réprime la commercialisation d'appareils anti-radars dispose que la confiscation de l'appareil est de plein droit en cas de condamnation.

* 23 Voir le commentaire de l'article premier.

* 24 Le terme d'identification a été préféré afin de ne pas induire de confusion avec la procédure d'immatriculation des véhicules réceptionnés. Bien qu'identifiés, les véhicules non soumis à réception ne seraient toujours pas autorisés à circuler sur la voie publique.

* 25 L'achat d'un quad ou d'une mini-moto à un non professionnel ou à un professionnel n'ayant pas adhéré à la charte de qualité ne constituerait pas une contravention.

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