Paragraphe 2
Du subrogé curateur et du subrogé tuteur
Art. 454 du code civil : Désignation et missions
du subrogé curateur ou du subrogé tuteur

La désignation d'un subrogé tuteur dépend actuellement du régime de protection choisi par le juge. En cas de tutelle complète, l'article 420 s'applique et le conseil de famille a l'obligation de désigner en son sein un subrogé tuteur. En revanche, lorsque le juge décide une administration légale sous contrôle judiciaire -qu'elle soit confiée à un parent ou à un allié ou, en cas de tutelle vacante, à un professionnel- ou une tutelle en gérance confiée à un administrateur spécial, il n'y a pas de subrogé tuteur. Par ailleurs, le curateur est le seul organe de la curatelle, sans qu'il soit possible de désigner un subrogé curateur.

Cet article laisse désormais la désignation d'un subrogé curateur ou d'un subrogé tuteur à l'entière appréciation du conseil de famille ou, à défaut, du juge, indépendamment du régime de protection choisi . Seule la tutelle avec conseil de famille emportera, comme aujourd'hui, obligation pour celui-ci de désigner un subrogé tuteur. Prévue par l'article 456, cette règle d'organisation du conseil de famille permet d'équilibrer la représentation des branches familiales, et de répondre à d'éventuelles divergences entre les proches du majeur. La subrogation pourra ainsi s'appliquer à une curatelle comme à une tutelle, que la mesure soit confiée à un proche du majeur ou à un mandataire judiciaire. Le juge pourra ainsi adapter l'organisation de la mesure à la situation du majeur. En outre, en cas de curatelle ou de tutelle exercée par un mandataire, la famille pourra être associée à la mesure par la désignation d'un de ses membres comme subrogé curateur ou subrogé tuteur.

En cas de curatelle ou de tutelle confiée à un parent ou à un allié du majeur, pour laquelle une subrogation aura été décidée, l'équilibre familial entre les lignes paternelle et maternelle devra, autant que possible, être respecté. Le conseil de famille ou, à défaut, le juge devra donc s'efforcer de choisir le subrogé dans la branche autre que celle dont sera issu le curateur ou le tuteur. Cette disposition étend à la protection des majeurs une règle actuellement prévue pour la protection des mineurs par l'article 423.

Sur proposition de sa commission des lois et avec l'accord du Gouvernement, l'Assemblée nationale a précisé les conditions dans lesquelles un subrogé tuteur ou un subrogé curateur peut être désigné, afin de faire respecter le principe de la priorité familiale.

La fin de la mesure -du fait de l'expiration du délai prévu, d'une mainlevée judiciaire ou du décès du majeur- entraînera naturellement celle de la charge du subrogé curateur ou du subrogé tuteur. En outre, le projet de loi maintient le lien entre les fonctions du curateur ou du tuteur et les fonctions du subrogé : la cessation des premières entraîne celle des secondes. Ainsi, non seulement le subrogé ne remplace pas le curateur ou le tuteur dont la charge prend fin, mais le décès du curateur ou du tuteur, son placement sous un régime de protection ou sa renonciation à la mesure met automatiquement fin aux fonctions du subrogé. Celui-ci a alors l'obligation, à peine d'engager sa responsabilité, de saisir le juge ou de réunir le conseil de famille, s'il a été constitué, aux fins de désigner un nouveau curateur ou tuteur. Destinée à assurer la continuité de la mesure, cette disposition reprend une règle actuellement prévue pour la tutelle des mineurs par l'article 424.

Le subrogé reste investi d'une mission de surveillance du curateur ou tuteur . Cette mission, qui peut engager sa responsabilité, est définie dans des termes plus restrictifs qu'aujourd'hui : il sera désormais chargé de surveiller les actes passés par le curateur ou par le tuteur, alors qu'il a actuellement un rôle général de surveillance de l'ensemble de la gestion. Cette fonction de surveillance est précisée par plusieurs dispositions ultérieures du projet de loi qui chargent le subrogé d'attester le bon déroulement des opérations de gestion du patrimoine (article 497) ou de vérifier les comptes du tuteur (articles 510 et 511).

Le projet de loi maintient l' obligation pour le subrogé d'informer le juge des fautes de gestion qu'il relève . Actuellement prévue par l'article 420, cette obligation peut, si le subrogé s'y soustrait, engager sa responsabilité à l'égard du majeur protégé.

Le subrogé garde également un rôle de suppléance en cas de conflit d'intérêts : comme aujourd'hui, il est appelé à remplacer le curateur ou le tuteur lorsque les intérêts de celui-ci et ceux du majeur s'opposent. S'agissant de la tutelle des mineurs, la notion d'opposition d'intérêts a fait l'objet d'une jurisprudence abondante dont les principes sont transposables à la protection d'un majeur. L'opposition d'intérêts ne résulte pas seulement de ce que le protégé et le protecteur sont conjointement intéressés à la même opération. Elle suppose une divergence de droits et d'obligations à l'occasion d'une même action, par exemple en cas de partage d'un bien indivis entre eux. En revanche, la vente de ce bien à un tiers ne recèle pas a priori d'opposition d'intérêts 77 ( * ) .

Le projet de loi prévoit en outre une possibilité de subrogation en cas d'impossibilité pour le curateur ou le tuteur d'agir . Le rôle de suppléance du subrogé est en effet étendu à l'hypothèse où le curateur ou le tuteur ne peut assister le majeur ni agir pour son compte en raison des limitations que le juge a apportées à sa mission. Le juge pourrait en effet, en application de l'article 425, avoir limité la mesure à la protection de la personne ou à celle des biens.

Enfin, dans sa rédaction initiale, le projet de loi faisait obligation au curateur ou au tuteur d'informer et de consulter le subrogé avant tout acte important. Cette obligation, qui n'est actuellement pas prévue, avait pour but de permettre au subrogé d'exercer sa mission de surveillance. Etaient visés les actes n'ayant pas un caractère usuel ou habituel, ou ne relevant pas de la gestion courante. Sur proposition de sa commission des lois et avec l'accord du Gouvernement, l'Assemblée nationale a précisé l'étendue de cette obligation d'information du subrogé curateur ou du subrogé tuteur, en visant les actes « graves » -notion déjà utilisée par le code civil pour désigner une décision qui n'est ni usuelle, ni habituelle-, et non plus les actes « importants ». Elle a également adopté un amendement rédactionnel.

* 77 Cass. 1 ère civ, 7 juin 1955.

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