Art. 451 du code civil : Possibilité de désigner le préposé d'un établissement hébergeant ou soignant le majeur

L'article 499 actuel donne au juge la possibilité de nommer un préposé appartenant au personnel administratif de l'établissement de traitement du majeur comme gérant de tutelle , si le patrimoine du majeur est peu important . À cet effet, les établissements d'hospitalisation, de soins ou de cure, qu'ils soient publics ou privés, choisissent la personne la plus qualifiée pour être désignée 75 ( * ) .

La tutelle en gérance confiée à un établissement fonctionne selon les mêmes règles que la tutelle en gérance confiée à un administrateur spécial. Il s'agit donc d'un régime simplifié de tutelle, sans subrogé tuteur ni conseil de famille.

Le projet de loi étend cette possibilité à tout établissement de santé et à tout établissement social ou médico-social qui héberge ou soigne le majeur, et ne la subordonne plus à la faiblesse de son patrimoine . En outre, pourra être nommé curateur ou tuteur tout membre du personnel administratif ou social de l'établissement, à l'exclusion du personnel médical, ou un de ses services .

Dans sa rédaction initiale, le projet de loi prévoyait que la personne ou le service nommé exercerait la curatelle ou la tutelle au nom de l'établissement, dans des conditions qui étaient renvoyées à un décret en Conseil d'État. Sur proposition de sa commission des lois et avec l'accord du Gouvernement, l'Assemblée nationale a supprimé la mention selon laquelle le préposé exerce sa mission de protection au nom de l'établissement, afin d'éviter qu'elle soit interprétée comme le plaçant dans un lien de subordination vis-à-vis de son employeur. Dès lors, les éventuelles fautes commises engageront la responsabilité du préposé , personne physique, et non celle de l'établissement . Les conséquences pour les victimes ne devraient pas être dommageables puisque les préposés sont soumis à une obligation d'assurance. Quand le préposé sera le service de l'établissement, la responsabilité de ce dernier sera bien évidemment engagée.

Afin de ne plus lier le régime de protection au choix de la personne chargée de l'exercer, la désignation d'un établissement d'hébergement ou de soins n'entraînera plus l'application des règles de la tutelle en gérance . Dans l'intérêt du majeur, le juge aura ainsi la liberté de fixer l'organisation d'une mesure confiée à un préposé d'établissement , en décidant une tutelle ou une curatelle et en prévoyant la nomination d'un subrogé curateur ou tuteur s'il l'estime nécessaire.

Sauf décision contraire du juge, la mesure s'étendra à la protection de la personne du majeur, et non plus, comme aujourd'hui, à la seule gestion de ses biens . Néanmoins, compte tenu des risques de confits d'intérêts qui peuvent exister en ce domaine, une exception est prévue en matière médicale : l'établissement ne pourra pas décider seul les diligences ou les actes graves prévus par le code de la santé publique qui touchent à la personne du majeur. Ces actes et diligences devront être autorisés par décisions spéciales du juge qui pourra notamment les confier au subrogé curateur ou tuteur ou, à défaut, à un curateur ou tuteur ad hoc . La liste des actes médicaux concernés par ce dispositif est renvoyée à un décret en Conseil d'État.

Sur proposition de sa commission des lois et avec l'accord du Gouvernement, l'Assemblée nationale a supprimé cette disposition, afin de la faire figurer dans la partie du projet de loi relative à la protection de la personne.

Plusieurs personnes entendues par votre rapporteur ont exprimé le souhait que soit supprimée toute possibilité de confier une mesure de protection d'un majeur accueilli dans un établissement social ou médico-social à un préposé de cet établissement, au motif qu'elle serait source de conflits d'intérêts. A titre d'exemple, le préposé chargé de la tutelle d'un majeur examinerait-il avec objectivité la demande de ce dernier de quitter l'établissement ? Le problème ne se pose pas dans les mêmes termes pour les établissements de santé, où le séjour des majeurs protégés est provisoire.

Ces risques sont réels. Ils doivent être pesés au regard des avantages que présente la réforme proposée et des garanties qui l'entourent. Comme le fait valoir M. Emile Blessig dans son rapport au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale : « L'exercice de la mesure par un membre du personnel de l'établissement d'hébergement répond à des exigences de proximité : la personne protégée rencontre plus facilement la personne en charge de sa protection, et, au-delà de la gestion patrimoniale, la prise en compte de la protection de la personne s'en trouve plus effective et plus adaptée aux attentes et besoins de la personne. Le maintien de cette forme de protection est d'autant plus justifié que la réforme transforme en profondeur les règles d'organisation et de fonctionnement des services de tutelles qui sont intégrés désormais dans le cadre juridique rénové de l'action sociale et médico-sociale: les services seront désormais soumis à une autorisation, et non à un agrément qui est réservé aux personnes physiques exerçant à titre individuel 76 ( * ) . » En outre, il s'agit d'une simple possibilité offerte au juge, qui appréciera l'opportunité d'en faire usage. Les mandataires judiciaires à la protection des majeurs ne sont pas légions dans l'ensemble des ressorts des tribunaux d'instance.

* 75 Article 1 er du décret du 15 février 1969 précité.

* 76 Rapport n° 3557 (Assemblée nationale, douzième législature) de M. Emile Blessig au nom de la commission des lois, page 160.

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