Art. 431 du code civil : Obligation de produire un certificat médical

Le nouvel article 425 subordonnant l'ouverture d'une mesure de protection juridique à une altération médicalement constatée des facultés mentales ou corporelles de la personne à protéger, cet article prévoit que la demande adressée au juge doit être accompagnée, à peine d'irrecevabilité, d'un certificat circonstancié rédigé par un médecin choisi sur une liste établie par le procureur de la République .

A la différence de l'actuel article 493-1, il n'exige plus que ce médecin soit un « spécialiste », la Cour de cassation ayant en effet jugé que l'inscription sur la liste établie par le procureur de la République, après avis du préfet 60 ( * ) , conférait la qualité de « spécialiste » et que le juge n'avait donc pas à rechercher si le praticien avait la qualité pour apprécier l'altération des facultés de l'intéressé 61 ( * ) .

En revanche, il précise que le certificat médical doit être circonstancié et, consacrant à nouveau la jurisprudence de la Cour de cassation 62 ( * ) , fait de sa production une formalité substantielle dont l'omission rend la requête irrecevable. Il appartiendra, comme aujourd'hui, au médecin de décrire l'état de santé de la personne et de constater l'altération de ses facultés. Dans leur ouvrage précité, M. Michel Bauer, M. Thierry Fossier et Mme Laurence Pecaut-Rivolier ont émis le souhait que ce certificat « inclue désormais non seulement un diagnostic sommaire mais aussi un pronostic sur les capacités qu'aura le majeur dans sa vie ».

Selon une jurisprudence que le projet de loi ne remet pas en cause même s'il ne la consacre pas :

- la personne placée sous une mesure de protection n'est pas fondée à se prévaloir de l'absence de certificat lorsque, par son propre fait, elle a rendu cette constatation impossible en se refusant à tout examen médical 63 ( * ) ;

- lorsque le médecin ne constate aucune altération des facultés de la personne à protéger, le juge des tutelles a une compétence liée, sauf à confier une expertise à un autre médecin 64 ( * ) .

L'obligation pour les familles de fournir un certificat médical est à la fois légitime et difficile à mettre en oeuvre.

Il est en effet plus difficile pour un proche de convaincre une personne de se rendre chez un médecin spécialiste que de lui expliquer la nécessité d'effectuer cette visite lorsqu'elle est imposée par un juge des tutelles.

Il est également beaucoup plus complexe déontologiquement pour un médecin, fût-il spécialiste, de produire un certificat à la demande d'une famille, dont il craint toujours les risques de manipulation, qu'à la demande du juge des tutelles.

Enfin, la question du financement se pose pour toutes les familles, pour lesquelles le coût d'une expertise, qui atteint souvent 250 euros, est bien lourd à prendre en charge. Or, étant donné qu'il s'agit d'une expertise et non d'une simple consultation, les honoraires du médecin ne peuvent être pris en charge par la sécurité sociale. Aussi, à l'initiative de M. Patrick Delnatte et avec les avis favorables de sa commission des lois et du Gouvernement, l'Assemblée nationale a prévu un encadrement par décret en Conseil d'Etat du coût du certificat médical .

De même que les juges des tutelles ont pendant longtemps accepté de procéder par saisine d'office, ils ont longtemps accepté, au grand soulagement des familles et des médecins spécialistes, de désigner eux-mêmes, par ordonnance, ce médecin, même lorsque la famille était présente, le coût de l'examen étant alors pris en charge par les frais de justice. Seul le ministère public disposera désormais de cette faculté.

Aussi serait-il opportun que la rémunération du médecin soit non seulement uniformisée mais aussi prise en charge par l'Etat lorsque les ressources du majeur ou de sa famille ne permettent pas de l'assumer.

S'il ne semble pas judicieux d'exiger deux avis médicaux, car l'utilité de cette nouvelle exigence doit être mise en regard de la difficulté que les familles rencontrent déjà pour faire examiner la personne à protéger et du coût qu'elles supportent, il paraît également indispensable que les médecins inscrits sur la liste du procureur de la République justifient d'une formation particulière dans le domaine de la protection des majeurs.

* 60 Article 1245 du nouveau code de procédure civile.

* 61 Cass. 1 ère civ., 24 nov. 1987.

* 62 Cass. 1 ère civ., 3 juill. 1975.

* 63 Cass. 1 ère civ., 10 juill. 1984.

* 64 Cass. 1 ère civ., 15 juin. 1994

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