Article 20
(art. L. 221-9 et L. 252-4 du code de l'organisation
judiciaire)
Coordinations au sein du code de l'organisation judiciaire
Cet article tire les conséquences, dans le code de l'organisation judiciaire, de l'extension des compétences du juge des tutelles.
Aux termes de l'article L. 221-9 de ce code, le juge des tutelles connaît :
- de l'émancipation ;
- de l'administration légale et de la tutelle des mineurs ;
- du placement sous sauvegarde de justice, de la curatelle et de la tutelle des incapables majeurs ;
- sous réserve de la compétence du juge des enfants, de la tutelle aux prestations sociales ;
- de la tutelle des pupilles de la nation ;
- de la constatation de la présomption d'absence.
Les modifications proposées par le I consistent à mentionner dans cette liste la mesure d'assistance judiciaire, renommée mesure d'accompagnement judiciaire par l'Assemblée nationale, et le mandat de protection future.
L'article L. 252-4 du même code énonce quant à lui que le juge des enfants connaît, sous réserve de la compétence du juge des tutelles, de la tutelle aux prestations sociales.
La modification proposée par le II consiste à supprimer la réserve de compétence du juge des tutelles, par coordination avec la création de la mesure d'accompagnement judiciaire.
Comme le prévoit le texte proposé par l'article 5 du projet de loi pour l'article 495-5 du code civil, cette mesure d'accompagnement judiciaire pourra coexister avec une mesure de tutelle aux prestations sociales ordonnée en application des articles L. 552-6 et L. 755-4 du code de la sécurité sociale.
Ces deux articles prévoient que, dans le cas où les enfants donnant droit aux prestations familiales sont élevés dans des conditions d'alimentation, de logement et d'hygiène manifestement défectueuses ou lorsque le montant des prestations n'est pas employé dans l'intérêt des enfants ou lorsque la personne ayant la charge des enfants a été reconnue comme vivant en état de polygamie, le juge des enfants peut ordonner que les prestations soient, en tout ou partie, versées à une personne physique ou morale qualifiée, dite tuteur aux prestations sociales.
Ces deux dispositions sont modifiées par le projet de loi relatif à la protection de l'enfance qui transforme le tuteur aux prestations sociales enfant en « délégué aux prestations familiales ».
Votre commission vous propose d'adopter l'article 20 sans modification .
Article 21
(art. L. 132-3-1 nouveau et L. 132-9 du code
des assurances)
Effet des mesures de protection sur les contrats d'assurance
sur la vie
L'article 21 tend à aménager les règles applicables à la souscription ou à la modification d'un contrat d'assurance sur la vie concernant un majeur. A cette fin, il introduit un article L. 132-3-1 nouveau au sein du code des assurances et modifie l'article L. 132-9 du même code par coordination.
Compte tenu des conséquences que peut avoir pour le patrimoine d'une personne protégée la souscription ou la modification d'un contrat d'assurance sur la vie, le code des assurances interdit actuellement, dans son article L. 132-3, de contracter une assurance en cas de décès sur la tête d'un majeur en tutelle.
L'assurance contractée en violation de cette prohibition est nulle, la nullité étant prononcée par le juge à la demande de l'assureur, du souscripteur de la police ou du représentant du majeur. En cas de nullité, les primes payées doivent être intégralement restituées. En outre, à titre de sanction complémentaire, l'assureur et le souscripteur sont passibles, pour chaque assurance conclue sciemment en violation de cette interdiction, d'une amende de 4.500 euros.
Ce régime strict n'empêche toutefois pas, dans le cadre d'une assurance en cas de décès, le remboursement de primes payées en exécution d'un contrat d'assurance en cas de vie qui aura été souscrit sur la tête d'une personne sous tutelle, de même que le remboursement du seul montant des primes payées en exécution d'un contrat d'assurance de survie souscrit au bénéfice de la personne protégée.
? Si le droit positif est destiné à protéger le majeur vulnérable, il emporte, dans certaines situations, des effets défavorables pour le majeur protégé. Une bonne gestion de ses intérêts patrimoniaux peut en effet justifier, dans certains cas, le recours au mécanisme de l'assurance sur la vie.
Aussi, le premier paragraphe (I) de cet article permet-il , lorsqu'une curatelle ou une tutelle a été ouverte à l'égard du stipulant :
- la souscription, la modification ou le rachat d'un contrat d'assurance sur la vie ;
- la désignation ou la substitution du bénéficiaire .
Ces actes requerront néanmoins l'autorisation du juge ou du conseil de famille s'il a été constitué.
Votre commission estime cependant que ce dispositif peut encore être assoupli sans pour autant que cela cause un préjudice au majeur protégé.
En premier lieu, il ne semble pas nécessaire de prévoir l'intervention du juge ou du conseil de famille lorsqu'il s'agit d'une modification du contrat d'assurance sur la vie. En effet, la modification d'un tel contrat correspond à un acte de gestion patrimoniale qui peut être fait, conformément au droit commun, par le tuteur sans l'autorisation du juge et par la personne sous curatelle sans l'assistance du curateur (par exemple, pour le choix des placements, les opérations d'achat et de vente d'actions ou de sicav...).
En second lieu, le régime de la curatelle consistant en la simple assistance du curateur lors de la conclusion d'actes juridiques par le majeur protégé, il n'est pas légitime de prévoir en espèce une « autorisation » . Il convient donc de prévoir que les actes visés au premier alinéa du texte proposé ne peuvent intervenir qu'avec l'assistance du curateur .
Votre commission estime par ailleurs que lorsque le curateur ou le tuteur est le bénéficiaire du contrat d'assurance, il doit être remplacé par un curateur ou tuteur ad hoc lors de la désignation ou de la substitution du bénéficiaire. Il y a en effet conflit d'intérêts.
Elle vous propose en conséquence un amendement tendant à apporter ces deux modifications.
Le texte proposé prend également opportunément en considération l'hypothèse d'actes défavorables au majeur protégé qui auraient été faits avant le prononcé de la mesure de protection .
Certes, l'article 464 du code civil, dans sa rédaction issue de l'article 5 du projet de loi, prévoit un régime d'annulation des actes accomplis par la personne protégée moins de deux ans avant la publicité du jugement prononçant la mesure de protection lorsque, en raison de l'altération des facultés personnelles de la personne protégée, l'inaptitude de la personne à défendre ses intérêts était notoire ou connue du cocontractant et s'ils ont causé un préjudice à la personne protégée.
Toutefois, cette disposition n'est pas suffisante pour éviter des situations où, alors que la mesure de protection n'a pas encore été prononcée par le juge, le bénéficiaire du contrat s'empresse d'accepter la stipulation faite à son profit, rendant impossible toute modification ultérieure de bénéficiaire quand bien même elle serait plus favorable aux intérêts de la personne protégée.
Aussi le texte initial du projet de loi prévoyait-il la possibilité d'annuler l'acceptation du bénéfice d'un contrat d'assurance sur la vie conclu moins de deux ans avant la publicité du jugement d'ouverture de la tutelle du stipulant. Contrairement aux dispositions de l'article 464 du code civil, cette annulation pourra être prononcée sur la seule preuve que l'incapacité était notoire ou connue du cocontractant à l'époque où les actes ont été passés . Il ne sera donc pas nécessaire de démontrer l'existence d'un préjudice subi par le majeur.
A l'initiative de sa commission des lois et contre l'avis du Gouvernement, l'Assemblée nationale a étendu cette disposition à l'hypothèse d'une curatelle du stipulant, garantissant une protection identique à celle prévue pour le majeur sous tutelle.
? Le second paragraphe (II) , introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative de sa commission des lois, apporte une coordination à l'article L. 132-9 du code des assurances.
Cette disposition prévoit actuellement :
- d'une part, que la stipulation en vertu de laquelle le bénéfice de l'assurance est attribué à un bénéficiaire déterminé devient irrévocable par l'acceptation expresse ou tacite du bénéficiaire ;
- d'autre part, que tant que l'acceptation n'a pas eu lieu, le droit de révoquer cette stipulation n'appartient qu'au stipulant et ne peut, en conséquence, être exercé de son vivant par ses créanciers ni par ses représentants légaux.
La modification proposée par l'Assemblée nationale tend à réserver le cas d'une modification du bénéficiaire ou d'une révocation dans les conditions qui sont définies à l'article L. 132-3-1 nouveau.
Votre commission vous soumet un amendement destiné à modifier les dispositions du code de la mutualité relatives aux contrats d'assurance sur la vie pouvant être offerts par les entreprises relevant de ce même code .
Les articles L. 223-1 et suivants du code de la mutualité prévoient en effet un régime identique à celui prévu par les articles L. 132-1 et suivants. Il apparaît donc légitime de prévoir les mêmes règles que celles envisagées par le présent projet de loi, sous réserve des modifications indiquées.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 21 ainsi modifié.