Art. 495-6 et 495-7 du code civil : Monopole d'exercice et mission du mandataire judiciaire à la protection des majeurs

Les articles 495-6 et 495-7 nouveaux du code civil prévoient le recours exclusif au mandataire judiciaire à la protection des majeurs, dans le cadre de la MAJ tout en définissant sa mission et ses prérogatives.

? Sur le premier point, l'article 495-6 prévoit un véritable monopole du mandataire judiciaire à la protection juridique des majeurs .

Les mandataires judiciaires à la protection des majeurs sont, en application du titre VI du livre IV du code de l'action sociale et des familles tel que rédigé par l'article 9 du projet de loi, les professionnels chargés de mettre en oeuvre les mesures de protection juridique ou d'accompagnement judiciaire décidées par le juge. Ils bénéficient désormais d'un statut unifié, ce qui n'est pas le cas actuellement des différentes personnes intervenant dans la mise en oeuvre des mesures aujourd'hui applicables 110 ( * ) .

Le choix d'un monopole est en cohérence avec le droit positif qui réserve la mise en oeuvre de la TPSA à des gérants professionnels.

On peut en effet estimer que la spécificité du travail d'accompagnement et de gestion budgétaire du majeur implique le recours à un professionnel qu bénéficie de compétences réelles en la matière. En outre, l'action « éducative » qui devra être menée dans le cadre de la MAJ requerra des compétences professionnelles spécifiques dont devraient désormais disposer les personnes habilitées à exercer les fonctions de mandataires judiciaires à la protection des majeurs.

? Le mandataire judiciaire à la protection des majeurs se voit attribuer deux missions par l'article 495-7 nouveau.

D'une part, il aura la responsabilité de la perception et de la gestion des prestations soumises à la MAJ .

Pour contrer la pratique plus que discutable dite du « compte-pivot », dans laquelle le tuteur perçoit sur un compte unique ouvert à son propre nom l'ensemble des prestations dont bénéficie chacune des personnes dont il a la charge, le nouveau dispositif impose que le mandataire judiciaire à la protection des majeurs perçoive les prestations incluses dans la MAJ sur un compte ouvert au nom de la personne auprès d'un établissement habilité à recevoir des fonds du public , « dans les conditions prévues à l'article 427 ».

Le renvoi à l'article 427 n'est cependant pas entièrement satisfaisant, car certaines de ses dispositions ne lui seront pas entièrement applicables. Votre commission vous soumet en conséquence un amendement tendant à renvoyer au premier alinéa de l'article 472 du code civil, relatif aux conditions de gestion dans le cadre de la curatelle renforcée.

Toutefois, cette mesure ne pourra intervenir que sous réserve des dispositions applicables aux mesures de protection confiées aux personnes ou services préposés des établissements de santé et des établissements sociaux ou médico-sociaux soumis aux règles de la comptabilité publique.

Les règles spécifiques de la comptabilité publique -à commencer par le décret n°62-1587 du 29 décembre 1962- imposent en effet la séparation de l'ordonnateur et du comptable. Dès lors, lorsque l'établissement est soumis à la comptabilité publique, le préposé d'établissement n'est pas le comptable public. Il ne paraît donc pas souhaitable de l'exposer à devoir faire des opérations de gestion sur des comptes privés, dans la mesure où les principes de la gestion publique apportent une garantie réelle du bon emploi des fonds.

Une fois ces prestations perçues, il revient au mandataire judiciaire de gérer les prestations dont bénéficie l'intéressé, en ses lieu et place.

La finalité de la gestion effectuée par le mandataire est de gérer les prestations « dans l'intérêt de la personne ». Sur ce point, le texte proposé laisse un large pouvoir d'appréciation au professionnel désigné par le juge. Cette grande latitude justifie donc que le mandataire bénéficie d'une formation à la gestion solide.

Pour autant, de façon pertinente, le projet de loi prévoit que le mandataire devra te nir compte de l'avis de l'intéressé et de sa situation familiale . L'administration de la prestation sociale devra ainsi être fortement individualisée.

Il est important que l'intéressé qui, en application de l'article 495-3 nouveau du code civil, n'est pas un incapable majeur, mais seulement une personne qui doit faire l'objet d'une mesure éducative et sociale, puisse dialoguer avec le mandataire judiciaire et voir ses avis pris en compte par ce dernier.

D'autre part, il reviendra au mandataire judiciaire d'exercer auprès de l'intéressé « une action éducative tendant à rétablir les conditions d'une gestion autonome des prestations sociales . »

L'objet de la MAJ n'est pas de substituer définitivement le mandataire judiciaire à la personne en difficulté dans la gestion de ses prestations. Il a une nature essentiellement éducative ayant pour finalité la restauration d'une gestion autonome de ses prestations par l'intéressé. Aussi la gestion proprement dite des prestations doit-elle s'accompagner d'une réelle démarche éducative sur les priorités de gestion du budget dont peut disposer la personne protégée. Ce n'est qu'à cette condition que la personne concernée pourra sortir de ses difficultés.

* 110 Voir infra, le commentaire de l'article 9 du présent projet de loi.

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