2. Le modèle écossais
Il n'existe pas d'exemple étranger de mise en oeuvre d'un droit au logement opposable hormis celui de l'Ecosse. Son dispositif, qui a déjà pu faire l'objet d'une première évaluation sur la base de trois années d'application, peut être instructif et servir de modèle pour l'instauration d'un droit au logement opposable à la française. Avec le Homeless Scotland Act , voté en 2003, l'Ecosse a en effet ouvert la voie vers la reconnaissance d'un droit au logement opposable.
Cette réforme a été mise en oeuvre par étapes : dès l'automne 2002, avant même l'adoption de la loi, tout demandeur prioritaire a pu exiger d'accéder effectivement à un logement temporaire ; le dispositif s'est rapidement élargi à des catégories prioritaires de plus en plus larges avant la généralisation de ce droit à l'ensemble de la population prévu pour 2012.
Les personnes concernées peuvent faire valoir leur droit auprès d'une collectivité locale, généralement leur collectivité de résidence ou d'origine et, le cas échéant, l'assigner devant la chambre administrative du tribunal civil. Selon les situations, la collectivité est tenue de proposer un logement durable, un hébergement institutionnel et, si la situation du demandeur le justifie, des services et prestations.
Cette loi est accompagnée d'un « code d'orientation » qui s'apparente à un manuel d'utilisation de la loi à destination des collectivités responsables. Des principes d'arbitrage sont posés afin de limiter les décisions d'opportunité : à titre d'exemple, une femme avec deux enfants relève de façon évidente d'une catégorie prioritaire. En revanche, une personne qui se plaindrait du caractère inconfortable de son logement serait soumise à une évaluation du caractère « raisonnable » de sa demande, celle-ci pouvant être arbitrée in fine par une cour de justice.
Dans le droit écossais, le tribunal n'intervient que si la loi n'a pas été respectée ou si la capacité discrétionnaire de la collectivité a été exercée improprement. Pour éviter les dérives, le code d'orientation définit très précisément la situation de « mal-logement », ses circonstances et la grille de correspondance entre ces circonstances et les prestations auxquelles elles peuvent donner droit.
Les premiers résultats positifs consécutifs à l'application du Homeless Scotland Act sont très certainement liés au travail considérable réalisé en amont pour développer le potentiel d'offre de logements et préparer les acteurs de proximité et les élus à sa mise en oeuvre sur le terrain.