2. Des innovations dans les mécanismes de mise sur le marché
a) Officialisation du rapport bénéfice-risque et refus des essais comparatifs
La réglementation relative aux AMM impose trois critères pour leur délivrance : la qualité, la sécurité et l'efficacité. Le rapprochement de ces critères permet d'établir le rapport bénéfice-risque de chaque médicament.
Ce rapport bénéfice-risque, défini par le code communautaire relatif aux médicaments humains, s'entend comme l'évaluation des effets positifs du médicament au regard du risque présenté pour la santé du patient ou pour la santé publique.
Désormais, une AMM sera refusée lorsqu'il apparaîtra que le rapport bénéfice-risque n'est pas considéré comme favorable. L'introduction de cette exigence nouvelle permet d'harmoniser les modalités d'instruction des dossiers d'AMM dans l'ensemble des pays de l'Union européenne. L'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) avait déjà recours à ce type d'évaluation qui sera désormais clairement inscrit en droit interne avec la transposition de la directive 2004/27.
L'apport majeur de la réforme de 2004 est d'étendre l'usage de l'analyse du rapport bénéfice-risque à tout moment de la vie d'un médicament et non plus uniquement lors de l'instruction du dossier d'AMM. Désormais, un rapport bénéfice-risque défavorable constitue un motif suffisant pour suspendre, retirer ou modifier l'AMM d'un médicament.
L'idée d'introduire l'obligation de réaliser des essais comparatifs entre le nouveau médicament faisant l'objet de la demande d'AMM et les médicaments existant dans la même classe thérapeutique a été écartée. Le recours à une telle évaluation aurait pourtant permis de juger la valeur thérapeutique ajoutée des produits et surtout de procéder à des études comparatives avec les médicaments déjà commercialisés.
Un tel recours aux essais comparatifs a d'ailleurs été recommandé par le rapport d'information de votre commission consacré aux conditions de mise sur le marché et de suivi des médicaments 3 ( * ) .
Les autorités européennes ont jugé préférable d'écarter ce critère au stade de l'AMM afin que les décisions prises par les agences restent exclusivement guidées par les seules exigences liées à la protection de la santé humaine.
Dans ce contexte, la comparaison de l'efficacité d'un médicament par rapport à un produit concurrent ne relève pas de la procédure d'AMM mais plutôt des procédures liées à la détermination du prix et du niveau de prise en charge des médicaments. C'est le cas en France, où la commission de transparence examine le critère de l'amélioration du service médical rendu.
b) L'institution de procédures dérogatoires pour faciliter l'accès aux médicaments
Le souci de garantir la sécurité des patients et de permettre un accès aux médicaments dans des conditions exceptionnelles a conduit les autorités européennes à définir plusieurs procédures dérogatoires d'autorisation de mise sur le marché. Deux d'entre elles méritent une attention particulière.
La première concerne l'accès aux médicaments en cas de menace sanitaire grave , telle qu'une attaque bioterroriste ou une pandémie grippale. Dans cette situation, les autorités publiques peuvent faire procéder temporairement à la distribution d'un médicament non autorisé ou recommander l'utilisation d'un médicament en dehors des indications de l'AMM.
Le recours à ces procédures doit s'accompagner d'une exonération de la responsabilité des professionnels de santé et des fabricants en cas d'accidents survenus dans le cadre de la dispensation de ces produits. En France, cette situation est prévue depuis la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique, et la prise en charge d'éventuels accidents est assurée par la solidarité nationale, par l'intermédiaire de l'office national d'indemnisation des accidents médicaux (Oniam).
La seconde procédure dérogatoire consacre l'usage compassionnel des médicaments, c'est-à-dire la mise à disposition d'un médicament à un groupe de patients ne pouvant pas être traités de manière satisfaisante par les produits autorisés et souffrant d'une maladie invalidante, chronique ou grave.
Ce système rejoint le principe des autorisations temporaires d'utilisation déjà existant en droit interne qui se voit ainsi conforté par les évolutions de la réglementation européenne.
* 3 Rapport de Marie-Thérèse Hermange et Anne-Marie Payet, Médicament : restaurer la confiance, Sénat n° 382, 2005-2006.