Article additionnel après l'article 23 quater (art. 11 de la loi du 25 ventôse an XI)
Exigence de la présence de deux notaires pour la renonciation anticipée à l'action en réduction

Votre commission vous propose d'adopter un amendemen t tendant à insérer un article additionnel afin de créer un article 11 dans la loi du 25 ventôse an XI contenant organisation du notariat, par coordination avec la création de la renonciation anticipée à l'action en réduction opérée par l'article 14 du projet de loi.

Il vise à préciser que la personne renonçant de manière anticipée à exercer l'action en réduction devra être assistée par un notaire différent de celui du de cujus afin de lui garantir un conseil véritablement objectif et d'éviter toute suspicion.

Ce notaire sera désigné par le président de la chambre des notaires .

Article 23 quinquies (nouveau) (art. 3 de l'ordonnance du 18 juin 1816, art. L. 321-2 du code de commerce, art. 1er de l'ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers)
Interdiction faite aux huissiers de justice et aux notaires de procéder à des ventes volontaires dans les communes où est établi un commissaire-priseur judiciaire

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale sur proposition de sa commission des lois et avec l'accord du Gouvernement, a pour objet d'interdire aux huissiers de justice et aux notaires de procéder à des ventes volontaires dans les communes où est établi un commissaire-priseur judiciaire.

Avant la loi n° 2000-642 du 10 juillet 2000 portant réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, les ventes de meubles aux enchères publiques ne pouvaient en principe être faites que par le ministère d'officiers publics ayant qualité pour y procéder, conformément aux dispositions de l'article 871 du code général des impôts.

Les commissaires-priseurs disposaient d'un monopole exclusif à Paris et dans les communes sièges de leurs offices, en application de la loi du 27 ventôse an IX et de l'ordonnance du 26 juin 1816. En dehors de ces communes, leur monopole s'exerçait en concurrence avec les autres officiers ministériels habilités à procéder aux ventes publiques, c'est-à-dire les notaires et les huissiers de justice. Sur le territoire des départements d'Alsace-Moselle, toutefois, leurs compétences étaient exercées par les huissiers de justice et les notaires.

La loi du 10 juillet 2000 a réduit le monopole des commissaires-priseurs aux ventes judiciaires , définies comme « les ventes de meubles aux enchères publiques prescrites par la loi ou par décision de justice ». Pour ces ventes, ils ont conservé leur statut d'officier ministériel et pris le nouveau titre de commissaires-priseurs judiciaires. Ce monopole est exercé concurremment avec les autres officiers publics ou ministériels et les autres personnes légalement habilitées, au rang desquels figurent les notaires et les huissiers de justice .

L'organisation et la réalisation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques ont en revanche été ouvertes à la concurrence et confiées à des sociétés de forme commerciale : les sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques . Pour continuer à exercer cette activité, les commissaires-priseurs, y compris les commissaires-priseurs judiciaires, ont dû constituer de telles sociétés.

Par dérogation à cette obligation, la loi du 10 juillet 2000 a autorisé les notaires et les huissiers de justice à organiser et réaliser des ventes volontaires à titre accessoire, dans le cadre de leur office et selon les règles qui leur sont applicables 235 ( * ) . Pour autant, elle n'a pas abrogé les dispositions faisant interdiction aux huissiers de justice et aux autres officiers publics ou ministériels habilités par leur statut d'effectuer des ventes aux enchères publiques de meubles dans les communes où sont installés des commissaires-priseurs judiciaires , dispositions qui figurent à l'article premier de l'ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers et à l'article 3 de l'ordonnance du 26 juin 1816 qui établit, en exécution de la loi du 18 juin 1816, des commissaires priseurs.

Dans une réponse à une question écrite de M. Jean Marsaudon, député, le garde des sceaux, ministre de la justice indiquait au mois de février 2001, qu'« il résulte des articles 1 er de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux huissiers de justice et 5 de son décret d'application du 29 février 1956 que ces officiers ministériels procèdent à ces ventes [volontaires], dans les lieux où il n'est pas établi de commissaire-priseur, dans le ressort du tribunal d'instance de leur résidence 236 ( * ) . » La même réponse était faite, au mois de septembre 2002, à une question écrite de M. Jean-Michel Ferrand, député 237 ( * ) .

A l'inverse, la première chambre civile de la Cour de cassation a considéré, dans un arrêt du 29 novembre 2005, que « l'interdiction faite aux huissiers de justice de procéder à des ventes dans les lieux où sont établis des commissaires-priseurs ne concerne que les ventes judiciaires » et pas les ventes volontaires. Il est vrai que les dispositions des deux ordonnances font référence aux « ventes publiques », sans distinguer les ventes volontaires et les ventes judiciaires.

L'objet des modifications proposées par le présent article, qui portent à la fois sur l'article 3 de l'ordonnance du 26 juin 1816, sur l'article L. 321-2 du code de commerce et sur l'article premier de l'ordonnance du 2 novembre 1945, est donc d' interdire expressément aux huissiers de justice et aux notaires de procéder à des ventes volontaires dans les communes où est établi un commissaire-priseur judiciaire .

Cette interdiction semble justifiée à un double titre :

- en premier lieu, ces officiers ministériels n'ont vocation à procéder à de telles opérations qu'à titre accessoire, l'activité de vente aux enchères publiques ne devant en aucune manière, en raison de la disponibilité qu'elle requiert, nuire à l'exécution du service public que la loi confie, à titre principal, à l'huissier de justice ou au notaire 238 ( * ) ;

- en second lieu, les huissiers de justice et les notaires ne sont pas soumis aux mêmes contraintes que les sociétés de ventes volontaires (procédure très rigoureuse d'agrément par le Conseil des ventes volontaires, formation en matière artistique...).

Recensant 71 études d'huissiers de justice et 8 études de notaires organisant régulièrement des ventes volontaires dans son rapport d'activité pour 2003, le Conseil des ventes s'est inquiété de la « manière dont certains huissiers de justice interprètent les dispositions de l'article L. 321-2 du code de commerce (...) en contravention avec la lettre comme avec l'esprit de la loi 239 ( * ) ». Aussi a-t-il été conduit saisir à dix-huit reprises les ordres professionnels, afin de dénoncer ces pratiques irrégulières, qui restent le fait d'une minorité d'officiers ministériels.

Quant au ministère de la justice, il a adressé aux procureurs généraux une circulaire datée du 6 janvier 2003 afin de leur demander de signaler aux instances professionnelles concernées les manquements constatés au regard du critère d'activité accessoire.

Si l'on peut souscrire aux mesures proposées par le présent article, leur rédaction mérite d'être précisée. En effet, alors que l'article L. 321-2 du code de commerce et l'ordonnance du 26 juin 1816 font interdiction aux huissiers de justice et aux notaires de procéder à des ventes volontaires dans les communes où est établi un commissaire-priseur judiciaire, tel n'est pas le cas de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers, qui fait référence aux commissaires-priseurs en général. Votre commission vous soumet en conséquence un amendement tendant à réparer cette omission.

Elle vous propose d' adopter l'article 23 quinquies ainsi modifié .

* 235 Art. L. 321-2 du code de commerce.

* 236 Réponse à la question écrite n° 56465, publiée au Journal officiel de l'Assemblée nationale du 26 février 2001, page 1276.

* 237 Réponse à la question écrite n° 567 publiée au Journal officiel de l'Assemblée nationale du 2 septembre 2002, page 3001.

* 238 Selon le Conseil supérieur du notariat, les ventes aux enchères publiques représentaient, en 1999, 0,2 % en moyenne du chiffre d'affaire des études de notaires.

* 239 Rapport d'activité pour 2003 du Conseil des ventes, p. 32.

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