Article 21 quater (nouveau) (art. 60 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statuaires relatives à la fonction publique de l'Etat)
Lutte contre les PACS de complaisance

L'Assemblée nationale a, à l'initiative de Mme Valérie Pécresse et de plusieurs de ses collègues, adopté avec les avis favorables, tant de la commission des lois que du Gouvernement, un amendement tendant à insérer un article additionnel afin de lutter contre la conclusion de PACS de complaisance visant à obtenir plus facilement des mutations dans la fonction publique.

Les députés ont considéré que, par la liberté de séparation qu'il offre, le PACS ouvre des possibilités de fraude, en particulier dans la fonction publique, et jugé nécessaire de vérifier la réalité de l'engagement des partenaires.

Le projet de loi modifie donc l'article 60 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statuaires relatives à la fonction publique de l'Etat et subordonne les demandes de mutation en vue d'un rapprochement géographique avec le lieu de travail du partenaire dans la fonction publique d'Etat à la production de la preuve que les partenaires se soumettent à l'obligation d'imposition commune prévue par le code général des impôts.

Rappelons que si la loi du 15 novembre 1999 relatif au PACS exigeait un délai de trois ans à compter de l'enregistrement du PACS pour bénéficier de l'imposition commune des revenus, la loi de finances pour 2005 a supprimé ce délai et aligné les conditions d'imposition à l'impôt sur le revenu sur celle des époux.

Cette disposition reprend partiellement une préconisation du rapport précité de la mission d'information de l'Assemblée nationale sur la famille et les droits des enfants, qui avait plus largement suggéré de soumettre tous les droits sociaux ouverts par le PACS à la preuve que les revenus des partenaires font l'objet d'une imposition commune.

Votre commission vous propose d' adopter l'article 21 quater sans modification .

Article 22 (art. 55, 62, 116, 368-1, 389-5, 466, 504, 505, 515-6, 723, 730-5, 732, 738-1, 738-2, 751, 754, 755, 757-3, 758-6, 763, 914-1, 916, 1130, 1251, 1390, 1873-14, 1973, 2013, 2103, 2109, 2111, 2147, 2258 et 2259 du code civil)
Dispositions diverses et de coordination

Cet article prévoit de nombreuses modifications du code civil répondant à des objets extrêmement divers.

• L'inscription des enfants en marge de l'acte de naissance de leurs parents (1° et 2°)

Le et le ont respectivement pour objet de modifier les articles 55 et 62 du code civil afin de prévoir l'inscription obligatoire, en marge de l'acte de naissance :

- pour chacun des parents, de la mention de la déclaration de naissance de chacun de ses enfants ;

- pour l'auteur d'une reconnaissance de paternité, de la mention de l'acte de reconnaissance de l'enfant .

Ces dispositions, qui ont fait l'objet d'améliorations formelles de la part de l'Assemblée nationale, répondent à une demande fréquemment formulée pour faciliter le recensement des enfants susceptibles d'hériter.

Cette demande revêt une acuité d'autant plus grande que toute distinction a disparu entre les enfants légitimes et naturels, alors que les premiers sont, par la force des choses, plus facilement identifiés au moment de l'ouverture de la succession que les seconds.

L'enfant naturel peut ne pas être appelé au règlement de la succession de son auteur, uniquement parce que sa reconnaissance par le défunt n'est pas connue.

En France, la reconnaissance de paternité s'effectue devant l'officier de l'état civil, par un jugement ou par tout autre acte authentique, que cet acte soit dressé spécialement à cet effet ou pour un autre objet (donation ou contrat de mariage, par exemple). La reconnaissance peut être faite avant ou après la naissance de l'enfant, quel que soit l'âge de ce dernier et sans que son consentement soit requis. C'est un acte irrévocable.

Lorsqu'elle est faite devant l'officier de l'état civil, la reconnaissance donne lieu à une transcription en marge de l'acte de naissance de l'enfant . Cette mention n'est d'aucun secours au moment de l'ouverture de la succession si l'existence de cette enfant n'est pas connue.

Quant à la reconnaissance faite devant notaire, elle ne fait l'objet d'aucune publicité et, si le notaire chargé de régler la succession n'est pas celui qui a reçu l'acte contenant la reconnaissance, le défunt emportera avec lui son secret.

Il est ainsi paradoxal de reconnaître aux enfants naturels des droits successoraux identiques à ceux des enfants légitimes, sans en assurer l'effectivité.

La mesure proposée rejoint l'une des solutions envisagées dans l'ouvrage « Demain la famille » publié à la suite du 95 e congrès des notaires de France organisé à Marseille au mois de mai 1999.

Elle semble efficace, dans la mesure où les actes de l'état civil du défunt font partie des pièces demandées dès l'ouverture du dossier de succession, même si elle ne portera ses fruits que progressivement puisqu'elle ne s'appliquera qu'aux enfants nés après on entrée en vigueur et ne permettra pas de prendre en compte les enfants nés à l'étranger de parents étrangers, venus ensuite s'installer en France, ou de Français résidant à l'étranger mais ne procédant pas à la déclaration de naissance de l'enfant auprès des agents diplomatiques ou consulaires.

Sur le plan pratique, elle aura pour conséquence d'imposer au service de l'état civil de la commune de naissance de chaque enfant, à compter de l'entrée en vigueur de la loi, qu'il informe systématiquement ses homologues des communes de naissance des parents ou de la personne ayant reconnu l'enfant, de façon à permettre l'inscription en marge de leur acte de naissance, regroupant ainsi la mention de tous les enfants de chaque adulte.

La principale difficulté tient au fait que les marges des actes de naissance ne sont pas indéfiniment extensibles, tandis que la dématérialisation des registres de l'état civil progresse lentement.

Les mentions devant déjà être portées en marge de l'acte de naissance

* S'agissant du lien matrimonial :

mariage

annulation du mariage

séparation de corps et divorce

déclaration de reprise de la vie commune

rectifications ou annulations relatives à l'une de ses mentions

* S'agissant du décès :

décès

absence

rectifications ou annulation de ces mentions

* S'agissant du lien de filiation :

reconnaissance (parfois des deux parents)

décision judiciaire d'annulation de la reconnaissance ou de contestation

possession d'état

légitimation (de plein droit, post-nuptias, par autorité de justice, après mariage posthume)

adoption simple

annulation de l'acte après adoption plénière

jugement de désaveu, de contestation de paternité

jugement déclaratif de paternité et tranchant un conflit de filiation

rectifications ou annulations de ces mentions

* S'agissant des noms et prénoms

changement de prénom à la suite d'un décret de francisation

changement ou suppression de prénom (décision judiciaire)

changement de nom par décret

changement de nom suite à une francisation

changement de nom de l'enfant naturel (déclaration conjointe de changement de nom -art. 334-2- ou décision judiciaire art. 334-3)

changement de nom

changement de nom suite à une déclaration conjointe d'adjonction de nom (art. 23 de la loi du 4 mars 2002)

dation de nom

rectifications ou annulations de ces mentions

* Rectification ou annulation de l'acte

* S'agissant des mentions relatives à la nationalité française :

actes administratifs

déclarations de nationalité française

décisions judiciaires

certificats de nationalité française

* Autres mentions :

inscription au et radiation du répertoire civil

changement de sexe

rectifications ou annulations de ces mentions

annulation des actes

Source : ministère de la justice .

En sus de la mention des enfants en marge de l'acte de naissance de leurs parents, le projet de loi prévoit diverses mentions relatives au PACS :

enregistrement de la constitution d'un PACS ;

enregistrement de chacune des modifications du PACS ;

enregistrement de sa dissolution ;

rectifications ou annulations de ces mentions.

La mention des enfants en marge de l'acte de naissance de leurs parents, qui atteste d'un fait, n'a pas vocation à être actualisée par l'apposition de nouvelles mentions (décès de l'enfant, changement de nom de l'enfant...).

L'objectif est exclusivement de permettre l'identification de la descendance d'un individu et non de transformer l'acte de naissance en fiche individuelle de descendance.

Sur le plan des principes, les dispositions proposées ont été contestées par les représentants des avocats, lors de leur audition par votre rapporteur, au triple motif qu'elles :

- porteraient une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée ;

- oublieraient les possessions d'état ;

- seraient limitées aux naissances et reconnaissances en France.

Il convient toutefois d'observer :

- en premier lieu et en application d'un décret du 3 août 1962, que la délivrance des copies intégrales ou des extraits d'actes de l'état civil comportant les mentions relatives à la filiation n'est ouverte qu'aux personnes concernées ou à leurs ascendants ou descendants ;

- en deuxième lieu, qu'aux termes de l'ordonnance du 4 juillet 2005 portant réforme de la filiation, dont l'entrée en vigueur interviendra le 1 er juillet 2006, la possession d'état ne constitue un mode d'établissement de la filiation que lorsqu'elle est constatée, et ce sous des conditions de procédure et de délai strictes ;

- en dernier lieu, que les changements de situations intervenues à l'étranger donnent lieu à l'actualisation des actes détenus par des officiers de l'état civil communaux ou consulaires.

Enfin, s'agissant de l'incidence de l'omission éventuelle de l'obligation de porter mention de l'acte de naissance ou de reconnaissance de l'enfant en marge de l'acte de naissance de ses parents, la jurisprudence a déjà pu considérer que la validité de l'acte de reconnaissance d'un enfant naturel, faite dans les formes prescrites par la loi, ne pouvait être subordonnée à l'existence de sa mention dans son acte de naissance, dès lors qu'il n'existait aucun doute sur l'identité de l'enfant. De même, l'omission de la mention de l'existence d'un mariage sur l'acte de naissance des époux n'entraîne naturellement pas la nullité de ce dernier, sans qu'il soit besoin d'une disposition expresse.

La nouvelle obligation de mention prévue ici constitue de la même manière une simple obligation à but informatif et non procédural. Les éventuelles conséquences d'une omission seront, d'une part, que l'enfant devra rapporter la preuve de son lien de filiation par d'autres moyens, notamment son acte de naissance et, d'autre part, que la responsabilité du service de l'état civil pourra le cas échéant être engagée dans les conditions du droit commun. Qu'elle résulte de l'absence de mention sur l'acte de naissance du défunt ou d'une autre cause, la constatation de l'omission de la mention de l'existence d'un enfant en marge de l'acte de naissance de l'un de ses parents décédé donnera lieu à un nouveau partage ou à un partage complémentaire.

• La clarification des règles relatives au droit de retour des biens dans le cas de la succession d'un adopté simple en présence d'un conjoint survivant (3° bis nouveau)

Le bis inséré par l'Assemblée nationale sur proposition de sa commission des lois et avec l'accord du Gouvernement a pour objet de modifier l'article 368-1 du code civil afin de clarifier les règles relatives au droit de retour des biens dans le cas de la succession d'un adopté simple en présence d'un conjoint survivant .

S'agissant des successions ab intestat , la loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001 a inséré un article 757-2 dans le code civil afin de prévoir qu'en l'absence d'enfants ou de descendants du défunt et de ses père et mère, le conjoint survivant recueille toute la succession.

Elle a toutefois ménagé une exception à cette règle qu'elle a fait figurer dans un nouvel article 757-3 : en cas de prédécès des père et mère, les biens que le défunt avait reçus d'eux par succession ou donation et qui se retrouvent en nature dans la succession sont, en l'absence de descendants, dévolus pour moitié aux frères et soeurs du défunt ou à leurs descendants, eux-mêmes descendants du ou des parents prédécédés à l'origine de la transmission. L'objectif recherché était d'assurer le maintien dans la famille de sang de certains biens.

L'article 368-1, qui prévoit lui aussi un droit de retour au profit des frères et soeurs d'un défunt ayant fait l'objet d'une adoption simple en l'absence de descendants, n'a pas été modifié. En l'état actuel du droit :

- si l'adopté meurt sans descendants, les biens donnés par l'adoptant ou recueillis dans sa succession retournent à l'adoptant ou à ses descendants, s'ils existent encore en nature lors du décès de l'adopté, à charge de contribuer aux dettes et sous réserve des droits acquis par les tiers ;

- les biens que l'adopté avait reçus à titre gratuit de ses père et mère retournent pareillement à ces derniers ou à leurs descendants ;

- le surplus des biens de l'adopté se divise par moitié entre la famille d'origine et la famille de l'adoptant, sans préjudice des droits du conjoint sur l'ensemble de la succession.

Le conjoint survivant n'a donc aucun droit sur les biens donnés par l'ascendant adoptant.

La modification proposée consiste à prévoir que l'article 368-1 ne s'applique qu'à défaut de descendants et de conjoint survivant : en conséquence, en présence d'un conjoint survivant, le droit de retour sera limité dans les conditions prévues par l'article 757-3.

• L'allègement des procédures de partage en présence d'une personne présumée absente ou éloignée, d'un mineur ou d'un majeur sous tutelle (3°, 4°, 5°, 6°)

Les 3°, 4°, 5° et 6° de cet article complètent les mesures de simplification opérées par l'article 4 du projet de loi en matière de partage et visant à privilégier le recours aux partages amiables et à substituer à l'homologation par le tribunal de grande instance une simple approbation de l'état liquidatif par un juge unique.

? Le de cet article apporte les coordinations nécessaires aux modifications apportées par l'article 4 du projet de loi aux articles 836 à 842 en matière de partage d'une succession auquel est appelée une personne présumée absente 214 ( * ) ou qui, par suite d'éloignement, se trouverait hors d'état de manifester sa volonté 215 ( * ) .

Actuellement, lorsque le présumé absent est appelé au partage d'une succession, le juge des tutelles se borne à autoriser le partage et à désigner un notaire, le principe étant celui du partage judiciaire. Un partage amiable est cependant possible sous contrôle judiciaire, le tribunal de grande instance homologuant l'état liquidatif du partage tel que dressé par le notaire.

L'article 4 du projet de loi allège cette procédure en faisant du partage amiable sous contrôle judiciaire le principe.

De même, l'actuel article 116 fait référence au premier alinéa de l'article 838 pour prévoir un partage judiciaire en présence d'un présumé absent appelé à un partage, tout en précisant que le juge des tutelles peut autoriser le partage même partiel et désigner un notaire pour y procéder en présence du représentant du présumé absent, l'état liquidatif étant soumis à l' homologation du tribunal de grande instance .

Le projet de loi procède à une coordination en faisant référence non plus à l'article 838, mais aux nouveaux articles 840 et suivants qui prévoient un partage judiciaire lorsque le partage amiable n'a pas été autorisé ou approuvé dans l'un des cas prévus aux articles 836 et 837 qui font référence à l'indivisaire présumé absent ou hors d'état de manifester sa volonté ou défaillant.

Il substitue en outre à l'homologation de l'état liquidatif par le tribunal de grande instance , jugée trop lourde, une simple approbation du juge.

Le choix du terme « approbation » répond aux remarques de certains auteurs, qui considèrent que l'homologation n'est qu'une vérification formelle de l'acte, alors qu'en l'espèce le juge des tutelles aura pour mission de veiller à ce que les intérêts de l'absent soient respectés, notamment à travers les biens dont il a été alloti, ce que vise précisément l'approbation. En outre, l'homologation, contrairement à l'approbation, confère aux actes homologués une force exécutoire, alors que dans le cadre d'un partage, c'est l'acte notarié qui donne la force exécutoire au partage et non la décision du juge des tutelles, qui n'a compétence que pour contrôler le respect des droits de la personne absente et non pour statuer sur le partage.

Enfin, le projet de loi complète l'article 116 en prévoyant que tout autre partage afférent à un successible présumé absent ne pourrait être considéré que comme provisionnel. Le partage provisionnel consiste en une répartition de la jouissance des biens et non de leur propriété. Il permet à chacun d'user privativement des biens qui lui sont attribués et d'en acquérir les fruits, sans préjuger du partage à intervenir sur la propriété (art. 815-10). Il s'agit de la reprise des dispositions de l'actuel article 840 supprimé par l'article 4 du projet de loi.

L'Assemblée nationale a, à l'initiative de sa commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, adopté un amendement de réécriture globale de l'article 116 afin notamment de :

- poser expressément comme principe que le partage auquel est partie un présumé absent est amiable ;

- rendre la désignation du notaire par le juge facultative , le partage de successions ne comprenant pas d'immeubles ne nécessitant pas forcément le recours à un notaire ;

- rétablir la mention expresse du juge des tutelles , la seule mention du juge pouvant prêter à confusion avec le président du TGI.

? Le de cet article prévoit les mêmes simplifications de procédure pour les mineurs en administration légale pure et simple que celles prévues par le 3° s'agissant des présumés absents ou éloignés.

Il modifie l'article 389-5 qui prévoit qu'en présence d'un mineur dont les biens sont gérés sous le régime de l'administration légale pure et simple, c'est-à-dire par les deux parents exerçant en commun l'autorité parentale, le juge des tutelles doit autoriser le partage amiable, l'état liquidatif devant ensuite être homologué dans les conditions prévues à l'article 466, c'est-à-dire par le tribunal de grande instance.

Le projet de loi substitue à cette homologation une simple approbation .

L'Assemblée nationale a, à l'initiative de sa commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, prévu que cette autorisation serait donnée par le juge des tutelles.

? Le de cet article traite du cas des mineurs et des majeurs sous tutelle et réécrit entièrement l'article 466.

Comme pour le présumé absent et la personne éloignée, l'actuel article 466 prévoit, lorsque l'un des successibles est un mineur ou un majeur sous tutelle 216 ( * ) , un partage judiciaire de principe ou un partage amiable sous contrôle judiciaire.

Contrairement aux présumés absents ou aux mineurs en administration légale pure et simple, qui relèvent du juge des tutelles, les mineurs et majeurs sous tutelle relèvent du conseil de famille 217 ( * ) . Ce conseil, présidé par le juge des tutelles, autorise le partage amiable et désigne un notaire. L'état liquidatif du partage est soumis à l'homologation du tribunal de grande instance. Le non-respect des formes prescrites a pour effet de ne rendre le partage que provisionnel.

Le projet de loi substitue à l'homologation de l'état liquidatif par le tribunal de grande instance l'approbation du conseil de famille . La phase judiciaire est cette fois totalement supprimée.

Cette garantie semble pourtant suffisante, le juge des tutelles ayant désigné les membres du conseil de famille et en étant le président. L'article 415 précise en outre qu'il a voix délibérative et prépondérante en cas de partage. De plus, l'article 416 prévoit la nullité des délibérations du conseil de famille en cas de dol, de fraude ou d'omission de formalités substantielles. L'action en nullité peut être exercée dans les deux ans par le tuteur, le subrogé tuteur, les membres du conseil et le ministère public, ainsi que par le mineur devenu majeur ou émancipé (le délai courant à compter de l'émancipation ou de la majorité). Enfin, les articles 1221, 1222 et 1223 du nouveau code de procédure civile permettent au juge des tutelles de suspendre l'effet exécutoire de la délibération et d'exercer un recours contre celle-ci, dans les quinze jours devant le tribunal de grande instance lorsque le partage apparaît déséquilibré.

L'Assemblée nationale a, à l'initiative de sa commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, adopté un amendement tendant à :

- mieux faire apparaître la préférence désormais accordée au partage amiable ;

- rendre facultative la désignation du notaire par le conseil de famille, pour les mêmes raisons que précédemment.

? Puis l'Assemblée nationale a, à l'initiative de sa commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, introduit un 4° bis et un 4° ter tendant à procéder aux coordinations nécessaires aux articles 461 et 462 qui traitent des particularités de l'option successorale pour les mineurs non émancipés et par renvoi, pour les majeurs sous tutelle. Cette option ne peut prendre la forme que d'une acceptation à concurrence de l'actif net ou d'une renonciation à une succession.

Il est précisé en particulier à l'article 462 l'impossibilité de révoquer une renonciation à une succession dès lors que l'Etat a été envoyé en possession.

? Le procède à une coordination au sein de l'article 465 relatif à l'impossibilité pour un tuteur d'introduire en l'absence d'autorisation du conseil de famille une demande de partage au nom du mineur et supprime la référence à l'article 822 relatif à l'action en partage, partiellement transposé au sein de l'article 841. L'Assemblée nationale a ensuite, à l'initiative de sa commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, adopté un amendement rédactionnel.

• La possibilité offerte aux majeurs en tutelle de tester après avoir préalablement reçu l'accord du conseil de famille (6° bis nouveau)

Le bis , inséré par l'Assemblée nationale sur proposition de sa commission des lois et avec l'accord du Gouvernement, a pour objet de réécrire l'article 504 du code civil afin d' autoriser les majeurs en tutelle à tester après avoir préalablement reçu l'accord du conseil de famille ou du juge des tutelles s'il n'y a pas de conseil de famille .

En l'état actuel du droit, le testament fait par le majeur après l'ouverture de la tutelle est nul de droit, le testament antérieurement fait restant valable, à moins qu'il ne soit établi que, depuis l'ouverture de la tutelle, la cause qui a déterminé le testateur à disposer a disparu.

Désormais, le majeur en tutelle pourrait tester à la condition d'y avoir préalablement été autorisé par le conseil de famille ou, à défaut, par le juge des tutelles 218 ( * ) . Pour établir un tel acte, il ne pourrait être représenté par son tuteur, même avec l'autorisation du conseil de famille ou du juge.

Ces dispositions s'inscrivent dans le droit fil de la loi sur le handicap qui a reconnu divers droits aux personnes atteintes de handicaps, en particulier le droit de vote.

L'amendement déposé par la commission des lois de l'Assemblée nationale exigeait que le testament fût fait par acte authentique. Cette obligation a été supprimée par un sous-amendement de M. Emile Blessig refusé par la commission mais soutenu par le Gouvernement.

M. Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice, a déclaré : « je ne suis pas favorable à ce que seul le testament par acte notarié soit recevable. En effet, soit la personne est apte à tester, et elle peut agir seule, soit elle n'est pas apte, et il ne faut pas l'autoriser à tester. C'est un point important. L'on ne peut confier au seul notaire la capacité de recevoir le testament d'un majeur sous tutelle . »

M. Sébastien Huyghe, rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, a fait valoir, à l'inverse, qu'« en aucun cas la rédaction du testament n'aura lieu au sein du conseil de famille, qui se contentera d'autoriser la personne protégée à tester, et celle-ci ne sera pas protégée contre d'éventuelles pressions. Voilà le risque, et il n'est pas mince ! », ce à quoi le garde des sceaux a répondu que « Seul le conseil de famille, composé des proches, est apte à juger de la capacité du majeur sous tutelle à tester. Le notaire, quant à lui, va enregistrer ; il ne va pas enquêter pour savoir si le majeur sous tutelle a été manipulé ! Si tel était le cas, comment pourrait-il le savoir, d'ailleurs ? Certes, le risque de manipulation existe, mais il faut faire confiance au conseil de famille, comme nous y invite le droit. En aucun cas un professionnel qui authentifie les actes n'a pour mission de vérifier les arrière-pensées . »

En tout état de cause, s'il s'avérait que le testament a été rédigé sous pression d'un tiers, ce qui concerne surtout le cas du testament olographe, il serait susceptible d'être annulé pour vice du consentement.

Votre commission vous soumet en conséquence un amendement de précision. La rédaction retenue par l'Assemblée nationale pourrait induire que le contenu du testament doive être approuvé par le conseil de famille. Or l'objectif recherché est de permettre au majeur en tutelle d'être autorisé à faire le testament, sans qu'il puisse y avoir un contrôle de son contenu. L'amendement qui vous est proposé tend à lever cette ambiguïté.

• Les donations faites au nom du majeur en tutelle (6° ter et 7°)

L'article 505 du code civil prévoit qu'avec l'autorisation du conseil de famille, des donations peuvent être faites au nom du majeur en tutelle, mais seulement au profit de ses descendants et en avancement d'hoirie, ou en faveur de son conjoint.

Le ter , inséré par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Patrick Delnatte et après un avis favorable du Gouvernement mais un avis défavorable de la commission des lois, a pour objet de permettre au majeur sous tutelle de faire des donations également à ses collatéraux privilégiés, c'est-à-dire à ses frères et soeurs, neveux et nièces.

La modification proposée aurait toutefois pour conséquence d'interdire au majeur en tutelle de consentir une donation au bénéfice de son conjoint, ce qui n'était manifestement pas dans les intentions de l'auteur de l'amendement et de ses défenseurs.

Le tend quant à lui à faire référence aux donations en avancement de part successorale et non plus en avancement d'hoirie, par coordination avec la terminologie retenue par le projet de loi.

Votre commission vous soumet un amendement de réécriture de l'article 505 afin de réparer l'erreur matérielle résultant de la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale, de faire référence aux frères et soeurs du donataire et à leurs descendants, dans la mesure où l'expression « collatéraux privilégiés » n'est pas employée dans le code civil, et de reprendre la modification rédactionnelle prévue par le projet de loi initial.

• Régime applicable en cas de vente simultanée de l'usufruit et de la nue-propriété d'un bien (9°)

Le du 22 de cet article met fin à l'incertitude actuelle concernant les modalités de répartition du prix de la cession d'un bien démembré entre l'usufruitier et le nu-propriétaire, qui ne concerne d'ailleurs pas spécifiquement les partages successoraux.

Il codifie la jurisprudence, qui se prononce en faveur de la répartition du prix de vente et des intérêts dus sur ce prix au prorata entre l'usufruit et la nue-propriété 219 ( * ) , solution contestée par une partie de la doctrine.

Les modalités de calcul de la valorisation respective des droits démembrés ne sont pas précisées par le projet de loi, ce qui renvoie à la liberté des parties. La jurisprudence a déjà accepté de ne pas asseoir nécessairement la valeur de l'usufruit sur le barème de l'article 762 du code général des impôts, qui ne s'impose qu'en matière fiscale, en se fondant par exemple sur l'âge de l'usufruitier et le revenu net qu'il pouvait espérer obtenir des actions vendues 220 ( * ) .

Rappelons cependant que la loi de finances pour 2004 a considérablement modernisé ce barème (art. 669 du code général des impôts), qui datait de 1901.

Le nouveau barème de l'usufruit
en proportion de la valeur en pleine propriété

Age de l'usufruitier

Valeur de l'usufruit

Valeur de la nue-propriété

Jusqu'à 20 ans

De 21 à 30 ans

De 31 à 40 ans

De 41 à 50 ans

De 51 à 60 ans

De 61 à 70 ans

De 71 à 80 ans

De 81 à 90 ans

À partir de 91 ans

9/10

8/10

7/10

6/10

5/10

4/10

3/10

2/10

1/10

1/10

2/10

3/10

4/10

5/10

6/10

7/10

8/10

9/10

En pratique, le contentieux en matière de répartition du prix entre usufruitier et nu-propriétaire est peu important, les parties se basant souvent sur les tables actuarielles dites de Xénard (du nom du notaire qui les a élaborées) permettant de déterminer la valeur économique de l'usufruit.

Le projet de loi laisse cependant aux parties la faculté de prévoir d'autres dispositions, et donc de reporter l'usufruit sur le prix, comme c'est la pratique notamment s'agissant de vente de parts sociales ou de valeurs mobilières. Dans ce cas, l'usufruit devient un quasi-usufruit, c'est-à-dire que l'usufruitier peut consommer les biens, à charge pour lui de les restituer à la fin de la période de l'usufruit (sans en devoir les intérêts s'il s'agit d'argent). En matière successorale, on peut ainsi démembrer la clause bénéficiaire d'un contrat d'assurance-vie : l'usufruitier des fonds, s'il doit les préserver jusqu'à sa mort pour qu'ils reviennent au nu-propriétaire, conserve les intérêts perçus du placement de la somme considérée.

Selon la Chancellerie, le remploi du prix de vente décidé d'un commun accord par l'achat d'un autre bien sur lequel nue-propriété et usufruit se reporteraient par le jeu de la subrogation réelle dans les mêmes conditions que sur le bien aliéné resterait possible, conformément à la jurisprudence actuelle 221 ( * ) .

Le second alinéa reprend en les modernisant les dispositions de l'actuel article 621 qui dispose que la vente d'un bien grevé d'un usufruit ne modifie pas le droit de l'usufruitier s'il n'y a pas renoncé . La jurisprudence a posé comme principe que la cession n'est pas nulle, mais simplement inopposable à l'usufruitier, qui peut agir à cet effet par voie de tierce opposition.

Le projet de loi précise que cette renonciation doit être formelle. L'Assemblée nationale a, à l'initiative de sa commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, adopté un amendement rédactionnel afin de prévoir qu'elle est « expresse ».

• La mise en conformité du texte avec la réforme du divorce (11°, 14°, 14° bis, 15°)

? Le 11° de cet article tend à réparer un oubli de coordination de la loi du 26 mai 2004 relative au divorce entrée en vigueur le 1 er janvier 2005 en modifiant l'article 732 du code civil, qui définit le conjoint successible comme le conjoint survivant non divorcé contre lequel il n'existe pas de jugement de séparation de corps ayant force jugée .

En effet, cette disposition est contradictoire avec l'article 301, également modifié par la loi de 2004, qui prévoit qu'en cas de décès de l'un des époux séparés de corps, l'autre époux conserve les droits que la loi accorde au conjoint survivant, à moins d'y renoncer.

Le conjoint séparé de corps demeure donc successible.

? En outre, le 15° du présent article modifie les articles 914-1 et 916.

L'actuel article 914-1 fait du conjoint survivant un héritier réservataire du quart des biens en l'absence de descendants et d'ascendants , tandis que l'article 916 prévoit que le de cujus peut librement disposer de ses biens en l'absence de descendant, d'ascendant et de conjoint survivant.

Ces deux articles précisent cependant que le conjoint survivant, pour être successible, doit respecter plusieurs conditions : ne pas être divorcé, ne pas avoir fait l'objet d'un jugement de séparation de corps passé en force de chose jugée et ne pas être engagé dans une instance de divorce ou de séparation de corps.

Le projet de loi procède à une unification de la définition du conjoint successible en retenant uniquement la condition d'absence de divorce prononcé .

Cette disposition ne constitue pas une simple coordination. En l'absence de descendant et d'ascendant, l'époux en instance de divorce demeure donc réservataire. Cette solution peut paraître paradoxale, la volonté du de cujus n'étant certainement pas de maintenir les avantages consentis à son conjoint dont il veut divorcer. De plus, le de cujus ne pourra pas exhéréder son conjoint, puisque celui-ci est protégé par sa qualité d'héritier réservataire.

Si cette solution paraît contestable sur le fond , elle est toutefois conforme à la logique juridique , qui veut qu'un personne demeure formellement mariée jusqu'au prononcé du divorce. En effet, des procédures de divorce peuvent être abandonnées après une conciliation réussie, et des désistements peuvent intervenir à tout moment de la procédure.

? Le 14° de cet article vise à insérer un nouvel article 758-6 au sein de la section 2 du chapitre III du titre Ier du livre III du code civil consacrée aux « Droits du conjoint successible », afin de préciser les règles d'imputation successorale des libéralités reçues par le conjoint survivant.

La loi du 3 décembre 2001 a supprimé la règle selon laquelle les libéralités consenties au conjoint survivant, notamment en concours avec des descendants, devaient être imputées sur son usufruit légal (un quart de la succession) qui s'en trouvait diminué voire anéanti 222 ( * ) (ancien art. 767 223 ( * ) ).

Une controverse doctrinale est née de la suppression de cette imputation, la loi du 3 décembre 2001 n'ayant pas prévu de nouvelles dispositions :

- selon un premier courant , le conjoint survivant pourrait cumuler au-delà des limites de la quotité disponible spéciale entre époux ses droits légaux et ceux résultant d'une donation entre époux. Par exemple en présence d'un enfant commun, le conjoint donataire de l'une trois quotités de l'article 1094-1 224 ( * ) pourrait demander la moitié de la succession en pleine propriété au titre de la quotité disponible ordinaire en tant que donataire et l'usufruit de l'autre moitié en sa qualité d'héritier. Ce cumul permettrait au conjoint survivant de recevoir la quotité disponible ordinaire majorée de l'usufruit de la réserve ;

- selon un second courant , la juxtaposition des vocations légales 225 ( * ) et volontaires ne serait possible que dans les limites de la quotité disponible spéciale entre époux .

Le projet de loi a donc pour objectif de fixer un plafond et de déterminer le secteur d'imputation des donations de biens présents entre époux :

- il prévoit que sauf volonté contraire du disposant, les libéralités reçues du défunt par le conjoint survivant s'imputent sur ses droits dans la succession, ce qui signifie qu'elles ne s'ajoutent pas à sa vocation légale telle qu'elle résulte des articles 757 et suivants. L'Assemblée nationale a, à l'initiative de sa commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, supprimé la possibilité pour le disposant d'exclure cette imputation, cette règle devant précisément contraindre le disposant à défendre les droits successoraux des descendants ;

- lorsque ces libéralités sont inférieures à sa vocation légale, le conjoint survivant pourra en demander le complément sans pouvoir excéder la quotité disponible spéciale . Ainsi, si le conjoint a reçu un usufruit portant sur le quart des biens, alors qu'en l'absence d'enfants du premier lit sa vocation successorale lui permet d'obtenir un usufruit sur la totalité des biens, sa part successorale sera augmentée en conséquence dans la limite de la quotité disponible spéciale entre époux.

L'Assemblée nationale a, à l'initiative de sa commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, adopté un amendement de clarification, afin de préciser que lorsque les libéralités reçues sont inférieures aux vocations légales définies aux articles 757 et 757-1 226 ( * ) , le conjoint survivant peut en réclamer le complément, sans jamais recevoir une portion des biens supérieure à la quotité définie, selon le cas, à l'article 1094-1 ou à l'article 1094-2 (selon que l'on se trouve ou non en présence d'enfants non issus des deux époux).

Votre commission approuve cette opportune clarification qui évitera toute interprétation abusive au profit du conjoint survivant des règles relatives à la quotité disponible. Elle vous propose cependant d'adopter un amendement de coordination avec son amendement de suppression de la réforme de la quotité disponible spéciale entre époux, qui devrait rester la même en présence ou non d'enfants non issus des deux époux.

? L'Assemblée nationale a ensuite, à l'initiative de Mme Béatrice Vernaudon, adopté avec les avis favorables du Gouvernement et de la commission des lois un amendement tendant à insérer un 14° bis afin d' étendre le droit à la jouissance gratuite du logement du conjoint survivant pendant un an à compter du décès prévu par l'article 763 du code civil à l'hypothèse où l'époux n'était que propriétaire indivis du logement . Comme pour les loyers, la charge de l'indemnité d'occupation sera à la charge de la succession.

Cette situation vise principalement la Polynésie française et la Corse, où l'indivision est très fréquente.

• Les règles de dévolution de la succession aux ascendants ordinaires (12°)

Le 12° a pour objet de lever une difficulté d'interprétation de l'article 734 du code civil, inséré par la loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001.

Cet article détermine l' ordre des héritiers en l'absence de conjoint successible . Dans cette hypothèse, les parents sont appelés à succéder comme suit :

1° Les enfants et leurs descendants ;

2° Les père et mère ; les frères et soeurs et les descendants de ces derniers ;

3° Les ascendants autres que les père et mère ;

4° Les collatéraux autres que les frères et soeurs et les descendants de ces derniers.

Chacune de ces quatre catégories constitue un ordre d'héritiers qui exclut les suivants.

De cette rédaction est née une incertitude sur le point de savoir si, en l'absence de conjoint successible, les ascendants des père et mère demeurent dans la dévolution successorale ab intestat dans le troisième ordre en l'absence de collatéraux privilégiés, ainsi que cela a toujours été le cas. En effet, les père et mère du défunt sont désormais classés dans le deuxième ordre, aux côtés des frères et soeurs et leurs descendants. En revanche, les ascendants non privilégiés, donc autres que les père et mère, constituent un troisième ordre. Cet ordre serait alors exclu par la présence d'au moins un héritier d'un ordre précédent, et donc, notamment, par celle d'un seul des parents, évinçant ainsi entièrement l'autre branche.

Tel n'était pourtant pas l'intention du législateur en 2001, comme en atteste le maintien des articles 747 et 748, qui posent la solution traditionnelle suivant laquelle la « fente 227 ( * ) » prime « l'ordre ».

Il est ainsi prévu que, lorsque la succession est dévolue à des ascendants, elle se divise par moitié entre ceux de la branche paternelle et ceux de la branche maternelle. Le père ou la mère n'exclut les ascendants d'un autre degré que dans leur ligne respective, de sorte que ce n'est qu'à défaut d'ascendant dans une branche, que les ascendants de l'autre branche recueillent toute la succession.

La pratique notariale a d'ailleurs consacré cette interprétation du texte, en s'éloignant de la lettre apparente de l'article 734. Selon les informations recueillies par votre rapporteur, aucune décision judiciaire n'aurait été rendue en sens contraire.

Pour résoudre cette difficulté, le 12° tend à insérer dans le code civil un article 738-1 explicitant complètement le cas de figure particulier concerné avec un mécanisme traditionnel de « fente » successorale entre les deux branches des ascendants.

En l'absence de conjoint successible, de postérité et de collatéraux privilégiés, et en présence d'un seul des deux parents de l'enfant prédécédé mais d'un ou plusieurs ascendants ordinaires de l'autre branche, il n'y aurait plus aucune ambiguïté possible sur le fait que la succession ab intestat serait alors répartie non pas entièrement au profit du seul parent survivant, mais pour moitié entre les deux branches : une moitié au profit du parent survivant, l'autre moitié au profit des ascendants de l'autre parent prédécédé.

• La création, au bénéfice des parents, d'un droit de retour sur les biens donnés à leur enfant prédécédé (12° bis)

Le 12° bis , inséré par l'Assemblée nationale sur proposition de sa commission des lois et avec l'accord du Gouvernement, a pour objet d' instituer, au bénéfice des parents, un droit de retour sur les biens donnés à leur enfant prédécédé, qu'ils auraient la faculté d'exercer si celui-ci venait à décéder sans postérité . Il s'agit d'une contrepartie à la suppression de la réserve des ascendants opérée par l'article 12 du projet de loi.

A titre liminaire, il convient de rappeler que les parents, lorsqu'ils procèdent à la donation d'un bien au profit de l'un de leurs enfants, ont déjà la faculté de prévoir des clauses d'inaliénabilité temporaire -il est admis que les biens puissent rester inaliénables jusqu'au décès du donateur- et de retour du bien en l'absence de postérité du donataire . Les biens sont alors considérés comme n'ayant jamais quitté leur patrimoine. La pratique notariale recourt largement à ce type de clauses qui permettent d'assurer le maintien de certains biens, immobiliers notamment, dans la famille de sang.

Le dispositif proposé, qui consiste dans l'insertion d'un article 738-2 dans le code civil, a donc pour objet de prévoir un régime légal protecteur, ayant vocation à s'appliquer à défaut de volonté clairement exprimée par les parents au moment de la donation.

Dans cette hypothèse, les biens faisant l'objet du droit de retour seraient considérés comme faisant partie du patrimoine de l'enfant prédécédé. Aussi le droit de retour des père et mère ne pourrait-il s'exercer qu'à concurrence des quotes-parts fixées au premier alinéa de l'article 738, aux termes duquel :

- lorsque les père et mère survivent au défunt et que celui-ci n'a pas de postérité, mais des frères et soeurs ou des descendants de ces derniers, la succession est dévolue, pour un quart, à chacun des père et mère et, pour la moitié restante, aux frères et soeurs ou à leurs descendants ;

- lorsqu'un seul des père et mère survit, la succession est dévolue pour un quart à celui-ci et pour trois quarts aux frères et soeurs ou à leurs descendants.

La valeur de la portion des biens soumise au droit de retour s'imputerait en priorité sur les droits successoraux des parents.

Si le droit de retour ne pouvait s'exercer en nature -soit que les biens aient été aliénés, soit que leur valeur excède la part de la succession revenant aux parents- il s'exécuterait en valeur.

Dans la mesure où le droit de retour pourrait s'exercer en valeur, votre commission vous soumet un amendement ayant pour objet d'éviter que, lorsque les biens donnés par les père et mère ont été aliénés et que les biens de la succession ne suffisent pas à remplir les droits que les ascendants peuvent avoir au titre du droit de retour, la charge ne passe aux héritiers désignés par le défunt, notamment à son conjoint survivant.

• Définition de la représentation et introduction de la représentation des renonçants (12° ter, 13°, 13° bis)

Le 12° ter , inséré par l'Assemblée nationale sur proposition de sa commission des lois et avec l'accord du Gouvernement, a pour objet de réécrire l'article 751 du code civil, afin de définir la représentation comme « une fiction juridique qui a pour effet d'appeler à la succession les représentants aux droits du représenté ».

La modification proposée est d'ordre rédactionnel puisque la représentation est actuellement définie comme « une fiction de la loi, dont l'effet est de faire entrer les représentants dans les droits du représenté ».

Le 13° a pour objet de modifier l'article 754 du code civil afin d'introduire le principe de la représentation des successibles renonçant .

Depuis deux siècles, le code civil exclut expressément la représentation des renonçants vivants, en cantonnant le mécanisme de la représentation au cas des prédécédés.

Ces dispositions s'avèrent contestables et contestées : si l'enfant renonce de son vivant, il prive ses enfants de la part de succession de ses propres parents, alors que s'il décède préalablement, la transmission s'opérera normalement.

La loi du 3 décembre 2001 a modifié l'article 755 du code civil afin d'étendre la représentation au cas des héritiers du successible indigne encore vivant, cette représentation étant admise au profit de tous les enfants et descendants, y compris donc si l'indigne est un descendant collatéral, sous réserve naturellement du principe général d'exclusion du plus éloigné dans la ligne par le plus proche posé par l'article 752-1 du code civil.

L'article 754 du code civil dispose ainsi qu'« on représente les prédécédés, on ne représente pas les renonçants », alors que l'interdiction originelle concernait toutes les personnes vivantes.

La modification proposée par le projet de loi initial consistait à permettre aux seuls descendants du renonçant de le représenter dans la succession , et donc de ne pas être gravement lésés par cette renonciation de leur ascendant direct 228 ( * ) . En cas de mésentente, ce dernier conserverait la possibilité de renoncer à la succession au bénéfice de son frère par exemple, ce qui s'analyse comme une libéralité en sa faveur, avec le risque que ses propres héritiers n'engagent une action en réduction si cette libéralité s'avérait excessive. Il aurait aussi la possibilité d'accepter la succession et d'en dépenser l'actif.

Sur proposition de sa commission des lois et avec l'accord du Gouvernement, l'Assemblée nationale a étendu cette faculté de représentation du renonçant de son vivant aux collatéraux privilégiés , déjà prévue dans le cas de l'indigne.

Alors que l'article 752 dispose que « la représentation a lieu à l'infini dans la ligne directe descendante », l'article 752-1 prévoit qu'en ligne collatérale, la représentation est admise en faveur des enfants et descendants de frères ou soeurs du défunt, soit qu'ils viennent à sa succession concurremment avec des oncles ou tantes, soit que tous les frères et soeurs du défunt étant prédécédés, la succession se trouve dévolue à leurs descendants en degrés égaux ou inégaux.

En revanche, la règle selon laquelle la représentation n'a pas lieu en faveur des ascendants , posée à l'article 752-1, serait maintenue .

Ces dispositions constituent le corollaire indispensable, dans le cas de la succession ab intestat , de la possibilité ouverte par le projet de loi en matière de libéralités de procéder à des donations trans-générationnelles, au profit d'un petit-enfant, et de la faculté nouvelle ouverte à l'enfant de renoncer a priori à toute action en réduction, par exemple dans le cas d'une atteinte à sa propre réserve consentie par ses parents au profit de ses enfants.

Sur proposition de sa commission des lois et avec l'accord du Gouvernement, l'Assemblée nationale a également prévu l'obligation, pour les enfants du renonçant conçus avant l'ouverture de la succession de ce dernier, de rapporter les biens dont ils ont hérité en son lieu et place, pour le cas où ils viendraient en concours avec d'autres enfants conçus après l'ouverture de la succession de l'ascendant.

Quant aux donations faites au renonçant, elle a prévu qu'elles s'imputeraient, sauf volonté contraire du disposant, sur la part de réserve qui aurait dû lui revenir s'il n'avait pas renoncé.

Votre commission vous soumet deux amendements tendant à corriger une erreur de référence et une mauvaise insertion d'alinéas.

Le 13° bis , inséré par l'Assemblée nationale sur proposition de sa commission des lois et avec l'accord du Gouvernement, tend à modifier l'article 755 du code civil, relatif à la représentation de l'indigne, afin d'opérer un renvoi aux règles qui seraient désormais posées à l'article 754 pour ce qui concerne le rapport des biens reçus par les enfants conçus avant l'ouverture de la succession d'un héritier indigne et l'imputation des donations reçues par ce dernier en cas de représentation. Il s'agit d'une mesure de coordination.

• Les droits des frères et soeurs du défunt sur les biens reçus de leurs ascendants

La loi du 3 décembre 2001 relative aux droits du conjoint survivant a prévu la dévolution à ce dernier de l'ensemble de la succession ab intestat de son époux prédécédé dans l'hypothèse où ce dernier ne laisserait ni postérité, ni parents.

Toutefois, les biens reçus par le défunt de ses père et mère par succession ou donation et qui se retrouvent en nature dans la succession doivent être partagés pour moitié par le conjoint survivant avec les frères et soeurs du défunt ou leurs descendants . L'objectif de cette disposition est d'assurer le maintien d'une partie de ces biens dans la famille de sang.

Votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer un nouvel alinéa avant le 14° de cet article et à modifier l'article 757-3 du code civil afin de prévoir l'hypothèse où ces biens auraient directement été transmis au défunt par ses ascendants et non par ses parents . Un tel élargissement semble en effet cohérent avec la possibilité prévue par le projet de loi de recourir à des donations-partages transgénérationnelles.

La donation-partage étant désormais possible au profit des petits-enfants, il est logique que ces biens soient compris dans l'assiette du droit de retour au profit des frères et soeurs du défunt en l'absence de postérité.

• L'aménagement de la prohibition des pactes sur succession future (16°, 16° bis, 17°, 17° bis)

? Le 16° modifie l'article 1130, qui établit la prohibition de principe du pacte sur succession future , en prévoyant qu'on ne peut renoncer à une succession non ouverte, ni faire aucune stipulation sur une telle succession, même avec le consentement de celui de la succession duquel il s'agit.

Cette prohibition souffre néanmoins de multiples dérogations 229 ( * ) , comme la clause commerciale du contrat de mariage, ou l'article 1870 qui autorise dans les statuts des sociétés civiles des clauses d'agrément des héritiers des associés. En outre, l'article 14 du présent projet ouvre la faculté de renoncer par anticipation à l'action en réduction des libéralités portant atteinte à la réserve.

Le 16° de cet article prévoit donc de reconnaître expressément cette possibilité de dérogations, tout en prévoyant qu'elles doivent être prévues par la loi . Il harmonise ainsi la rédaction de l'article 1130 avec celle de l'article 722 issue de la loi du 3 décembre 2001 qui prévoit déjà que « les conventions qui ont pour objet de créer des droits ou de renoncer ou à des droits sur tout ou partie d'une succession non encore ouverte ou à un bien en dépendant ne produisent effet que dans les cas où elles sont autorisées par la loi ».

On rappellera que les autres tempéraments au principe de prohibition autorisés par la jurisprudence en l'absence de textes ne sont pas considérés comme des pactes sur succession future et n'ont donc pas à être validés par la loi. On peut ainsi citer la clause d'accroissement (dite aussi pacte tontinier), dans la mesure où chacun des co-acquéreurs est propriétaire du bien dès l'origine sous la condition du prédécès de son co-contractant, la promesse unilatérale de vente, dont l'option ne peut être levée qu'après le décès du promettant et dont seule l'exécution est retardée jusqu'au décès, le droit existant dès la signature, ainsi que la vente ferme retardant au décès du vendeur le transfert de propriété et le paiement du prix.

? L'Assemblée nationale a ensuite inséré, à l'initiative de sa commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, un 16° bis tendant à modifier l'article 1251 du code civil qui vise les hypothèses où la subrogation de plein droit est admise.

Il procède tout d'abord à une coordination compte tenu du remplacement de l'acceptation sous bénéfice d'inventaire par l'acceptation à concurrence de l'actif net au profit de l'héritier bénéficiaire qui a payé de ses deniers les dettes de la succession.

En outre, il opère une coordination à la codification de la jurisprudence selon laquelle le renonçant demeure tenu au paiement des dettes funéraires opérée par l'Assemblée nationale à l'article 806 du code civil à l'article 1 er du projet de loi. La subrogation aura ainsi lieu de plein droit au profit de celui qui a payé de ses deniers les frais funéraires pour le compte de la succession et se retourne contre elle. Il pourra jouir du privilège sur les meubles du 2° de l'article 2101 du code civil.

Cet amendement clarifie également le fait que les frais funéraires sont d'abord une dette successorale et que le recours à l'obligation alimentaire ne vaut qu'à titre subsidiaire. En effet, il permet la subrogation même si la personne qui a payé n'y était pas tenue en application de l'article 806 modifié du code civil (par exemple un neveu qui n'est pas héritier car évincé par des héritiers de rang plus proche), afin d'éviter qu'elle soit considérée comme s'étant acquittée d'une obligation naturelle pour laquelle il n'y a pas de recours.

? Le 17° complète l'article 1390, issu de la loi du 13 juillet 1965 230 ( * ) , qui prévoit une exception à la prohibition des pactes sur succession future en autorisant des clauses dite commerciales dans les contrats de mariage. Ces clauses permettent au décès de l'un des conjoints que l'autre puisse bénéficier d'un droit d'acquisition ou d'attribution dans le partage de certains biens du prédécédé moyennant le paiement aux héritiers d'une indemnité.

Cette clause peut porter sur tout bien (et notamment le logement), mais est plus particulièrement utilisée pour le fonds de commerce, d'où son nom. Le conjoint survivant pourra ainsi poursuivre l'exploitation notamment s'il était conjoint collaborateur ou salarié. Si le conjoint survivant est héritier du prédécédé, l'opération s'analyse comme une opération de partage successoral et le conjoint survivant est attributaire du bien. Dans le cas contraire, il s'agit d'une vente en exécution d'une promesse figurant au contrat de mariage et le conjoint est simple acquéreur du bien.

Le projet de loi codifie la jurisprudence 231 ( * ) qui autorise cette clause à porter non sur l'obtention de la propriété d'un bien, mais sur l'octroi d'un bail en tant qu'élément du fonds de commerce ou de la location-gérance du fonds de commerce lui-même, parmi les biens propres de l'époux prédécédé. Cette validation législative est opportune dans la mesure où il s'agit d'une forme de pacte sur succession future.

Le conjoint survivant pourra donc exiger des héritiers l'obtention d'un bail -dont la nature n'est pas précisée et qui pourra donc être commercial, artisanal, rural ou professionnel- pour continuer l'exploitation du fonds qui lui est attribué dans l'immeuble dans lequel l'entreprise attribuée ou acquise 232 ( * ) est exploitée.

L'Assemblée nationale a, à l'initiative de sa commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, adopté un amendement rédactionnel afin de substituer à l'expression de « prémourant » celle de « prédécédé », utilisée depuis la réforme des successions des comourants opérée par la loi du 3 décembre 2001.

Elle a dans les mêmes conditions inséré un 17° bis tendant à modifier l'article 1392 qui prévoit que la mise en demeure de prendre parti pour l'exercice de la clause commerciale ne peut avoir lieu avant l'expiration du délai prévu au titre « Des successions » pour faire inventaire et délibérer.

Il s'agit d'une coordination avec la réforme de la procédure d'acceptation sous bénéfice d'inventaire, le délai de trois mois pour faire inventaire et de 40 jours pour délibérer sur l'option avant lequel l'héritier ne puisse être sommé d'opter étant remplacé par le délai unique de quatre mois prévu à l'article 792 modifié.

• Les droits successoraux liés au PACS (8°)

Le 8° de l'article 22 du projet de loi aborde la question des droits successoraux liés au PACS. Ils sont actuellement limités.

Le régime successoral du PACS

Le partenaire ne peut hériter qu'en vertu d'une disposition testamentaire, dans les limites de la quotité disponible ordinaire.

Il peut donc recevoir la moitié des biens successoraux en présence d'un enfant, le tiers en présence de deux enfants et le quart en présence de trois enfants et plus. En l'absence d'enfants, les ascendants bénéficient d'une réserve de la moitié de la succession, du quart si un seul est encore vivant. Le présent projet de loi propose cependant de supprimer cette réserve des ascendants, ce qui favorisera le partenaire survivant.

Le traitement fiscal de la succession est moins intéressant que celui des époux.

- Entre époux s'applique un abattement de 76.000 euros, en plus de l'abattement de 50.000 euros opéré sur l'ensemble de la succession depuis 2005 (art. 775 ter du code général des impôts). Il est également effectué un abattement de 20 % sur la valeur de l'immeuble constituant la résidence principale du défunt et de son conjoint. Le taux des droits de mutation s'échelonne ensuite entre 5 et 40 % selon la tranche.

- Le partenaire survivant ne bénéficie que d'un abattement de 57.000 euros. La loi de finances pour 2005 a supprimé le délai de deux ans imposé par la loi du 15 novembre 1999 pour en bénéficier et étendu au partenaire pacsé survivant le bénéfice de l'abattement de 20 % sur la valeur de la résidence principale. Le taux applicable est ensuite de 40 % jusqu'à 15.000 euros et de 50 % au-delà.

La loi du 3 décembre 2001, en améliorant les droits du conjoint survivant, a encore accru ces différences.

Le conjoint survivant dispose :

- d'un droit de jouissance gratuite du logement principal du couple pendant un an, qui être d'ordre public et ne peut lui être retiré par testament ;

- d'un droit d'habitation du logement s'il appartenait aux époux et/ou un droit d'usage des meubles le garnissant, jusqu'à son décès. Si la valeur de ce droit excède sa part successorale, il n'a pas à récompenser la succession. Le de cujus peut toutefois l'en priver par testament ;

- ainsi que d'un droit à pension alimentaire s'il est dans le besoin et en fait la demande dans un délai d'un an.

En revanche, le partenaire survivant ne peut qu'obtenir le transfert du bail du logement commun , même s'il n'est pas intervenu au moment de sa signature.

Il faut observer qu' hormis l'alignement de la fiscalité successorale, le groupe de travail sur le PACS n'a pas préconisé d'étendre les droits nouvellement ouverts en 2001 au conjoint survivant au partenaire de PACS survivant , contrairement à la mission d'information de l'Assemblée nationale sur la famille et les droits des enfants.

Le projet de loi opère des coordinations relatives aux conditions dans lesquelles le partenaire d'un PACS peut bénéficier de l'attribution préférentielle .

L'actuel article 515-6 du code civil prévoit déjà que les dispositions relatives à l'attribution préférentielle sont applicables entre partenaires d'un PACS en cas de dissolution de celui-ci, à l'exception de celles relatives à tout ou partie d'une exploitation agricole, ainsi qu'à une quote-part indivise ou aux parts sociales de cette exploitation.

Ces attributions préférentielles concernent :

- la propriété ou le droit au bail du local qui lui sert effectivement d'habitation s'il y avait sa résidence à l'époque du décès et du mobilier le garnissant ;

- la propriété ou le droit au bail du local à usage professionnel servant effectivement à l'exercice de sa profession et des objets mobiliers à usage professionnel le garnissant ;

- la propriété d'une entreprise commerciale, industrielle ou artisanale dont l'importance n'exclut pas un caractère familial.

Les modifications apportées par l'article 1 er du projet de loi à ce dispositif contribuent à augmenter les droits du partenaire survivant. Ainsi, l'attribution préférentielle peut désormais porter sur l'entreprise libérale et sur des sociétés de capitaux et non plus seulement de personnes. En outre, l'exigence du caractère familial qui s'appliquait aux entreprises commerciales, industrielles ou artisanales est supprimée.

En cas de pluralité de demandes des cohéritiers, le juge tranche en fonction des intérêts en présence.

L'Assemblée nationale a, à l'initiative de sa commission des lois, et avec l'avis favorable du Gouvernement :

- rectifié une erreur matérielle, le projet de loi initial ayant omis une coordination et par conséquent exclu le partenaire survivant d'un PACS du bénéfice de l'attribution préférentielle du logement, qui lui est actuellement reconnue ;

- supprimé l'exclusion de l'attribution préférentielle portant sur l'exploitation agricole, qui ne parait pas justifiée.

L'Assemblée nationale a en outre, à l'initiative du Gouvernement, avec l'avis favorable de la commission des lois et à l'unanimité, inséré un 8° bis afin de garantir au partenaire survivant l'attribution préférentielle du droit du logement (art. 831-3 modifié). Cet amendement met en oeuvre une préconisation de la mission sur la famille et le droit des enfants précitée de l'Assemblée nationale.

Cette attribution de droit n'est actuellement reconnue qu'au conjoint survivant.

Toutefois, afin d'éviter des conséquences non voulues par le partenaire défunt, le bénéfice de ce droit est subordonné à la volonté expresse de ce dernier, qui doit l'avoir prévu par testament .

Le droit en vigueur permet déjà à un héritier copropriétaire de demander l'attribution préférentielle de la propriété ou du droit au bail du local qui lui sert effectivement d'habitation s'il y avait sa résidence à l'époque du décès. Si cet héritier peut certes se trouver en concurrence avec des demandes d'attribution préférentielle d'autres héritiers, cette situation devrait être assez rare puisqu'elle suppose que ces héritiers soient également copropriétaires et aient également résidé dans le même logement.

La modification apportée par l'Assemblée nationale intéressera en revanche le partenaire lorsque le logement appartenait en totalité au défunt.

L'attribution préférentielle du logement se fera sous réserve d'une récompense du partenaire envers la succession. Elle supposera donc que le partenaire survivant soit en mesure de la régler.

Votre commission des lois vous propose d'améliorer la situation du partenaire survivant en prévoyant qu'il pourra exercer un droit de préemption en cas de vente par les héritiers du défunt du logement qu'il occupait au moment du décès, même en l'absence de testament.

L'Assemblée nationale a ensuite adopté, à l'unanimité à l'initiative du Gouvernement et avec l'avis favorable du rapporteur, un amendement reprenant une préconisation de la mission d'information sur la famille et le droit des enfants et tendant à améliorer la situation du partenaire survivant en le faisant bénéficier pendant un an du droit de jouissance du domicile commun , prévu par les deux premiers alinéas de l'article 763.

L'article 763 prévoit que si, à l'époque du décès, le conjoint successible occupe effectivement à titre d'habitation principale un logement appartenant aux époux ou dépendant totalement de la succession, il a de plein droit, pendant une année, la jouissance gratuite de ce logement ainsi que du mobilier. Si le logement était loué, les loyers lui sont remboursés par la succession pendant un an au fur et à mesure de leur acquittement.

En revanche, le dernier alinéa de cet article, qui prévoit que le droit à la jouissance gratuite du logement pendant un an est d'ordre public, n'est pas repris. Le partenaire d'un PACS pourra donc priver son partenaire de ce droit par testament, contrairement aux époux.

En revanche, l'Assemblée nationale a suivi le Gouvernement et la commission des lois (dont le rapporteur cependant s'était à titre personnel déclaré favorable) et rejeté un amendement de MM. Alain Vidalies, Patrick Bloche et les membres du groupe socialiste tendant à consacrer un droit viager au logement pour le partenaire survivant.

Le partenaire aurait pu ainsi demeurer dans l'habitation principale qu'il occupait effectivement au moment du décès et dont son partenaire était propriétaire.

Cet amendement reprenait une proposition de la mission d'information sur la famille et le droit des enfants et permettait au partenaire survivant d'un PACS de bénéficier d'un droit viager sur le logement et d'un droit d'usage de son mobilier, à condition que le défunt l'ait prévu dans son testament .

Il ajoutait une condition supplémentaire en prévoyant que si la valeur des droits d'habitation et d'usage excédait celle des droits successoraux recueillis par le partenaire survivant, celui-ci devrait verser une soulte pour compenser la différence. Cette particularité permettait de préserver la réserve d'éventuels héritiers légaux en impactant la seule quotité disponible.

Ce droit viager se distinguait ainsi que celui accordé au conjoint survivant sur deux points :

- l'existence d'une soulte, puisque le conjoint survivant n'en est jamais redevable, mais conserve au contraire le solde de ses droits s'ils sont supérieurs à la valeur des droits d'habitation et d'usage ;

- et l'incidence du testament, qui dans le cas du partenaire est indispensable pour lui ouvrir ce droit, alors qu'il n'intervient dans le cas de l'époux que pour l'en priver.

• Des coordinations

Le 10° a pour objet de modifier l'article 723 du code civil, aux termes duquel les successeurs universels ou à titre universel sont tenus d'une obligation indéfinie aux dettes de la succession, afin de remplacer le terme de « successeurs » par celui d'« héritiers », par cohérence avec les autres dispositions du projet de loi, notamment l'article 786 nouveau. Le terme « héritiers » a en l'espèce vocation à englober tous ceux qui viennent à la succession, du fait de la loi ou du fait d'un testament.

Toutefois, ces dispositions semblent désormais redondantes avec celles proposées par l'article premier du projet de loi pour l'article 786 du code civil. En conséquence, votre commission vous soumet un amendement tendant à abroger l'article 723.

Le 10 bis , inséré par l'Assemblée nationale sur proposition de sa commission des lois et avec l'accord du Gouvernement, a pour objet de modifier l'article 730-5 du code civil, prévoyant que toute personne se prévalant sciemment et de mauvaise foi d'un acte de notoriété inexact, encourt les pénalités de recel, sans préjudice des dommages et intérêts qu'il pourrait être condamné à verser.

Les modifications proposées consistent :

- à tirer la conséquence du déplacement des dispositions relatives aux pénalités de recel de l'article 792 à l'article 778 du code civil, prévu par l'article premier du projet de loi ;

- à faire référence aux « dommages et intérêts » plutôt qu'aux « dommages-intérêts ».

Aux termes du texte proposé pour l'article 778 du code civil, l'héritier qui a recelé des biens ou des droits d'une succession ou dissimulé l'existence d'un cohéritier est réputé accepter purement et simplement la succession, nonobstant toute renonciation ou acceptation à concurrence de l'actif net, sans pouvoir prétendre à aucune part dans les biens ou les droits divertis ou recelés. À titre de sanction, les droits revenant à l'héritier dissimulé et qui ont ou auraient pu augmenter ceux de l'auteur de la dissimulation sont réputés avoir été recelés par ce dernier.

Lorsque le recel a porté sur une donation rapportable ou réductible, l'héritier doit le rapport ou la réduction de cette donation sans pouvoir y prétendre à aucune part.

Enfin, l'héritier receleur est tenu de rendre tous les fruits et revenus dont il a eu la jouissance depuis l'ouverture de la succession sur les biens du partage desquels il est exclu.

Votre commission vous soumet un amendement de coordination tendant à insérer un nouvel alinéa après le 15° de cet article afin de remplacer, à l'article 937 du code civil, le terme d'hospices par ceux d'établissements de santé et d'établissements sociaux et médico-sociaux.

Le 17° ter , inséré par l'Assemblée nationale sur proposition de sa commission des lois et avec l'accord du Gouvernement, a pour objet d'actualiser la rédaction des articles 1873-14 et 1973 respectivement relatifs aux conventions relatives à l'exercice des droits indivis en l'absence d'usufruitier et au contrat de rente viagère afin de faire référence au « prédécédé » plutôt qu'au « prémourant ».

Le 23° , inséré par l'Assemblée nationale sur proposition de sa commission des lois et avec l'accord du Gouvernement, a pour objet de réécrire l'article 2259 du code civil, aux termes duquel la prescription court encore pendant les trois mois pour faire inventaire et les quarante jours pour délibérer, afin d'opérer des coordinations avec les dispositions de l'article 1 er du projet de loi.

Le texte prévoit ainsi que la prescription court pendant :

- le délai de quatre mois, à compter de l'ouverture de la succession, accordé par le nouvel article 771 à l'héritier pour opter ;

- le délai de deux mois, à compter de la sommation d'opter, accordé par le nouvel article 772 à l'héritier pour prendre parti ou solliciter un délai supplémentaire auprès du juge lorsqu'il n'a pas été en mesure de clôturer l'inventaire commencé ou lorsqu'il justifie d'autres motifs sérieux et légitimes, ce délai étant suspendu à compter de la demande de prorogation jusqu'à la décision du juge saisi ;

- le délai de deux mois, à compter de la déclaration d'acceptation de la succession à concurrence de l'actif net, accordé par l'article 790 à l'héritier pour déposer l'inventaire au tribunal ou solliciter du juge un délai supplémentaire.

? Les 18° et 19° procèdent à des coordinations aux articles 2013 et 2111 rendues nécessaires par la modification de l'article 878 par l'article 6 du projet de loi (voir supra ).

Actuellement, seuls les créanciers successoraux peuvent demander la séparation du patrimoine du défunt d'avec le patrimoine de l'héritier, ce qui leur permet d'être préférés aux créanciers personnels sur les biens successoraux, tout en conservant le droit de saisir les biens personnels du successeur, afin d'éviter lorsque l'héritier est insolvable de se retrouver en concurrence avec les créanciers personnels de l'héritier.

Le projet de loi prévoit une bilatéralisation de ce droit de préférence au bénéfice des créanciers personnels de l'héritier, qui pourront réciproquement demander à être préférés à tout créancier du défunt sur les biens de l'héritier non recueillis au titre de la succession et se prémuniront ainsi contre l'insolvabilité du défunt.

Le 18° de l'article 22 du projet de loi modifie le 6° de l'article 2103 qui prévoit que les créanciers et légataires du défunt sont privilégiés sur les immeubles de la succession par rapport aux créanciers personnels de l'héritier.

Il précise tout d'abord que ne sont concernés que les légataires de biens fongibles, les légataires de corps certains étant protégés par leur droit de préférence et leur droit de suite en vertu de leur droit de propriété qui remonte rétroactivement au jour du décès.

Il prévoit ensuite un droit de paiement prioritaire sur le patrimoine personnel de l'héritier au profit des créanciers personnels de celui-ci, par rapport aux créanciers de la succession.

Le 19° modifie de la même manière l'article 2011, qui prévoit que les créanciers et légataires du défunt conservent leur privilège par une inscription prise sur chaque immeuble héréditaire dans les quatre mois de l'ouverture de la succession, le privilège prenant rang à la date de l'ouverture.

? Le 20° substitue dans les articles 2103 et 2109 relatifs au privilège sur les immeubles la référence à l'article 866 à celle à l'article 924, au sein duquel ont été déplacées les dispositions de l'article 866 supprimé relatives aux donations réductibles.

? L'Assemblée nationale a enfin, à l'initiative de sa commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, inséré les 21° et 22° afin d'opérer deux coordinations rédactionnelles aux articles 2147 et 2258 respectivement relatifs à l'arrêt du cours des inscriptions hypothécaires sur les immeubles successoraux en cas d'acceptation sous bénéfice d'inventaire et à la suspension de la prescription à l'égard des créances contre la succession de l'héritier bénéficiaire, afin de tenir compte de la réforme de l'acceptation sous bénéfice d'inventaire.

Votre commission vous propose d' adopter l'article 22 ainsi modifié .

* 214 Est présumée absente la personne qui a cessé de paraître au lieu de son domicile sans que l'on en ait eu de nouvelles, jusqu'à sa déclaration d'absence par le TGI dix ans après le jugement ayant constaté l'absence.

* 215 L'article 836 relatif aux personnes présumées absentes et éloignées renvoyant dans les deux cas à l'article 116 du code civil.

* 216 L'article 495 prévoit que les règles prévues pour les mineurs sous tutelle aux articles 393 à 475 du code civil sont également applicables pour la tutelle des majeurs.

* 217 Il est composé de quatre à six membres choisis par le juge des tutelles parmi les parents ou alliés des père et mère du mineur et les amis ou voisins (art. 407 à 409).

* 218 Aux termes des articles 389-6, 497 et 500 du code civil, lorsque la tutelle est ouverte sans conseil de famille (ce qui est le cas dans la quasi-totalité des cas), qu'il s'agisse d'une administration légale sous contrôle judiciaire prévue par l'article 497 ou d'une tutelle en gérance prévue par l'article 499, tous les actes qu'un tuteur ne pourrait faire qu'avec l'autorisation du conseil de famille sont soumis à l'autorisation du juge des tutelles.

* 219 Cass., 3 ème civ., 3 juill. 1991.

* 220 Cass., 1 ère civ., 25 fév. 1997.

* 221 Cour d'appel de Versailles, 1 ère chambre, section 1, 5 avril 1990.

* 222 Soit la libéralité faite au conjoint était égale ou dépassait l'usufruit légal et celui-ci ne pouvait être exercé, soit la libéralité était inférieure à l'usufruit légal et ce dernier pouvait être exercé à hauteur de la différence.

* 223 Article 767 ancien, sixième alinéa : « Il cessera d'exercer [ce droit] dans le cas où il aura reçu du défunt des libéralités, même faites par préciput et hors part, dont le montant atteindrait celui des droits que la présente loi lui attribue et, si ce montant était inférieur, il ne pourrait réclamer que le complément de son usufruit. »

* 224 L'article 1094-1 prévoit que la quotité disponible spéciale entre époux est soit l'usufruit universel, soit 1/4 en pleine propriété et ¾ en usufruit, ou quotité disponible ordinaire (c'est-à-dire ½ en présence d'un enfant, 1/3 en présence de deux enfants et ¼ en présence de trois enfants et plus).

* 225 Depuis 2001, l'article 757 précise qu'en présence d'enfants du défunt et en l'absence de disposition testamentaire, le conjoint survivant recueille à son choix l'usufruit de la totalité des biens ou la propriété du quart des biens lorsque tous les enfants sont issus des deux époux et la propriété du quart en présence d'un ou plusieurs enfants non communs.

* 226 L'article 757-1 prévoit que si, à défaut d'enfants ou de descendants, le défunt laisse ses père et mère, le conjoint survivant recueille la moitié des biens. Quand le père ou la mère est prédécédé, la part qui lui serait revenue échoit au conjoint survivant.

* 227 Une personne peut décéder sans enfants, et sans laisser de frère et soeurs. Dans ce cas, sa succession revient à ses ascendants (parents, grand-parents,...) ou à ses collatéraux non privilégiés (oncles et tantes, neveux et nièces, cousins et cousines, ...).Pour éviter que les biens provenant d'une famille ne reviennent entièrement à l'autre, le code civil a introduit le principe de la fente: les biens du défunt sont partagés en deux parties égales, l'une revenant à la famille paternelle du défunt, l'autre revenant à la famille maternelle. La moitié de revenant à chaque famille est traitée et partagée comme une succession indépendante.

* 228 La restriction prévue par le projet de loi initial était liée au fait que la représentation du renonçant constitue une importante dérogation au principe que l'on ne représente jamais un vivant, et qu'il semblait par suite souhaitable de la restreindre à la seule hypothèse dans laquelle le renonçant dispose d'un droit réservataire, afin de tirer toutes les conséquences de l'idée selon laquelle les enfants peuvent « passer leur tour » au profit de leurs propres descendants dans la succession de leurs parents. La différence entre l'indignité et la renonciation pouvait également être justifiée par le fait que l'indignité est une peine personnelle infligée à l'indigne, qui ne méritait pas d'être étendue à ses descendants, tandis que la renonciation est un choix de l'auteur de la souche qui doit, sauf dérogation expresse, être opposable à l'ensemble de ses membres.

* 229 Voir supra commentaire de l'article 14 du projet de loi.

* 230 La loi du 13 juillet 1965 a pris le contre-pied de l'arrêt Crémieux (Cass, 11 janv. 1933) qui faisait de cette clause un pacte sur succession future.

* 231 Cass., 1 ère civ., 29 avril 1985 : « la licéité de la faculté d'attribution en propriété impliquait celle de la clause du contrat de mariage prévoyant l'octroi d'un bail sur les biens propres de l'époux prédécédé ».

* 232 L'attribution dans le cadre de la clause commerciale des articles 1390 et suivants est faite en pleine propriété et non en usufruit. Le sort de cette clause est réglé au moment de la liquidation du régime matrimonial et donc en théorie préalablement au règlement de la succession et au choix éventuel par le conjoint survivant de la succession totalement en usufruit.

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