Art. 1050 du code civil : Abandon anticipé de la jouissance des biens

Cet article pose le principe selon lequel les droits du second gratifié s'ouvrent à la mort du grevé.

Il donne cependant au grevé la faculté d'abandonner au second gratifié la jouissance du bien faisant l'objet de la libéralité, à la condition de ne porter préjudice ni à ses propres créanciers ni aux tiers auxquels il aurait consenti un droit sur le bien.

L' abandon de la jouissance du bien répond à un besoin pratique, en particulier lorsque le premier gratifié n'en a plus l'utilité -il peut s'agir d'une personne âgée qui, devant être hébergée en établissement, n'utilise plus son appartement- et souhaite que ses enfants puissent en jouir de façon anticipée.

L'abandon en jouissance semble seul possible car la libéralité graduelle fait l'objet, pour le second gratifié, d'une double condition suspensive du décès du premier gratifié et résolutoire de son propre prédécès. On ne peut envisager que le premier gratifié puisse abandonner la propriété du bien objet de la libéralité, sans remettre en cause l'économie générale du contrat.

Cette seule possibilité d'abandon en jouissance qui, en pratique, devrait s'accompagner d'une convention mettant à la charge du second gratifié toutes les obligations incombant au propriétaire, paraît protectrice du droit des tiers qui peuvent conclure des actes de disposition sur le bien, même si ce dernier est inaliénable, toujours sous condition résolutoire du décès du premier gratifié (convention de servitude, d'occupation précaire...). Admettre que le premier gratifié puisse abandonner la propriété au second reviendrait à faire tomber les droits des tiers et rendrait la condition résolutoire, sous laquelle sont conclues les conventions, purement potestative. Enfin, il n'est pas non plus possible d'envisager que le transfert de propriété puisse intervenir du vivant du premier gratifié vers le second en conservant les droits des tiers jusqu'au décès du premier gratifié car cela reviendrait à priver le second gratifié d'une partie de ses pouvoirs de propriétaire.

Votre commission vous soumet un amendement de coordination.

Art. 1051 du code civil : Dévolution successorale

Cet article précise que le second gratifié -ou ses héritiers s'il est prédécédé et qu'eux-mêmes sont mentionnés à cet effet dans l'acte originel- est réputé tenir ses droits du disposant , alors que les biens lui sont pourtant transmis à partir du patrimoine du premier gratifié, une fois celui-ci décédé.

Ces dispositions seraient également applicables aux libéralités résiduelles, en application de l'article 1061.

Sur le plan civil, la fiction juridique ainsi créée vise à faire échapper les biens, ainsi obtenus par le second gratifié, aux règles de rapport et d'imputation applicables à la succession du premier gratifié.

Sur le plan fiscal, elle permet en outre au second gratifié d'éviter un taux d'imposition qui, si le premier gratifié n'est pas un proche parent, pourrait lui être très défavorable. Si l'on prend l'exemple d'une libéralité graduelle consentie à un enfant handicapé avec obligation de transmettre les biens à son frère, ce dernier acquittera au décès du premier gratifié les droits de mutation applicables en cas de transmission de parent à enfant et non entre frères. En revanche, à la différence de la libéralité résiduelle, la libéralité graduelle subit une double taxation.

Le legs de residuo est en effet actuellement considéré comme une seule transmission du bien et n'est donc taxé qu'une seule fois, en fonction de la valeur des biens et du lien de parenté existant entre le testateur et le premier gratifié et le testateur et le second gratifié. Si la valeur des biens n'a pas évolué entre le décès du testateur et celui du premier gratifié, le second gratifié ne sera pas taxé. En revanche, si la valeur a augmenté, il le sera sur la différence, en fonction de son degré de parenté. Il a été indiqué à votre rapporteur que le ministre des finances avait été saisi afin d'éviter toute modification de la doctrine fiscale actuelle après l'adoption de la loi.

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