Article 24
(article 5 de la loi n° 92-546 du 20 juin 1992)

Substitution de l'appellation « Bibliothèque nationale de France »
à celle de « bibliothèque nationale »

I. Texte du projet de loi

Cet article vise à substituer, à l'article 5 de la loi du 20 juin 1992 déterminant les personnes soumises à l'obligation de dépôt, l'appellation « Bibliothèque nationale de France » à celle de « bibliothèque nationale ».

Cette modification ayant déjà été réalisée à l'occasion de la codification par ordonnance 147 ( * ) des articles de la loi du 20 juin 1992, cet article est devenu sans objet.

Votre rapporteur rappellera pour mémoire que la Bibliothèque nationale de France fut « substituée aux droits et obligations de la Bibliothèque nationale et de l'Établissement public de la Bibliothèque de France » par l'article 22 du décret n° 94-3 du 3 janvier 1994 portant création de la Bibliothèque nationale de France.

II. Texte adopté par l'Assemblée nationale

Sur proposition du rapporteur de la commission des lois M. Christian Vanneste, l'Assemblée nationale a adopté, pour les raisons évoquées ci-dessus, un amendement de suppression du présent article.

III. Position de votre commission

Votre commission vous propose de maintenir cette suppression.

Article 25
(articles L. 132-4, L. 132-5 et L. 312-6 [nouveaux] du code du patrimoine)

Conditions de consultation des fonds du dépôt légal

I. Texte du projet de loi

Cet article a deux objets distincts : ses paragraphes I et II tendent à modifier l'article 6 de la loi du 20 juin 1992 relatif au Conseil scientifique du dépôt légal tandis que son paragraphe III propose d'instituer une exception aux droits d'auteur et aux droits voisins au bénéfice des organismes dépositaires et des chercheurs qu'ils accréditent pour les actes nécessaires à l'accomplissement des missions de collecte, de conservation et de consultation au titre du dépôt légal.

Avant d'entrer plus avant dans l'analyse des dispositions hétéroclites de cet article, votre rapporteur souhaite indiquer que les deux paragraphes relatifs au Conseil scientifique du dépôt légal sont de véritables coquilles vides illustrant parfaitement les complexités juridiques résultant d'un examen tardif par le Parlement des projets de loi gouvernementaux.

A- LE CONSEIL SCIENTIFIQUE DU DÉPÔT LÉGAL

Les deux présents paragraphes proposent de modifier la composition et les missions d'un organisme dont la base législative à disparu.

Le paragraphe I tend à attribuer la présidence du Conseil scientifique du dépôt légal au président de la Bibliothèque nationale de France en lieu et place de l'administrateur de la bibliothèque nationale.

Cette correction intervient plus de dix ans après la disparition effective du poste d'administrateur de la bibliothèque nationale en vertu du décret n° 94-3 du 3 janvier 1994 portant création de la Bibliothèque nationale de France.

Le paragraphe II confie au Conseil scientifique du dépôt légal la tâche de veiller à la coordination et à la mise en oeuvre des procédures de collectes des documents diffusés sur Internet.

La légitimité du conseil scientifique en cette matière est double. D'une part, la responsabilité du dépôt légal des documents diffusés sur Internet étant attribuée à deux organismes distincts, nul ne peut écarter l'hypothèse, en dépit de leur collaboration déjà ancienne en ce domaine, d'éventuels « doublonnages » au niveau des sites collectés. D'autre part, les modalités de cette même collecte n'étant pas encore définitivement arrêtées, l'existence d'une instance de réflexion associant les organismes dépositaires et des personnalités qualifiées aurait permis sans doute de régler les difficultés qui ne manqueront pas de se poser.

Les textes successifs intervenus depuis le dépôt du présent projet de loi en ont décidé autrement. En effet, l'effet conjugué de l'ordonnance n° 2004-178 du 20 février 2004 relative à la partie législative du code du patrimoine et de l'ordonnance n° 2004-637 du 1 er juillet 2004 relative à la simplification de la composition et du fonctionnement des commissions administratives et à la réduction de leur nombre, a sapé les bases légales du Conseil scientifique du dépôt légal.

L'ordonnance n° 2004-178 du 20 février 2004 a modifié l'article 6 de la loi du 20 juin 1992 selon deux modalités. Elle a abrogé les dispositions de l'article précité se rapportant à la consultation des documents déposés au titre du dépôt légal pour les codifier en les modifiant à l'article L. 132-4 du code du patrimoine. Les dispositions de ce même article consacrées au Conseil scientifique du dépôt légal modifiées par le présent article restaient quant à elle en vigueur et ne devaient être abrogées qu'à compter de la publication des dispositions réglementaires du code du patrimoine.

Mais l'ordonnance n° 2004-637 du 1 er juillet 2004 relative à la simplification de la composition et du fonctionnement des commissions administratives et à la réduction de leur nombre, en abrogeant purement et simplement la disposition de l'ordonnance n° 2004-178 du 20 février 2004 prévoyant le maintien de ces dispositions jusqu'à la publication des dispositions réglementaires du code du patrimoine a remis en cause l'existence même de ce conseil et la raison d'être de ces deux paragraphes que l'Assemblée nationale a donc décidé de logiquement supprimer.

B- LA CRÉATION D'UNE NOUVELLE EXCEPTION STRICTEMENT ENCADRÉE

Le paragraphe III du présent article propose d'insérer après l'article 6 de la loi du 20 juin 1992 trois articles nouveaux définissant le cadre juridique d'une nouvelle exception au droit d'auteur et aux droits voisins au bénéfice des organismes dépositaires 148 ( * ) et des chercheurs qu'ils accréditent pour les actes nécessaires à l'accomplissement des missions de collecte, de conservation et de consultation au titre du dépôt légal.

Ces dispositions visent ainsi à concilier les prérogatives nécessaires au fonctionnement du service public du dépôt légal et les droits légitimes des auteurs et des titulaires de droits. En effet, votre rapporteur rappellera qu'aucune des trois étapes du dépôt légal 149 ( * ) n'est couverte par les exceptions édictées aux articles L. 122-5, L. 211-3 et L. 212-10 du code de la propriété intellectuelle quand bien même chacune d'entre elle est susceptible de se heurter à l'une des deux composantes du droit d'exploitation appartenant à l'auteur des oeuvres ou à ses ayants droits.

La collecte des programmes audiovisuels ou des documents diffusés sur Internet met ainsi en jeu le droit de reproduction. En effet, à la différence du dépôt légal traditionnel pour lequel s'opère un transfert de propriété sur le support sans que soient affectés les droits sur les oeuvres incorporées, le dépôt légal des documents précités occasionne un acte de reproduction au sens du code la propriété intellectuelle.

De même, la conservation des documents implique de longue date un acte de reproduction dans les hypothèses suivantes :

- le support est en danger ;

- le support est obsolète car il n'existe plus de moyen de lecture sur le plan physique ou sur le plan logiciel ;

- le support est stable mais sa mise en consultation le détériore.

Enfin, la mise à disposition des contenus collectés et archivés sur des postes de lectures et d'écoute au profit des personnes dûment accréditées dans l'enceinte des différents organismes dépositaires implique une représentation au sens du code de la propriété intellectuelle.

Pour résoudre ce conflit potentiel entre les principes du code de la propriété intellectuelle et ceux du dépôt légal 150 ( * ) , le présent projet de loi propose l'institution d'une exception interdisant aux auteurs (article 6-1), aux artistes interprètes (article 6-2) et aux producteurs de base de données de s'opposer à la consultation ou à la reproduction des oeuvres faisant l'objet d'un dépôt légal.

(1) La consultation des documents

Le présent texte tend à introduire en premier lieu une exception pour « la consultation de l'oeuvre sur place par des chercheurs dûment accrédités par chaque organisme dépositaire sur des postes individuels de consultation dont l'usage leur est exclusivement réservé ».

Conformément à l'article 5.3.n) de la directive de 2001 151 ( * ) autorisant les Etats membres à prévoir une exception au droit de reproduction et au droit de communication au public « lorsqu'il s'agit de l'utilisation, par communication ou par mise à disposition, à des fins de recherches ou d'études privées, au moyen de terminaux spécialisés, à des particuliers dans les locaux des établissements visés au 2, point c) 152 ( * ) , d'oeuvres et d'autres objets protégés faisant partie de leur collection qui ne sont pas soumis à des conditions en matière d'achat ou de licence », le présent texte pose deux limites au champ d'application de l'exception.

D'une part, la consultation des documents doit impérativement se faire dans les locaux de l'organisme dépositaire. Votre rapporteur estime qu'il y a là une importante contradiction entre le fait de mettre en oeuvre tant de moyens à collecter et conserver des documents et celui d'obliger les chercheurs à se déplacer dans les emprises franciliennes des organismes dépositaires pour avoir communication des contenus. Notre pays s'est ainsi doté d'un dépôt légal à caractère national dont la restitution demeure très largement parisienne et locale.

D'autre part, la consultation n'est ouverte qu'aux chercheurs accrédités. A cet égard, la BnF a bien voulu nous indiquer que toute demande d'accréditation devait être justifiée par le besoin de consulter des ensembles documentaires spécifiques à des fins de recherche d'ordre universitaire, professionnel ou personnel.

Votre rapporteur tient à préciser que de telles limites existent déjà dans notre corpus législatif. En effet, les dispositions de l'article 6 de la loi du 20 juin 1992 codifiées à l'article L. 132-4 du code du patrimoine précisaient déjà que « la consultation des documents déposés [...] se fait dans le double respect des principes définis par le code de la propriété intellectuelle et de ceux inhérents au droit, pour le chercheur, d'accéder à titre individuel, dans le cadre de ses recherches et dans l'enceinte de l'organisme dépositaire, aux documents conservés. »

(2) La reproduction des documents

Le présent projet de loi propose en second lieu d'introduire une exception relative à « la reproduction sur tout support et par tout procédé d'une oeuvre, nécessaire à la collecte, à la conservation et à la consultation sur place [...] ».

Cette exception s'appuie quant à elle sur l'article 5, c) de la directive de 2001 aux termes duquel les Etats membres ont la faculté de prévoir des exceptions ou des limitations au droit de reproduction « lorsqu'il s'agit d'actes de reproduction spécifiques effectués par des bibliothèques accessibles au public, des établissements d'enseignement ou des musées ou par des archives, qui ne cherchent aucun avantage commercial ou économique ».

De portée bien plus générale que la précédente, cette exception couvre l'ensemble des cas énumérés précédemment (« aspiration » automatique des contenus audiovisuels et bientôt des sites Internet, sauvegarde des documents fragiles...).

II. Texte adopté par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale, sur proposition du rapporteur de la commission des lois M. Christian Vanneste, a adopté un amendement de rédaction globale du présent article tendant à :

- réaliser une coordination avec la publication de la partie législative du code du patrimoine en supprimant le I et le II du présent article ;

- fusionner le dispositif proposé par le III du présent article avec l'article L. 132-4 du code du patrimoine prévoyant déjà que la consultation des documents déposés dans le cadre du dépôt légal se fait dans le double respect des principes de la propriété intellectuelle et du droit des chercheurs à accéder aux documents dans des conditions précises.

III. Position de votre commission

Concernant l'obligation de consultation des documents dans les locaux de l'organisme dépositaire, votre rapporteur se félicite que le second contrat d'objectifs et de moyens signé entre l'INA et l'État en novembre 2005 définisse un nouveau dispositif mettant à profit les évolutions technologiques pour mieux répondre aux besoins des chercheurs et des universitaires sur l'ensemble du territoire dans un cadre sécurisé.

Conformément aux voeux de votre rapporteur, ce document précise en effet que l'accès au patrimoine audiovisuel pour les chercheurs et universitaires installés en régions sera facilité par l'implantation de six points de consultation hors du Centre de consultation de l'Ina à la Bibliothèque nationale de France.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

* 147 Ordonnance n° 2004-178 du 20 février 2004 relative à la partie législative du code du patrimoine.

* 148 Les organismes dépositaires sont énumérés à l'article 5 de la loi n° 92-546 du 20 juin 1992 devenu l'article L. 132-3 du code du patrimoine : la Bibliothèque nationale de France, le Centre national de la cinématographie, l'Institut national de l'audiovisuel, le service chargé du dépôt légal du ministère de l'intérieur ainsi que les bibliothèques régionales en charge du dépôt légal imprimeur.

* 149 Collecte, conservation et consultation des documents n'étant pas encore tombés dans le domaine public.

* 150 Votre rapporteur tient à rappeler que l'article 3 du décret n°93-1429 du 31 décembre 1993 relatif au dépôt légal renvoyait à la négociation contractuelle le soin de concilier les droits des auteurs et des titulaires de droits voisins avec les exigences du dépôt légal. Las, les négociations ouvertes cette même année n'ont jamais abouti compte tenu de l'absence de sociétés de gestion susceptible de représenter l'ensemble des éditeurs. La BnF a néanmoins indiqué qu'en vertu d'un accord de principe, les représentants des ayants droits avaient autorisé la mise à disposition sur microfilms et microfiches de leurs oeuvres dans les conditions définies à l'article L. 132-4.

* 151 Directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001 sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information.

* 152 Bibliothèques accessibles au public, établissements d'enseignement, musées, archives.

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