C. LES PROPOSITIONS DE LA COMMISSION EUROPÉENNE
Sans bouleverser l'équilibre fondamental de la directive « Télévision sans Frontières », la Commission européenne propose de modifier l'économie générale du texte dans le sens d'une extension de son champ d'application et d'un assouplissement des règles les plus contraignantes.
1. Étendre le champ d'application de la directive à l'ensemble des services audiovisuels
Si la Commission européenne était en 2003 11 ( * ) relativement prudente quant à la nécessité d'étendre le champ d'application de la directive « Télévision sans Frontières » aux services de la société de l'information - du moins à la composante audiovisuelle de ces services - force est de constater qu'elle a depuis lors changé d'avis.
Dans sa communication « i 2010 - Une société de l'information européenne pour la croissance et les emplois » adoptée le 1 er juin 2005, la Commission européenne reconnaissait d'ailleurs la nécessité de promouvoir « une approche intégrée des politiques de la société de l'information et des médias audiovisuels dans l'Union européenne » puisque « les réseaux de communications, les médias, les contenus, les services et les appareils subissent la convergence numérique » .
La proposition de directive entérine cette position et propose d'instituer un cadre juridique technologiquement neutre et cohérent s'appliquant à l'ensemble des services audiovisuels quelles que soient leurs caractéristiques (linéaires ou non-linéaires) et leurs supports de diffusion.
Si le champ d'application de la directive est désormais étendu à toute forme de fourniture électronique de contenu audiovisuel, c'est-à-dire aux services délivrant au grand public des images en mouvement et des sons via des moyens de communication audiovisuelle, il continue toutefois d'exclure tant les services de radio que toute forme de communication individuelle.
Votre rapporteur tient par ailleurs à rappeler que la législation communautaire établissait jusqu'alors une distinction entre les « services de radiodiffusion télévisuelle » relevant du champ d'application de la directive « Télévision sans frontières » et les « services de la société de l'information » relevant du champ d'application de la directive sur le commerce électronique.
Cette summa divisio laissait subsister une incertitude sur la portée de la notion de service de télévision et sur le régime juridique applicable à ces services sur l'ensemble des modes de diffusion. Ces incertitudes étaient non seulement préjudiciables à la cohérence de la régulation des services de télévision, mais également susceptibles de provoquer de graves distorsions de concurrence pouvant conduire, à terme, au démantèlement de la réglementation consacrée spécifiquement à la télévision.
L'extension du champ d'application de la directive aux services de télévision traditionnels et assimilés diffusés sur Internet permet d'éviter ces écueils et de soumettre toute forme d'offre de contenu audiovisuel au respect de dispositions minimales essentielles concernant la protection des mineurs, la dignité humaine (en particulier, l'interdiction de l'incitation à la haine) et le droit de réponse.
2. Adapter la réglementation à la nature des services audiovisuels
a) La distinction services linéaires/services non linéaires
La proposition de directive établit une distinction fondamentale au sein des services audiovisuels entre services linéaires et services non linéaires.
La notion de service audiovisuel linéaire couvre uniquement les services programmés, c'est-à-dire ceux qui comportent une succession de programmes organisés sur l'ensemble de la journée par l'éditeur responsable et sur lesquels le téléspectateur n'exerce aucun contrôle sur le temps de transmission. Ces services incluent l'ensemble des services de télévision indépendamment de leur plateforme de diffusion (voie hertzienne terrestre, câble, satellite, réseau ADSL, Internet) ainsi que les services de quasi-vidéo à la demande 12 ( * ) .
Les services audiovisuels non linéaires couvrent quant à eux l'ensemble des services « à la demande », dont les téléspectateurs sont en mesure de choisir le contenu qu'ils souhaitent à tout moment. On peut ainsi citer à titre d'exemple, indépendamment de la plateforme utilisée pour la fourniture du service, la vidéo à la demande ou les services d'information basés sur Internet.
b) Des règles différentes en fonction de la nature du service
Dans sa proposition de directive, la Commission européenne propose de distinguer les règles applicables à l'ensemble des services de celles réservées aux services non linéaires.
Le premier niveau de réglementation, applicable à l'ensemble des services audiovisuels (linéaires et non linéaires) consiste en un cadre commun de principes généraux, tels que ceux relatifs à la protection des mineurs et à la dignité humaine, à l'identification des communications commerciales, au droit de réponse et à l'identification du fournisseur de contenu.
Le second niveau de réglementation, applicable aux seuls services audiovisuels linéaires, reprend pour l'essentiel les règles de la directive actuelle, sous réserve de plusieurs assouplissements dans le domaine de la publicité : allègement des règles quantitatives, simplification des règles d'insertions publicitaires, autorisation, moyennant encadrement, du placement de produit.
3. Clarifier les compétences territoriales des États membres
a) Clarifier les règles relatives aux délocalisations abusives
Le risque de délocalisation de services de télévision vers les États membres pratiquant un véritable « dumping culturel » reste une préoccupation majeure des pays disposant d'une réglementation contraignante, au premier rang desquels la France. Comme le soulignait très justement le Conseil supérieur de l'audiovisuel dans sa « contribution au réexamen de la directive Télévision sans frontières » datée du 18 juin 2003, « face aux exigences inégales que manifeste la transposition nationale des articles 4 et 5 de la directive « Télévision sans Frontières » , relatifs à la promotion de la distribution et de la production des oeuvres européennes, l'objectif de diversité culturelle exige que les États membres désireux d'encourager le développement de l'industrie nationale et européenne des programmes aient la possibilité de se prémunir efficacement contre un détournement de la notion de liberté d'établissement. »
Cette préoccupation partagée par votre rapporteur est partiellement prise en compte par la proposition de directive. Celle-ci conforte en effet la possibilité reconnue aux États membres d'agir contre le risque de délocalisation abusive des fournisseurs de service de média.
La Commission européenne propose ainsi de codifier dans le corps même de la directive (article 2 paragraphe 7) une solution jurisprudentielle 13 ( * ) déjà rappelée dans le considérant 14 du préambule de la directive 97/36/CE du 30 juin 1997 14 ( * ) : « considérant que, conformément à une jurisprudence constante de la Cour de justice, un État membre conserve le droit de prendre des mesures à l'encontre d'un organisme de radiodiffusion télévisuelle établi dans un autre État membre, mais dont l'activité est entièrement ou principalement tournée vers le territoire du premier État membre, lorsque cet établissement a eu lieu en vue de se soustraire aux règles qui seraient applicables à cet organisme s'il était établi sur le territoire du premier État membre ».
Si votre rapporteur se félicite du fait que les autorités nationales soient désormais explicitement autorisées à prendre « les mesures appropriées » à l'encontre des fournisseurs de service établis dans un autre État membre dans le seul but de contourner la législation nationale du pays de réception, il s'interroge toutefois sur la portée de cette disposition. L'excès de formalisme caractérisant les paragraphes 8 et suivants 16 ( * ) du projet de directive risque en effet de dissuader toute action préventive.
b) Faciliter « le partage du fardeau » en matière de chaînes extracommunautaires
À la lumière d'affaires récentes concernant des incitations à la haine dans des émissions provenant de l'extérieur de l'Union européenne, et plus précisément des affaires « Al Manar » et « Sahar 110 », la proposition de directive cherche à répartir équitablement la responsabilité entre les opérateurs concernés et, par conséquent, entre les États membres.
Elle propose pour ce faire d'inverser l'ordre existant des critères techniques prévus à l'article 2, paragraphe 4, de la directive TVSF permettant de déterminer la compétence nationale sur les services non établis dans l'Union européenne mais diffusés sur son territoire par des satellites, et de placer par conséquent l'utilisation d'une liaison montante avant l'utilisation d'une capacité satellitaire.
Votre rapporteur tient à cet égard à préciser que depuis l'interprétation donnée par la Commission européenne du critère relatif à « l'utilisation d'une capacité satellitaire relevant d'un État membre » (article 2, paragraphe 4 de la directive) dans une lettre de la DG EAC transmise aux autorités françaises le 20 juin 2002, la compétence du Conseil supérieur de l'audiovisuel français s'étendait à de nombreux services extra-communautaires dont la situation juridique était jusqu'alors imprécise.
Cette interprétation définissait en effet la « notion de capacité satellitaire relevant d'un État membre » au regard de la propriété et de l'immatriculation des satellites fournissant cette capacité. Elle aboutissait à faire passer de jure sous compétence française l'ensemble des services diffusés par les satellites de la société Eutelsat 17 ( * ) , sauf dans l'hypothèse où un critère de rang supérieur permet de rattacher un service à un autre État membre. La plupart des programmes des pays tiers diffusés sur le territoire de l'Union européenne utilisant des capacités satellitaires fournies soit par Eutelsat, soit par Astra, un grand nombre de chaînes extracommunautaires était ainsi placé sous compétence française.
Votre rapporteur considère à cet égard que, en fonction de motifs tenant à la préservation de l'ordre public et à la prévention des délocalisations de services en dehors du territoire européen, les autorités communautaires ont pu valablement faire le choix de soumettre au droit communautaire l'ensemble des services reçus sur le territoire de l'Union européenne. Rien ne justifiait en revanche que la charge de l'application de la directive aux services non établis dans l'Union européenne ne repose que sur la France et le Luxembourg.
4. Inciter les éditeurs de services non linéaires à promouvoir les oeuvres européennes
Alors que l'Union européenne promeut activement la diversité culturelle au plan international, la révision de la directive pouvait représenter une occasion de réaffirmer ce principe à l'échelle communautaire.
Votre rapporteur constate toutefois que le texte présenté par la Commission européenne ne propose ni de renforcer les obligations imposées aux services linéaires ni de prendre des mesures concrètes de soutien à la production audiovisuelle européenne ou indépendante à l'égard des services non linéaires.
a) Le maintien en l'état des dispositions relatives aux services linéaires
Concernant les obligations de diffusion imposées aux services linéaires, la Commission européenne a pris le parti de ne pas modifier les articles 4 et 5 de la directive « Télévision sans Frontières ».
En dépit des lacunes de ce dispositif au demeurant essentiel, elle a en effet conclu « qu'il n'existe pas, actuellement, de nécessité de modifier sur le fond les articles 4 et 5 18 ( * ) . Les données montrent que la diffusion des oeuvres européennes a constamment augmenté. Il a également été constaté dans l'étude d'impact que, outre leur incidence sur la programmation d'oeuvres européennes, les articles 4 et 5 ont permis l'accomplissement d'objectifs culturels. Des éléments montrent par ailleurs que les articles 4 et 5 ont contribué en général à un renforcement de l'industrie audiovisuelle européenne. Il semble que les proportions indiquées dans les articles 4 et 5 restent valables pour l'essentiel, puisqu'il s'est avéré que ces dispositions formaient un cadre efficace et stable pour la promotion des oeuvres européennes et des productions indépendantes. »
Ce statu quo permet au moins d'éviter, pour le moment, de remettre à l'ordre du jour communautaire des dispositions fortement contestées par certains de nos partenaires.
b) Un dispositif faiblement incitatif à destination des services non linéaires
La proposition de directive n'étend pas les obligations de diffusion imposées aux services linéaires par les articles 4 et 5 de la directive aux services non linéaires. Alors que les services non linéaires offrent pourtant de plus en plus de contenus audiovisuels, la Commission européenne a sans doute considéré qu'il était prématuré de prendre des mesures contraignantes risquant de pénaliser leur développement.
Elle se contente par conséquent de proposer l'adoption d'un article incitatif (article 3 septiès nouveau) aux termes duquel : « les États membres veillent à ce que les fournisseurs de services de médias relevant de leur compétence facilitent, lorsque cela est réalisable, et par des moyens appropriés, la production des oeuvres européennes au sens de l'article 6 ainsi que l'accès à ces dernières ».
5. Harmoniser les règles concernant l'accès à l'information
La Commission européenne propose d'introduire dans la directive des règles minimales afin de garantir l'exercice du droit fondamental à l'information.
Le premier alinéa de l'article 3 ter (nouveau) impose ainsi aux États membres de s'assurer que les radiodiffuseurs relevant de leur compétence accordent aux radiodiffuseurs des autres États membres, dans des conditions équitables, raisonnables et non discriminatoires, un accès aux « évènements d'un grand intérêt pour le public » qu'ils retransmettent afin de permettre leur utilisation pour la réalisation de brefs reportages d'actualité.
Le second alinéa de l'article 3 ter (nouveau) autorise quant à lui les organismes de radiodiffusion télévisuelle à extraire librement leurs brefs reportages d'actualité moyennant l'indication de leur source.
Conformément aux demandes formulées par certaines chaînes publiques, cet article garantit par conséquent aux radiodiffuseurs exclus de la retransmission d'un événement de pouvoir accéder librement aux images diffusées par le titulaire des droits de retransmission et d'en diffuser de brefs extraits librement choisis dans le cadre d'émissions d'information (journaux télévisés ou magazines d'information) régulièrement programmées.
6. Faciliter l'identification des fournisseurs de services de médias
Aux termes de l'article 3 quater (nouveau), les fournisseurs de services de médias audiovisuels sont tenus de communiquer des informations sur leur identité qui soient aisément, directement et en permanence accessibles, de façon à ce que les parties puissent exercer leurs droits.
Votre rapporteur tient à souligner l'utilité de cette disposition tant pour les services non linéaires que pour les services « traditionnels ».
7. Assouplir le régime des communications commerciales
a) L'adoption d'une nouvelle définition pour les « communications commerciales audiovisuelles »
La directive propose en premier lieu l'adoption d'une nouvelle définition pour les « communications commerciales audiovisuelles ». Cette notion couvre désormais toutes les communications commerciales audiovisuelles - messages publicitaires classiques, slogans promotionnels de parrains, télé-achat, écrans fractionnés, publicité interactive, placement de produit ...- qui seraient soumises à un socle commun de règles « qualitatives » : principe d'identification, respect de la dignité humaine, absence de discrimination, protection des mineurs et règles de santé publique.
b) Des règles « qualitatives » différenciées
La directive propose la mise en place d'un socle commun de règles qualitatives applicables à toutes les communications commerciales audiovisuelles, mais dont les modalités d'exercice seraient à la mesure de chaque catégorie de service de contenu audiovisuel.
(1) Les règles relatives à la dignité humaine et à la protection des mineurs
Votre rapporteur note avec satisfaction que la proposition de directive étend considérablement le champ d'application des règles relatives à la dignité humaine et à la protection des mineurs.
Alors que seuls la publicité et le télé-achat sont soumis dans l'actuelle directive à des règles sur la dignité humaine (article 12) et la protection des mineurs (article 16), la proposition tend à étendre ce régime à toutes les communications commerciales audiovisuelles quelle que soit la nature du service (linéaire ou non linéaire) de diffusion.
Votre rapporteur estime que cette proposition permet d'assurer un juste équilibre entre le principe de libre circulation des communications commerciales audiovisuelles dans le marché intérieur et celui de protection de principes fondamentaux.
Ainsi, concernant les règles relatives à la dignité humaine, l'article 3 sexies (nouveau) dispose que : « les États membres veillent, par des mesures appropriées, à ce que les services de médias audiovisuels et les communications commerciales audiovisuelles fournis par les fournisseurs relevant de leur compétence ne contiennent aucune incitation à la haine fondée sur le sexe, l'origine raciale ou ethnique, la religion ou les convictions, le handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle ».
Votre rapporteur souligne que cette nouvelle rédaction, plus complète que celle de l'article 22 bis actuel 19 ( * ) , s'inspire de celle établie par la « proposition de recommandation du Parlement européen et du Conseil sur la protection des mineurs et de la dignité humaine, et le droit de réponse en lien avec la compétitivité de l'industrie européenne des services audiovisuels et d'information » 20 ( * ) du 30 avril 2004.
Concernant la protection des mineurs, le (f) de l'article 3 octies (nouveau) précise quant à lui que « les communications commerciales ne doivent pas porter un préjudice moral ou physique aux mineurs ».
(2) Les règles relatives à des considérations de santé publique
La directive comporte actuellement des interdictions ou des restrictions à la publicité qui tiennent à des considérations de santé publique. Ainsi, l'article 13 interdit toute forme de publicité télévisée et de télé-achat pour les produits du tabac, l'article 14 prohibe toute publicité pour les médicaments et traitements médicaux disponibles sur ordonnance et l'article 15 encadre fermement les annonces et le télé-achat pour les boissons alcoolisées.
Considérant comme justifiées les règles actuelles sur les produits du tabac et l'alcool, la Commission européenne propose d'en étendre leur application à tout service audiovisuel, linéaire ou non.
S'agissant des communications relatives aux produits pharmaceutiques fournis sur ordonnance, votre rapporteur remarque que le cadre réglementaire applicable au téléachat - tel que réglementé à l'article 14 (2) - et au parrainage - tel que réglementé à l'article 17 (3) - est reconduit. Il regrette toutefois qu'aucune disposition de la proposition de directive ne vienne réglementer le placement de produit de ce type de médicaments.
(3) L'encadrement juridique de la technique du placement de produit
Une des innovations principales de cette proposition de directive en matière de communications commerciales réside dans l'autorisation, sous conditions, de la pratique du placement de produit définie à l'article premier du présent texte comme « toute forme de communication commerciale audiovisuelle consistant à inclure ou à faire référence à un produit, un service ou leur marque, en l'insérant dans un service de média audiovisuel, normalement paiement ou contrepartie. »
Votre rapporteur tient à cet égard à rappeler que si le cadre juridique actuel, et plus précisément la double exigence d'identification et de séparation du contenu publicitaire du reste du programme, a pour effet implicite de ne pas autoriser le recours au placement de produit dans les programmes produits par des radiodiffuseurs visés par la directive, cette pratique n'est pas pour autant bannie des écrans européens, bien au contraire. En effet, certains programmes (films, fictions...) sur lesquels les radiodiffuseurs sous juridiction communautaire n'exercent aucune responsabilité de production ont fréquemment recours à cette technique sans que puisse par conséquent leur être appliquée ex ante la réglementation européenne.
Afin de s'adapter à cette réalité, la directive propose de définir à l'article 3 nonies (nouveau) des règles communes à la technique du placement de produit et à celle du parrainage :
« 1. Les services de média audiovisuel qui sont parrainés ou comportent du placement de produit répondent aux exigences suivantes :
(a) le contenu et, le cas échéant, la programmation de tels services de média audiovisuel ne doivent en aucun cas être influencés de manière à porter atteinte à la responsabilité et à l'indépendance éditoriale du fournisseur de service de média ;
(b) ils ne doivent pas inciter directement à l'achat ou à la location de biens ou de services, notamment en faisant des références promotionnelles spécifiques à ces produits ou services ;
(c) les utilisateurs doivent être clairement informés de l'existence d'un accord de parrainage et/ou de l'existence d'un placement de produit. Les émissions parrainées doivent être clairement identifiées en tant que telles par le nom, le logo et/ou un autre symbole du parrain, par exemple au moyen d'une référence à ses produits ou services ou d'un signe distinctif, au début/à la fin de l'émission et/ou pendant l'émission. Les émissions comportant du placement de produit doivent être identifiées de manière appropriée au début de leur diffusion, afin d'éviter toute confusion de la part de l'utilisateur. »
Cet article dispose, par ailleurs, que « Les journaux télévisés et les émissions d'information politique ne doivent pas être parrainés et ne doivent pas comporter de placement de produit. Les services de média audiovisuel pour enfants et les documentaires ne doivent pas comporter de placement de produit. »
Au total, le principe de séparation entre le contenu publicitaire et le reste du programme cesse d'être un critère indispensable et devient simplement l'un des moyens permettant aux utilisateurs d'identifier le contenu commercial et de le distinguer du contenu éditorial. En effet, si la directive continue à requérir de la publicité et du télé-achat qu'ils puissent être « nettement distingués du reste des programmes » (article 10 tel que modifié par la présente proposition), elle n'impose pour le parrainage et le placement de produit que l'obligation d'une « identification claire » au début du programme concerné.
Votre rapporteur estime qu'il s'agit là d'un dispositif acceptable permettant de sortir d'une certaine hypocrisie en encadrant juridiquement une technique de plus en plus prisée tant par les annonceurs que par les producteurs d'oeuvres audiovisuelles et cinématographiques.
c) Des règles « quantitatives » assouplies pour les services linéaires
En vue de « maintenir un équilibre entre les besoins de recettes publicitaires de certains organismes de radiodiffusion, d'une part, et la nécessité de maintenir l'intégrité et la qualité des programmes, d'autre part, » l'actuelle directive TVSF (article 18) encadre le temps de transmission qui peut être consacré au télé-achat et à la publicité.
Sans pour autant bouleverser les règles actuelles, la proposition de directive tend à les assouplir afin d'adapter cette réglementation aux progrès technologiques et à la diversification de l'offre, qui semblent conférer plus d'autonomie à l'utilisateur.
(1) L'exemption des services linéaires de toute limite quantitative
Bien que la directive couvre désormais les services non linéaires de médias audiovisuels, la Commission européenne a estimé qu'il n'y avait pas lieu de soumettre ces derniers à des limites quantitatives.
Les experts consultés pour la rédaction du texte ont souligné que, pour des services « à la demande », de telles limites quantitatives faisaient peu de sens.
(2) La suppression de la limite quotidienne de publicité
Si elle maintient la limite horaire de 20 %, la directive propose de supprimer la limite quotidienne de publicité posée par l'article 18 paragraphe 1 de la directive.
A la différence des représentants des consommateurs, des téléspectateurs et de la presse écrite, les organisations d'annonceurs et agences de publicité ainsi que les radiodiffuseurs de service public, la Commission européenne a estimé que cette limite extrêmement haute 21 ( * ) n'apportait aucune valeur ajoutée au cadre réglementaire en vigueur.
(3) La redéfinition du cadre réglementaire applicable au télé-achat
Concernant les chaînes non exclusivement consacrées au télé-achat, la proposition de directive remet en question les règles particulières applicables à cette catégorie de programmes définies à l'article 18 bis de la directive. L'évolution des technologies et le développement des nouveaux services interactifs offerts aux utilisateurs rendent en effet caduques ces règles réservées aux services linéaires.
Le nouveau cadre réglementaire applicable aux chaînes exclusivement consacrées au télé-achat exonère quant à lui ces dernières de l'application des règles prévues par les articles 18 et 18 bis de l'actuelle directive mais maintient les restrictions « qualitatives ».
(4) La simplification des règles d'insertion publicitaire
L'article 11 de la directive en vigueur pose le principe selon lequel la publicité et les écrans de télé-achat doivent être insérés entre les émissions. Toutefois, sous réserve des conditions fixées aux paragraphes 2 à 5 22 ( * ) , ils peuvent être également insérés pendant les émissions de façon à ne pas porter atteinte à certains intérêts spécifiques (intégrité et valeur des émissions, prise en compte des interruptions naturelles du programme, durée et nature du programme...).
Répondant favorablement aux demandes des radiodiffuseurs, la Commission européenne propose l'adoption d'un cadre législatif offrant à ces derniers une réelle flexibilité pour insérer de la publicité pendant les émissions. L'assouplissement des règles d'insertion revient en effet à faire disparaître les dispositions suivantes : l'obligation d'insérer la publicité entre les émissions (paragraphe 1 de l'article 11 actuel), le critère des parties autonomes et celui des interruptions permettant l'insertion de publicité (paragraphes 1 et 2 du même article) et la règle des 20 minutes (paragraphe 4 du même article).
Au total, seules les interruptions pendant les services religieux sont désormais totalement interdites tandis que le nombre des interruptions à des fins de communication commerciale pendant les émissions protégées, à savoir les oeuvres cinématographiques, les journaux d'information et les émissions pour enfants, est limité à une fois par tranche de 30 minutes.
* 11 Com (2003) 784 - Communication de la commission au Conseil, au Parlement européen, au comité économique et social européen et au comité des régions concernant l'avenir de la politique de réglementation européenne dans le domaine de l'audiovisuel : « Pour l'heure, aucun service de la société de l'information n'a encore une importance et un impact similaires à ceux des services de la radiodiffusion télévisuelle. La pénétration des services à large bande a été plus lente qu'initialement prévu et il semblerait que les développements soient difficiles à anticiper dans un environnement économique radicalement modifié. »
* 12 Sur la distinction entre service de quasi-vidéo à la demande et service de vidéo à la demande, voir l'arrêt de la Cour de justice des communautés européennes (troisième chambre) Mediakabel BV contre Commissariaat voor de Media (C-89/04) du 2 juin 2005. Les considérants 38 et 39 de cet arrêt précisent ainsi :
38. « [...] La liste des films proposée dans le cadre d'un service tel que le service « Filmtime » est établie par le prestataire du service. Cette sélection de films est proposée à tous les abonnés dans les mêmes conditions, soit au moyen de journaux, soit au moyen d'information diffusées sur l'écran télévisé, et lesdits films sont accessibles aux horaires de diffusion fixés par le prestataire. 39. [...] Un tel service n'est donc pas commandé individuellement par un destinataire isolé qui aurait le libre choix de ses programmes dans un cadre interactif. Il doit être regardé comme un service de quasi vidéo à la demande, fourni sur une base « point à multipoint » et non « à la demande individuelle d'un destinataire de services ».
* 13 Considérant 26 de l'Affaire C-23/93, TV10 SA.
* 14 Directive 97/36/CE du 30 juin 1997 15 modifiant la directive TVSF 89/552/CEE du 3 octobre 1989.
* 16 8. Les États membres ne peuvent prendre des mesures en application du paragraphe 7 que si toutes les conditions suivantes sont remplies :
(a) l'État membre de réception demande à l'État membre dans lequel le fournisseur de service de média est établi de prendre des mesures ;
(b) ce dernier État membre s'abstient de prendre de telles mesures ;
(c) le premier État membre notifie à la Commission et à l'État membre dans lequel le fournisseur de service de média est établi son intention de prendre de telles mesures ;
(d) la Commission décide que lesdites mesures sont compatibles avec le droit communautaire.
9. Toute mesure prise en application du paragraphe 7 doit être objectivement nécessaire, être appliquée de manière non discriminatoire, être propre à réaliser les objectifs poursuivis et ne doit pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour les atteindre.
10. La Commission statue sur les mesures envisagées dans les trois mois qui suivent la notification visée au paragraphe 8. Si la Commission décide qu'elles sont incompatibles avec le droit communautaire, l'État membre concerné s'abstient de prendre les mesures envisagées.»
* 17 Et l'ensemble des services diffusés par les satellites de la société Astra sous la compétence du Luxembourg.
* 18 Commission européenne, Document de réflexion pour la conférence de Liverpool sur l'audiovisuel.
* 19 « Les États membres veillent à ce que les émissions ne contiennent aucune incitation à la haine pour des raisons de race, de sexe, de religion ou de nationalité. »
* 20 COM (2004) 341 final - Non publié au Journal officiel :
(3) « encourageant l'industrie à éviter toute discrimination basée sur le sexe, la race ou l'origine ethnique, la religion ou les convictions, un handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle dans tous les médias, et à combattre toute discrimination de ce type. ».
* 21 « Article 18 :
1. Le pourcentage de temps de transmission consacré aux spots de téléachat, aux spots publicitaires et aux autres formes de publicité, à l'exclusion des fenêtres d'exploitation consacrées au télé-achat au sens de l'article 18 bis, ne doit pas dépasser 20 % du temps de transmission quotidien. Le temps de transmission des messages publicitaires ».
* 22 « Article 11 :
2. Dans les émissions composées de parties autonomes ou dans les émissions sportives et les événements et spectacles de structure similaire comprenant des interruptions, la publicité et les spots de télé-achat ne peuvent être insérés qu'entre les parties autonomes ou au cours des interruptions.
3. La transmission d'oeuvres audiovisuelles, telles que longs métrages et films conçus pour la télévision (à l'exclusion des séries, feuilletons, émissions de divertissement et documentaires), pour autant que leur durée programmée soit supérieure à quarante-cinq minutes, peut être interrompue une fois par tranche de quarante-cinq minutes.
Une autre interruption est autorisée si leur durée programmée est supérieure d'au moins vingt minutes à deux ou plusieurs tranches complètes de quarante-cinq minutes.
4. Lorsque des émissions autres que celles visées au paragraphe 2 sont interrompues par la publicité ou par des spots de télé-achat, une période d'au moins vingt minutes devrait s'écouler entre les interruptions successives à l'intérieur des émissions.
5. La publicité et le télé-achat ne peuvent être insérés dans les diffusions de services religieux. Les journaux télévisés, les émissions d'information politique, les documentaires, les émissions religieuses et les émissions pour enfants, dont la durée programmée est inférieure à trente minutes, ne peuvent être interrompus par la publicité ou le télé-achat. Lorsqu'ils ont une durée programmée égale ou supérieure à trente minutes, les paragraphes précédents s'appliquent. »