EXPOSÉ GÉNÉRAL
I. RAPPEL DE LA LÉGISLATION EXISTANTE
S'agissant du concept de parc national, les Etats-Unis sont incontestablement les promoteurs d'un modèle qui constitue encore aujourd'hui une référence. La création, en 1872, du Parc de Yellowstone, dans le Nord-ouest américain, a pour ambition d'offrir à des citadins de grands espaces pour se régénérer et permettre aux générations nouvelles de découvrir les paysages qui ont marqué la vie des premiers pionniers.
D'autres parcs nationaux ont été ensuite rapidement créés aux Etats-Unis mais aussi dans les pays liés à l'empire britannique notamment dans des pays à structure coloniale, avec la volonté de préserver « la faune, la flore et le spectacle de la vie sauvage ».
La dynamique de création des parcs se propage en Europe, dès la première moitié du XX e siècle, mais la France, sur son territoire métropolitain, accuse un retard certain.
Créé par le décret du 27 novembre 1946, le Conseil national de protection de la nature est notamment chargé de définir le statut des parcs nationaux et réserves, mais la loi fondatrice n'est adoptée qu'en juillet 1960.
La loi n° 60/708 du 22 juillet 1960 relative à la création des parcs nationaux se veut une loi-cadre, fixant les grands principes au niveau législatif et laissant une grande liberté au pouvoir réglementaire et au niveau local, afin de prendre en compte les spécificités de chaque projet.
- Le texte traduit une certaine conception française de la protection des espaces naturels exceptionnels : à la sauvegarde des espèces et des écosystèmes, au tourisme culturel et à l'exercice de sports de nature que sont les objectifs communs des parcs nationaux dans le monde, le législateur a ajouté la restauration et la mise en valeur du tissu socio-économique avoisinant, en définissant une zone périphérique dotée d'un programme de réalisations. La place de l'homme est ainsi réaffirmée, en tant qu'entité indissociable de ces espaces naturels exceptionnels .
Le décret d'application n° 61-1195 du 31 octobre 1961 portant règlement d'administration publique (RAP) pour l'application de la loi du 22 juillet 1960 énonce une réglementation « longue, stricte et précise ».
Il convient de relever que ces deux textes fondateurs n'ont été que peu modifiés par des textes ultérieurs 1 ( * ) et le projet de loi soumis à l'examen du Sénat constitue la première réforme d'envergure.
- En application de cette réglementation, sept parcs ont été créés entre 1963 et 1989 dont cinq sont situés en zone de montagne.
Les 7 parcs existants
PN |
Création |
Superficie du parc (ha)
|
Superficie zone périphérique (ha) |
|||
Vanoise |
1963 |
52 839 |
143 637 |
|||
Port-Cros* |
1963 |
3 741 |
||||
Pyrénées |
1967 |
45 707 |
206 352 |
|||
Cévennes |
1970 |
91 270 |
230 110 |
|||
Ecrins |
1973 |
91 800 |
179 600 |
|||
Mercantour |
1979 |
68 500 |
146 500 |
|||
Guadeloupe |
1989 |
17 380 |
16 200 |
Données Atlas PN
* espace protégé = Port Cros + Porquerolles + zone marine adjacente
La superficie totale des 7 parcs nationaux représente 1.293.636 hectares, c'est à dire 371.237 ha de parcs (zone centrale) soit 0,66 % du territoire national et 922.399 ha en zone périphérique.
Le bilan qui peut être établi de cette législation et de sa mise en oeuvre doit être nuancé.
Il faut tout d'abord relever l'adhésion manifestée au concept de parc national, vécu comme un label venant consacrer un territoire véritablement exceptionnel, tant par la qualité de sa faune, de sa flore et de son paysage, que par l'authenticité de son caractère, c'est à dire ses traditions et son histoire. Le parc national fait souvent l'objet d'une appropriation fière et parfois exclusive de ceux qui y vivent, en contradiction avec la nécessaire ouverture du parc, aux promeneurs, citadins et touristes désireux de découvrir ces espaces naturels, mais dont le nombre est parfois jugé excessif voire dangereux.
Au delà de ce constat a priori très favorable, un bilan plus critique permet de souligner les difficultés suivantes :
- une protection réussie des espaces naturels de la zone centrale ;
- une mise en valeur des zones périphériques qui est restée souvent lettre morte !
- un sentiment d'expropriation ressenti très fortement par les populations locales, par ailleurs viscéralement attachées à la préservation de leur territoire ;
- une prolifération réglementaire parfois mal ressentie ;
- un sentiment de frustration de la part des élus et par ailleurs une certaine suspicion des associations de protection de la nature à l'encontre de ces élus.
Plusieurs rapports élaborés dès 1983 plaident pour un aménagement du dispositif afin de conforter ses objectifs de protection tout en créant une véritable dynamique partenariale avec les collectivités territoriales intéressées.
Tous insistent sur la nécessité d'introduire plus de transparence dans le fonctionnement de l'établissement public du parc national, pour une clarification des compétences respectives de l'établissement public du parc et des autorités déconcentrées de l'Etat et pour la définition de nouvelles règles de gouvernances associant effectivement les collectivités territoriales concernées par le parc national.
- rapport de M. Edgard Pisani sur « la définition, la protection et la gestion d'un réseau d'espaces naturels (1983) ; - rapport de Mme Hélène Blanc, préfet honoraire sur les rapports des parcs nationaux avec leurs zones périphériques (1994) ; - propositions de la Conférence des présidents des conseils d'administration des Parcs nationaux de France (1995) ; - propositions du Collège des directeurs des parcs nationaux de France (1997). |
Le dernier rapport en date, remis au Premier ministre en 2003 et dont l'auteur est M. Jean-Pierre Giran député et rapporteur à l'Assemblée Nationale, inspire l'essentiel des dispositions figurant dans le projet de loi.
* 1 On peut citer la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature, la loi n° 79-1150 du 29 décembre 1979 sur la publicité, les enseignes et pré enseignes, la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 dite « loi montagne » et la loi n° 95-101 du 2 février 1995 dite « loi Barnier ».