II. AU COURS DES ANNÉES 1990, LE SYSTÈME ÉTAIT PARVENU À PRENDRE EN COMPTE LES CONSÉQUENCES DE LA SÉCHERESSE
A. LES CONSÉQUENCES DE LA SÉCHERESSE PRÉSENTENT DES SPÉCIFICITÉS FORTES QUI RENDENT LEUR IDENTIFICATION DIFFICILE...
Bien que la loi de 1982 ne dresse pas de liste des événements susceptibles d'être reconnus comme catastrophes naturelles, il apparaît clairement que le système avait initialement surtout été conçu pour faire face à des périls de type « classique », telles que les inondations 10 ( * ) .
Or, par rapport à ces événements, les mouvements de terrains consécutifs à la sécheresse, présentent les spécificités suivantes :
- Ils ne résultent pas de l'action anormale d'un seul agent naturel mais de la succession de deux phénomènes : tout d'abord, une sécheresse qui a pour effet de compacter les sous-sols argileux et ensuite une réhydratation du sous-sol sous l'effet de la pluie ;
- Les dommages peuvent mettre plusieurs années pour se produire : la succession des mouvements de terrains d'amplitude modestes sur plusieurs années peut avoir les mêmes effets qu'un mouvement d'amplitude importante causé par une sécheresse et une réhydratation d'intensité anormale. Or, d'après la loi, seul ce dernier cas pourrait donner lieu à interprétation ;
- L'événement ne peut pas être observé en tant que tel puisqu'il s'agit de mouvements souterrains. Seuls peuvent être constatés les dommages qui peuvent en résulter, sous la forme de fissures des bâtiments ;
- Les mouvements de terrain ne sont jamais la cause unique des fissures observées et une part revient toujours à l'inadaptation de la construction aux contraintes du terrain. En effet, il est admis par les professionnels que, même sur un terrain très argileux, le respect de règles traditionnelles de construction permet d'éviter toute fissure du bâtiment. A ces insuffisances de la construction peuvent aussi s'ajouter des causes variées comme l'existence d'une végétation dans l'environnement immédiat du bâtiment ou la fuite d'une canalisation, qui peuvent toutes deux modifier la teneur en eau du sol sous les différents endroits du bâtiment.
B. L'INDEMNISATION SATISFAISANTE DES CONSÉQUENCES DE LA SÉCHERESSE
A partir des demandes consécutives à la sécheresse de l'été 1989, le Gouvernement a reconnu pour la première fois les mouvements de terrains différentiels comme des catastrophes naturelles, et ce au même titre que les inondations, les avalanches, les séismes, les phénomènes liés à l'action de la mer et les autres types de mouvements de terrains.
Depuis cette date, de nombreuses reconnaissances de mouvements de terrains différentiels en catastrophes naturelles sont intervenues au point de représenter plus de 40 % des indemnisations accordées par le régime depuis sa création et de risquer de devenir très bientôt son premier poste de dépenses (devant les inondations) 11 ( * ) .
A partir de 1998, ces indemnisations se sont fondées sur un critère objectif de l'intensité anormale de l'événement, dont l'application permettait de reconnaître effectivement les communes les plus touchées.
Malgré les difficultés rencontrées pour l'identifier, le phénomène était donc pris en charge par le régime des catastrophes naturelles.
Pourtant l'indemnisation des conséquences de la sécheresse de l'été 2003 a donné lieu à un large mécontentement.
* 10 Lors des débats parlementaires de 1982, les inondations du Rhône et de la Saône intervenues l'année précédente furent souvent citées en exemples.
* 11 Au 1 er janvier 2004, les inondations représentaient la catastrophe naturelle la plus indemnisée (avec 3 610 millions d'euros, soit 45 % du total établi à 7 880 millions d'euros), suivi par les mouvements de terrains différentiels (3 200 millions d'euros) et par les tempêtes, ouragans et cyclones (1 085 millions d'euros). Source : Les catastrophes naturelles en France , Caisse centrale de réassurance, septembre 2004. Mais le règlement définitif des conséquences de la canicule de 2003 pourrait amener les indemnisations des mouvements de terrain à dépasser celles des inondations.