3. Le déroulement et la gestion des carrières
Les articles au déroulement et à la gestion des carrières militaires, qui représentent la part principale du projet de loi, reprennent beaucoup de dispositions de l'actuel statut. Ils n'en comportent pas moins plusieurs avancées.
Le projet de loi procède ainsi à une refonte du régime des sanctions disciplinaires , inspirée d'un souci de rapprochement avec la fonction publique civile et d'un renforcement des garanties accordées aux militaires. Le nouveau statut se conformera aux grands principes du droit de la défense. Dans le cadre des textes d'application, il sera prévu de permettre au militaire concerné de choisir un défenseur de son choix. Il s'agira d'un militaire dans la plupart des cas, mais la possibilité de recourir à un avocat sera prévue lorsque les sanctions les plus graves seront encourues. Le projet de loi restreint également les possibilités de cumuler divers types de sanctions. Le statut actuel permet d'infliger cumulativement une punition disciplinaire, une sanction professionnelle et une sanction statutaire. Le projet de loi regroupe les actuelles punitions disciplinaires et sanctions statutaires dans un même ensemble de sanctions disciplinaires qui ne pourront se cumuler entre elles, à l'exception des arrêts qui pourront être appliqués en l'attente du prononcé d'une sanction d'un autre type. Le projet de loi introduit également dans le statut général des sanctions prévues dans la fonction publique civile et à portée pécuniaire, comme l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de cinq jours, avec privation de la rémunération, ou encore l'abaissement d'échelon, temporaire ou définitif.
Le projet de loi retient en second lieu le principe d'un alignement, chaque fois que cela est possible, de la situation des personnels sous contrat sur celle des personnels de carrière . À titre d'exemple, les dispositions du projet de loi relatives aux rémunérations s'appliquent sans distinction aux militaires de carrière et aux militaires sous contrat, alors que le statut actuel prévoyait à l'intention de ces derniers des règles particulières pour l'indemnité de résidence ou l'indemnité pour charges militaires, tout comme il ne leur garantissait pas le bénéfice des mesures de portée générale affectant la rémunération des fonctionnaires. Les militaires sous contrat bénéficient d'un alignement sur la situation des militaires de carrière dans plusieurs autres domaines, par exemple pour l'accès à certaines positions comme le détachement ou pour l'intégration dans la fonction publique. Le projet de loi prévoit également l'inscription dans le statut du principe selon lequel les militaires ayant servi sous contrat et involontairement privés d'emploi ont droit à un revenu de remplacement sous forme d'allocation de chômage.
Le projet de loi instaure une catégorie nouvelle - les militaires commissionnés - pour permettre des recrutements exceptionnels, à des grades correspondant au niveau de compétence de l'intéressé et dans des spécialités pour lesquelles les armées n'assurent pas de formation. Inspirée de l'actuel statut des officiers servant sous contrat, cette catégorie inclura également des sous-officiers. Par ailleurs, les règles applicables aux volontaires sont assouplies, pour permettre des contrats plus courts et fractionnables, afin de diversifier les possibilités de recourir à cette formule qui peut être considérée comme un prélude à un engagement ou à un contrat de réserviste.
Le projet de loi insère par ailleurs deux chapitres relatifs à la reconversion des militaires dans le statut. Il reprend en les pérennisant les dispositions de la loi 70-2 du 2 janvier 1970, reconduites périodiquement et actuellement en vigueur jusqu'en 2008, qui permettent à des officiers d'accéder à des emplois proposés par les administrations civiles, y compris les collectivités locales et les hôpitaux. Ces dispositions auront un caractère permanent, mais surtout, elles seront étendues à tous les militaires, de carrière ou sous contrat, quel que soit leur grade, alors qu'elles s'appliquent aujourd'hui aux seuls officiers. Le projet de loi rationalise et consolide diverses dispositions actuellement éparses et concernant la reconversion. Il pose le principe du bénéfice de la formation professionnelle pour tout militaire comptant au moins 4 ans de service. Il maintient les dispositifs instaurés en 1996, en accompagnement de la professionnalisation, à savoir le congé de reconversion de 6 mois, en position d'activité, et le congé complémentaire de 6 mois en position de non-activité, eux aussi ouverts à tous les militaires comptant 4 ans d'ancienneté.
Le projet de loi procède aussi à un aménagement des limites d'âge en cohérence avec la réforme des retraites. Ces limites d'âge sont reportées en moyenne de 3 ans. La limite maximale de durée de service des engagés, qui était de 22 ans, est portée à 25 ans. Cet allongement s'effectuera progressivement, dans le cadre d'un période transitoire. Il s'accompagnera d'une simplification considérable puisque dans l'actuel statut, on comptait près de 140 cas particuliers. Il n'en restera qu'une trentaine dans le nouveau statut.
Enfin, suivant les recommandations de la commission Denoix de Saint Marc, le projet de loi procède à une réforme du mode de désignation des officiers généraux . Il met fin à la pratique des nominations à titre conditionnel, dépourvue de base légale et qui donnait un caractère largement fictif aux limites d'âge statutaires. Il propose un dispositif plus transparent pour satisfaire des objectifs sensiblement analogues, à savoir maintenir un flux suffisant de promotion aux grades d'officiers généraux. Désormais, les officiers généraux bénéficieront d'une possibilité de maintien temporaire en première section au-delà de la limite d'âge du grade de colonel, pour une durée déterminée en fonction des emplois à pourvoir, sans toutefois pouvoir servir au delà de l'âge maximal de maintien en première section, soit 61 ans. Ces nouvelles règles devraient se traduire par un recul d'environ un an de l'âge moyen réel de départ des officiers généraux.