CONCLUSION
L'expansion économique de la zone asiatique et, en particulier, du Vietnam, nécessite le retour des sociétés d'armement françaises dans la liaison maritime entre l'Europe et l'Extrême-Orient, qui est appelée à se développer fortement.
Le présent accord définit un cadre juridique adapté, tant à l'organisation économique encore centralisée du Vietnam qu'à la volonté des sociétés françaises de coopérer, par le biais de sociétés mixtes, avec les autorités vietnamiennes.
C'est pourquoi il est opportun d'adopter cet accord, qui constitue une base à partir de laquelle nos sociétés pourront s'insérer dans une desserte marquée par une vive concurrence.
EXAMEN EN COMMISSION
La commission a examiné le présent rapport lors de sa séance du 28 janvier 2004.
A la suite de l'exposé du rapporteur, une discussion s'est instaurée au sein de la commission.
M. Xavier de Villepin a rappelé que c'est au Vietnam que la part de marché de l'économie française était la plus importante, à hauteur de 4 %. Notant que notre présence économique s'inscrit cependant dans un climat fortement concurrentiel, il s'est interrogé sur la nationalité des principales compagnies étrangères maritimes opérant au Vietnam.
M. Daniel Goulet, rapporteur, a précisé que les compagnies australiennes, japonaises et américaines étaient en effet très présentes au Vietnam et que le présent accord visait à appuyer les efforts accomplis par les opérateurs français pour s'insérer dans ce marché. Il a estimé que ce texte faciliterait la reprise des liaisons maritimes et, par-delà, des relations économiques entre la France et le Vietnam.
Il a par ailleurs confirmé, à l'attention de M. Philippe François, qu'Air France desservait Hanoï et Ho Chi Minh Ville.
La commission a alors adopté le projet de loi.
PROJET DE LOI
(Texte proposé par le Gouvernement)
Article unique
Est autorisée l'approbation de l'accord maritime entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République socialiste du Vietnam, signé à Paris le 23 mai 2000, et dont le texte est annexé à la présente loi. 2 ( * )
ANNEXE -
ÉTUDE
D'IMPACT3
(
*
)
I. - Etat du droit et situation de fait existant et leurs insuffisances
L'accord maritime franco-vietnamien du 23 mai 2000 est l'aboutissement d'une négociation délicate qui devrait donner une nouvelle impulsion à la relation maritime bilatérale affaiblie par la non application de l'accord maritime franco-vietnamien de 1978 et le retrait à partir de 1988 des opérateurs français (Chargeurs Réunis et CGM) des lignes Europe/Orient.
La normalisation des relations maritimes entre les deux Parties devrait ainsi assurer un cadre juridique stable et la création d'une commission mixte maritime permettra d'étudier les questions relatives à l'amélioration et au développement des transports maritimes entre les deux pays.
Cependant, toutes les attentes de la Partie française n'ont pas été satisfaites. Ni le bénéfice du traitement national dans les ports vietnamiens, ni la possibilité pour les armements français de contrôler des filiales et agences maritimes sur le sol vietnamien, n'ont pu être obtenus des négociateurs vietnamiens, alors même que la France accorde un traitement égal dans es ports aux navires de toutes nationalités, et ne met pas d'obstacles à l'ouverture de filiales et agences maritimes.
Une fois l'accord entré en vigueur, la France entend utiliser cet instrument pour convaincre à terme le Vietnam de l'intérêt d'intégrer le transport maritime dans une chaîne logistique multimodale, notamment par la possibilité pour les armateurs de contrôler le volet terrestre de leurs activités à travers des filiales locales.
II - Bénéfices escomptés
* en matière d'emploi :
L'affirmation du principe de la liberté du commerce maritime ainsi que la possibilité pour nos compagnies maritimes d'ouvrir des représentations au Vietnam offrent d'intéressantes perspectives. Même si le traitement national dans les ports et la possibilité pour nos armements de développer le champ d'action des agences maritimes restent encore à discuter, cet accord représente une première étape très encourageante vers une ouverture plus large du Vietnam permettant le développement du trafic maritime, dont les entreprises maritimes françaises sauront tirer avantage du fait de leur présence dans le pays.
L'armement CMA-CGM, 10 ème armement de ligne mondial, est présent au Vietnam à travers Gemartrans, une entreprise commune fondée en 1987, dont il contrôle 49 % des parts. Les 51 % restants appartiennent à l'Etat vietnamien. La CMA-CGM a accepté cette répartition dans le cadre d'un accord garantissant l'équilibre des pouvoirs dans l'entreprise. En matière de conteneurs, Gemartrans assure environ 25 % du trafic de ligne vietnamien, pour un total de 160.000 Equivalents Vint Pieds (EVP). Ce trafic se développe de 15 à 20 % par an dans un contexte en voie d'amélioration après la crise asiatique.
L'activité de Gemartrans a un caractère stratégique pour CMA-CGM car elle lui assure une position forte sur le marché en expansion du transport maritime vietnamien, dans une région qui est au coeur de ses ambitions armatoriales. La place des ports du Vietnam dans le développement du trafic de conteneurs dans la zone asiatique ne doit pas être séparée du fonctionnement des grands ports mondiaux d'éclatement dont les plus proches sont Hong-Kong et Singapour, dans le cadre du « rail maritime » Yokohama/Rotterdam.
CMA-CGM a créé deux postes d'expatriés sur place, le n° de l'entreprise, chargé des finances, et le patron de l'antenne commerciale. Elle est représentée au conseil d'administration de Gemartrans par deux administrateurs.
* en matière d'intérêt général :
L'accord maritime consacre et garantit un cadre ouvert, conforme aux besoins du transport maritime actuel.
Dès l'approbation de l'accord, la réunion de la commission mixte permettra d'aborder les points touchant au développement du trafic maritime et l'évolution vers un transport multimodal « de porte à porte ». Cette tendance conduit les armateurs à renforcer leurs implantations dans les pays qu'ils desservent pour une meilleure implication dans les activités terrestres, d'agence, de camionnage, de manutention, etc...
Cet accord permettra également d'améliorer la coopération portuaire. Des cadres portuaires vietnamiens ont bénéficié au cours de ces dernières années de formations dans le domaine du dragage, de la signalisation maritime, de la prévention et de la lutte contre les pollutions marines (INFOPOL) et la gestion et administration des ports (cours OMI-IPER). L'ingénierie portuaire française, et notamment le port de Bordeaux, a réalisé le balisage de la rivière de Ho Chi Minh-Ville et du chenal d'accès du port de Haiphong. Ces travaux indispensables ont amélioré les accès de ce port en le dotant de moyens modernes facilitant le trafic maritime.
* en matière financière :
L'accord octroie aux compagnies la possibilité de transférer leurs revenus conformément aux législations nationales ; Il bénéficiera donc à la balance des paiements française.
* en matière de simplification des formalités administratives :
L'ensemble des dispositions concernant la reconnaissance des documents d'identité des marins est de nature faciliter la descente à terre, le séjour ou le transit des marins et simplifie le cadre des relations maritimes franco-vietnamiennes.
* en matière de complexité de l'ordonnancement juridique :
L'article 13 modifie la compétence territoriale de la loi pénale française (art. 113-21 du code pénal) et touche aux compétences des Conseils de prud'homme (art. L. 420-1 du code de l'organisation judiciaire).
L'alinéa 1 de l'article 13 limite en effet la possibilité pour les autorités judiciaires françaises de connaître de procès civil opposant un capitaine et un membre de l'équipage d'un navire vietnamien lorsque celui-ci fait escale dans un port français pour un différend portant sur le contrat d'engagement le salaire.
L'article L. 420-1 du code de l'organisation judiciaire (partie législative) dispose que les règles concernant la compétence, l'organisation et le fonctionnement des conseils de prud'hommes sont fixées par le code du travail. Il est donc nécessaire, pour déroger à ce principe, que le législateur intervienne afin de légaliser le dispositif proposé par le présent accord. Toutefois cette disposition n'est pas applicable lorsque le ou les membres de l'équipage en cause sont des citoyens français.
Concernant la compétence territoriale de la loi pénale française (art. 113-2 du code pénal), l'article 13 alinéa 2 prévoit l'intervention des autorités administratives et judiciaires françaises à bord d'un navire vietnamien en escale dans un port français dans trois cas :
(a) si le fonctionnaire consulaire ou le capitaine du navire sollicite leur intervention ;
(b) si l'infraction ou ses suites revêtent un caractère tel qu'elles portent atteinte à la tranquillité et à l'ordre public sur le territoire ou dans le port, ou s'il est porté atteinte à la sûreté de l'Etat ;
(c) si l'infraction est commise par des personnes ou à l'encontre de personnes qui ne font pas partie de l'équipage.
Or, selon l'article 113-2 du code pénal, la loi pénale française est applicable aux infractions commises sur le territoire de la République. L'infraction est réputée commise sur le territoire de la République dès lors qu'un de ses faits constitutifs a eu lieu sur ce territoire.
L'intervention du législateur est donc nécessaire pour autoriser l'approbation de cet accord qui déroge aux règles de compétence territoriale de la loi pénale française.
Toutefois, les cas d'intervention retenus à l'article 13 alinéa 2 couvrent une large partie des faits pouvant survenir à bord d'un navire. En outre, l'alinéa 3 ne porte pas atteinte au droit des autorités locales compétentes pour tout ce qui concerne l'application de la législation et de la réglementation douanière, la santé publique et les autres mesures de contrôle concernant la sécurité des navires et des ports, la sauvegarde des vies humaines, la sûreté des marchandises, l'admission des étrangers, ainsi que le transport des déchets dangereux et la pollution marine, dans le respect des conventions internationales applicables en la matière aux deux Parties contractantes.
Il convient de noter que, pour l'instant, aucun navire vietnamien ne fait escale dans les ports français.
* 2 Voir le texte annexé au document Sénat n° 422 rectifié (2002-2003).
* 3 Texte transmis par le Gouvernement pour l'information des parlementaires.