Rapport n° 175 (2003-2004) de M. Daniel GOULET , fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 28 janvier 2004
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RAPPORT
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FAIT
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INTRODUCTION
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CONCLUSION
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EXAMEN EN COMMISSION
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PROJET DE LOI
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ANNEXE -
ÉTUDE D'IMPACT3
N° 175
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2003-2004
Annexe au procès-verbal de la séance du 28 janvier 2004
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant l'approbation de l' accord maritime entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République socialiste du Vietnam ,
Par M. Daniel GOULET,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : M. André Dulait, président ; MM. Robert Del Picchia, Jean-Marie Poirier, Guy Penne, Michel Pelchat, Mme Danielle Bidard-Reydet, M. André Boyer, vice-présidents ; MM. Simon Loueckhote, Daniel Goulet, André Rouvière, Jean-Pierre Masseret, secrétaires ; MM. Jean-Yves Autexier, Jean-Michel Baylet, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Daniel Bernardet, Pierre Biarnès, Jacques Blanc, Didier Borotra, Didier Boulaud, Jean-Guy Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Ernest Cartigny, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Paul Dubrule, Hubert Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Jean Faure, Philippe François, Jean François-Poncet, Philippe de Gaulle, Mme Jacqueline Gourault, MM. Christian de La Malène, René-Georges Laurin, Louis Le Pensec, Mme Hélène Luc, MM. Philippe Madrelle, Serge Mathieu, Pierre Mauroy, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Louis Moinard, Jacques Peyrat, Xavier Pintat, Jean-Pierre Plancade, Bernard Plasait, Jean Puech, Yves Rispat, Roger Romani, Henri Torre, Xavier de Villepin, Serge Vinçon.
Voir le numéro :
Sénat : 422 rect. (2003-2004)
Traités et conventions. |
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
L'accord maritime, signé le 23 mai 2000, entre la France et le Vietnam vise à apporter aux sociétés françaises, autrefois actives sur cette ligne, un signal politique et un cadre juridique de nature à les inciter à reprendre leur place dans un contexte très concurrentiel.
Cet accord a déjà été ratifié, le 31 août 2000, par les autorités vietnamiennes, ce qui montre leur souhait de voir l'armement français jouer un rôle plus actif dans leur desserte maritime.
I. LE VIETNAM ADAPTE PROGRESSIVEMENT SON ÉCONOMIE AUX RÈGLES DU MARCHÉ
A. UNE ÉVOLUTION VERS UNE ÉCONOMIE MOINS DIRIGISTE
Le parti communiste vietnamien (PCV), au pouvoir depuis la paix entre les parties nord et sud du pays, en 1975, a décidé en 1986 d'entreprendre une politique de réformes économiques prudentes et graduelles, la « doi moi ».
Cette ligne a été réaffirmée lors du IXe Congrès du PCV, en 2001, en réponse à l'évolution rapide de la société vietnamienne, dont la vitalité démographique (l'indice de fécondité y est de 2,2) et le caractère entreprenant s'accommode mal des contraintes inhérentes à l'économie socialisée. Cependant, les rigidités bureaucratiques s'opposent à une ouverture politique et économique trop marquée.
B. UN FORT POTENTIEL ÉCONOMIQUE
Grâce à la vigoureuse demande intérieure formulée par une population de près de 80 millions d'habitants, dont 32 % ont moins de 15 ans, la croissance économique se maintient à près de 7 % par an depuis 2000, soit le plus fort taux de l'ASEAN 1 ( * ) .
Ni la légère reprise de l'inflation (4 % en 2002, nulle voire négative les années précédentes), ni les conséquences économiques de la crise sanitaire du SRAS, au printemps 2003, notamment sur la fréquentation touristique qui est un des moteurs de la croissance, avec une augmentation du nombre de touristes étrangers de 12 % de 2001 à 2002, année où leur nombre s'est élevé à 23,4 millions, n'ont altéré cette croissance. Les secteurs de l'agriculture (riz, café) et de la pêche (poissons et crevettes d'élevage) participent pour 24 % au produit intérieur brut, le secteur industriel et du BTP représentant, pour leur part, 38 % du PIB, à égalité avec les services.
Cependant cette expansion repose, pour 50 % du PIB, sur les exportations de matières premières vers le Japon, les Etats-Unis et l'Union européenne. Cette dépendance extérieure est accrue par le caractère fluctuant du cours de ces matières premières.
Le développement des investissements étrangers est freiné par la persistance d'un interventionnisme étatique, notamment en matière de localisations des activités, de demande de réalisation, par ces investisseurs, d'infrastructures et de services sociaux de voisinage, et par une fiscalité imprévisible (taxation de 40 % des pièces destinées à la construction automobile en décembre 2002).
L'implantation de sociétés étrangères passe obligatoirement par la conclusion d'accords de partenariat avec les entreprises publiques dans les secteurs jugés stratégiques, comme les transports, les télécommunications ou le tourisme.
II. L'ACCORD MARITIME VISE À FACILITER LE RETOUR DE NOS SOCIÉTÉS DE TRANSPORT AU VIETNAM
Les principales sociétés françaises d'armement ont abandonné la desserte de ce pays après la non-application d'un précédent accord maritime intergouvernemental conclu le 7 septembre 1978. Le présent texte vise à définir de nouvelles bases juridiques, plus adaptées aux réalités d'aujourd'hui, pour relancer l'activité des sociétés françaises.
A. L'ÉCHEC DE L'ACCORD MARITIME DE 1978
Après l'établissement du nouveau régime politique vietnamien, un accord a été conclu, en décembre 1977, entre l'armement d'Etat vietnamien Vosco, et les armements français Compagnie Générale Maritime et Chargeurs Réunis, regroupés dans le Groupement d'Intérêt Economique (GIE) Vietnatraf. Cet accord prévoyait une répartition égale des trafics maritimes franco-vietnamiens entre les armements nationaux. Il était associé à un accord intergouvernemental négocié parallèlement, et signé le 7 septembre 1978.
Un système de partage de trafic géré par les armements nationaux sous la supervision conjointe des autorités des deux pays était donc prévu, mais ce système n'a jamais fonctionné.
La principale raison en était la réticence des chargeurs devant cette contrainte sur le choix du transporteurs. La centrale du ministère du commerce extérieur vietnamien, en particulier, qui organisait les transports maritimes, Vietfrach, privilégiait, malgré nos accords, les pavillons du Comecon ou les registres économiques, à défaut du pavillon vietnamien.
L'échec du système de 78 a conduit à un dépérissement de nos relations maritimes jusqu'en 1988 ; durant cette période la présence des armements français en Orient déclina, avec la vente des Chargeurs Réunis et le retrait de la CGM des lignes reliant l'Orient à l'Europe.
Une vingtaine d'années plus tard, le gouvernement vietnamien a accepté de négocier un nouvel accord, dont les clauses sont plus adaptées aux réalités économiques d'aujourd'hui.
B. LES PERSPECTIVES OUVERTES PAR LE PRÉSENT ACCORD MARITIME
A l'heure actuelle, le transport maritime entre l'Europe et le Vietnam est dominé par une dizaine d'opérateurs vietnamiens gérés par l'Etat lui-même, par les autorités locales ou des sociétés mixtes. Cependant, l'ouverture, très progressive, du Vietnam à l'économie de marché, permet à près de vingt cinq compagnies maritimes étrangères d'opérer dans ce pays.
L'essentiel du trafic est assuré par la compagnie d'Etat VINALINES, qui possède à elle seule six compagnies maritimes, six compagnies mixtes vietnamo-étrangères, dont la société GEMARTRANS, à participation française, et gère cinq ports (Quang Ninh, Haïphong, Danang, Saïgon, Can Tho). Cette société a enregistré une croissance annuelle soutenue, de 12 % en moyenne, entre 1996 et 2000.
Les navires qu'elle utilise couvrent l'ensemble de la gamme du transport, allant du caboteur au vraquier, en passant par le cargo, le porte-conteneur et par le pétrolier.
Ce groupe assure à lui seul 90 % du transport intérieur fluvial et maritime du Vietnam, ainsi que la totalité du transport intérieur de conteneurs, et 15 % du transport maritime de marchandises à l'étranger. Sa flotte dispose, au total, d'une capacité de 850 000 Equivalents Vingt Pieds (E.V.P.), qui est l'unité de mesure utilisée pour évaluer les volumes transportés par voie maritime. La vitalité de ce mode de transport a conduit les dirigeants vietnamiens à vouloir rénover leur flotte, dont ils souhaitent porter la capacité à 1,5 million d'E.V.P d'ici 2005. Ce quasi-doublement des capacités vise à assurer, à cette date, 30 % du transport maritime à destination et en provenance de l'étranger, et 30 % du transport intérieur par cargo.
Dans cette perspective, la société d'Etat Vinalines souhaite développer des sociétés mixtes avec des entreprises européennes et asiatiques. Actuellement, cette société ne dessert que des ports d'Asie du sud-est, notamment Hong-Kong et Singapour, d'où les marchandises sont expédiées vers leur destination finale. Le trafic maritime entre l'Asie et l'Europe s'effectue, en effet, par une « route » principale qui relie les ports de Yokohama et Rotterdam. Cette voie est ponctuée de ports « d'éclatement » des marchandises et, dans ce contexte, il n'existe aujourd'hui aucune ligne de transport maritime directe entre le Vietnam et la France.
L'ambassade du Vietnam en France a précisé à votre rapporteur que « les transports commerciaux entre les deux pays ne sont pas tous assurés par les navires vietnamiens ou français, mais également par d'autres sociétés de navigation étrangères.
Il n'y a pas encore de liaison directe (liners) du Vietnam vers la France et inversement. Les produits d'exportations ou d'importations sont transportés d'abord à des ports de transit intermédiaires à Singapour, Hong Kong pour être chargés sur les navires de grandes sociétés de navigation comme KLM, MASK LINES, HANJIN, CGM, AVERGREEN, COSCO à destination de l'Europe ou autres. »
Cette potentialité pourrait être concrétisée par la Compagnie générale maritime (CGM), qui se situe au 10è rang mondial en matière d'armement, et qui possède les 49 % de parts françaises au sein de Gemartrans, les 51 % restant appartenant à l'Etat vietnamien. Cette société assure actuellement environ un quart du trafic maritime vietnamien, pour un total de 160 000 E.V.P., et progresse de 15 % à 20 % par an, surtout depuis l'amélioration de l'économie asiatique. En 2003, les échanges maritimes entre les deux pays ont été constitués, vers le Vietnam, pour l'essentiel, de produits pharmaceutiques, d'accessoires informatiques, et de voitures, pour un total de 350 millions de dollars et, vers la France, de café, thé, caoutchouc, chaussures et textiles, pour un total de 440 millions de dollars.
Volumes d'échanges commerciaux entre les deux
pays
(
données des 11 mois de 2003
)
Importations, en 1.000 USD
Valeur totale |
Produits pharmaceutiques |
Accessoires informatiques |
Pièces de rechange |
Matériaux textiles, tanniers |
Voiture |
Engrais |
Fer, acier |
Matières plastiques |
345.653 |
59.784 |
2.621 |
150.703 |
5.237 |
5.284 |
10 |
1.851 |
907 |
Exportations, en 1.000 USD
Valeur totale |
Produits pharmaceutiques |
Accessoires informatiques |
Pièces de rechange |
Matériaux textiles, tanniers |
Voiture |
Engrais |
Fer, acier |
Matières plastiques |
441.586 |
21.296 |
5.585 |
137 |
171.091 |
17.752 |
61.995 |
2.763 |
45.671 |
Sources : Vietnam Economic News, Janvier 2004
La Gemartrans dispose, au Vietnam, de deux expatriés, chargé des finances et de la prospection commerciale.
Le présent accord établit une commission mixte, composée de fonctionnaires désignés par chacun des Etats, qui s'attachera, dès sa mise en place, à conforter la place des armateurs français dans les opérations de livraison, stockage, desserte et manutention qui constituent autant de plates-formes pour s'insérer dans l'économie locale.
L'accord permettra également d'améliorer la coopération portuaire, qui a déjà bénéficié à des cadres vietnamiens venus suivre en France des formations portant sur la signalisation maritime, la prévention et la lutte contre les pollutions marines, et la gestion des ports. Au Vietnam, le port de Bordeaux a réalisé le balisage de la rivière de Saïgon, ainsi que celui du chenal d'accès au port d'Haïphong.
L'accord permet aux compagnies de transférer leurs revenus conformément aux législations nationales, ce qui bénéficiera à la France. Il facilite la reconnaissance des documents d'identité des marins, et affirme la possibilité, pour nos compagnies maritimes, d'ouvrir des représentations au Vietnam.
Cependant, la France a dû accepter que l'accord déroge, dans son article 13, aux règles de compétence territoriale de la loi civile et pénale française. En effet, cet article limite les possibilités normalement ouvertes aux autorités judiciaires françaises de connaître d'éventuels litiges civils opposant le capitaine et un membre de son équipage lorsqu'un navire vietnamien fait escale dans un port français. La règle commune veut que, lors d'une telle escale, le navire soit soumis aux dispositions du droit du travail français, notamment en matière de contrat d'engagement, ou de salaire.
Le Vietnam s'y est opposé ; le négociateur français a alors estimé que cette exception pouvait être acceptée, au vu des avancées que l'accord permet à nos armateurs dans leur volonté de s'implanter plus largement sur le marché vietnamien.
Il faut relever que le Gouvernement précise, dans l'étude d'impact, « qu'aucun navire vietnamien ne fait, pour l'instant, escale dans les ports français ».
De surcroît, cette dérogation n'est pas spécifique au présent accord, mais figure dans de nombreux accords maritimes conclu par la France . Elle a en l'occurrence été précisée dans le premier alinéa de l'article 13.
Cet alinéa dispose que les autorités judiciaires vietnamiennes ne pourront connaître de procès civil à la suite d'un différend portant sur le salaire ou le contrat d'engagement, entre le capitaine et un membre d'équipage d'un navire battant pavillon français ou contrôlé par des intérêts français.
Toutefois, si les autorités diplomatiques ou consulaire françaises au Vietnam donnent leur accord, les juridictions vietnamiennes peuvent être saisies. L'accord des autorités diplomatiques et consulaires françaises est inutile lorsque le membre d'équipage est vietnamien. Les juridictions vietnamiennes sont de droit compétentes.
Le deuxième alinéa prend acte de l'inexistence de convention internationale traitant du statut du navire en escale. La convention sur le droit de la mer ne l'évoque pas. On peut en déduire que lors de l'escale, le navire est sur le territoire d'un Etat et donc soumis à sa juridiction. Les cas de poursuite et de sanctions concernent la pollution et non les affaires internes au navire.
La convention du 10 mai 1952 sur la saisie conservatoire des navires, traitant le cas des créances maritimes peut dans certains concerner les navires en escale, mais il s'agit de cas de litiges commerciaux ou civils.
Les accords bilatéraux peuvent organiser le statut des navires en escale.
En conclusion, le navire est en principe soumis à la législation de l'Etat du port . Toutefois, les compétences pénales de l'état du port vis-à-vis d'actes survenant à bord d'un navire de pavillon tiers peuvent répondre à un régime spécifique. En France, la référence juridique reste ancienne. Le Conseil d'Etat dans son avis du 20 novembre 1806 (navires Sally et Newton) considère que les infractions commises à bord d'un navire étranger, alors même que le navire se trouverait dans les eux territoriales ou intérieures françaises, relèvent de la loi et des juridictions du pavillon . Toutefois, les autorités françaises sont habilités à intervenir, si l'infraction commise à bord du navire étranger :
- trouble la paix publique
- ou si la victime est étrangère au bord
- ou si l'aide des autorités locales est réclamée par le bord.
L'alinéa 2 de l'article 13 se conforme à cette interprétation.
Il dispose que les possibilités d'intervention des autorités vietnamiennes sur un navire battant pavillon français ou contrôlé par des intérêts français, dans le cas d'infractions commises à bord, sont limitées aux cas suivant :
- demande d'intervention des autorités diplomatiques françaises au Vietnam ou du capitaine du navire
- trouble à l'ordre public (si l'infraction ou ses conséquences sont de nature à compromettre la tranquillité et l'ordre public à terre ou dans le port, ou à porter atteinte à la sécurité publique)
- l'infraction est commise par ou contre des personnes étrangères à l'équipage.
Les dispositions de l'article ne portent pas atteinte aux droits des autorités locales compétentes pour tout ce qui concerne l'application de la législation et de la réglementation douanière, la santé publique et les autres mesures de contrôle concernant la sécurité des navires et des ports, la sauvegarde des vies humaines, la sûreté des marchandises, l'admission des étrangers, ainsi que le transport des déchets dangereux et la pollution marine, dans le respect des conventions internationales applicables en la matière aux deux Parties contractantes.
CONCLUSION
L'expansion économique de la zone asiatique et, en particulier, du Vietnam, nécessite le retour des sociétés d'armement françaises dans la liaison maritime entre l'Europe et l'Extrême-Orient, qui est appelée à se développer fortement.
Le présent accord définit un cadre juridique adapté, tant à l'organisation économique encore centralisée du Vietnam qu'à la volonté des sociétés françaises de coopérer, par le biais de sociétés mixtes, avec les autorités vietnamiennes.
C'est pourquoi il est opportun d'adopter cet accord, qui constitue une base à partir de laquelle nos sociétés pourront s'insérer dans une desserte marquée par une vive concurrence.
EXAMEN EN COMMISSION
La commission a examiné le présent rapport lors de sa séance du 28 janvier 2004.
A la suite de l'exposé du rapporteur, une discussion s'est instaurée au sein de la commission.
M. Xavier de Villepin a rappelé que c'est au Vietnam que la part de marché de l'économie française était la plus importante, à hauteur de 4 %. Notant que notre présence économique s'inscrit cependant dans un climat fortement concurrentiel, il s'est interrogé sur la nationalité des principales compagnies étrangères maritimes opérant au Vietnam.
M. Daniel Goulet, rapporteur, a précisé que les compagnies australiennes, japonaises et américaines étaient en effet très présentes au Vietnam et que le présent accord visait à appuyer les efforts accomplis par les opérateurs français pour s'insérer dans ce marché. Il a estimé que ce texte faciliterait la reprise des liaisons maritimes et, par-delà, des relations économiques entre la France et le Vietnam.
Il a par ailleurs confirmé, à l'attention de M. Philippe François, qu'Air France desservait Hanoï et Ho Chi Minh Ville.
La commission a alors adopté le projet de loi.
PROJET DE LOI
(Texte proposé par le Gouvernement)
Article unique
Est autorisée l'approbation de l'accord maritime entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République socialiste du Vietnam, signé à Paris le 23 mai 2000, et dont le texte est annexé à la présente loi. 2 ( * )
ANNEXE -
ÉTUDE
D'IMPACT3
(
*
)
I. - Etat du droit et situation de fait existant et leurs insuffisances
L'accord maritime franco-vietnamien du 23 mai 2000 est l'aboutissement d'une négociation délicate qui devrait donner une nouvelle impulsion à la relation maritime bilatérale affaiblie par la non application de l'accord maritime franco-vietnamien de 1978 et le retrait à partir de 1988 des opérateurs français (Chargeurs Réunis et CGM) des lignes Europe/Orient.
La normalisation des relations maritimes entre les deux Parties devrait ainsi assurer un cadre juridique stable et la création d'une commission mixte maritime permettra d'étudier les questions relatives à l'amélioration et au développement des transports maritimes entre les deux pays.
Cependant, toutes les attentes de la Partie française n'ont pas été satisfaites. Ni le bénéfice du traitement national dans les ports vietnamiens, ni la possibilité pour les armements français de contrôler des filiales et agences maritimes sur le sol vietnamien, n'ont pu être obtenus des négociateurs vietnamiens, alors même que la France accorde un traitement égal dans es ports aux navires de toutes nationalités, et ne met pas d'obstacles à l'ouverture de filiales et agences maritimes.
Une fois l'accord entré en vigueur, la France entend utiliser cet instrument pour convaincre à terme le Vietnam de l'intérêt d'intégrer le transport maritime dans une chaîne logistique multimodale, notamment par la possibilité pour les armateurs de contrôler le volet terrestre de leurs activités à travers des filiales locales.
II - Bénéfices escomptés
* en matière d'emploi :
L'affirmation du principe de la liberté du commerce maritime ainsi que la possibilité pour nos compagnies maritimes d'ouvrir des représentations au Vietnam offrent d'intéressantes perspectives. Même si le traitement national dans les ports et la possibilité pour nos armements de développer le champ d'action des agences maritimes restent encore à discuter, cet accord représente une première étape très encourageante vers une ouverture plus large du Vietnam permettant le développement du trafic maritime, dont les entreprises maritimes françaises sauront tirer avantage du fait de leur présence dans le pays.
L'armement CMA-CGM, 10 ème armement de ligne mondial, est présent au Vietnam à travers Gemartrans, une entreprise commune fondée en 1987, dont il contrôle 49 % des parts. Les 51 % restants appartiennent à l'Etat vietnamien. La CMA-CGM a accepté cette répartition dans le cadre d'un accord garantissant l'équilibre des pouvoirs dans l'entreprise. En matière de conteneurs, Gemartrans assure environ 25 % du trafic de ligne vietnamien, pour un total de 160.000 Equivalents Vint Pieds (EVP). Ce trafic se développe de 15 à 20 % par an dans un contexte en voie d'amélioration après la crise asiatique.
L'activité de Gemartrans a un caractère stratégique pour CMA-CGM car elle lui assure une position forte sur le marché en expansion du transport maritime vietnamien, dans une région qui est au coeur de ses ambitions armatoriales. La place des ports du Vietnam dans le développement du trafic de conteneurs dans la zone asiatique ne doit pas être séparée du fonctionnement des grands ports mondiaux d'éclatement dont les plus proches sont Hong-Kong et Singapour, dans le cadre du « rail maritime » Yokohama/Rotterdam.
CMA-CGM a créé deux postes d'expatriés sur place, le n° de l'entreprise, chargé des finances, et le patron de l'antenne commerciale. Elle est représentée au conseil d'administration de Gemartrans par deux administrateurs.
* en matière d'intérêt général :
L'accord maritime consacre et garantit un cadre ouvert, conforme aux besoins du transport maritime actuel.
Dès l'approbation de l'accord, la réunion de la commission mixte permettra d'aborder les points touchant au développement du trafic maritime et l'évolution vers un transport multimodal « de porte à porte ». Cette tendance conduit les armateurs à renforcer leurs implantations dans les pays qu'ils desservent pour une meilleure implication dans les activités terrestres, d'agence, de camionnage, de manutention, etc...
Cet accord permettra également d'améliorer la coopération portuaire. Des cadres portuaires vietnamiens ont bénéficié au cours de ces dernières années de formations dans le domaine du dragage, de la signalisation maritime, de la prévention et de la lutte contre les pollutions marines (INFOPOL) et la gestion et administration des ports (cours OMI-IPER). L'ingénierie portuaire française, et notamment le port de Bordeaux, a réalisé le balisage de la rivière de Ho Chi Minh-Ville et du chenal d'accès du port de Haiphong. Ces travaux indispensables ont amélioré les accès de ce port en le dotant de moyens modernes facilitant le trafic maritime.
* en matière financière :
L'accord octroie aux compagnies la possibilité de transférer leurs revenus conformément aux législations nationales ; Il bénéficiera donc à la balance des paiements française.
* en matière de simplification des formalités administratives :
L'ensemble des dispositions concernant la reconnaissance des documents d'identité des marins est de nature faciliter la descente à terre, le séjour ou le transit des marins et simplifie le cadre des relations maritimes franco-vietnamiennes.
* en matière de complexité de l'ordonnancement juridique :
L'article 13 modifie la compétence territoriale de la loi pénale française (art. 113-21 du code pénal) et touche aux compétences des Conseils de prud'homme (art. L. 420-1 du code de l'organisation judiciaire).
L'alinéa 1 de l'article 13 limite en effet la possibilité pour les autorités judiciaires françaises de connaître de procès civil opposant un capitaine et un membre de l'équipage d'un navire vietnamien lorsque celui-ci fait escale dans un port français pour un différend portant sur le contrat d'engagement le salaire.
L'article L. 420-1 du code de l'organisation judiciaire (partie législative) dispose que les règles concernant la compétence, l'organisation et le fonctionnement des conseils de prud'hommes sont fixées par le code du travail. Il est donc nécessaire, pour déroger à ce principe, que le législateur intervienne afin de légaliser le dispositif proposé par le présent accord. Toutefois cette disposition n'est pas applicable lorsque le ou les membres de l'équipage en cause sont des citoyens français.
Concernant la compétence territoriale de la loi pénale française (art. 113-2 du code pénal), l'article 13 alinéa 2 prévoit l'intervention des autorités administratives et judiciaires françaises à bord d'un navire vietnamien en escale dans un port français dans trois cas :
(a) si le fonctionnaire consulaire ou le capitaine du navire sollicite leur intervention ;
(b) si l'infraction ou ses suites revêtent un caractère tel qu'elles portent atteinte à la tranquillité et à l'ordre public sur le territoire ou dans le port, ou s'il est porté atteinte à la sûreté de l'Etat ;
(c) si l'infraction est commise par des personnes ou à l'encontre de personnes qui ne font pas partie de l'équipage.
Or, selon l'article 113-2 du code pénal, la loi pénale française est applicable aux infractions commises sur le territoire de la République. L'infraction est réputée commise sur le territoire de la République dès lors qu'un de ses faits constitutifs a eu lieu sur ce territoire.
L'intervention du législateur est donc nécessaire pour autoriser l'approbation de cet accord qui déroge aux règles de compétence territoriale de la loi pénale française.
Toutefois, les cas d'intervention retenus à l'article 13 alinéa 2 couvrent une large partie des faits pouvant survenir à bord d'un navire. En outre, l'alinéa 3 ne porte pas atteinte au droit des autorités locales compétentes pour tout ce qui concerne l'application de la législation et de la réglementation douanière, la santé publique et les autres mesures de contrôle concernant la sécurité des navires et des ports, la sauvegarde des vies humaines, la sûreté des marchandises, l'admission des étrangers, ainsi que le transport des déchets dangereux et la pollution marine, dans le respect des conventions internationales applicables en la matière aux deux Parties contractantes.
Il convient de noter que, pour l'instant, aucun navire vietnamien ne fait escale dans les ports français.
* 1 Association des Nations du Sud Est asiatique : Brunei, Cambodge, Indonésie, Malaisie, Philippines, Singapour, Vietnam.
* 2 Voir le texte annexé au document Sénat n° 422 rectifié (2002-2003).
* 3 Texte transmis par le Gouvernement pour l'information des parlementaires.