C. ENTREPRENDRE UNE MODERNISATION DU RÉSEAU POSTAL POUR GARANTIR L'ACCESSIBILITÉ AU SERVICE
Votre rapporteur connaît la valeur économique, sociale, voire même affective, qui s'attache, en France, au réseau postal. Le rapport de 1997 : « Sauver La Poste » a largement insisté sur la puissance de ce lien, surtout dans les endroits du territoire ayant connu des pertes de population et dans lesquels La Poste est bien souvent le dernier des services publics présents dans la commune, après la fermeture de tous les autres. Or, comme le souligne le dernier rapport de votre commission sur La Poste, « le réseau est un noeud de paradoxes : exceptionnellement dense, il est pourtant désaxé par rapport aux principaux flux humains et commerciaux et déserte les nouveaux lieux de vie ; stable depuis 50 ans, il est perçu, dans l'esprit de beaucoup d'élus, comme une « peau de chagrin » qu'il n'est pas ».
Ainsi, malgré sa très grande capillarité, le réseau postal ne répond plus à tous les types de modes de vie actuels. Modelé il y a un siècle, le réseau pèche aujourd'hui par son absence des nouveaux lieux de vie et son insuffisante présence dans les villes moyennes à grandes, alors même que plus d'une antenne postale sur trois a moins de quatre heures d'activité par jour.
La structure du réseau a un coût social -notamment en zones urbaines sensibles, où une plus forte présence postale serait utile-, un coût économique -la paupérisation guettant le réseau- et enfin un coût financier : en effet, le coût net de l'animation territoriale peut être estimé aujourd'hui à environ 350 millions d'euros 10 ( * ) .
C'est pourquoi, votre commission souhaite que le projet de loi offre l'occasion de débattre sur la question de l'accessibilité au réseau postal. La modernisation du réseau devient urgente pour l'entreprise de service public qu'est La Poste à l'heure où la totalité de ses activités sont de plus en plus soumises à la concurrence... mais aussi pour les clients de l'entreprise, qui sont tous en droit d'accéder à un service public de qualité et adapté à leurs besoins. L'attention doit se focaliser sur les moyens de garantir le meilleur service postal au plus grand nombre plutôt que sur les moyens de pérenniser une présence « immobilière » de La Poste qui n'est pas toujours en mesure d'offrir tous les services postaux.
Dans cette perspective, votre commission considère qu'il conviendrait de construire des normes nationales d'accessibilité au service postal, dont la déclinaison locale pourrait être précisée par les Commissions départementales de présence postale territoriale , instituées par le contrat de plan 1998-2002, et qui se traduirait à la fois par une adaptation en tant que de besoin des points de contact et surtout par un renforcement de la présence postale là où elle fait manifestement défaut. Un soutien particulier, relevant de la responsabilité de l'Etat et s'appuyant sur le fonds de péréquation territoriale prévu au contrat de plan entre l'Etat et La Poste, doit bien entendu être mis en oeuvre pour les zones les plus fragiles afin de faire jouer la solidarité territoriale, et toute liberté laissée aux collectivités locales qui souhaiteraient aller au-delà des critères d'accessibilité définis nationalement.
L'opportunité qu'offre aujourd'hui ce projet de loi est à saisir : le texte soumis au Sénat pourrait être encore utilement complété par une clarification du débat de la question de l'accessibilité au service postal et sur les services publics de proximité, prolongeant la réflexion ouverte par le Sénat à l'occasion de la question orale avec débat posée par le Président de votre commission le 20 mai 2003.
Le rapporteur ne jugerait pas inutiles des propositions du Gouvernement en ce sens afin de favoriser l'engagement de cette indispensable modernisation. En tout état de cause, il envisage de prendre lui-même une telle initiative en concertation avec le Président de votre Commission des Affaires économiques.
* 10 Pour les détails du calcul conduisant à cette estimation, se rapporter au rapport 2002-2003 n°344 de la Commission des affaires économiques du Sénat.