TITRE III
DISPOSITIONS RELATIVES À L'AIDE PUBLIQUE
AUX PARTIS
POLITIQUES
Article 32
(art. 9 de la loi n° 88-227 du 11 mars
1988)
Instauration d'un seuil pour le versement de la première
fraction
de l'aide publique aux partis
politiques
Cet
article tend à modifier le premier alinéa de l'article 9 de
la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la
transparence financière de la vie politique afin de limiter le versement
de l'aide publique aux partis et groupements politiques qui auraient
présenté des candidats ayant obtenu au moins 1 % des
suffrages exprimés dans cinquante circonscriptions lors des
élections législatives les plus récentes. Ces dispositions
seraient adaptées pour l'outre-mer.
1. Le droit en vigueur
Les règles de financement des partis politiques sont fixées par
les articles 7 à 11-8 de la loi n°88-227 du
11 mars 1988 relative à la transparence financière de
la vie politique
162(
*
)
.
a) L'aide publique aux partis et groupements politiques
Le montant des crédits inscrits dans le projet de loi de finances de
l'année pour être affecté au financement des partis et
groupements politiques peut faire l'objet de propositions conjointes des
bureaux de l'Assemblée nationale et du Sénat au
Gouvernement
163(
*
)
. Il
s'élève à
80.264.408 euros en 2002
et se
divise en deux fractions égales :
-
une première fraction destinée au financement des
partis et groupements en fonction de leurs résultats aux
élections à l'Assemblée nationale ;
-
une seconde fraction spécifiquement destinée au
financement des partis et groupements représentés au
Parlement.
La première fraction de l'aide publique directe est attribuée aux
partis et groupements politiques qui ont
présenté des
candidats dans cinquante circonscriptions lors du plus récent
renouvellement de l'Assemblée nationale.
Cette condition n'est pas exigée des formations politiques n'ayant
présenté de candidats aux élections législatives
que dans un ou plusieurs départements d'outre-mer, ou à
Saint-Pierre-et-Miquelon, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en
Polynésie française ou dans les îles Wallis-et-Futuna.
La répartition de la première fraction de l'aide publique est
effectuée proportionnellement au nombre des suffrages obtenus
par
chacun des partis concernés.
Les candidats aux élections législatives indiquent dans leur
déclaration de candidature, le parti ou le groupement politique auquel
ils se rattachent. Aucune disposition particulière ne détermine
la forme de cette déclaration de rattachement
164(
*
)
, qui est facultative. Le parti ou
groupement de rattachement doit être unique
165(
*
)
.
La loi ne prévoit aucune procédure permettant au candidat de
revenir sur sa déclaration initiale
166(
*
)
.
Les voix d'un candidat n'ayant pas indiqué de parti ou de groupement de
rattachement et les suffrages obtenus par les candidats déclarés
inéligibles au titre de l'article L.O. 128 du code
électoral
167(
*
)
ne sont
pas considérés
168(
*
)
pour le calcul de la
répartition de l'aide publique.
Depuis la loi du 6 juin 2000 tendant à favoriser un
égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux
et aux fonctions électives, les partis politiques doivent tenir compte
du respect de la parité : si l'écart entre le nombre de
candidats de chaque sexe ayant déclaré s'y rattacher a
dépassé 2 % du nombre total de candidats lors des
dernières élections législatives,
le montant de la
première fraction de l'aide publique directe est diminué d'un
pourcentage égal à la moitié de cet écart
rapporté au nombre total de
candidats.
Cette diminution n'est pas applicable aux partis et groupements politiques
ayant présenté des candidats exclusivement outre-mer lorsque
l'écart entre le nombre de candidats de chaque sexe n'est pas
supérieur à un.
La seconde fraction de l'aide publique directe
est attribuée aux
partis et groupements politiques bénéficiaires de la
première fraction proportionnellement au nombre des membres du Parlement
qui ont déclaré au bureau de leur assemblée au cours du
mois de novembre y être inscrits ou s'y rattacher. Au plus tard le
31 décembre de l'année, le bureau de l'Assemblée
nationale et le bureau du Sénat communiquent au Premier ministre la
répartition des parlementaires entre les partis et groupements
politiques.
b) La transparence financière des partis politiques
Les partis et groupements politiques ne sont pas soumis aux règles du
contrôle des dépenses engagées, ni au contrôle de la
Cour des comptes ou aux règles concernant le financement des
associations subventionnées.
En revanche, ils doivent
tenir une comptabilité,
qui doit
retracer tant les comptes du parti ou groupement politique que ceux des
organismes, sociétés ou entreprises qu'ils contrôlent.
Ils doivent aussi
arrêter leurs comptes chaque année au
31 décembre
,
les faire certifier par deux commissaires
aux comptes et les
déposer avant le 30 juin de
l'année suivante à la Commission nationale des comptes de
campagne et des financements politiques, qui assure leur publication
« sommaire » au Journal officiel.
En cas de manquement aux obligations précitées, le parti ou
groupement est sanctionné pour l'année suivante (perte du
bénéfice de l'aide publique et du bénéfice du
statut de parti politique).
c) Les expériences européennes
169(
*
)
Les partis et groupements politiques ne bénéficient d'aucune aide
publique au Royaume-Uni.
En Italie, le contribuable peut attribuer 0,4 % de son impôt sur le
revenu à des partis politiques. Un montant global étant inscrit
à l'avance à ce titre au budget de l'Etat, ce système peut
difficilement être qualifié de
«
volontaire
».
Ailleurs, deux systèmes de financement sont utilisés, à
savoir l'attribution d'un montant forfaitaire et le versement d'une somme
proportionnelle au nombre de voix obtenues lors des élections. Les deux
sont souvent combinés (Autriche ; Belgique ; Pays-Bas ;
République tchèque).
En Allemagne, chaque parti reçoit une subvention de l'Etat égale
à la moitié des cotisations ou des dons privés qu'il a
encaissés, afin de compléter l'aide liée au
résultats électoraux. L'aide publique est plafonnée.
Conformément au traité de Nice, la Commission européenne a
émis une proposition de règlement afin de définir le
statut et le financement des partis politiques européens
170(
*
)
.
d) Le détournement « légal » de la
première fraction de l'aide publique directe
Selon l'article 4 de la Constitution, « l
es partis et
groupements politiques concourent à l'expression du suffrage. Ils se
forment et exercent leur activité librement
. »
Jouissant de la personnalité morale, ils ont le droit d'ester en justice
et d'acquérir à titre onéreux ou gratuit. Ils peuvent
effectuer tous les actes conformes à leur mission et notamment
créer et administrer des journaux et des instituts de formation
conformément aux dispositions des lois en vigueur
171(
*
)
.
Or, le dispositif actuel d'attribution de la première fraction de l'aide
publique, qui
confère à chaque voix obtenue la valeur moyenne
de 1,66 euro
, a encouragé
l'inflation des candidatures
.
8.444 candidatures ont ainsi été enregistrées au
premier tour des élections législatives de 2002
contre 2.888
en 1988. 24 formations politiques n'ont présenté qu'un
candidat et onze ont obtenu moins de 1.000 voix.
69 peuvent
prétendre à la première fraction de l'aide publique.
Dans ses rapports d'activité, la Commission nationale des comptes de
campagne et des financements politiques a constaté une dérive
de la législation en vigueur, proposant de limiter le
bénéfice de la première fraction de l'aide publique
directe aux formations ayant présenté des candidats ayant obtenu
au moins 2 % des suffrages exprimés dans cinquante circonscriptions.
En 1990, le Conseil constitutionnel, en tant que juge de la
constitutionnalité de la loi, avait censuré l'instauration d'un
seuil de 5 % des suffrages exprimés
172(
*
)
. Cependant, par la suite
,
rappelant que les dispositions relatives au financement de la vie politique ne
devaient pas permettre des abus dans les pratiques d'imputation des
dépenses, en tant que juge de l'élection,
il a
considéré que la fixation d'un seuil
était
nécessaire
.
«
Aussi la décision n 89-271 DC du
11 janvier 1990 du Conseil constitutionnel appelle-t-elle le
législateur à fixer, à un niveau certes inférieur
à 5 % des suffrages exprimés, le seuil en-dessous duquel il
ne serait plus tenu compte des suffrages exprimés dans une
circonscription donnée, pour la répartition de la première
fraction de l'aide publique aux partis
... »
173(
*
)
.
Il convient enfin de signaler que la commission des Finances de
l'Assemblée nationale avait proposé de limiter le versement de la
première fraction de l'aide publique aux partis et groupements
politiques ayant obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés au
niveau national (ou ayant un candidat élu selon des dispositions
spécifiques outre-mer), lors de l'examen du projet de loi de finances
rectificative pour 2002 puis du projet de loi de finances pour 2003. Le
Gouvernement s'était alors engagé à résoudre le
problème dans le cadre d'une loi électorale.
2. Le texte soumis au Sénat
Le présent article tend, en premier lieu, à modifier les
dispositions de l'article 9 de la loi du 11 mars 1988, relatives
à l'attribution de la première fraction de l'aide publique.
Les candidats présentés par les partis et groupements
politiques
devraient désormais avoir atteint 1 % des
suffrages exprimés dans au moins cinquante circonscriptions, lors du
plus récent renouvellement de l'Assemblée nationale.
Selon le
ministère de l'intérieur, de la sécurité
intérieure et des libertés locales, ce nouveau mode d'attribution
permettrait de réduire le nombre de partis ou groupements
éligibles en métropole de 32 à 16.
Outre-mer, les formations politiques devraient avoir présenté
des candidat dans une ou plusieurs circonscriptions et ceux-ci devraient avoir
réuni 1 % des suffrages exprimés sur l'ensemble de ces
circonscriptions.
Le nombre de partis et groupements
bénéficiaires pourrait passer de 37 à 31 outre-mer.
L'Assemblée nationale, sur proposition de sa commission des Lois, a en
outre adopté un amendement de coordination.
Le dispositif retenu, sans méconnaître l'exigence du pluralisme
des courants d'idées et d'opinions, devrait permettre de limiter le
bénéfice de l'aide publique aux partis et groupements concourant
effectivement à l'expression du suffrage.
Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 32
sans
modification
.
Article 32 bis (nouveau)
(art. 9-1 de la loi n° 88-227 du
11 mars 1988)
Coordination
Cet
article additionnel, issu d'un amendement de la commission des Lois de
l'Assemblée nationale retenu dans le texte sur lequel le Gouvernement a
engagé sa responsabilité devant les députés, tend
à modifier l'article 9-1 de la loi n° 88-227 du
11 mars 1988 par coordination avec la modification de l'article 9 de
la même loi opérée par l'article 32.
Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 32
bis
sans modification
.