B. UNE ÉROSION DE L'EFFORT D'ÉQUIPEMENT QUI PROVOQUE UN AFFAIBLISSEMENT CAPACITAIRE
De 1997
à 2002, le budget de la défense a légèrement
régressé, alors que la simple actualisation en fonction de
l'indice des prix aurait représenté une hausse de 6%. C'est donc,
en monnaie constante
, un
recul significatif
qui a
été enregistré au cours de ces six dernières
années,
de l'ordre de 6% pour l'ensemble du budget de la
défense
, hors pensions, et
d'environ 14% pour les dépenses
d'équipement
.
Cette érosion n'a pas de justification stratégique
. Durant
ces six années, nos armées ont participé à deux
opérations de guerre et ont été engagées sur les
théâtres extérieurs à un niveau
inégalé depuis plusieurs décennies. Crises
régionales, terrorisme international et prolifération des armes
de destruction massive et de leurs vecteurs ont démontré les
limites des « dividendes de la paix ».
Elle n'a
pas davantage de justification économique et
financière
. Durant la même période, notre pays a
bénéficié d'une croissance soutenue qui permettait
pleinement le respect des engagements pris en 1996.
Elle résulte donc d'un choix purement politique que votre commission des
affaires étrangères, de la défense et des forces
armées et le Sénat ont régulièrement
désapprouvé.
Votre rapporteur souhaite ici illustrer cette évolution par quelques
données succinctes, car ses conséquences vont durablement peser
sur le niveau de nos capacités de défense et conditionnent
très largement le contexte dans lequel se présente le projet de
loi de programmation militaire 2003-2008.
1. Un recul de la défense dans l'ordre des priorités gouvernementales
Telle
que la calcule l'OTAN, la
part des dépenses de défense dans le
PIB français
est passée en dessous de 2% dès 1998 pour
atteindre
1,7% en 2001
. Cette diminution n'est pas propre à la
France, mais de tous les pays de l'OTAN, c'est bien en France que le recul a
été le plus fort au cours des cinq dernières
années, nous plaçant loin derrière le Royaume-Uni dont les
dépenses de défense représentaient 2,28% du PIB en 2001.
Au cours de la période 1997-2002,
le budget de la défense
,
hors pensions,
a diminué de 0,9%
alors que dans le même
temps,
le budget général progressait de 11,6% et le PIB de
près de 20%
.
Évolution des 10 principaux budgets de l'Etat de 1997 à 2002
(en milliards d'euros courants)
|
1997 |
2002 |
Variation |
Enseignement scolaire |
42,26 |
52,70 |
+ 24,7 % |
Charges de la dette |
35,96 |
37,20 |
+ 3,4 % |
Défense (hors pensions) |
29,11 |
28,85 |
- 0,9 % |
Emploi |
15,70 |
16,78 |
+ 6,9 % |
Intérieur |
11,62 |
17,27 |
+ 48,6 % |
Economie, finances, industrie |
10,89 |
14,45 |
+ 32,7 % |
Santé, solidarité, ville |
10,81 |
15,17 |
+ 40,4 % |
Transports |
8,30 |
9,29 |
+ 12,0 % |
Enseignement supérieur |
7,17 |
8,74 |
+ 21,8 % |
Logement |
6,15 |
7,30 |
+ 18,7 % |
Ensemble des dépenses du budget général |
238,43 |
266,02 |
+ 11,6 % |
Le
tableau ci-dessus, qui retient les crédits inscrits au cours des lois de
finances initiales successives, illustre le
traitement budgétaire
particulièrement défavorable réservé à la
défense
ces dernières années.
Pour le titre III, la progression des crédits aura
représenté 6,7%, soit une évolution à peine
supérieure à l'indice des prix. Pour les titres V et VI, le recul
s'élève, en monnaie courante, à 9,2% entre 1997 à
2002, traduisant un affaissement très significatif du niveau
d'investissement, en total décalage avec le rythme d'évolution du
budget général.
2. Une annuité d'équipement perdue
Il
convient ici de rappeler en quelques grandes lignes le constat effectué
par votre commission, année après année, au sujet de la
mise en oeuvre de la programmation des équipements militaires.
Hormis en 1997, toutes
les lois de finances se sont situées en
retrait par rapport au niveau requis par la loi de programmation
.
Dès 1998, une sévère amputation, représentant une
« encoche » de l'ordre de 9%, était appliquée
aux crédits d'équipement. La même année, une
« revue des programmes » définissait, pour les
quatre années 1999-2002 un nouvel objectif de dépenses, à
mi-chemin entre cette « encoche » et la loi votée en
1996. La « revue des programmes », non avalisée par
le Parlement, n'a pas pour autant été respectée de 2000
à 2002, contrairement à tous les engagements pris par le
précédent gouvernement
2(
*
)
. Sur les six années de
programmation, l'entorse opérée par les diverses lois de finances
initiales ont représenté un « manque à
gagner » de l'ordre de 6,1 milliards d'euros par rapport à la
loi de programmation, et de 3,5 milliards d'euros si l'on se
réfère à la « revue de programmes ».
Dépenses d'équipement militaire 1997-2002
(en milliards d'euros courants)
|
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
Loi de
programmation
|
13,472 |
13,598 |
13,671
|
13,774
|
13,973
|
14,196
|
Loi de
finances initiale
|
13,522
|
12,348
|
13,111
|
12,646
|
12,718
|
12,273 |
Ecart/LPM
|
- 0,769 |
- 1,934 |
- 1,911
|
- 1,787
|
- 2,254
|
|
D'autre
part, comme le montre le tableau ci-dessus,
les crédits
d'équipement effectivement consommés ont été
notablement inférieurs à ceux inscrits dans ces lois de finances
successives
, principalement en raison d'
annulations de crédits
qui ont servi à gager l'ouverture de crédits au titre III
pour le financement des opérations extérieures et, dans une
certaine mesure, la recapitalisation de GIAT Industries. L'écart entre
crédits inscrits et crédits consommés atteint,
année 2002 non comprise, 4,1 milliards d'euros.
Enfin,
les crédits consommés englobent une série de
dépenses transférées sur les crédits
d'équipements
. Il s'agit essentiellement d'une charge d'entretien
programmé des matériels auparavant supportée par le
titre III (1,4 milliard d'euros sur la période) et d'un
transfert au budget civil de recherche et de développement
(820
millions d'euros de 1997 à 2002).
Au total,
c'est environ un sixième de l'enveloppe prévue par
la loi de programmation 1997-2002 qui a manqué aux armées
,
soit l'équivalent d'une année de programmation.
Votre rapporteur tient particulièrement à
réfuter deux
types de commentaires
qui visent à minimiser l'impact de cette
mauvaise exécution, où à en fausser l'analyse.
Les uns voudraient accréditer
l'idée selon laquelle le titre V
aurait du compenser un surcoût de la professionnalisation
, dont les
conséquences financières auraient été mal
évaluées. Cette idée est
clairement démentie par
les faits
, car la professionnalisation a été
réalisée dans l'enveloppe budgétaire prévue. C'est
en revanche la pratique consistant à systématiquement financer
les opérations extérieures par des annulations
équivalentes au titre V qui a largement amputé ce dernier.
D'autres commentaires, se référant au passé, tiennent pour
un principe acquis que toute loi de programmation a vocation à ne pas
être correctement exécutée. C'est oublier que
la loi de
programmation militaire 1997-2002 se distinguait des lois
antérieures
d'un double point de vue :
- elle
conditionnait la cohérence d'une réforme sans
précédent de notre appareil de défense
, combinant
professionnalisation et réorientation des missions ;
- elle retenait pour les
crédits d'équipement militaire
un
niveau très inférieur aux lois de programmation et budgets
successifs des années antérieures et représentait une
réduction de 20% de l'effort d'équipement militaire par rapport
au budget de 1990 et de 10% par rapport au budget de 1993.
En tout état de cause, le contexte budgétaire des années
1997-2002 permettait le plein respect des objectifs, au demeurant raisonnables,
retenus en 1996.
3. Un affaiblissement capacitaire
Le recul
du budget d'équipement a bien entendu entraîné
d'importantes conséquences, tant sur le déroulement des
programmes d'armement, qui a été retardé et a donné
lieu à certaines réductions de cibles, que sur les
opérations dites « à flux », comme
l'entretien des matériels ou les opérations d'infrastructure.
Enfin, le domaine des études et développement a été
sans doute le plus touché, avec les handicaps qui en résultent
pour nos capacités technologiques futures.
En ce qui concerne les
programmes d'armement
, on constate au terme de la
loi de programmation de nombreux retards et décalages, auxquels s'ajoute
l'abandon de certaines capacités. Il en résultera un
affaiblissement capacitaire, compte tenu de la nécessité de
prolonger des matériels vieillissants, moins performants et moins
disponibles, et des délais supplémentaires d'acquisition de
systèmes d'armes modernes répondant aux besoins
opérationnels actuels. On ne peut en outre passer sous silence les
incidences de cette situation sur nos industries de défense,
pénalisées dans leurs investissements et pour la conquête
de marchés à l'exportation.
Programmes et opérations |
Modifications par rapport aux objectifs
|
Anti blindé léger (ABL) |
étalement des livraisons |
Antichar AC3G LP |
abandon de la production |
Antichar AC3G-MP |
abandon de la production |
Missile antinavires futur (ANF) |
abandon |
Version « interdiction de zone » du missile de croisière APACHE |
abandon |
Bâtiment océanographique BHO |
décalage de 3 ans |
Engin porte-blindé |
122 au lieu de 220 |
Satellite radar HORUS |
abandon |
Système d'identification IFF futur |
abandon en 2001 |
Missile M51 |
RDV M51-SNLE-NG en 2010 |
Mine antichar MACPED |
abandon |
Radars MARTHA |
cible modifiée : 114 au lieu de 120 |
Missile porte-torpilles MILAS |
abandon |
Bâtiment d'écoute MINREM |
décalage de 2 ans de l'ASA |
Modernisation frégates F70 |
suppression de la modernisation |
Télécommunications des bases aériennes MTBA |
réduction de cible de 46 à 45 |
Télécommunications des garnisons terre MTGT |
cible réduite de 168 à 151 |
Torpille MU 90 |
450 au lieu de 600 |
Système haute fréquence OMAR HF |
réduction de cible de 113 à 78 |
Pod reconnaissance NG |
retard de lancement |
Avion de combatRAFALE |
décalage de 9 mois |
Rénovation AMX 10RC |
300 au lieu de 337 |
Missile sol-air très courte portée MISTRAL |
cible ramenée de 3490 à 3020 missiles puis dernière commande de 710 missiles annulée |
Système d'information régimentaire |
742 au lieu de 775 |
SNLE NG |
3ème en 2004 au lieu de 2002
|
Système de surveillance de l'espace |
abandon mais mise en service du système exploratoire |
Torpille Lourde |
abandon |
Valorisation AUF1 |
décalage d'1 an |
Valorisation ROLAND |
retard de 6 mois |
En
matière d'
infrastructure
, les retards observés portent
notamment sur la réalisation du plan VIVIEN (amélioration des
conditions de logement des sous-officiers et militaires du rang
célibataires), dont les objectifs ne seront atteints pour l'essentiel
qu'au-delà de 2004., alors que cette opération est essentielle
à la consolidation de la professionnalisation. La remise à niveau
du parc immobilier de la gendarmerie souffre elle aussi du retard
accumulé en matière d'investissement. Les besoins sont
également très importants dans la marine, qui doit faire face
à un réel défi de remise en état des
immobilisations techniques des ports de Brest et Toulon désormais sous
sa responsabilité, et dans le service de santé, compte tenu de la
nécessité de la mise aux normes civiles d'accréditation
des hôpitaux des armées.
Sur la période 1997-2002, le
maintien en condition
opérationnelle
, a été marqué par une
dégradation significative et régulière de la
disponibilité des matériels, le niveau atteint par certains parcs
étant aujourd'hui critique. Bien que le facteur financier ne soit pas le
seul en cause, la disponibilité a été affectée par
la réduction des crédits consacrés à l'entretien
programmé des matériels.
Dans l'armée de terre, la disponibilité moyenne du parc des
blindés était d'environ 68 % début 2001, au lieu de 80 %
requis, à l'exception des parcs de chars Leclerc et de blindés
AMX 10 dont la disponibilité était très inférieure
en raison d'opérations de remise à niveau et de modernisation.
Dans l'ALAT, la situation est jugée « critique », la
disponibilité des matériels étant d'environ 62 % en
2001, au lieu de 70 %. Dans l'armée de l'air, le taux de
disponibilité moyen des appareils est de 67 %, au lieu de 75 % requis.
Enfin dans la Marine, la disponibilité globale des bâtiments est
d'environ 56 % au lieu de 80 % requis. Il a été nécessaire
de retirer du service l'une des deux frégates lance-missiles les plus
anciennes, le Suffren, pour fournir des pièces détachées
à la seconde, le Duquesne, et permettre son maintien en service.
Cette détérioration conduit les armées à la limite
de la rupture capacitaire dans plusieurs domaines majeurs. Les
difficultés de maintien en condition opérationnelle menacent
directement leur capacité à s'engager longtemps ou massivement,
comme on la vu à l'occasion des opérations en Afghanistan. Le
déploiement de 6 Mirage 2000-D au Kirghizistan a nécessité
des prélèvements de pièces de rechange rendant
indisponibles un nombre équivalent d'appareils en métropole. De
même, le priorité donnée au maintien en condition
opérationnelle des bâtiments engagés dans l'Océan
indien a directement pénalisé l'entretien programmé des
autres bâtiments. Il s'agit là d'une situation très
insatisfaisante alors que nos engagements extérieurs perdurent à
un niveau élevé.
S'agissant des
munitions
, les insuffisances financières ont
entraîné une consommation des stocks sans possibilité d'une
remise niveau systématique. Ces stocks ont atteint aujourd'hui un niveau
plancher imposant de limiter l'entraînement au tir de certaines
catégories de munitions à un strict niveau de suffisance.
Enfin, les dotations consacrées aux
études et
développements
ont subi les
abattements les plus lourds durant
les six dernières années
. De 1997 à 2002, les
dotations en loi de finances initiale ont régressé de 13%, et
elles se situaient cette année en retrait de 23% par rapport aux
objectifs initiaux de la loi de programmation. Elles ont joué, au cours
de la période, le rôle de variable d'ajustement. Ce
véritable décrochage de l'effort de recherche produira des
effets durables
sur l'évolution de nos capacités
technologiques
quelle que soit l'ampleur du rattrapage opéré
à partir de 2003.
Au total, c'est «
un bilan capacitaire
contrasté
» que dresse le rapport au Parlement sur
l'exécution de la loi de programmation 1997-2002.
Les capacités de projection et de mobilité seront fortement
pénalisées par l'arrivée tardive de l'avion de transport A
400 M et de l'hélicoptère NH 90. Le désarmement
anticipé du Foch a mis fin à la permanence du groupe
aéronaval dès 2000. Dans le domaine aéroterrestre,
«
les diverses mesures d'abandon, d'étalement et de
réduction ... ont été particulièrement
pénalisants. Ainsi, en matière de protection, les moyens de
transport blindés actuels (VAB et AMX 10P) sont vieillissants et ne
permettent plus d'assurer les conditions optimales de sécurité du
personnel face aux nouvelles formes de menaces
».
L'équipement individuel de l'infanterie est jugé
«
peu adapté au nouvel environnement
». Dans
le domaine aéromaritime, plusieurs capacités ont
été retardées, suspendues ou abandonnées, alors que
«
le retrait du service de la frégate Suffren et le
vieillissement du système d'armes des deux frégates de type
Cassard fragilisent la protection antiaérienne du
porte-avions
». Toujours selon ce rapport, «
le
vieillissement et la stagnation des capacités n'a pas
épargné le milieu aérospatial
»,
pénalisé par les retards successifs du programme Rafale et les
reports et annulations ayant affecté la composante sol-air.
Ces
retards
dans la réalisation de nos programmes
d'équipement
pénalisent a fortiori notre aptitude à
acquérir les capacités nouvelles
, qui sont jugées
essentielles au vu des opérations les plus récentes. Le rapport
précité au Parlement estime que les moyens «
de
renseignement par tout temps et ... de transmission en temps réel sont
déficitaires
» alors que ceux destinés à la
projection de forces «
ont été rapidement
saturés
». De même, l'interopérabilité
de nos forces «
s'avère encore incomplète en
particulier pour les systèmes d'information et de communication, les
moyens d'identification et les équipements de transmission de
données
».
Le projet de loi de programmation militaire 2003-2008 reprend cette analyse,
estimant dans son exposé des motifs que «
le rythme de la
modernisation des équipements et l'effort en matière de recherche
et technologie se sont trouvés ralentis par rapport à celui qui
avait été prévu ...
accentuant ainsi le
décrochage vis à vis du Royaume-Uni
».
La référence au Royaume-Uni est fréquemment et à
juste titre soulignée. Cette comparaison ne doit pas procéder
d'un quelconque esprit de compétition ou de préoccupations de
« standing » international. Il est parfaitement
légitime que chaque pays ajuste son effort de défense à
ses priorités, et qu'il en résulte des différences
sensibles de capacités, dans un sens ou dans l'autre. Il demeure
néanmoins que la France et le Royaume-Uni se trouvent dans une situation
relativement comparable, comte tenu de leur statut international, la France
portant de surcroît une attention particulière à son
autonomie stratégique. Les deux pays sont également
appelés à jouer un rôle moteur dans l'Europe de la
défense, dont ils sont actuellement seuls capables de forger l'armature.
Aussi n'est-il pas indifférent qu'un écart très
significatif se soit creusé entre le Royaume-Uni et la France à
partir de 1996, période à laquelle leurs deux budgets
étaient comparables. S'agissant des dépenses de défense
dans leur ensemble, le
différentiel en faveur des britanniques
est passé, selon l'association Eurodéfense, de 5 milliards
d'euros environ en 1997 à plus de
10 milliards d'euros annuels en
2000 et 2001
. En matière d'
équipement
, il atteignait 5
milliards d'euros en 1998 puis
6 milliards d'euros annuels en 2000 et
2001
, soit une dépense d'équipement supérieure de 50%
chez les britanniques. En matière d'effort de recherche et technologie,
le rapport est du même ordre entre les deux pays, les britanniques ayant
maintenu le niveau des crédits d'études-amont alors qu'ils
diminuaient fortement en France.
L'effort d'équipement réalisé ces dernières
années par le Royaume-Uni lui permet aujourd'hui de disposer, dans
l'ensemble, de matériels plus récents, et donc d'une marge de
manoeuvre supérieure pour engager le développement de
systèmes d'armes nouveaux. S'il n'est pas aujourd'hui pleinement
perceptible, un écart capacitaire entre les deux pays résultera,
avec un décalage dans le temps de quelques années, des
différences d'effort budgétaire constatées ces
dernières années.
FRANCE-ROYAUME UNI
Éléments de comparaison
La
comparaison des capacités militaires actuelles de la France et du
Royaume-Uni
montre que les avantages et handicaps respectifs de chaque pays
s'équilibrent globalement. Mais l'effort financier supérieur
effectué ces dernières années par les britanniques se
traduira, d'ici la fin de la décennie, par un
recul de la position
relative de la France
, qui a pris du retard dans la modernisation de ses
matériels.
En matière de
dissuasion nucléaire
, la France a
développé une capacité strictement nationale, ce qui n'est
pas le cas du Royaume-Uni, dépendant des systèmes
américains et désormais seulement doté d'une composante
océanique. La France dispose aussi avec Hélios d'une autonomie
sans équivalent en Europe dans le
renseignement
stratégique
. En revanche, les moyens britanniques de
renseignement humain
sont traditionnellement très
supérieurs à ceux des services français. Les
capacités de commandement et de communication sont comparables.
Le porte-avions confère à la France un avantage en matière
de
frappe dans la profondeur
, comme l'ont montré les
opérations d'Afghanistan, mais la permanence du groupe aéronaval
n'est pas assurée, les britanniques devant pour leur part se doter de
deux bâtiments à l'horizon 2012. Ces derniers demeureront
durablement les seuls à pouvoir délivrer des
missiles de
croisières
depuis la mer (à partir de sous-marins
actuellement puis sans doute de frégates en fin de décennie).
L'
aviation de combat
britannique possède également une
panoplie plus complète d'équipements modernes (suppression des
défenses antiaériennes, moyens de transmission de données
et d'acquisition d'objectifs, capacité à délivrer des
armes de précision) que son homologue française.
Le
déficit français en matière de capacité de
projection à longue distance
est d'ores et déjà
très important par rapport aux britanniques et
ira en s'aggravant
dans les prochaines années. C'est le cas en matière
aérienne, du fait du vieillissement de notre flotte, alors que les
britanniques disposent d'appareils multifonctions (transport et
ravitaillement), mais également en matière de soutien logistique
par voie maritime. Quant à l'avantage français dans le domaine
des hélicoptères de transport, il va disparaître avec la
chute annoncée de nos capacités d'ici la livraison, en 2011, du
NH 90. Les britanniques disposent par ailleurs d'hélicoptères
lourds qui nous font défaut.
En matière de
combat terrestre
, les britanniques se sont
dotés d'hélicoptères de combat Apache avant
l'entrée en service du Tigre en France. Leur avantage résulte
surtout du véhicule de combat d'infanterie
Warrior
, et à
l'avenir de l'
Armoured battlefield support vehicule
(ABSV), alors que le
VBCI commencera à peine à être livré en 2006, au
mieux, à l'armée de terre, cette dernière devant d'ici
là fonctionner avec un parc de véhicules vieillissants et
insuffisamment protégés. Dans le domaine
maritime
, la
Royal Navy bénéficie d'un nombre supérieur de
frégates et de sous-marins d'attaque, ainsi que de bâtiments de
soutien.
Enfin, les armées britanniques ont bénéficié ces
dernières années d'un
rythme d'entraînement
très supérieur à celui constaté en France, comme en
témoignent tous les indicateurs d'activités.