AUDITION DE M. JEAN-FRANÇOIS MATTEI
ET DE MME MARIE-THÉRÈSE BOISSEAU
Réunie le jeudi 24 octobre 2002, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a procédé à l'audition de M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées , et de Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, sur les crédits de leur département ministériel .
M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées , a tenu à insister sur la grande inertie des dépenses budgétaires de son ministère, en raison notamment du poids des crédits consacrés aux prestations sociales comme l'allocation parent isolé (API), l'allocation pour personne handicapée (AAH), la couverture maladie universelle (CMU) ou les crédits du fonds spécial d'invalidité. Le budget demandé pour 2003 s'élève à 9,4 milliards d'euros, soit un montant relativement faible par rapport aux sommes très importantes dont le ministre a la responsabilité dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale. Néanmoins, ces crédits progressent de 400 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2002, soit une hausse de 4,4 % en 2003. A périmètre constant, c'est-à-dire hors transfert, cette progression est même de plus de 5 %.
Le ministre a considéré que son projet de budget 2003 était sincère et qu'il allait dans le sens de la nécessaire clarification entre Etat et assurance maladie. Le projet de budget 2003 est un projet de budget sincère qui assume le financement des dettes laissées par le précédent gouvernement dans le domaine des grandes prestations comme l'Allocation parent isolé (API), l'Allocation adulte handicapé (AAH), la Couverture maladie universelle (CMU) et le fonds spécial d'invalidité, qui représentent près de 70 % des dépenses du ministère. Les financements dans ce domaine progressent de 5,8 % entre la loi de finances 2002 et le projet de loi de finances pour 2003, et encore de 2,2 % si on tient compte des ouvertures du collectif d'été. C'est un effort très important pour faire face à un héritage lourd à assumer. Il a ajouté que le budget 2003 allait dans le sens d'une clarification des relations entre l'Etat et la sécurité sociale. A cet égard, le remboursement de la moitié de la dette de l'Etat envers la sécurité sociale et le retour à l'assurance maladie d'une partie des ressources détournées par le financement des 35 heures sont des mesures importantes de clarification, même si elles sont portées par le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
M. Jean-François Mattei a ensuite expliqué que le projet de budget comportait trois modifications de périmètre : la prise en charge par l'Etat du coût des stages de résidanat chez les médecins généralistes, et le transfert à l'assurance maladie des centres de soins spécialisés pour les toxicomanes ainsi que celui des dépenses afférentes à l'interruption volontaire de grossesse. Il s'agit essentiellement, en effet, de dépenses de soins.
Il a indiqué que les crédits demandés pour 2003 participaient à l'effort collectif de maîtrise et d'optimisation des dépenses publiques, en donnant trois exemples. Les moyens en personnel et en fonctionnement du ministère ont été analysés dans le cadre de l'effort global de réduction des effectifs de l'Etat et au regard d'une analyse des missions et des moyens. Il a ainsi été décidé de diminuer de 100 le nombre de postes budgétaires dans le projet de loi de finances. Par ailleurs, au titre de la pause dans les mesures catégorielles décidée par le gouvernement, le budget 2003 ne contient aucune nouvelle mesure à ce titre. Les agences sanitaires disposent d'une trésorerie accumulée grâce à des crédits de l'Etat non consommés. La gestion de ces agences est parfois loin d'être optimale, comme vient de le souligner la Cour des comptes. Dans une période où chacun doit faire des efforts, il a paru normal au Gouvernement que l'argent public ne dorme pas, et c'est pourquoi il a décidé de mettre à contribution les fonds de roulement de certaines agences en 2003, ce qui incitera les directeurs des agences à améliorer leurs modes de fonctionnement. Cette mesure représente une économie de 45 millions d'euros en 2003. Enfin, compte tenu du résultat mitigé des actions subventionnées par le budget de l'Etat pour moderniser les établissements hospitaliers, le gouvernement a souhaité mettre un terme à cette procédure. Ainsi, aucune nouvelle opération de modernisation d'établissements ne sera désormais plus financée par le fonds d'investissement de modernisation des hôpitaux (FIMHO), et seules les opérations déjà décidées seront poursuivies.
M. Jean-François Mattei a ensuite fait part de sa volonté de faire de son ministère un ministère exemplaire et pilote dans la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances : la présentation du budget pour 2003 a subi des modifications liées à des changements de nomenclature et de présentation des agrégats, afin de préfigurer les programmes de la loi organique. Ces nouveaux agrégats tiennent compte de la nouvelle structure gouvernementale, mais aussi des travaux d'ores et déjà menés au sein du ministère sous l'égide de M. Etienne Marie, nouveau directeur de l'administration générale, du personnel et du budget, pour réfléchir à la future structure de programme qui sera nécessaire dans le cadre de la loi organique relative aux lois de finances. Le ministre a ainsi exprimé son souhait de pouvoir adopter une véritable structure de programme pour le prochain projet de loi de finances.
M. Jean-François Mattei a indiqué que le budget de son ministère traduisait les priorités du gouvernement et mettait en place les moyens nécessaires pour la conduite des grands chantiers annoncés par le Président de la République le 14 juillet dernier. Le handicap constitue l'un des trois grands chantiers sociaux du quinquennat et le budget 2003 est à la hauteur de cet enjeu majeur. S'en tenant à l'essentiel, le ministre a précisé que les dépenses consacrées aux personnes handicapées progresseraient l'an prochain de 5,6 %, que 3.000 places de centres d'aide par le travail (CAT) seraient créées, ce qui représente un doublement de l'effort de création de places par rapport au plan 2001/2003 que le précédent gouvernement avait élaboré, que 63 millions d'euros supplémentaires seraient prévus pour l'amélioration des structures d'aide et de prise en charge pour les personnes handicapées : ainsi, 500 nouveaux postes d'auxiliaires d'intégration scolaire sont prévus afin de favoriser la scolarisation des enfants handicapés.
Le ministre a ensuite indiqué que la prévention, l'éducation à la santé et le dépistage figuraient au premier rang de ses priorités dans le domaine de la santé. Considérant que la responsabilité de l'Etat se mesurait à la priorité qu'il accorde à la santé publique, il a jugé que le choix implicite du curatif par rapport au préventif dans notre pays n'était plus acceptable : il convient donc de développer progressivement, mais avec détermination, une véritable culture de la prévention dans notre pays. Au total, les crédits du projet de loi de finances pour 2003 affectés aux programmes de santé publique ciblés sur la prévention, en particulier le cancer et les maladies transmissibles, sont en forte progression, de 30 %, soit un montant de 173 millions d'euros. Il a annoncé que le gouvernement déposerait en 2003, si possible au premier semestre, un projet de loi quinquennale en santé publique, qui concernera l'ensemble des politiques de santé, y compris la santé scolaire et la santé au travail, 5 millions d'euros étant d'ores et déjà provisionnés dans le projet de loi de finances pour 2003.
Rappelant que le cancer était la première cause de mortalité prématurée en France, il a souligné que le projet de budget prévoyait 35 millions d'euros supplémentaires pour la lutte contre le cancer. Les crédits budgétaires consacrés au cancer seront ainsi en 2003 quatre fois supérieurs à ce qu'ils étaient en 2002. D'ores et déjà, et avant même les conclusions de la commission que le ministre a installée avec Claudie Haigneré, ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies, deux orientations peuvent être indiquées : le dépistage intra-familial des femmes à risque pour le cancer du sein débutera en 2003, et, à compter de 2004, l'extension du dépistage systématique du cancer du sein sur l'ensemble du territoire sera poursuivie, alors que seuls 32 départements organisent actuellement le dépistage.
M. Jean-François Mattei a précisé que, dans le domaine du syndrome immunodéficitaire acquis (SIDA), la politique du ministère répondait à l'engagement présidentiel, exprimé à nouveau avec force au cours de la XIV e conférence internationale sur le SIDA à Barcelone. Elle intègre les nouvelles données épidémiologiques, mais aussi sociologiques et thérapeutiques disponibles. Au total, l'effort du ministère pour la lutte contre le SIDA représente près de 65 millions d'euros dans le budget 2003. En outre, les crédits consacrés à la coopération internationale devraient progresser de 30%, à 8,2 millions d'euros, l'accent étant porté sur l'aide publique au développement dans le domaine de la santé. Il a ajouté avoir voulu renforcer les initiatives françaises en matière de lutte contre le SIDA, en particulier le groupement d'intérêt public « Ensemble pour une solidarité thérapeutique hospitalière en réseau » (ESTHER).
Abordant la question de la lutte contre la drogue et la toxicomanie, le ministre a estimé que la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT) jouait un rôle clé dans ce dispositif. Il s'est félicité qu'un nouveau président de la MILDT, un médecin, qui est également un professionnel de terrain, ait été nommé la veille en Conseil des ministres. Ce changement de président contribuera à donner une nouvelle impulsion à la politique, qui a parfois un peu souffert au cours des dernières années d'une approche trop rigide et trop globale. En ce qui concerne les crédits, ceux destinés à la MILDT sont ramenés de 45,6 millions d'euros à 40 millions d'euros en 2003, en raison de la nécessité de rechercher une meilleure synergie avec l'Institut national pour la prévention et l'éducation sanitaire (INPES) pour la communication. Mais cela traduit également la volonté du ministre de mieux gérer les crédits de la MILDT. Son nouveau président devra adresser au Gouvernement, dans quelques semaines, un état des lieux de la situation qu'il a trouvée ainsi que des propositions opérationnelles.
M. Jean-François Mattei a indiqué que la sécurité sanitaire était une exigence indispensable de la politique de santé. Celle-ci doit s'appuyer très fortement sur la fonction d'expertise scientifique et d'évaluation des risques confiée aux agences sanitaires. La préoccupation du ministre est de veiller à la séparation de cette fonction de la décision politique pour ne pas mélanger l'évaluation des risques avec la question de leur gestion. Il en va de la confiance de la population envers l'action publique. Il s'est réjoui de ce que la France dispose aujourd'hui d'un dispositif de sécurité sanitaire nettement plus performant qu'il y a une dizaine ou quinzaine d'années. Le projet de budget pour 2003 intègre ainsi le financement des diverses agences qui assurent la veille et la sécurité sanitaires. Sera ainsi poursuivi l'effort de développement en ce domaine, en particulier en donnant vie dans les prochains jours à l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale (AFSSE), qui n'était jusqu'à présent que virtuelle mais qui sera installée et en mesure de commencer son travail en novembre. Les différentes agences seront financées en 2003 à la fois par le budget de l'Etat, à hauteur de 53 millions d'euros, et par les fonds accumulés par les agences au cours des années passées. Le recours à ces deux sources de financement permettra de financer 10 millions d'euros de mesures nouvelles en 2003, en particulier l'embauche de 150 personnes. Les moyens propres du ministère sont également renforcés à hauteur de 14,5 millions d'euros, en hausse de 7 millions d'euros en matière de prévention et de lutte contre les risques sanitaires liés aux facteurs d'environnement, la qualité de l'environnement immédiat étant en effet de plus en plus liée aux questions de santé. Le ministre a expliqué que, tout en adhérant à l'idée de précaution, il considérait que le principe de précaution n'était pas une « formule magique » permettant de résoudre tous les problèmes. Le contenu de ce principe doit faire l'objet d'un vaste débat dans la société et, pour ce faire, l'expertise des agences doit être mise à la disposition de la population.
M. Jean-François Mattei a indiqué que la CMU permettait l'accès aux soins aux plus démunis : près de 4,7 millions de personnes bénéficient ainsi gratuitement d'une couverture complémentaire maladie. Depuis cet été, l'accès à une couverture complémentaire pour les personnes situées juste au-dessus du plafond de revenu pour bénéficier de la CMU est également possible. La prochaine étape, a-t-il ajouté, est certainement de transformer ce dispositif qui a fait ses preuves afin de donner à tous les Français la possibilité d'accéder à une couverture complémentaire. Dans un premier temps, c'est-à-dire dès 2003, le Gouvernement a décidé de revaloriser significativement le montant de la déduction des organismes complémentaires qui participent à la CMU, de 228 à 283 euros. Cette déduction n'avait pas été revalorisée depuis 1999, date de la mise en place de la CMU. Il a également décidé de contrôler davantage l'utilisation de la CMU par ses bénéficiaires, qui fait l'objet d'interrogations nombreuses, afin que le bilan financier soit globalement neutre.
Le ministre a ensuite abordé la famille et la politique familiale. Les interventions publiques en direction des familles figurent, pour l'essentiel, au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003. Dans le domaine strictement budgétaire, le gouvernement a prévu deux mesures fiscales fortes en faveur des familles : le doublement de l'abattement pour les donations entre les grands-parents et les petits-enfants, et l'augmentation des seuils pour les emplois familiaux, qui a fait l'objet d'amendements au cours des débats à l'Assemblée nationale. Sur le budget du ministère de la santé, il convient de relever essentiellement que la dotation 2003 pour l'API progresse de 8,8 %, à 805 millions d'euros. En tenant compte de l'abondement intervenu cette année sur cette ligne, qui avait été sous-dotée par la loi de finances initiale pour 2002, la progression est de 4,5 %. Plus de 175.000 personnes sont concernées en 2003. Une réflexion concernant une réforme de cette allocation est par ailleurs engagée, dont le ministre aura l'occasion de reparler dans les mois à venir.
Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées , a indiqué que les crédits alloués à la prise en charge des personnes handicapées passeraient de 5,6 milliards d'euros en 2002 à 5,9 milliards d'euros en 2003, dont 4,5 milliards sont consacrés à l'AAH, 1 milliard aux centres d'aide par le travail (CAT), 263,5 millions au fonds spécial d'invalidité et plus de 12 millions aux instituts des jeunes aveugles et des jeunes sourds. Le projet de budget pour 2003 permet ainsi de doubler le nombre de places en CAT, soit 3.000 places supplémentaires l'année prochaine, ce qui permettra d'atteindre 100.000 places dans les CAT en France. Elle a indiqué que les structures de prise en charge bénéficieront de 63 millions d'euros supplémentaires. Elle a noté la mise en place, en vue de la pérennisation des auxiliaires d'intégration scolaires, postes aujourd'hui occupés par des emplois-jeunes, d'un groupe de travail commun avec le ministère de la jeunesse et de l'éducation nationale sur les statuts de ces personnels, qui doit remettre ses conclusions en mars 2003. La secrétaire d'Etat a donc pris l'engagement de maintenir les aides-éducateurs sur ces postes jusqu'en juin 2003. Elle a également indiqué avoir engagé une réflexion sur la question de l'efficience du système d'insertion professionnelle des bénéficiaires de l'AAH et du renforcement de l'évaluation médicale dans les COTOREP. L'insertion des personnes handicapées dans la société bénéficie non seulement de crédits de l'État, mais aussi de dotations inscrites en loi de financement de la sécurité sociale et dans les budgets des collectivités territoriales.
La secrétaire d'Etat a présenté les quatre principaux axes de sa politique : conforter l'engagement des acteurs de la lutte en faveur des handicapés, qui est véritable mais parfois insuffisamment visible, en particulier au niveau des collectivités territoriales et des associations ; diversifier les modalités de prise en charge des personnes handicapées en introduisant davantage de souplesse ; engager des expérimentations, qui seront facilitées par le projet de loi constitutionnelle sur la décentralisation ; régler certains problèmes spécifiques, comme celui des poly-handicapés ou des handicapés vieillissants.
Enfin, elle a indiqué avoir confié deux missions à des personnalités, la première à Mme Geneviève Levy, députée de Seine-Maritime, sur l'accessibilité des transports aux personnes handicapées, et la seconde au professeur Lecomte, sur les prestations spéciales.
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial des crédits de la santé, de la famille et des personnes handicapées , s'est dit impressionné par la faiblesse des marges de manoeuvre dont dispose le ministre en raison de la rigidité de son budget. Il s'est félicité des engagements en matière de clarification des financements et de mise en oeuvre de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances, même s'il a noté un taux extrêmement faible de réponses à son questionnaire budgétaire à la date fixée par ladite loi organique. Il a ensuite souhaité obtenir des informations relatives au financement du protocole hospitalier de mars 2000, dont la gestion avait été très critiquée par la Cour des comptes. Puis il a noté la faiblesse du taux de consommation des crédits du FIMHO, qui a empêché de financer les nombreuses opérations inscrites à son programme, et a voulu savoir les orientations que le ministre entendait donner à cet instrument. Concernant les minima sociaux, il a interrogé le ministre sur l'intention du Gouvernement de réformer le RMI pour le transformer en revenu minimum d'activité (RMA) et a voulu savoir si cette réforme s'inspirerait de la proposition de loi votée par le Sénat le 8 février 2001 et visant à instituer un RMA. Il s'est enquis de la préparation par le ministère de la loi organique relative aux lois de finances, notamment de l'élaboration d'indicateurs de résultats et de performances et de la mise en place de programmes. Il a voulu savoir pourquoi la contribution à l'initiative de solidarité thérapeutique internationale était augmentée en 2003 de 1,7 million d'euros, alors que les crédits inscrits à ce titre les années précédentes n'ont été consommés qu'à hauteur du tiers. Enfin, il a souhaité obtenir des informations sur les consultations engagées en vue de la préparation de la loi de programmation quinquennale sur la santé.
M. Jean Arthuis, président, s'est interrogé sur les compétences que pourraient exercer les collectivités territoriales en matière de santé publique après le vote du projet de loi sur la décentralisation.
En réponse à M. Adrien Gouteyron, M. Jean-François Mattei a tout d'abord souligné que le FIMHO était un fonds dont les ressources n'étaient pas utilisées correctement dans la mesure où son fonctionnement était trop centralisé. Il a annoncé que les projets en cours faisant l'objet d'un financement par le FIMHO iraient à leur terme mais que, par la suite, le financement des projets d'investissement dans les hôpitaux se ferait via le plan « Hôpital 2007 ».
S'agissant de la politique de prévention, M. Jean-François Mattei a précisé qu'il fallait entendre par « familles à risque » susceptibles de faire l'objet d'un dépistage systématique du cancer du sein, les familles pour lesquelles une analyse génétique révèlerait que certaines femmes sont porteuses du gène du cancer du sein, présentant ainsi une prédisposition à développer cette maladie. Il a estimé que ce genre de dépistage participait d'une politique de prévention d'avant-garde. En outre, il a annoncé la mise en oeuvre d'un dépistage systématique du cancer du sein à partir de 2004 et par la suite l'extension de ce dépistage à deux autres formes de cancers facilement dépistables : le cancer du côlon et celui du col de l'utérus.
S'agissant des programmes de coopération internationale, M. Jean-François Mattei a rappelé que ceux-ci avaient débuté en 2001 et qu'ils seraient relancés par son ministère. Il a rappelé à cet égard que trois accords avaient déjà été signés sur la lutte contre le SIDA.
En réponse à M. Jean Arthuis, président, M. Jean-François Mattei a d'abord regretté que l'espace européen n'ait pas été construit sur le thème de la santé et a souligné le besoin d'une agence de santé publique au niveau européen. À un niveau décentralisé, il a estimé que certaines compétences ne pouvaient être entièrement dévolues à l'échelon local. Il a rappelé que les départements disposaient de compétences sanitaires et sociales mais qu'en la matière une certaine recentralisation s'imposait, notamment dans le domaine de la santé publique et de la prévention afin d'assurer une réelle égalité entre tous les citoyens. Il a en outre précisé que les compétences d'ordre sanitaire devaient relever du territoire régional et celles d'ordre social plus spécifiquement du territoire départemental. Il a enfin estimé que privilégier la proximité en matière de santé était essentiel et devait mener à une réflexion sur un juste transfert de compétences.
En réponse à la question de M. Adrien Gouteyron s'agissant de l'articulation entre le RMI et l'AAH, Mme Marie-Thérèse Boisseau a estimé que l'objectif d'insertion professionnelle des handicapés devait être primordial et que l'assistance devait intervenir en dernier recours. Elle a cependant reconnu que, malgré les réels efforts de réinsertion, il demeurait un noyau dur de handicapés ne pouvant être réinsérés professionnellement. Elle a ensuite fait part de sa volonté de simplifier et de clarifier les dispositifs à destination des handicapés.
S'agissant de la révision de la loi de 1975 sur les personnes handicapées, elle a affirmé son souhait d'aboutir a une loi simple et claire, et annoncé la discussion prochaine d'une loi-cadre qui définirait les principaux objectifs de la politique en faveur des handicapés et laisserait place à l'expérimentation et à l'inventivité. Elle a estimé que cette réflexion devait être menée en collaboration avec les parlementaires et avec les acteurs de terrain.
M. François Trucy a souhaité interroger M. Jean-François Mattei sur le mode de gestion de l'assurance maladie, sur la couverture de la responsabilité médicale des médecins et des cliniques ainsi que sur la possibilité de créer un ordre des masseurs-kinésithérapeutes. Il a ensuite enjoint Mme Marie-Thérèse Boisseau de mieux faire respecter les places de parking réservées aux conducteurs handicapés.
M. Yann Gaillard a d'abord tenu à saluer l'existence d'un ministère de la santé à part entière. Il a ensuite souhaité interroger le ministre sur divers sujets : l'accompagnement et l'information des familles de personnes souffrant de la maladie d'Alzheimer, la nécessité de créer des chaires de médecins dédiées à la santé publique et enfin a évoqué les dépenses d'appareillage.
M. Auguste Cazalet a estimé que la politique en faveur des handicapés devait être une priorité du gouvernement et a souhaité que la secrétaire d'Etat développe les grands axes de sa politique. Il s'est également inquiété d'une recrudescence de la méningite dans le sud-ouest de la France, notamment dans le département des Pyrénées-Atlantiques, et a souhaité connaître les causes de cette recrudescence.
Mme Marie-Claude Beaudeau a d'abord tenu à souligner que le contexte de rigueur budgétaire actuel allait contribuer à décrédibiliser le discours plein de bonnes intentions du ministre de la Santé. Elle a ensuite insisté sur le fait que la prochaine loi de programmation de santé publique du premier semestre 2003 faisait l'objet de très fortes attentes, de la part du personnel médical notamment. S'agissant du dépistage systématique du cancer du sein, elle a souhaité savoir comment les évaluations statistiques seraient traitées au niveau national et elle a insisté sur l'existence d'un monopole instauré par la compagnie américaine « Myriad Genetics » en matière de technique du dépistage de ce cancer. Enfin, s'agissant des handicapés, elle s'est émue de l'impossibilité pour certains enfants handicapés d'être scolarisés et a estimé le nombre de ces enfants en France à 6.600.
M. Philippe Adnot a constaté que, dans le cadre de la politique de prévention, les départements manquaient de moyens eu égard au dépistage du SIDA. Il a également rappelé que 33 départements avaient mis en place une expérimentation en matière de dépistage du cancer du sein et a souhaité savoir ce qu'il adviendrait de cette expérimentation si cette politique de dépistage était recentralisée. Il a estimé qu'une clarification des règles du jeu était nécessaire en la matière.
M. Michel Moreigne a souhaité savoir si les conventions tripartites signées par les établissements d'accueil des personnes âgées dans le cadre de l'allocation personnalisée d'autonomie allaient être encadrées par le ministre.
M. Philippe Marini, rapporteur général , a posé deux questions, l'une s'adressant à M. Jean-François Mattei et portant sur la mise en oeuvre de la politique de prévention en matière de lutte contre la toxicomanie notamment s'agissant de la coordination entre les actions du ministère de la Santé et celles de la MILDT, l'autre s'adressant à Mme Marie-Thérèse Boisseau et concernant le mode de financement très complexe de certains établissements d'accueil des handicapés.
M. Jean Arthuis, président , s'est enfin inquiété du déclin de la démographie médicale dans certaines régions et a interrogé Mme Marie-Thérèse Boisseau sur le statut des CAT et sur leur accessibilité aux handicapés et à d'autres populations.
En réponse à ces interventions, M. Jean-François Mattei a d'abord tenu à rappeler que certains des sujets évoqués par les membres de la commission des finances, notamment celui de la démographie médicale, seraient plus spécifiquement traités dans le cadre de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 et qu'il aurait l'occasion d'y revenir.
En réponse à M. François Trucy, il a rappelé qu'un groupe de travail destiné à mieux définir le domaine de compétence de l'assurance maladie avait été créé à l'occasion de la dernière réunion de la Commission des comptes de la sécurité sociale. S'agissant de la couverture de la responsabilité médicale des médecins, il a précisé qu'une proposition de loi d'origine sénatoriale portant spécifiquement sur ce sujet serait discutée devant le Parlement avant le 31 décembre de cette année. Enfin, s'agissant de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes, il a estimé qu'il n'existait aucun obstacle majeur à sa création, mais il a aussi souligné la nécessité de régler le problème du conseil des professionnels de santé.
En réponse à M. Yann Gaillard, il a constaté que la maladie d'Alzheimer était une maladie désarmante et qu'elle constituerait un des sujets prioritaires de la prochaine loi de programmation de santé publique. Il a également estimé que le domaine de la santé mentale était en jachère dans notre pays. Il a rappelé que la santé publique était une spécialité mal aimée en France et a souhaité faire évoluer les esprits en créant notamment un grand institut de santé publique à l'image de celui existant à Londres.
En réponse à M. Auguste Cazalet, M. Jean-François Mattei a rappelé l'existence d'un système de veille sanitaire en France qui avait permis de déceler une augmentation des cas de méningites dans certains départements du sud-ouest de la France, notamment les Hautes-Pyrénées et les Landes. Le seuil atteint avait abouti à la recommandation d'une campagne de vaccination de certaines populations à risque, notamment les enfants. Il a indiqué que le coût de cette campagne de vaccination s'élevait à 13 millions d'euros.
M. Jean-François Mattei a indiqué, en réponse à Mme Marie-Claude Beaudeau, que la loi de programmation sur la santé publique ferait l'objet d'une vaste concertation au niveau régional et départemental, orchestrée respectivement par les Directions régionales des affaires sanitaires et sociales (DRASS) et les Directions départementales des affaires sanitaires et sociales (DDASS). S'agissant de la firme américaine « Myriad Genetics », il a reconnu le monopole exercé par elle en matière de dépistage du cancer du sein, mais il a estimé qu'il était impossible de renoncer à ce dépistage pour autant. Il a soutenu qu'il apporterait une aide à l'Institut Curie dans le but de développer une technique de dépistage similaire.
En réponse à M. Philippe Marini, rapporteur général, il a rappelé qu'un nouveau président avait été nommé à la tête de la MILDT, M. Didier Jayle, et qu'il s'agissait d'un médecin. Il a rappelé que l'approche en matière de lutte contre la toxicomanie était une approche de santé publique et qu'elle devait permettre d'articuler deux volets, celui de la prévention et celui de la répression.
En réponse à M. François Trucy, Mme Marie-Thérèse Boisseau a affirmé qu'il était possible de faire respecter les emplacements pour personnes handicapées mais qu'il s'agissait d'une question de mentalité. Elle a par ailleurs rappelé que l'année 2003 serait l'année européenne du handicap.
En réponse à M. Yann Gaillard, elle a indiqué qu'il était nécessaire de développer les compétences des aides-soignantes en contrepartie de celles des infirmières, notamment en matière de prise en charge des malades mentaux. S'agissant de l'appareillage, elle a annoncé qu'un groupe de travail serait chargé de mener une réflexion sur l'ensemble des aides techniques existantes. Elle a reconnu que beaucoup de progrès restaient à faire, notamment dans le domaine des fauteuils roulants pour myopathes.
En réponse à Mme Marie-Claude Beaudeau, Mme Marie-Thérèse Boisseau a fait savoir qu'elle était réservée sur le chiffre avancé de 6.600 enfants handicapés non scolarisés cette année. Elle a rappelé que si les enfants avaient le devoir d'aller à l'école, l'Etat lui se devait d'intégrer scolairement la majorité des enfants handicapés. Elle a également estimé indispensable de développer le nombre d'auxiliaires d'intégration scolaire.
En réponse à M. Philippe Marini, rapporteur général, elle a rappelé que son objectif était de simplifier et de clarifier la législation. S'agissant du financement des foyers d'accueil médicalisés, elle a estimé, à titre personnel, qu'il devait être pris en charge intégralement par l'assurance maladie.
Enfin, en réponse à M. Jean Arthuis, président, elle a estimé que l'accès aux CAT devait être réservé aux personnes souffrant d'un handicap lourd et que l'ouverture des CAT le soir pourrait être envisagée afin d'utiliser au mieux le potentiel de formation professionnelle représenté par ces centres.