B. UNE SOUS-CONSOMMATION CHRONIQUE DES CRÉDITS : LE VOTE DU BUDGET EST UN EXERCICE DE DUPES
Les taux de consommation du budget de l'environnement depuis 1997 ne cessent de diminuer pour atteindre en 2000 le pourcentage dérisoire de 47 %.
La « dégringolade » des taux de consommation des crédits du budget de l'environnement
|
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
Taux de consommation |
85 % |
77 % |
62 % |
47 % |
Source : Rapport de la Cour des comptes sur
l'exécution des lois de finances pour l'année 2000
En conséquence,
les reports de crédits
de 1999 sur 2000
représentent 37 % des crédits ouverts en loi de finances initiale
pour 2000, et les crédits de 2000 reportés sur 2001
représentent 72 % des crédits ouverts en 2001 !
Le palmarès des reports de crédits 2000 sur 2001
- au chapitre 57-10 « fonds d'intervention
contre les
pollutions marines accidentelles », les reports 2000
représentent
2.642 %
de la dotation initiale 2001 ;
- au chapitre 67-30 « agence de l'environnement et de la
maîtrise de l'énergie (ADEME) », les reports 2000
représentent
462 %
de la dotation initiale 2001 ;
- au chapitre 37-02 « instances consultatives et remboursements
à divers établissements publics », les reports 2000
représentent
129 %
de la dotation initiale 2001 ;
- au chapitre 67-20 « protection de la nature et de
l'environnement - subventions d'investissement », les reports 2000
représentent
120 %
de la dotation initiale 2001 ;
- au chapitre 57-20 « protection de la nature et de
l'environnement - études, acquisitions et travaux
d'investissement », les reports 2000 représentent
106 %
de la dotation initiale 2001 ;
- au chapitre 57-91 « équipement immobilier des
services », les reports 2000 représentent
104 %
de la
dotation initiale 2001.
Source : ministère de l'environnement - contrôle
financier central
Cette situation s'explique en partie par
le montant des crédits de
paiement de l'ADEME
qui se sont
établis pour 1999 et 2000
à des niveaux sans commune mesure avec les besoins réels de
l'établissement (
cf. infra
).
Néanmoins, la Cour des comptes dans son rapport précité
indique que même sans tenir compte de l'ADEME
le taux de consommation
des crédits demeure anormalement faible
(73 % pour 2000).
Evolution du budget de l'environnement (1997-2002)
Millions d'euros et % |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
Loi de
finances initiale
|
285
|
290
|
603
|
656
|
716
|
761
|
Crédits ouverts
|
271
|
287
|
651
|
979
|
|
|
Dépenses
|
230
|
221
|
406
|
463
|
|
|
Source : ministère de l'environnement
Evolutions comparées
des crédits
votés,
des crédits disponibles et des crédits réellement
dépensés
(1997-2002)
La consommation des crédits 2001 du budget de l'environnement au 28
septembre 2001
Au 28
septembre 2001, les dépenses ordinaires disponibles pour 2001 (y compris
reports ; annulations et gels
16(
*
)
déduits) ont
été engagées à 76 %. En revanche, s'agissant des
crédits de paiement, seuls 23 % sont ordonnancés à cette
date. Plusieurs chapitres des titres V et VI présentent un taux
d'ordonnancement inférieur à 50 % :
- chapitre 67-30 « agence de l'environnement et de la
maîtrise de l'énergie (ADEME) » :
0,01 %
- chapitre 57-91 « équipement immobilier des
services » :
41 %
- chapitre 67-20 « protection de la nature et de
l'environnement - subv. d'investissement » :
46 %
Source : ministère de l'environnement - contrôle financier
central
La Cour des comptes
explique ces taux de consommation anormalement bas
par plusieurs facteurs :
- des retards dans les programmes,
- une refonte de la structure administrative du ministère qui a
désorganisé les circuits habituels,
- un nombre élevé de dossiers rejetés pour des
questions de forme,
- des crédits de paiement trop importants.
Elle distingue également des causes institutionnelles :
- un mauvais contrôle du ministère sur ses 350 ordonnateurs
secondaires délégués qui relèvent le plus souvent
d'autres ministères (équipement, agriculture, industrie
principalement) ;
- une tutelle insuffisante sur ses établissements publics ;
- une formation administrative et comptable de ses propres agents
insuffisante.
En réponse à une question de votre rapporteur spécial,
le ministère
de l'environnement
a quant à lui
expliqué la faiblesse de sa consommation de crédits par :
- des raisons conjoncturelles : la mise en place de la nouvelle
direction dite D4E en milieu d'année, le manque de formation des agents
fraîchement recrutés ;
- des raisons « politiques » (
sic
) : les
crédits pléthoriques de l'ADEME ;
- des raisons structurelles : l'existence de 350 ordonnateurs
secondaires délégués, l'absence d'outil de gestion
adéquate notamment dans les DIREN, la croissance trop importante des
moyens financiers au regard des moyens humains
17(
*
)
.
Le ministère s'est fixé comme objectif en matière
d'efficacité de la gestion «
d'améliorer la gestion
budgétaire et comptable
». Il estime que «
la
baisse du pourcentage de reports sur les crédits de fonctionnement reste
à ce stade un critère d'amélioration de la
gestion
».
Taux de reports sur les crédits de fonctionnement - indicateur de résultats
1999 |
2000 |
2001* |
2002* |
2004* |
5 % |
14 % |
7 % |
o5 % |
5 % |
*
prévisions.
Source : projet de loi de finances pour 2002 - Direction
générale de l'administration, des finances et des affaires
internationales du ministère de l'environnement
Cette faiblesse des taux de consommation, qui permet certes une
réduction du déficit budgétaire de l'Etat en fin
d'exercice, pose deux questions :
- d'une part, à quoi bon voter des progressions de crédits
mirifiques si ces crédits ne sont pas consommés ? Le vote de
crédits élevés n'est alors que pur affichage politique.
- d'autre part, le vote de tels montants de crédits qui
in
fine
ne seront pas utilisés n'évince-t-il pas de la
discussion budgétaire des dépenses qui auraient été
peut-être plus utiles ou plus urgentes ?
Une adoption peu enthousiaste de ce budget par l'Assemblée nationale
Le budget de l'environnement pour 2002 n'a pas été adopté sans réserve par l'Assemblée nationale, et en particulier par sa commission des finances. Le compte-rendu de l'examen en commission de ce budget précise ainsi que « M. Augustin Bonrepaux s'est interrogé sur la nécessité d'augmenter les crédits du ministère de l'environnement qui soufrent d'une sous-consommation chronique ». Il a estimé qu'il convenait « de s'interroger sur l'efficience de certains crédits » ainsi que « sur des gaspillages ». M. Michel Suchod, rapporteur spécial, a indiqué qu'en dépit d'un certain nombre de problèmes « et compte tenu de l'arrivée d'un nouveau ministre, il (convenait), pour solde de tout compte, d'adopter cependant ce budget ».