EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. LES CARACTÉRISTIQUES DE LA FORÊT FRANÇAISE

Le patrimoine forestier français connaît une extension forte et continue depuis 150 ans avec une surface de 15 millions d'hectares jamais atteinte depuis le XVe siècle, comme le montre le tableau ci-dessous 1 ( * ) :

MILLIONS D'HECTARES

Date

Population de la France (millions d'habitants)

S.A.U.

Forêts

Landes, Friches, Parcours

Terrains urbanisés et infrastructures (artificialisés)

Improductifs eaux et rochers

An 1000

8-10

14-15

26

12-14

-

2

1300

20-22

27

13

12-14

-

2

1450

10-12

16-17

22

12-14

-

2

1700

22,5

30

8-9

12-14

0,5

2

1827

30

31,5

7-8

12

0,5

2

1840

32

31,5

8,4

12

1

2

1862

35

34

9

8

1

2

1914

40

34

10,2

6,5

1,3

2

1990

56

31

15

2,8

4

2

On notera que sur le total précité :

- les forêts domaniales représentent 1,75 million d'hectares ;

- les forêts communales ont une superficie qui avoisine 2,3 millions d'hectares , répartie entre 11.000 communes propriétaires environ ;

- les forêts privées, avec 10,6 millions d'hectares , représentent 71 % des forêts françaises réparties entre plus de 4,5 millions de propriétaires.

Le morcellement de la propriété forestière privée

La propriété forestière est caractérisée par un morcellement endémique puisque :

- 40.000 propriétaires possèdent des forêts de plus de 25 hectares, couvrant 4,3 millions d'hectares, soit 45 % du total des forêts privées ;

- 2,5 millions d'hectares sont gérés conformément à un plan simple de gestion ;

- 2,5 millions d'hectares dépendent de 200.000 exploitations agricoles ;

- entre 3,5 et 4 millions de propriétaires possèdent des espaces boisés de moins de dix hectares , pour une superficie totale de 2,8 millions d'hectares, soit encore 25 % de la surface totale .

Mais cette forêt morcelée qui a, par nature, un assez faible potentiel biologique de production, contribue néanmoins largement aux circuits d'autoconsommation de bois de feu.

TAILLE DES FORETS PRIVEES

Surface totale

Catégorie de taille

Nombre de propriétés

(en millions d'hectares)

en %

> 100 ha

9 000

2,4

25

100 > > 25 ha

32 000

1,9

20

25 > > 10 ha

395 000

1,6

15

10 > > 4 ha

1 million

1,9

17

1 >

2 à 3 millions

0,9

8

Total

4,5 millions

10,3

100

Il convient de souligner également que la proportion de forêts possédée par des personnes physiques ou morales dont l'activité principale concerne la récolte ou la valorisation du bois est très faible , de l'ordre de 1 à 2 % , alors que ce chiffre est de 37 % en Suède, de 8 % en Finlande et de 7 % au Portugal. Les surfaces possédées par des personnes déclarant la sylviculture comme revenu principal représentent de 100 à 150.000 hectares.

La forêt française est sous-exploitée

La structure de la forêt française a beaucoup évolué depuis le début du XIXe siècle avec le développement de la futaie, qui a entraîné un accroissement sensible du volume de bois sur pied à l'hectare, pour atteindre 140 m 3 à l'hectare. Le stock total est estimé à 1,9 milliard de m 3 de volume dit de " bois fort ". L'accroissement annuel est de 85 millions de m 3 .

Malgré ce potentiel, la France , paradoxalement, est depuis longtemps un importateur de produits forestiers.

La forêt française est sous-utilisée, son taux d'exploitation est ainsi passé de 60 % vers 1980 à environ 50 % en 2000, exception faite du massif des Landes, dont 85 % sont exploités.

La production biologique des forêts françaises est d'environ 84 millions de m 3 par an, à comparer aux 35 millions de m 3 qui ont été récoltés et commercialisés en 1998, auxquels il faut ajouter un volume de l'ordre de 15 millions de m 3 à usage de bois de chauffage récolté mais non commercialisé.

Sur les 35,5 millions de m 3 commercialisés, 7,8 millions de m 3 sont constitués de bois d'oeuvre feuillu (45 % de la production de l'Union européenne), 14,1 millions de m 3 de bois d'oeuvre résineux (13 % de la production de l'Union européenne, 10,8 millions de m 3 de bois d'industrie (15 % de la production de l'Union européenne) et 2,8 millions de m 3 de bois de feu.

Cette sous-exploitation entraîne un vieillissement et une plus grande fragilité. L'impact des tempêtes de 1999 en est un des signes révélateurs.

La forêt française bénéficie pourtant d'atouts considérables :

- compte tenu du climat tempéré, les accroissements constatés sont très supérieurs à ceux des pays scandinaves ;

- la très grande variété des conditions pédoclimatologiques locales contribue à la diversité des peuplements et à la biodiversité des forêts françaises.

La contribution de la forêt à la lutte contre l'effet de serre

L'espace agricole et forestier joue un rôle très positif, en particulier la forêt , dans la lutte contre l'effet de serre avec les " puits " dans lesquels le gaz carbonique est absorbé grâce à la photosynthèse. L'extension du boisement, ou encore la conversion des taillis en futaie permettent, à terme, de doubler le stockage moyen de carbone par hectare.

Les capacités d'accroissement de ces stocks de carbone n'étant cependant pas illimitées, et pour continuer à absorber du carbone et capter de l'énergie solaire dans les biomasses, il est nécessaire de récolter tout ou partie des biomasses ou des bois produits dont l'utilisation permet de remplacer des énergies et des matières premières fossiles. L'utilisation de biomatériaux à la place d'autres matériaux dotés d'un plus fort contenu énergétique et plus polluants lors de leur production et de leur combustion, permet aussi dans certains cas d'économiser des sources d'énergies fossiles et de réduire les émissions de gaz carbonique.

La contribution de la filière forêt-bois au programme national de lutte contre l'effet de serre se décline selon quatre axes :

- la substitution du bois-énergie aux combustibles fossiles ;

- l'accroissement du stock de carbone dans les forêts ;

- l'accroissement du stock de carbone dans les constructions ;

- les économies d'énergie engendrées par l'utilisation du matériau-bois à la place d'autres matériaux.

Compte tenu du potentiel de la forêt française et de l'extension des surfaces, on regrettera, s'agissant des négociations sur les engagements liés au Protocole de Kyoto, que pour la première période d'engagement commençant en 2008, les règles de comptabilisation des énergies laissent de côté plus de 90 % de la variation des stocks de carbone dans les forêts françaises.

* 1 Ce tableau récapitulatif est extrait de l'article " France ", dans l'étude " Long term historical changes in the Forest ressources ", ECE - United nations - Genève - 1996, p. 19-22) par G-A MORIN

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