B. QUAND ON VEUT, ON PEUT... ET ENCORE !

Malgré tous ces facteurs de ralentissement, les retards ne sont pas inéluctables : dans le domaine des affaires sociales , le suivi réglementaire est opéré avec une indéniable célérité. Le taux d'application atteint près de 60 % pour les lois votées en 1999-2000. C'est le taux le plus élevé de toutes les commissions permanentes.

La majorité des dispositions de deux lois importantes, hautement emblématiques, a pu être appliquée grâce à la précocité de l'élaboration des décrets à venir : les lois du 29 juillet 1998 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions et du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail .

La commission des affaires sociales commente ainsi le suivi de la loi du 19 janvier 2000, votée après déclaration d'urgence :

Le bilan de la mise en oeuvre de la loi relative à la réduction négociée du temps de travail est satisfaisant, à une exception près, concernant le décret portant nomination du conseil de surveillance du fonds de financement des allégements de charges sociales. Comme pour la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions, il convient d'observer que la plupart des décrets avaient été rédigés avant même l'adoption définitive de la loi. Ceci était d'autant plus nécessaire que la loi créait des obligations aux entreprises de plus de vingt salariés dès le 1er février 2000.

C'est ainsi que la moitié des décrets prévus par la loi a été publiée au 31 janvier 2000. Il s'agit des décrets les plus importants puisqu'ils déterminent les modalités du nouveau régime de la durée du travail et notamment :

- le régime de l'incitation financière à la réduction du temps de travail ;

- le champ de l'allégement de cotisations sociales ;

- le contingent d'heures supplémentaires applicable ;

- le contrôle de la durée du travail ;

- le dispositif d'appui et d'accompagnement ;

- les conditions d'établissement du bulletin de paie.

Par ailleurs, six autres décrets ont été publiés au mois de février concernant notamment les conditions de suspension et de suppression du bénéfice de l'allégement de cotisations sociales, les modalités du contrôle de l'exécution des engagements auxquels est subordonnée l'aide ou encore les pénalités applicables aux employeurs qui rémunèrent leurs salariés à un taux inférieur au salaire minimum. Ce sont donc les trois quarts des décrets prévus qui ont été publiés un mois et demi après la publication de la loi. On peut considérer que cela constitue un facteur essentiel de sécurité juridique, d'ailleurs indispensable, compte tenu du caractère contraignant de ce texte législatif qui oblige les entreprises concernées à modifier leur organisation comme leurs rapports de production. A cet égard, on peut souligner que le Gouvernement a fait paraître une importante circulaire (MES/CAB/2000-003) relative à la réduction du temps de travail qui a permis d'éclairer nombre de dispositions de la loi qui méritaient des explications.

Deux décrets ont été publiés ultérieurement. Il s'agit dans le premier cas d'un texte précisant les modalités d'application du repos compensateur en matière d'heures supplémentaires pour les exploitants agricoles et dans le second cas d'un texte relatif à la majoration de l'allégement de cotisations sociales prévue dans la zone franche corse.

Deux décrets demeurent en attente de publication : un premier relatif à la majoration des aides dans la zone franche corse et un second relatif à la définition des heures d'équivalence dans les hôtels, cafés et restaurants. Une publication rapide de ce dernier décret serait souhaitable afin d'éviter que ne perdure une situation d'insécurité juridique qui pourrait prendre des proportions importantes après le 1er janvier 2002, date de l'application de l'abaissement de la durée légale du temps de travail aux entreprises de moins de 20 salariés.

Par ailleurs, l'article 36 de la loi a prévu que le Gouvernement présenterait au Parlement deux rapports annuels, l'un sur l'impact sur l'emploi de la réduction du temps de travail et de l'allégement prévu à l'article L. 241-13-1 du code de la sécurité sociale, l'autre relatif au bilan de l'application de la réduction du temps de travail dans les fonctions et secteurs publics. La loi n'a pas prévu de date spécifique pour la remise de ces rapports. A l'avenir, il serait néanmoins souhaitable qu'ils soient remis au Parlement avant l'examen du projet de loi de finances.

On constate que, même dans ce cas à valeur exemplaire, de substantiels progrès doivent encore être réalisés...

Ainsi, si l'on revient sur la loi du 29 juillet 1998 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions , déjà très largement appliquée, comme on l'a vu, s'aperçoit-on, néanmoins que subsistent des dispositions encore non applicables :

- les modalités d'exercice du droit à l'ouverture d'un compte de dépôt (article 137). Le secrétariat général du Gouvernement précise que le ministère pilote est le ministère de l'économie. La loi prévoit un décret simple mais il s'agirait de modifier le D. 84-708 du 24 juillet 1984 pris pour l'application de la loi n° 84-46 ;

- le statut et le fonctionnement des agences d'insertion (ADI) dans les DOM (article 19 - art. 42-6 et 42-7 de la loi n° 88-1088). Le secrétariat général du Gouvernement précise que le ministère pilote est le ministère de l'outre-mer. Le texte est en cours de signature ;

- le contrat entre l'Etat et les centres de formation en travail social agréés : contrat-type et modes de calcul de la subvention (article 151-II). Le secrétariat général du Gouvernement précise qu'un projet de décret est à l'examen du Conseil d'Etat ;

- les conditions de fonctionnement et de financement des CHRS (article 157). Le secrétariat général du Gouvernement précise qu'un projet de décret a été soumis au cabinet de la ministre ;

- les frais de fonctionnement du FSL (article 36). Le secrétariat général du Gouvernement précise que le ministère pilote est celui de l'équipement ;

- la surveillance médicale des salariés (article 13-II-1). Le secrétariat général du Gouvernement précise que le projet a été transmis au cabinet le 20 mars 1999 ;

- les modalités de la publicité de l'adjudication : saisie immobilière (article 111). Le secrétariat général du Gouvernement précise que le ministère pilote est celui de la justice.


La commission des affaires sociales relève, à ce sujet :

" Il s'agit de dossiers importants dont les enjeux ne sont pas seulement techniques. C'est pourquoi il peut paraître étonnant que, plus de deux ans après le vote de la loi, les ultimes arbitrages n'aient pu être rendus plus rapidement. "

Autre exemple intéressant relevant de la commission des affaires sociales : la loi du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle.

La commission des affaires sociales indique :

Les dispositions de la loi relatives à la couverture maladie universelle sont, dans leur immense majorité, appliquées.

Il convient toutefois de regretter la non-application des dispositions de l'article 23 de la loi qui prévoyaient la détermination d'un tarif maximum d'adhésion à une couverture complémentaire pour les personnes perdant le bénéficie de la CMU. Les probables difficultés rencontrées par le Gouvernement pour négocier ce tarif avec les organismes de protection sociale complémentaires sont à mettre en relation avec les choix exprimés par le Gouvernement dans la rédaction de l'ensemble du projet de loi, qui se sont révélés être peu conformes au " souhait partenarial " qu'avait appelé de ses voeux, avant même le rapport de la commission des affaires sociales du Sénat, celui du parlementaire en mission M. Jean-Claude Boulard.

De nombreuses dispositions du titre IV de la loi (" Modernisation sanitaire et sociale "), qui comprend diverses mesures d'ordre social ne sont pas applicables : c'est le cas de l'article 36 consacré à la carte vitale mais aussi de dispositions importantes au regard de la santé publique (personnels aides opératoires - article 38). C'est également le cas de l'article 55 prévoyant l'expérimentation de la tarification à la pathologie, et qui ne faisait que reprendre une disposition de la loi hospitalière de 1991.

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