EXAMEN EN COMMISSION
Au cours
d'une réunion tenue le 7 juin 2000 sous la présidence de
M. James Bordas, vice-président
, la commission a
examiné le rapport pour avis de
M. Victor Reux
sur le titre IV du
projet de loi n° 342 (1999-2000), adopté par l'Assemblée
nationale en première lecture après déclaration d'urgence,
d'
orientation
pour l'outre-mer
.
A la suite de l'exposé du rapporteur pour avis, un large débat
s'est instauré.
M. André Maman
a souhaité obtenir des précisions
complémentaires sur le système scolaire en Guyane et notamment
sur le nombre d'enfants non scolarisés, sur l'origine des enseignants et
sur les avantages dont ceux-ci bénéficiaient.
Il s'est enquis des langues régionales qui faisaient déjà
l'objet d'un enseignement en Guyane dans le cadre de l'éducation
nationale et a demandé si l'obligation de scolarité s'appliquait
à tous les enfants issus de l'immigration clandestine.
Il a par ailleurs évoqué la situation générale de
l'ensemble des départements d'outre-mer dans le domaine de
l'éducation.
M. Jacques Legendre
s'est étonné de la proportion
d'élèves non francophones en Guyane dans le second degré
et s'est demandé si les établissements avaient l'obligation de
les accueillir. Il s'est interrogé sur la responsabilité de
l'enseignement primaire en ce domaine. Après avoir exprimé ses
plus vives réserves quant à une ratification de la charte du
Conseil de l'Europe sur les langues régionales et minoritaires, il a
manifesté son accord pour faire entrer les langues régionales
ultramarines dans le champ d'application de la loi Deixonne.
Il a en revanche exprimé son scepticisme quant aux effets
bénéfiques de l'instrumentalisation des langues régionales
pour l'apprentissage et la maîtrise du français.
Il a souhaité que la mise en oeuvre de la loi de 1951 dans les DOM fasse
l'objet d'un suivi, via un rapport au Parlement et a rappelé que
l'enseignement des langues régionales devait rester fondé sur le
volontariat.
Il a par ailleurs estimé que des mesures devraient être prises
à l'encontre des enseignants qui se distinguent par un
absentéisme excessif.
Après avoir évoqué les circonstances qui ont
suscité l'éclatement de l'ancienne académie des
Antilles-Guyane, il s'est demandé si les enseignants d'origine
métropolitaine avaient contribué à freiner le
développement des langues régionales dans ces départements.
Il a enfin souhaité obtenir des précisions sur les
aménagements susceptibles d'être introduits dans les programmes
d'histoire.
M. René-Pierre Signé
a fait observer que la culture
française avait été imposée à nos anciennes
colonies sans référence à leur histoire, contrairement
à l'attitude observée par le Royaume-Uni à l'égard
de son empire colonial.
M. Louis de Broissia
a rappelé que cette politique unificatrice
avait été engagée surtout après Jules Ferry mais
que des adaptations aux programmes existaient en fait dans nos anciennes
colonies comme l'Indochine.
M. Alain Dufaut
a fait observer que la situation de Cayenne et de Kourou
ne pouvait être comparée à celle des villages du Maroni qui
ne sont difficilement accessibles qu'en pirogue, et qui subissent une
immigration permanente de familles du Surinam attirées par notre
système sanitaire, social et éducatif, notre administration
étant bien en peine de contrôler ces mouvements de population au
plan local.
Soulignant les difficultés des conditions de vie et d'enseignement en
forêt et sur le fleuve, il a estimé que le système actuel
d'incitations financières devait être maintenu au
bénéfice des enseignants concernés.
M. Serge Lagauche
a estimé que l'échec scolaire outre-mer
résultait davantage des conditions économiques et sociales que
d'une absence de reconnaissance des langues créoles dans
l'éducation nationale.
Répondant à ces interventions,
M. Victor Reux, rapporteur pour
avis
, a notamment apporté les précisions suivantes :
- les enseignants exerçant en Guyane bénéficient d'une
prime d'éloignement correspondant à un an de traitement, qui est
susceptible d'être supprimée par l'article 12 bis du projet
de loi, d'une surrémunération et d'une prime spécifique
lorsqu'ils exercent dans certains villages du fleuve, ces avantages devant
être préservés pour maintenir la qualité de
l'enseignement ;
- les communautés surinamienne et brésilienne représentent
environ 30.000 personnes en Guyane ;
- tous les enfants d'âge scolaire, même issus de l'immigration
clandestine doivent être scolarisés en vertu de l'obligation
scolaire ;
- les plans de rattrapage ont permis d'améliorer l'encadrement des
élèves mais leurs effets sont obérés en Guyane du
fait de la croissance démographique et d'une immigration
incontrôlée ;
- l'usage du créole à l'école, qui constitue la langue
maternelle de la majorité des enfants est de nature à
réduire l'échec scolaire et le mutisme des élèves
mais son enseignement doit rester optionnel et fondé sur le volontariat
des maîtres et des familles ;
- l'usage de la langue vernaculaire dans l'enseignement, comme le
préconisent des linguistes éminents, crée un lien entre la
maison et l'école et doit contribuer à la maîtrise de la
langue française.
- la place de la langue française doit être
préservée dans une perspective de développement de la
francophonie ;
- la création d'un IUFM de plein exercice à Cayenne est
essentielle pour " guyaniser " le corps professeurs des écoles et les
stabiliser ; les conditions de vie et d'enseignement difficiles sont à
l'origine du fort absentéisme des enseignants et de leur court passage
en Guyane ;
- l'adaptation des programmes scolaires a été
réclamée par de nombreux élus des DOM qui demandent une
plus grande reconnaissance des identités ultramarines ; il convient de
rappeler que les instructions officielles existantes autorisent d'ores et
déjà des aménagements substantiels aux programmes ;
- une coopération doit être développée avec les
Etats voisins de la Guyane pour tenter de contrôler l'immigration ;
La commission a ensuite abordé l'examen des articles au cours duquel
sont notamment intervenus, outre
le rapporteur pour avis
et
M. James
Bordas, président de séance, MM. Louis de Broissia, Serge
Lagauche, Jacques Legendre
et
Jean-Luc Miraux.
Après avoir adopté les amendements proposés par son
rapporteur pour avis, la commission a donné un avis favorable à
l'adoption des dispositions du titre IV du projet de loi ainsi
modifiées.